Le 3 août 1981, les 13.000 contrôleurs aériens affiliés au syndicat PATCO (la Professional Air Traffic Controllers Organization) entreprenaient une grève contre l’agence fédérale de l’aviation pour demander une réduction des heures de travail, le recrutement de nouveaux employés et des augmentations de salaire.

Manifestation des contrôleurs grévistes

Manifestation des contrôleurs grévistes

Le jour même , le président Ronald Reagan passait à la télévision pour dénoncer les grévistes, évoquer un péril pour la « sécurité nationale » et lancer un ultimatum : où bien ils reprenaient le travail dans les 48 heures, où ils étaient licenciés et interdits de façon permanente de tout emploi fédéral. Reagan invoquait la Taft-Hartley de 1947. il s’agissait d’une législation anti-syndicale qui rendait illégaux les débrayages spontanés et obligatoire des préavis de grève de 60 jours, qui retirait le droit de grève aux fonctionnaires fédéraux, aux fonctionnaires d’états et aux fonctionnaires des collectivités locales, qui donnait le droit au gouvernement fédéral d’interdire une grève mettant en danger la sécurité nationale, et qui obligeait les responsables syndicaux à prêter serment de non-communisme (cette dernière disposition sera décrétée inconstitutionnelle en 1965).

Reagan, flanqué du ministre des transports, annonce le 5 août le licenciement des grévistes

Reagan, flanqué du ministre des transports, annonce le 5 août le licenciement des grévistes

Le 5 août, Reagan licenciait les 11.359 contrôleurs qui avaient défié l’ordre de retour au travail et les faisait remplacer en partie par des militaires. Commença alors une opération antisyndicale radicale, qui se termina par la création d’une liste noire et le licenciement permanent des travailleurs, la saisie des finances de la PATCO et la révocation de l’accréditation syndicale du syndicat. Des agents du FBI sont intervenus contre les piquets de grève. Des dirigeants de la PATCO furent arrêtés et emmenés en prison avec les fers aux pieds, entourés d’agents du FBI l’arme au poing. Quatre membres de la PATCO ont été emprisonnés par le gouvernement fédéral au printemps et à l’été 1983. Ron May, Gary Greene, Lee Grant et Dick Hoover avaient été ciblés pour leur militantisme lors de la grève. Accusés de délit majeur de grève contre le gouvernement, ils seront emprisonnés, frappés d’amende et privés de façon permanente de leurs droits civiques.

1983: Les syndicalistes Lee Grant, Ron May et Gary Greene devant un tribunal fédéral

1983: Les syndicalistes Lee Grant, Ron May et Gary Greene devant un tribunal fédéral

Les attaques de Reagan contre les grévistes de la PATCO ont provoqué une opposition massive des travailleurs tant aux Etats-Unis qu’ailleurs dans le monde. Un mois après que Reagan eut congédié les grévistes de la PATCO, plus de 500 000 travailleurs ont convergé sur Washington, DC, lors d’une « journée de solidarité » — la plus grande manifestation jamais organisée aux Etats-Unis.

19 septembre 1981: Journée de solidarité avec les grévistes de PATCO

19 septembre 1981: Journée de solidarité avec les grévistes de PATCO


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Mais les grandes centrales syndicales — l’AFL-CIO, les Travailleurs unis de l’automobile, les Teamsters, etc.— n’ont pas soutenu la PATCO. Suite à l’ultimatum de Reagan adressé aux grévistes de la PATCO, l’AFL-CIO a ordonné à ses affiliés (pilotes, machinistes et agents de bord) de franchir les piquets de grève pour se rendre au travail.
La défaite de la PATCO a été le signal d’une vague antisyndicale, de compressions salariales et de licenciement de masse menée par les grandes entreprises dans tous les secteurs de l’économie américaine. Le modèle était posé: Thatcher allait âtre la première à le suivre en Angleterre, les autres gouvernements européens suivant rapidement. La fin de la grève des contrôleurs aériens a marqué la fin des politiques du réformisme et des compromis de classe qui ont prédominé dans la période de l’après-guerre et le déclenchement de l’offensive néo-libérale qui se poursuit toujours aujourd’hui.

Le 27 février 1973, quelques 200 activistes Sioux Oglala armés, appartenant à l’American Indian Movement (AIM), occupèrent le hameau de Wounded Knee, sur la réserve de Pine, prirent onze otages, demandèrent une enquête sur la corruption de l’administration de cette réserve, l’une des plus pauvres des États-Unis, et une enquête sur la violation des traités signés lors des guerres indiennes.
Les otages furent relâchés grâce à la médiation de deux sénateurs du Dakota du Sud, tandis que le blocus de Wounded Knee était organisé avec des moyens considérables : des centaines de policiers et 2.000 agents du FBI furent envoyés sur place ; des chars cernèrent le village et des hélicoptères armés survolèrent le territoire occupé.

Un des blindés encerclant les occupants de Wounded Knee

Un des blindés encerclant les occupants de Wounded Knee


Occupants de Wounded Knee: la classe américaine

Occupants de Wounded Knee: la classe américaine

Le choix de Wounded Knee était hautement symbolique. En 1868, les Sioux avaient signé un traité avec les États-Unis qui leur concédait une réserve assez vaste. Mais ce traité n’avait jamais été vraiment respecté, surtout après la découverte, en 1874 de gisements d’or dans la région. Les Sioux s’étaient alors donnés un leader spirituel qui prophétisait la réapparition des morts indiens et le départ des conquérants blancs. Ses disciples de Wovoka pratiquaient avec ferveur la ghost dance (danse des esprits), ce qui inquiéta les autorités qui commencèrent la répression. Bien le chef Sitting Bull n’était pas un adepte de Wovoka, il fut assassiné par un policier.
Quatre cents Sioux s’enfuirent et trouvent refuge dans le campement du chef Big Foot, dans une autre réserve. Le 7e de cavalerie intervient et entreprend de le désarmer à Wounded Knee, le clan de Big Foot. Un coup de feu part, une fusillade générale s’ensuit où les Sioux, encerclés par les soldats, sont massacrés. C’est alors que les canons bombardent le village des femmes et des enfants. 300 à 350 Amérindiens périrent ce 29 décembre 1890. Ce massacre marqua la fin des guerres indiennes et l’ouverture définitive de l’Ouest aux colons euro-américains.

