En 2008, l’Allemagne adoptait une nouvelle loi en vue de transposer la directive européenne sur la conservation des données afin de pouvoir, notamment, tracer et identifier la source et la destination d’une communication, la date, l’heure et la durée de celle-ci ainsi que son type. La loi allemande obligeait dès lors tous les fournisseurs d’accès à Internet et de téléphonie à conserver les traces de leurs abonnés sur les réseaux de communication pendant six mois. Ce 2 mars, la cour constitutionnelle allemande a demandé la destruction de toutes ces données accumulées depuis 2008 dans le cadre de la lutte antiterroriste. Elle a estimé que la loi n’était pas suffisamment transparente, qu’elle violait le secret des correspondances et n’encadrait pas suffisamment l’utilisation qui serait faite de ces données, que les mesures de sécurité censées les protéger n’étaient pas suffisantes, que les motifs invoqués – lutte contre le terrorisme,… – n’étaient pas assez clairs en terme de protection de la vie privée. La cour constitutionnelle a donc exigé que soient détruites toutes ces informations.

L’Allemagne est le troisième pays après la Bulgarie et la Roumanie à avoir considéré comme inconstitutionnelle la conservation des données. Néanmoins, ces trois pays n’ont pas contesté la nécessité de la directive européenne. Ils ont plutôt mis en avant le problème de son interprétation dans les lois nationales, contrairement à l’Irlande qui elle, a déposé plainte contre la directive devant la cour européenne de justice.

Le bureau du procureur fédéral allemand a annoncé ce jeudi l’arrestation de deux membres présumés du DHKP-C lors d’une vague de perquisitions menée dans l’ouest de l’Allemagne. Ils sont accusés d’être des membres éminents de l’organisation. L’un des suspects, Alaatin A., 35 ans, est également accusé d’avoir violé les lois d’immigration, tandis que l’autre, Unalkaplan D., 27 ans, est aussi accusé d’extorsion.

Faruk Ereren est un opposant politique turc de longue date. Durant les années 1970, époque où les Loups Gris massacraient les travailleurs, les étudiants, les intellectuels et les minorités ethniques et religieuses ainsi que les habitants des bidonvilles par milliers, Faruk Ereren s’engagea activement dans la résistance antifasciste. Arrêté par la junte militaire qui prit le pouvoir le 12 septembre 1980, Faruk Ereren subira de longues séances de tortures. Il poursuit cependant le combat politique en prison et ce, jusqu’à sa libération. Durant les années 1990, il entre en clandestinité et prend les chemins de l’exil.

Le 8 avril 2007, il est arrêté à Hagen en Allemagne et placé sous régime d’isolement strict. Vingt mois plus tard, son procès commence devant la Haute Cour Régionale (OLG) de Düsseldorf, comparable à une Cour d’appel. Avec ses plus de 50 audiences s’étalant sur près d’un an, son procès tourne au marathon judiciaire. Faruk Ereren est accusé d’exercer des fonctions dirigeantes au sein du DHKP-C. Il est poursuivi en vertu de l’article 129b du Code pénal allemand qui punit toute appartenance à une ‘organisation terroriste étrangère’ (photo: une affiche de la campagne contre cette loi). Le 29 janvier 2010, la 2e Chambre criminelle de la Haute Cour Régionale de Düsseldorf a donné son feu vert à la demande d’extradition émise par les autorités turques à l’encontre de Faruk Ereren. Mais le 6 février dernier, les avocats de Faruk Ereren ont demandé à la Cour un délai de quatre semaines afin de pouvoir introduire un recours contre cette demande d’extradition devant la Cour constitutionnelle.

Affiche contre le §129

Affiche contre le §129

Le vendredi 22 janvier, le feu a été mis dans le service local des Etrangers à Göttingen. Une forte déflagration s’est produite blessant légèrement un employé qui tentait d’éteindre l’incendie. La police a trouvé à proximité des lieux une sorte de lettre de revendication exigeant un arrêt général des expulsions de réfugiés.

Service local des étrangers de Gottingen

Service local des étrangers de Gottingen

Le 3 février, quelques anarchistes ont effectué une brève occupation du consulat grec de Berlin avec une banderole disant (en grec et en allemand) ‘La passion pour la liberté est plus forte que toute prison – Liberté pour Alfredo Bonanno et Christos Stratigopoulos‘. Alfredo et Christos, actifs depuis de nombreuses années dans le mouvement anarchiste ont été arrêtés le 1er octobre 2009 à Trikala en Grèce, accusés du braquage d’une banque.

Les 2 et 3 février prochain se tiendra à Berlin le 13ème Congrès Européen de la Police, rassemblement de fonctionnaires de police internationaux, de politiciens et de différents acteurs de l’industrie de la sécurité. Selon les organisateurs, le meeting de l’an dernier avait réuni plus de 1.800 participants de 70 pays. Officiellement, cette réunion vise à ‘renforcer les relations existantes et à développer de nouvelles pratiques’.

Le point central est l’extension et la consolidation de la coopération entre les institutions répressives européennes, dont le programme porte sur une stratégie de sécurité interne à l’UE. A l’agenda se trouve le ‘Programme de Stockholm’, un programme multi-annuel sur le futur des affaires intérieures européennes. Ce programme en cinq ans appelle une nouvelle fois à ‘la guerre contre le terrorisme, le crime organisé et la migration illégale’, ainsi qu’à l’expansion de la coopération entre la police, les services militaires et ceux du renseignement. Cela comprend l’adoption de nouvelles normes technologiques pour la surveillance et le contrôle pour lesquels l’industrie de la sécurité va exposer différents produits dans la salle de congrès. Ce congrès de la police se veut être ‘tendance’ pour l’implémentation des méthodes des services de renseignement dans les procédures de police. Surveillance et répression fonctionnent de plus en plus de manière ‘proactive’ et dans le jargon des forces de police, c’est devenu un synonyme commun pour une ‘approche anticipative’, qui a également été adoptée par l’OTAN.

Durant le congrès, il y aura des forums divers durant lesquels les stratégies seront mises en commun pour ‘fusionner sécurité intérieure et extérieure’. En conséquence, un comité se posera la question ‘Que peut-on apprendre des forces armées?’. Des représentants de l’OTAN rencontreront des fonctionnaires de police et des agents du renseignement, des ministres de l’intérieur et des secrétaires d’état prendront le café aux stands de PDGs de l’industrie de la sécurité. L’an dernier, Kai Vittrup, chef de la mission de police européenne en Afghanistan, a donné une conférence sur la coopération entre civils et militaires. Vittrup a été le chef des forces de police au Kosovo, avant d’être impliqué dans des postes de police au Soudan, en Irak ou au Timor oriental. Durant des années, il a été le chef de la police de Copenhague, qui a récemment démontré, durant le sommet sur le climat, comment le maintien de l’ordre de la protestation et de la résistance se fera dans le futur.

Les bases de données et les informations considérables qui y sont stockées sont d’un extrêmement grand intérêt pour les services de police. En Allemagne, avec la fameuse ‘enquête coup de filet’, on constate l’installation d’un instrument de contrôle très puissant, définissant un comportement déviant et normalisant la population. Chaque singularité est traitée comme un ‘risque’. Cependant, ‘l’enquête coup de filet’ actuelle a accès à beaucoup plus d’informations relatives aux personnes et aux objets que le BKA (Bureau fédéral allemand de la police criminelle) à l’époque du président Horst Herold, qui a commandé une ‘enquête coup de filet’ pour la première fois en 1979. De plus, cela contient aujourd’hui l’analyse des statistiques criminelles prise en charge de manière informatisée, mais également d’autres données telles que la conservation de données des informations provenant des télécommunications, des registres de population, des autorités étrangères, des agences pour l’emploi ou des informations d’obtention d’un diplôme, aussi bien que le lieu de résidence des délinquants ou des suspects (comme dans la note de Körting sur ‘la violence de la gauche à Berlin’).

Les réseaux sociaux et les sites internet sont analysés électroniquement, pour ensuite alimenter de leurs éventuelles anormalités les bases de données de la police. De plus, l’UE est en train de signer des accords d’échange de données avec des pays tiers, par exemple les traités avec les USA et le Japon, régule le transfert des données récupérées dans les transactions financières et des données des passagers aériens. Et ce n’est pas uniquement dans ce cas que les ministres de l’intérieur européens ont défié un vote défavorable du Parlement Européen contre ces échanges de données. La manie informatique accroit les demandes de faisabilité afin de traiter plus de données en moins de temps tout en intégrant simultanément un nombre croissant de services de police. Mais pour atteindre ce but, les programmes et le matériel dans toute l’Europe doit être adapté. Pour l’administration de cette ‘architecture IT’, de nouvelles agences doivent être développées. A partir de maintenant, cet appareil a le statut ‘d’infrastructure critique’ dont le contrôle à tour de rôle par les autorités policières est un thème important du congrès de cette année.

Les industries de logiciels développent des produits qui visent à rassembler les données satellitaires avec les analyses biométriques CCTV et d’autres bases de données variées. Certains exposant proposent même un programme sensé prédire le comportement humain. Plusieurs entreprises allemandes sont en concurrence sur ce marché de soi-disant ‘Analyses Prophétiques’ pour n’en citer que quelques unes: SAP, PSI, Siemens, EADS. Ces programmes servent la tactique de ‘Full Spectrum Dominance’ (Prédominance d’un Spectre Total) et visent à soutenir les autorités répressives à tout moment grâce à une vue d’ensemble détaillée de toute l’information disponible. Les investissements massifs de l’UE dans la recherche et le développement d’un secteur de ‘Sécurité Intérieure’ renforcent l’industrie européenne de la sécurité, qui malgré une crise financière générale profite de marchés en expansion.