Fosse commune des victimes du massacre de 1890 à Wounded Knee

Fosse commune des victimes du massacre de 1890 à Wounded Knee

Dans le contexte du mouvement de défense des droits civiques, la montée du red power, dont l’AIM représentait l’aile la plus radicale, faisait sortir les Indiens de l’oubli. L’occupation de Wounded Knee s’inscrivait dans une série d’actions militantes comme l’occupation de l’île d’Alcatraz (1969), du mont Rushmore (1970) ou du Bureau des affaires indiennes à Washington (1972).
Le 11 mars 1973, après que de nombreuses personnes aient convergé en direction de Wounded Knee, apportant avec elles des vivres en grandes quantités, l’indépendance du territoire fut déclarée. Des cantines communautaires, un service de santé et un hôpital furent aménagés au sein du territoire assiégé. Les occupants de Wounded Knee faisaient preuve d’une extrême détermination. Des fusillades sporadiques pendant les 70 jours de sièges firent deux morts parmi les militants, un blessé grave parmi les policiers et plusieurs blessés légers.

Occupant de Wounded Knee (à l'arrière plan, l'église jouxtant le cimetière de 1890)

Occupant de Wounded Knee (à l’arrière plan, l’église jouxtant le cimetière de 1890)

Finalement les occupants reçurent un ultimatum : ils devaient évacuer Wounded Knee après avoir déposé les armes. Le gouvernement s’engageait à examiner leurs revendications : enquête sur la violation des traités, sur la mauvaise gestion et la corruption du Conseil tribal, amélioration des conditions de vie dans la réserve de Pine Ridge. Le 8 mai, les militants se rendent, et disparaissent à la barbe des autorités pendant la nuit.
Mais si l’occupation de Wounded Knee apparaît comme l’une des manifestations les plus spectaculaires de l’action militante amérindienne au cours des années 1970, les conditions de vie à Pine Ridge n’en furent guère modifiées, l’enquête sur la corruption de l’administration fut abandonnée, et les représentants de la Maison-Blanche ne rencontrèrent pas les leaders indiens pour renégocier le traité de 1868.

Par contre, au cours des mois et des années qui suivirent, les militants de l’AIM devinrent la cible de la répression policière sur le mode de la répression contre les Black Panthers. Certains purent s’enfuir, d’autres furent emprisonnés, et en deux ans sept membres ou sympathisants de l’AIM furent assassinés.
C’est dans le cadre de cette répression que le dirigeant de l’AIM Leonard Peltier est arrêté puis condamné pour l’assassinat, le 25 juin 1975, de deux agents du FBI enquêtant sur un vol dans la réserve de Pine Ridge. Au procès, ses avocats se sont vu imposer des restrictions dans leur argumentation et n’ont pas été autorisés à présenter des témoins. Plus de 140.000 pages du dossier Peltier sont toujours inaccessibles aux avocats, classées par le FBI et la CIA pour des raisons de « sécurité nationale »…

Leonard Peltier, emprisonné depuis 1976

Leonard Peltier, emprisonné depuis 1976

Le 26 juillet 1953, 166 jeunes révolutionnaires, mal préparés et mal armés, attaquent la caserne Moncada, à Santiago de Cuba, et la caserne Carlos Manuel de Gazons, à Bayamo. Cette date est le point de départ de la révolution cubaine, et devint le nom du mouvement révolutionnaire (Movimiento 26 Julio ou M 26-7) que Castro allait fonder après sa libération, qui conquit finalement le pouvoir en 1959.

L’attaque de la Moncada devait être le signal d’un soulèvement populaire contre le régime du général putschiste Batista, au pouvoir depuis mars 1952, qui atteignait des sommets de corruption et de cruauté. Elle avait été préparée par Fidel Castro, alors jeune avocat, et son second Abel Santamaría qui la veille avait dit aux rebelles « … soyez assurés de notre victoire, ayez foi en notre idéal; mais si le destin s’avère contraire pour nous, il nous faut rester courageux dans la déroute, car ce qui se sera passé ici se saura et mourir pour la patrie sera un exemple pour toute la jeunesse de Cuba ».

La caserne Moncada après l'assaut

La caserne Moncada après l’assaut

Et l’attaque échoue. Plusieurs révolutionnaires sont tués, tandis que d’autres sont capturés. 75 révolutionnaires au total seront tués par les militaires ou les policiers de Batista. Abel Santamaría est torturé, on lui brûle les bras et on lui arrache un œil pour lui faire avouer le nom du dirigeant de l’insurrection. Des photos montrent que la grande partie des révolutionnaires tués ont été torturés et abattus après leur reddition et devant le scandale naissant, les rebelles arrêtés la nuit suivante, notamment Fidel Castro et son frère Raúl, échappent à l’exécution sommaire.

Révolutionnaires tués aux abords de la Moncada

Révolutionnaires tués aux abords de la Moncada

Quelques révolutionnaires capturés après l'attaque, (Castro est le premier de la file)

Quelques révolutionnaires capturés après l’attaque, (Castro est le premier de la file)

En septembre 1953, les procès de l’attaque ont eu lieu. Fidel Castro, comme dirigeant principal est jugé séparément. Il est amené dans la salle de l’Hôpital Civil, où l’audience se tenait, après plus de deux mois d’isolement total. Il entend le procureur requérir 26 ans de prison, et se lance alors dans une « plaidoirie », en fait un discours politique, intitulé La Historia me absolvera, l’Histoire m’acquittera. Pendant trois heures, sans lire ses notes, il dénonce les crimes de la dictature et la misère du peuple cubain. Castro est alors un démocrate radical et progressiste – pas un communiste. Il cite de mémoire Jean de Salisbury, Saint Thomas d’Aquin, Martin Luther, Juan de Mariana, François Hotman, Johannes Althusius, Juan Poynet, Jean-Jacques Rousseaux et bien d’autres. Elevé par les Jésuites, il met l’accent sur Saint Thomas d’Aquin, selon lequel les tyrans devaient être démis par le peuple.
Loin de se limiter à dénoncer à la dictature, Castro expose le projet politique qui motivait l’assaut de la Moncada, et qui passait par 5 points prioritaires. La première loi remettait en vigueur la Constitution républicaine de 1940, suspendue par Batista. La deuxième était une loi de réforme agraire, qui donnait la propriété aux métayers qui occupaient jusqu’à une soixantaine d’hectares. La troisième octroyait aux travailleurs 30% des parts des grandes entreprises. La quatrième accordait aux récoltants 55% du revenu de la canne à sucre. Et la cinquième loi ordonnait la confiscation de tous les biens accaparés par les concessionnaires des gouvernements successifs.

Castro allait conclure avec ces mots restés célèbres: « Je terminerai ma plaidoirie d’une manière peu commune à certains magistrats en ne demandant pas la clémence de ce tribunal. Comment pourrais-je le faire alors que mes compagnons subissent en ce moment une ignominieuse captivité sur l’Île des Pins ? Je vous demande simplement la permission d’aller les rejoindre, puisqu’il est normal que des hommes de valeur soient emprisonnés ou assassinés dans une République dirigée par un voleur et un criminel. Condamnez-moi, cela n’a aucune importance. L’histoire m’acquittera. »

Castro lors de sa détention

Castro lors de sa détention

Les prisonniers de la Moncada à leur libération en 1955 (Castro est au centre)

Les prisonniers de la Moncada à leur libération en 1955 (Castro est au centre)

Castro est condamné à 15 ans de prison sur l’Île des Pins, et son frère à 13 ans de prison. En 1955, en raison de la pression de personnalités civiles, de l’opposition générale, et des Jésuites qui avaient participé à l’instruction de Castro, Batista décide de libérer tous les prisonniers politiques, y compris les attaquants de la Moncada. Les frères Castro partent en exil au Mexique, où se retrouvent les Cubains décidés à renverser le régime. Ils y rencontrent « Che » Guevara qui se joint à eux. Les membres du M 26-7 sont entraînés par Alberto Bayo, un ancien officier de la République espagnole exilé au Mexique, et le 26 décembre 1956, avec un armement de fortune, ils s’embarquent pour Cuba.

Le 28 janvier 1960, la caserne Moncada a été transformée en école.

Les révolutionnaires tués à la Moncada

Les révolutionnaires tués à la Moncada

Lorsque Berlin-Ouest était enclavé dans la RDA, elle n’était reliée à la RFA par un simple corridor routier et ferroviaire. Sa situation particulière et ses conséquences (loyers bon marché, exemption de service militaire) en fit un point de ralliement de la jeunesse rebelle allemande. C’est à Berlin que fut créé, en 1972, le Mouvement du 2 Juin, une organisation de guérilla urbaine anarchiste qui resta essentiellement berlinoise. Son nom faisait référence à l’assassinat d’un manifestant étudiant par un policier.

Le symbole du Mouvement du 2 Juin, qui est aussi celui de la Conférence Tricontinentale de 1966

Le symbole du Mouvement du 2 Juin, qui est aussi celui de la Conférence Tricontinentale de 1966

Peter Lorenz était le candidat à la mairie de Berlin-Ouest de l’Union chrétienne-démocrate d’Allemagne (CDU). Deux jours avant les élection, le 27 février 1975, il est enlevé par le Mouvement du 2 Juin qui exige la libération de plusieurs prisonniers. Cinq autres prisonniers et prisonnières sont libérés :

Gabriele Kröcher-Tiedemann, née le 18 mai 1951 à Ziegendorf, elle avait connue la vie des communautés à Berlin et s’y était politisée. Passée à la clandestinité, elle est arrêtée en 1973 après avoir tiré sur un policier qui voulait l’arrêter pour l’avoir surpris en train de voler des plaques d’immatriculation dans un parking. Elle est condamnée à huit ans de prison.
Verena Beker, née en 1952 à Berlin, s’engage à 19 ans dans le Mouvement du 2 Juin. Quelques mois plus tard, le 21 juillet 1972, elle est arrêtée, pour son implication dans une attaque à la bombe contre le Yacht Club des officiers britanniques à Berlin. Elle est condamnée en 1974 à six ans de prison.
Ingrid Siepmann, née en 1944 à Marienberg, s’installe à Berlin-Ouest avec son mari et son fils en 1966 et s’engage politiquement après la tentive d’assassinat du leader étudiant Rudi Dutschke en avril 1968. En 1969, elle rejoint la RAF. Elle participe à un hold up de banque en 1974, elle est condamnée à 13 ans de prison.
Rolf Pohle, né à Berlin en 1954, est membre actif de l’opposition extra-parlementaire (APO) à Munich. Il s’occupe particulièrement du travail anti-répression après la tentative d’assassinat de Rudi Dutschke est condamné en 1969 à 15 mois de prison pour la participation aux émeutes de Pâques 1968. En 1974, il est condamné à six ans et demi de prison pour appartenance à la RAF, ce qu’il a toujours nié.
Rolf Heissler, né le 3 Juin 1948 à Bayreuth, a épousé Brigitte Mohnhaupt et a été un membre des Tupamaros de Munich. Avec Brigitte Mohnhaupt, il est entré dans la RAF et a été arrêté le 13 avril 1971 pour un hold-up. En 1972, il est condamné à six ans de prison.