Depuis deux ans, des voitures de luxe ou d’entreprise sont incendiées dans les grandes villes. En 2009, rien qu’a Berlin, les services de police ont recensé 212 voitures incendiées. A la mi-mai 2009, suite à une tentative d’incendie, Alex est arrêtée dans une rue parallèle, puis relâchée le lendemain faute de preuve. Pourtant, un jour plus tard, son mandat d’arrêt est réactivé. La police et le Ministère de l’Intérieur sont décidés à ne pas la lâcher. Elle restera 6 mois en détention préventive, avant un procès en septembre-octobre 2009 où elle sera relaxée.

En juin 2009, Christoph est arrêté avec une accusation-scénario identique à celui d’Alex, simplement contrôlé dans les environs d’un incendie de voiture. Il faudra trois semaines au procureur pour réussir à l’envoyer en taule, avec les refus d’incarcération des juges des deux premières chambres. Il va jusqu’à la troisième et dernière chambre afin d’obtenir le feu vert. Christoph a été libéré en octobre et son procès mis en pause pour ‘examination des preuves’ par la Police Fédérale (et non plus régionale).

Le 16 novembre 2009, c’est Tobi qui se fait arrêter après avoir été contrôlé dans une rue proche d’une autre où trois voitures de luxe partaient en fumée. Il vient d’être libéré le 29 décembre 2009, faute de preuve mais tout de même dans l’attente d’un procès. Le jour de son arrestation, la police a procédé à deux perquisitions de Haus Projekt (les squats légaux), avec quadrillage du quartier. Le 26 décembre, 26 voitures de luxe ont encore été incendiées (photos).

Incendie de voiture en Allemagne

Incendie de voiture en Allemagne

Incendie de voiture en Allemagne

Incendie de voiture en Allemagne

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Elena, pour Elektronischer Entgeldnachweiss (attestation électronique de revenus) est le dernier projet de fichier en date en Allemagne et a été lancé le 1er janvier dernier. L’objectif avoué par le gouvernement serait de simplifier les démarches administratives et surtout le coût. Le fichier contiendra à terme (à priori en 2012) les données de près de 40 millions de salariés, qui seront chacun muni d’une carte Elena qui leur permettra d’effectuer certaines démarches sans avoir à fournir tous les justificatifs de revenus exigés aujourd’hui. Toutes ces informations seront reprises dans la puce de la carte. Toutes ces informations, mais plus encore. La tâche de la collecte a commencé et les entreprises allemandes doivent donc fournir quantité de renseignements sur chacun de leur employé. Le dossier à remplir contient 41 pages par salarié! Sont évoqués, notamment: le salaire, l’ancienneté, mais aussi le temps de grève, les rappels à l’ordre, les raisons d’un licenciement,… Bref, somme d’informations clairement nullement nécessaire à la seule simplification des démarches administratives, mais que l’on insère par la même occasion. Somme toute, un fichier des bons et des mauvais salariés qui pourra se révéler utile pour les employeurs pour qui il peut être important de connaître ce type d’information concernant un postulant, renseignements hautement confidentiels auxquels l’entreprise n’a théoriquement pas accès. Et donc une énorme menace pour le respect de la personne et des acquis sociaux.

Alors qu’elle n’avait même pas été informée qu’une procédure légale avait été engagée contre elle, la FAU-Berlin a été moralement interdite en tant que syndicat par le tribunal régional de Berlin ce 11 janvier. Engagée dans un conflit social local, ce syndicat alternatif est la victime d’un accord conclu entre Ver.di (gros syndicat allemand, qui considérait la FAU comme une concurrence ), les politiciens et les patrons afin de faire cesser ses activités. En effet, depuis plusieurs années, elle a pu démontrer qu’un syndicalisme alternatif est possible en Allemagne affirmant qu’un conflit n’est pas seulement une question de meilleures conditions de travail, mais aussi une question de liberté d’association.

Dans le contexte syndicaliste allemand actuel, où le DGB (organisme des syndicats majoritaires) détient un quasi-monopole, cette décision judiciaire montre à quel point ce puissant monopole est effrayé de l’émergence de l’auto-organisation et de la décentralisation des actions des travailleurs. La décision du tribunal, sans même qu’aucune audition ne soit menée, a donc interdit la FAU de travailler en tant que syndicat. Et comme elle fera jurisprudence, elle affectera l’ensemble du mouvement syndicaliste allemand, car quelle que soit la forme prise par un syndicat alternatif, ce précédent le rendra impuissant.

Dimanche 10 janvier 2010 a eu lieu à Berlin la manifestation annuelle en l’honneur de Rosa Luxembourg et de Karl Liebknecht, les cofondateurs du parti communiste d’Allemagne (KPD) assassinés le 15 janvier 1919. L’hommage à Luxembourg et Liebknecht relie la gauche anticapitaliste allemande à son histoire. Malgré les conditions climatiques difficiles, plus de 9.000 personnes sont venues manifester. Une délégation portait une banderole exigeant spécifiquement la libération des prisonniers d’Action Directe.

Calicot pour les prisonniers d'AD

Calicot pour les prisonniers d’AD