Le négociateur fut le pasteur Heinrich Albertz, qui avait été un résistant au régime nazi (arrêté plusieurs fois et finalement enrôlé de force). Membre du parti social-démocrate à Berlin-Ouest jusqu’à devenir gouverneur de la ville dans les années ’60, et était redevenu pasteur. Albertz avait accepté de se porter garant de l’échange et d’accompagner les prisonniers au Yémen du Sud, qui a accepté de les accueillir. En 1967, la partie sud du Yémen s’était libérée, après une longue lutte dirigées par des forces communistes, du colonialisme britannique. En 1967, les Britanniques s’en vont et la République Démocratique Populaire du Yémen est fondée. Le 3 mars les prisonniers sont libérés et le lendemain, le mouvement du 2 Juin relâche Peter Lorenz.

A la télévision allemande, le jour des libérations

A la télévision allemande, le jour des libérations


Les prisonniers libérés embarquent à Francfort dans un Boeing pour le Yemen

Les prisonniers libérés embarquent à Francfort dans un Boeing pour le Yemen

Les cinq prisonniers libérés connaîtront des destins différents :
– Le 20 décembre 1975, Gabriele Kröcher-Tiedemann participera avec Ilich Ramírez Sánchez « Carlos » au raid au siège de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole à Vienne. Durant cette opération, elle abat un policier autrichien et un garde de sécurité irakien qui essayait de la maîtriser. En novembre 1977, elle a réintégré le Mouvement du 2 Juin qui enlève un milliardaire autrichien, Walter Palmers, et obtient 2 millions de dollars en échange de sa liberté. En décembre 1977, elle est arrêtée avec Christian Möller suite à une fusillade à la frontière suisse où deux douaniers sont blessés. Gabriele Kröcher-Tiedemann passe les dix ans dans une prison suisse. En 1987, elle est extradée vers l’Allemagne, où elle est emprisonnées pour le raid de l’OPEP. Libérée en 1991, gravement malade, elle est opérée cinq fois en 1992 et décède d’un cancer, en 1995, à l’âge de 44 ans.
– Verena Becker réapparaît le 3 mai 1977 lorsqu’avec Günter Sonnenberg, un autre membre de la RAF, ils tirent et blessent deux policiers lors d’un contrôle à Bonn. Günter Sonnenberg est touché dans le dos et à la tête et Verena Becker à la jambe. Elle est condamnée à la prison à vie, et sera graciée après douze ans de prison, après avoir semble-t-il collaboré avec la justice sans dénoncer personne. En avril 2008, le procureur général lance une nouvelle poursuite contre Verena Becker pour l’exécution par la RAF en 1977 du Procureur fédéral en chef Siegfried Buback. Elle est emprisonnée mais bientôt remise en liberté.
– Ingrid Siepmann rejoint un camp de formation du Front Populaire pour la Libération de la Palestine (FPLP). Elle est également impliquée dans l’enlèvement de Walter Palmers. En 1981, elle est l’un des militante les plus recherchées de la République fédérale. Elle est tuée en 1982 lors de l’invasion du Liban par Israël, alors qu’elle y combattait dans une brigade féminine palestinienne.
– Après sa libération, Rolf Pohle s’est rendu en Grèce où il a été arrêté en 1976. Extradé en Allemagne, il y reste jusqu’à 1982. Il est retourné en suite en Grèce où il a enseigné l’allemand jusqu’à sa mort, d’un cancer, en 2004. Il a toujours nié avoir eu des relations profondes avec la RAF.
– En octobre 1976, Rolf Heissler est rentré clandestinement en Allemagne et a réintégré la RAF. Le 1er novembre 1978, avec une autre membre de la RAF, Adelheid Schulz, il est impliqué dans une fusillade à la frontière néerlandaise. Deux douaniers sont tués. Lorsque les policiers allemands le repèrent le 9 juin 1979 à Francfort, ils ne tentent pas de l’arrêter mais lui lui mettent directement une balle dans la tête. Grièvement blessé, il survivra cependant et sera condamné à la prison à vie. Il sera libéré après 22 ans de prison. De nouvelles poursuites seront entamées contre lui pour la mort de Hans Martin Schleyer, mais elles seront abandonnées faute de preuve.

Début des années ’80, les militants du Mouvement du 2 Juin annonçait sa dissolution dans la RAF.

Lire le programme du Mouvement du 2 Juin

Lire le communiqué de dissolution du Mouvement du 2 Juin

On situe la naissance de Pieter Breughel l’Ancien entre 1525 et 1530, il serait né dans un des deux villages ayant porté le nom de Brueghel (ou Brogel), l’un situé dans le Brabant hollandais, l’autre dans le Limbourg belge. En 1552, il fait un voyage en Italie, poussant jusqu’à Rome et Naples; entre 1555 et 1563, il est établi à Anvers. Il fréquente un cercle d’artistes et d’érudits humanistes mais aussi les milieux populaires ruraux de la Campine proche. Il s’invite aux noces paysannes en se faisant passer pour un parent, apportant des cadeaux et participant à la fête. Dans ses tableaux dominés par la vie populaire, le peintre montre des paysans tels qu’ils sont dans leurs activités et divertissements. Pour la première fois dans l’histoire de la peinture, la classe rurale est humanisée.

La danse de la mariée

La danse de la mariée

C’est en 1562, qu’il s’installe à Bruxelles dans le quartier des Marolles. En 1564 naît le premier de ses fils, Pieter Breughel le Jeune, dit Breughel d’Enfer. La situation politique et religieuse se dégrade. La naissance de Charles-Quint a mis sous la tutelle espagnole les riches 17 provinces formant alors les Pays-bas (soit les Pays-Bas actuels et la Belgique, moins la principauté de Liège, plus le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie). Le carcan de la monarchie espagnole, ultra-réactionnaire, féodale, était pesante pour des Pays-Bas qui avaient une des activités industrielles et marchandes les plus développées au monde. L’imbrication du trône, des grands féodaux et de l’église catholique fit que la bourgeoisie et les milieux populaires trouvèrent dans le protestantisme une expression idéologique adéquate à leur position antagonique. Les empiétements des Espagnols sur les vieilles libertés conquises du temps des Bourguignons provoquèrent des mécontentements, puis des troubles.

Autoportrait de Breughel

Autoportrait de Breughel

Si Charles-Quint, né à Gand, parlant flamand, connaissait et aimait les Pays-Bas, son fils Philippe II, n’y voyait que terre d’hérésie et de rébellion. Philippe II nomme le duc d’Albe vice-roi des Pays-Bas, l’investi d’un pouvoir absolu pour supprimer les libertés, faire tomber les têtes, remplacer les fonctionnaires locaux, annuler les droits des États. En 1567, année de la naissance du deuxième fils de Breughel, Jan Brueghel l’Ancien, dit Breughel de Velours, Albe son entrée dans Bruxelles à la tête de 17.000 soldats espagnols. Il établit et préside, sous le titre de Conseil des troubles, un tribunal tellement sévère qu’on ne le désigne plus que sous le nom de Conseil de sang.

L’année suivante Philippe II ordonne l’exécution des comtes d’Egmont et de Hornes. Ils avaient pris la tête de centaines de nobles qui, à Bruxelles, avaient signé une protestation contre les empiétements du pouvoir espagnol sur des chartes et libertés. Ils s’étaient décerné le titre de « gueux », par défi à l’égard du conseiller de la régente, qui les avait ainsi qualifiés avec mépris. Ils seront décapités sur la Grand-Place le 5 juin 1568. C’est le point de départ de la guerre de Quatre-Vingts Ans. Les soldats et mercenaires espagnols vivent sur le pays, multipliant les exactions tandis que, bataille après bataille, les armées dévastent villes et campagnes.

Breughel, né dans un pays prospère et pacifique, meurt en 1569 dans un pays dévasté par la guerre, pillé par les mercenaires espagnols, terrorisé par l’Inquisition. Et s’il semble s’être bien gardé de se positionner ouvertement contre l’autorité espagnole (en fait, le gouverneur de Bruxelles était son mécène et son protecteur), sa peinture fustige, pour qui sait la lire, l’oppression espagnole. C’était l’usage de peindre les scènes bibliques et antiques avec les costumes contemporains. Mais Breughel va plus loin : Le Dénombrement de Bethléem (1566) est une critique à peine voilée des contraintes administratives imposées par le pouvoir espagnol (on y voit même un Espagnol, représenté avec un grand chapeau, voler des légumes). Dans le Portement de croix (1565) Marie pleure au pied de la roue où l’on mettait à mort les condamnés en leur rompant les os et la Prédication de Saint Jean-Baptiste (1566) évoque les prêcheurs itinérants protestants, réunissant les paysans dans la forêt.

Le Dénombrement de Bethléem

Le Dénombrement de Bethléem

L’œuvre gravée de Breughel l’Ancien est importante. Il dessine des planches satiriques comme Les gros poissons mangent les petits. En 1557 sort la série des Sept Péchés capitaux suivie en 1558 des Sept Vertus – dont la Justice. La liste des sept péchés capitaux, influencée par Thomas d’Aquin, est assez connue : l’orgueil, l’avarice, l’envie, la colère, la luxure, la gourmandise et la paresse. Les péchés capitaux sont des péchés de « tête » (capita), ils ne sont pas plus graves que d’autres, mais susceptibles d’en entraîner d’autres. Pour équilibrer, il existe sept vertus catholiques (chasteté, tempérance, prodigalité, charité, modestie, courage et humilité) et aussi les vertus théologales (d’origine divine), que sont la foi, l’espérance et la charité, sont complétées par les vertus cardinales (d’origine humaine), que sont la justice, la prudence, la tempérance et la force d’âme.

Comme à son habitude, Breughel illustre péchés capitaux et vertus cardinales par des scènes de la vie réelle : la Foi est l’accomplissement des cérémonies de l’Église, l’Espérance soutient le naufragé et console le prisonnier, la Charité habille les nus et nourrit les affamés, etc. Mais lorsqu’il en vient à la justice, il change de registre et s’il représente au milieu de l’image l’allégorie habituelle de la justice : une femme aux yeux bandés (impartialité) tenant la balance du jugement et le glaive de la sanction, il la place au centre de tout l’appareil barbare de l’organisation judiciaire son temps : la torture par l’eau et le feu, l’estrapade, la roue, le gibet, le bûcher, la hart (corde d’étranglement) et le glaive. Sous prétexte d’illustrer une vertu, Breughel grave un terrible réquisitoire contre un appareil qui broie et martyrise les hommes.

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Quelques détails:
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Billy Wright avait adhéré en 1975 à l’Ulster Volunteer Force. L’UVF était une organisation paramilitaire loyaliste d’Irlande du Nord créée en 1912 pour lutter contre le mouvement indépendantiste. Refondée en 1966, officiellement interdite mais bénéficiant de profondes complicités dans les forces de sécurité, elle tuera 426 personnes, des militants républicains mais aussi, dans une volonté de terreur, des Irlandais qui étaient simplement catholiques. Dirigeant de l’UVF à Portadown, Wright avait dénoncé en 1986 les négociations de paix et avait profité des grandes marches protestantes, qui célèbrent l’écrasement des catholiques et la soumission de l’Irlande à la couronne britannique, pour organiser une violence de rue dirigée contre les catholiques.

Après une éclipse de cinq ans en politique, il affirme au début des années 90 avoir « rencontré Dieu » et consacré sa vie « à la défense du peuple protestant ». Il réintègre alors l’UVF et reprend son activité dans les escadrons de la mort, mais peu après, en 1994, l’UVF accepte le cessez-le-feu proposé (et entamé) par l’IRA. Billy Wright entre en dissidence et avec une centaine de clandestins de l’UVF de Portadown, il fonde la LVF (Loyalist Volunteer Force). La LVF va poursuivre une politique d’assassinats, essentiellement des prolétaires catholiques sans activité politique.

Billy Wright

Billy Wright

Surnommé le « Rat roi », Wright était un anticommuniste déclaré, lié à des groupes d’extrême droite chrétiens des États du sud des États-Unis, et entretenant des relations étroites avec l’organisation néo-nazie « Combat 18″, basé à Bolton. Véritable psychopathe, Billy Wright prolongeait l’exécution en »discutant » avec ses victimes avant de les abattre. Billy Wright avait été condamné à mort par l’IRA (qui a tenté à six reprises de l’exécuter, parvenant une fois à le blesser). Son ancienne hiérarchie paramilitaire protestante, adhérant au processus de paix, lui avait ordonné de quitter l’Irlande du nord le 1er septembre 1997 avant minuit, sous peine de mort. Arrêté pour un motif mineur mais convaincu par la suite de trois meurtres (il en aurait personnellement commis une dizaine et ordonné des dizaines), Wright avait été enfermé au bloc 6 de la prison de Maze.

Dans la matinée du samedi 27 décembre 1997, trois prisonniers de l’INLA – Christopher « Crip » McWilliams, John « Sonny » Glennon et John Kennaway, armés de deux pistolets, ont quitté l’aile des prisonniers de l’INLA, ont traversé le terrain de sport voisin, sont passés par un trou préparé à l’avance dans le grillage, sont montés sur le toit de leur aile pour accéder à la cour où Wright montait dans le van amenant les prisonniers au bloc des visites. Après avoir tiré sept balles sur Wright, les trois volontaires de l’INLA se sont rendu en présentant un communiqué de l’INLA. L’opération, ordonné par le commandement de l’INLA (qui n’avait pas encore acceptée le cessez-le-feu) avait été soigneusement planifiée et parfaitement exécutée.

Le plan de l'opération

Le plan de l’opération


Le plan général de la prison de Maze

Le plan général de la prison de Maze

Les paramilitaires de la LVF ont répliqué à leur manière: en s’en prenant à des civils de l’autre communauté. La nuit même, un de leur commando mitrailla des jeunes gens qui sortaient d’une discothèque d’un quartier catholique. Plusieurs meurtres suivirent. Le 20 octobre 1998, les trois membres de l’INLA qui avaient exécuté Billy Writht ont été condamnés à la prison à vie. Dans l’intervalle, l’INLA avait rallié le cessez-le-feu et ses prisonniers allaient progressivement être libéré dans le cadre du programme de libérations anticipées liée aux accords de paix.

symbole de l'INLA

symbole de l’INLA

Après Les Conquérants (1928) et La Voie royale (1930), La Condition humaine (prix Goncourt 1933) est le dernier volet d’un cycle romanesque inspiré à Malraux par ses séjours en Indochine dans les années 1920. Malraux n’a jamais été communiste – et il deviendra un politicien anticommuniste – mais lors de ce séjour en Asie, il collaborera comme journaliste avec les communistes qui sont à la pointe de la lutte anti-coloniale et anti-impérialiste, tout comme il collaborera avec eux contre le nazisme et l’intervention fasciste en Espagne.

André Malraux

André Malraux


L'édition originale de La Condition humaine

L’édition originale de La Condition humaine

L’action du roman, concentrée en à peine quelques jours, se situe à Shanghai en 1927, dans une Chine politiquement décomposée, dominée économiquement par les nations étrangères. Les troupes nationalistes du Kuomintang, dirigé par Tchiang Kaï-chek, avancent sur Shanghai contrôlé par un seigneur de la guerre lié aux impérialistes. Le Parti communiste chinois, qui a fait alliance avec le Kuomintang, organise et réussi une insurrection ouvrière.

Shanghai en 1928

Shanghai en 1928


Insurgés communistes de Shanghai

Insurgés communistes de Shanghai

Mais un changement d’alliance s’opère et Tchiang Kaï-chek, exige que les communistes lui rendent leurs armes. Ils s’y refusent, puis cèdent sur ordre de l’Internationale qui tente de préserver l’alliance avec le Kuomintang (en essayant de dresser sa gauche contre Tchiang Kaï-chek). La répression des insurgés tourne au massacre.

Décapitation d'un communiste lors du massacre de Shanghai en 1927

Décapitation d’un communiste lors du massacre de Shanghai en 1927

Les scènes de la répression de la Commune de Shanghaï sont saisissante et ont beaucoup fait pour le succès du roman. Une des personnage qui a refusé de collaborer et rejoint sous le préau, ses camarades qui attendent d’être brûlés vifs dans les chaudières des locomotives.

Le 14 janvier 1918, des grèves contre le rationnement et la guerre commencèrent à Vienne et s’étendirent rapidement à toute l’Autriche et à d’autres parties de l’empire austro-hongrois. Le gouvernement impérial semblait impuissant mais la très puissante social-démocratie autrichienne empêcha que ce mouvement prenne un caractère révolutionnaire. A l’automne 1918, la monarchie austro-hongroise se disloqua. Plutôt que de revendiquer le pouvoir pour les conseils d’ouvriers et de soldats qui se développaient, les socialistes acceptèrent de diriger un gouvernement de coalition issu de l’Assemblée nationale provisoire. Les communistes ne réussirent à se rallier aucun dirigeant important de la social-démocratie et restèrent relativement marginaux en Autriche. Quand la révolution éclata en Hongrie (le 
21 mars 1919) et en Bavière (7 avril), les socialistes autrichiens les abandonnèrent à leur sort.

Cependant, ils établirent des réformes sociales importantes (congés payés, réduction du temps de travail, assurance-maladie, droit de vote des femmes, interdiction du travail des enfants, abolition de la peine de mort, etc.). A Vienne, ils firent construire des cités ouvrières grandioses dotées d’appartements confortables (comme le Karl-Marx-Hof: 1382 appartements) , des crèches, des centres de santé et des colonies de 
vacances. Le parti social-démocrate comptait quelque 700.000 membres (dans un pays de moins de 7 millions d’habitants) et obtenait autour de 40% des voix aux élections nationales, recueillait près de 60% des suffrages à Vienne-la-rouge.
A la fin de la guerre s’était formée une force paramilitaire nationaliste ultra-réactionnaire, la Heimwehr. Pour la contrer, le parti-social-démocrate créa la Republikanischer Schutzbund (la Ligue de Défense Républicaine), une milice qui comptait 80.000 membres en 1928 à Vienne et dans les zones industrielles. Les membres de le Schutzbund étaient organisés en formations militaires avec des uniformes, bien entraînés, rapidement mobilisables et disposant de stocks d’armes. Le Schutzbund devait garantir contre tout coup de force réactionnaire l’accès au pouvoir des socialistes par les voies légales.

Les 1000 mètres de façade du Karl-Marx-Hof

Les 1000 mètres de façade du Karl-Marx-Hof

Défilé de membres du Schutzbund

Défilé de membres du Schutzbund

Le 15 juillet 1927 constitua le tournant. Le 30 janvier, les paramilitaires de la Heimwehr tuèrent deux manifestants socialistes dans une petite ville de province. Les meurtriers passèrent en jugement et furent acquittés le 14 juillet, ceci déclencha le lendemain une révolte populaire à Vienne qui prit la forme d’une grève générale et d’une manifestation violente de masse (mise à sac d’un commissariat, du siège d’un journal, et du palais de justice qui fut totalement incendié). La police ouvrit le feu et tua 84 manifestants et en blessa 600.

Le 15 juillet, les dirigeants socialistes temporisèrent et le Schutzbund reçu comme seule mission de tenter de calmer la foule. La crédibilité d’une action déterminée du Schutzbund était atteinte. Le bloc des partis bourgeois, appuyé par la Heinwehr, qui évoluait en austro-fascisme, employa la « tactique du salami » : chacune de ses actions, y compris en violation de la Constitution, ne paraissait pas assez grave pour justifier l’insurrection armée, mais marquait un recul des positions de force des travailleurs et les démoralisait.

15 juillet 1927: L'incendie du palais de justice de Vienne

15 juillet 1927: L’incendie du palais de justice de Vienne

A partir de 1931, la crise économique provoqua une hausse du chômage et mit en difficulté le « modèle social » viennois. Les syndicats sociaux-démocrates cautionnèrent d’incessants reculs sur le terrain de la défense des salaires et des conditions de travail. Sous l’impact du chômage (en 1933, un tiers de la population active n’avait pas de travail) mais aussi de la démoralisation, les effectifs syndicaux reculèrent tandis que les provocations gouvernementales se multipliaient. La Heimwehr fut intégrée au gouvernement du chancelier Dollfuss. En février 1932 le gouvernement utilisa l’armée contre une grève des cheminots et emprisonna les grévistes. Le 4 mars 1932, Dollfuss commença à gouverner par décret. Le 15 mars, il fit intervenir la police pour empêcher la réunion de l’Assemblée. La voie vers l’austro-fascisme (proche du fascisme italien et opposé aux nazis qui voulaient annexer l’Autriche) était ouverte.

Le 31 mars, le Schutzbund fut dissous, puis ce fut la censure de la presse, l’interdiction du Parti Communiste, le rétablissement de la peine de mort, la création de camps pour les opposants politiques, la destitution des directions syndicales élues. La social-démocratie à chaque fois se contentait de protestations surtout verbales.

En janvier 1934, Dollfuss était désormais décidé à liquider le mouvement ouvrier organisé. Le 21, le grand quotidien socialiste Arbeiter Zeitung fut interdit et des perquisitions commencèrent pour saisir les armes du Schutzbund. Le Schutzbund de la ville de Linz décida de résister à toute tentative de désarmement. La direction socialiste essaya de les dissuader mais le message en ce sens ne parvint pas à Linz et, le 12 février, les policiers qui venaient perquisitionner essuyèrent des coups de feu.

A ces nouvelles, des grèves éclatèrent spontanément à Vienne et des membres du Schutzbund allèrent chercher leurs armes. La direction sociale-démocrate était surprise et ne se rallia que tard et avec beaucoup d’hésitations et de confusion, au principe de la résistance armée. Cela explique qu’une partie seulement du Schutzbund viennois se mobilisa effectivement et resta cantonnés dans les quartiers ouvriers, il laissa le temps à l’adversaire de prendre les points stratégiques de la ville. L’attaque des quartiers ouvriers suivi : Simmering, Favoriten, Meidling, Margareten, Floridsdorf, les ensembles d’immeubles du Karl-Marx-Hof, du Schlingerhof, du Goethehof.

L’armée qui fera la différence en faisant donner l’artillerie. Mortiers, canons et obusiers mettront deux jours à réduire le Karl-Marx-Hof. Le Parti Socialiste interdit et ses dirigeants fuient à l’étranger. Des combats se déroulèrent à Graz, à Steyr et dans de nombreuses villes industrielles. Les forces de répression mirent quatre jours à venir à bout de l’insurrection. La répression et la terreur s’abattaient dans l’ensemble de l’Autriche.

Les principaux combats à Vienne: tous dans les quartiers ouvriers périphériques

Les principaux combats à Vienne: tous dans les quartiers ouvriers périphériques

L'armée canonne les insurgés par delà le Danube

L’armée canonne les insurgés par delà le Danube

Reddition d'insurgés: les exécutions vont commencer

Reddition d’insurgés: les exécutions vont commencer

L’écrasement de Vienne-la-rouge a fortement marqué les esprits et ainsi la culture prolétarienne. Elle ainsi est le sujet d’un grand roman d’Anna Seghers paru en 1935, Le Chemin de février (Der Weg durch den Februar), dont le point d’orgue est l’attaque contre le Karl-Marx-Hof. Quant au chant des combattants de ’34, Nous sommes les travailleurs de Vienne, il deviendra un classique du répertoire prolétarien

Cette chanson a pour origine un chant de l’Armée rouge Armées blanches, baron noir composé durant la guerre civile. En 1927, dans la foulée des événements du 15 juillet, Fritz Brügel écrit la plus célèbre adaptation de cette chanson : Nous sommes les travailleurs de Vienne (Wir sind die Arbeiter von Wien). Elle ne fut présentée pour la première fois qu’en 1929 à l’occasion de la IIe Journée Internationale de la Jeunesse Ouvrière. Adoptée comme chant de lutte par les combattants de Vienne en février 1934, elle se répandit dans tout le mouvement ouvrier, et particulièrement en Scandinavie.

Nous sommes les bâtisseurs du monde à venir,
Nous sommes le semeur, la semence et la terre.
Nous sommes les faucheurs de la prochaine moisson,
Nous sommes le futur et nous sommes l’action.

Alors vole, flamboyant, drapeau rouge,
Ouvre le chemin que nous suivons.
Nous sommes les fidèles combattants de l’avenir,
Nous sommes les travailleurs de Vienne.

Maîtres des usines, maîtres du monde,
Votre pouvoir sera finalement liquidé.
Nous, l’armée qui crée le futur,
Briserons les chaînes des prisonniers.

Alors vole, flamboyant, drapeau rouge,
Ouvre le chemin que nous suivons.
Nous sommes les fidèles combattants de l’avenir,
Nous sommes les travailleurs de Vienne.

Bien que l’odieux mensonge nous entoure,
L’esprit s’élèvera et triomphera.
Sa force brisera les prisons et les fers ,
Nous nous préparons à la dernière bataille.

Alors vole, flamboyant, drapeau rouge,
Ouvre le chemin que nous suivons.
Nous sommes les fidèles combattants de l’avenir,
Nous sommes les travailleurs de Vienne.

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Lire « Des potences en Autriche », une brochure de 1934 du Secours rouge sur la fin de Vienne-la-rouge

L’affaire du gazage au pepper spray de l’Université de Californie Davis a eu lieu le 18 novembre 2011. Au cours d’un mouvement d’occupation à l’UC Davis. La protestation faisait suite à la hausse des frais de scolarité à l’université, et s’inscrivait plus généralement dans le mouvement « occupy ».

Le 9 novembre déjà, la police avait brutalement dispersé les teach-ins et sit-ins sur le campus, matraquant plusieurs étudiants et arrêtant 39 d’entre eux pour avoir refusé d’obtempérer à l’ordre de dispersion. Le 15 novembre, une nouvelle manifestation a lieu, de nouvelles tentes sont plantées, et le 16, la police fait une nouvelle fois usage de matraques et de gaz. Le 17 novembre, des tentes sont encore une fois installée sur le campus et dans la matinée du 18, la doyenne ordonne leur évacuation pour 15h. A 15h30, les membres de la police universitaire, en tenue anti-émeutes, ordonnent aux manifestants de partir. Ceux-ci refusent. A 16h, deux agents ont commencé la pulvérisation d’un spray au poivre à usage militaire, quasiment à bout touchant (alors qu’une distance de sécurité est prescrite), sur les visages des étudiants assis sur le sol. Onze manifestants ont du recevoir des soins, deux ont été hospitalisés. La photo et la vidéo du lieutenant de police John Pike gazant les manifestants deviennent aussitôt virales.

La célèbre photo du lieutenant John Pike à l'oeuvre

La célèbre photo du lieutenant John Pike à l’oeuvre

Après l’incident, de grandes manifestations contre l’utilisation de spray au poivre sur le campus ont eu lieu. La doyenne de l’UC Davis a présenté ses excuses aux étudiants, affirmant que la police avait agi contre ses ordres (aucune arrestation et aucun usage de la force). Un débat public sur la militarisation de la police et de l’utilisation du spray au poivre sur des manifestants pacifiques a lieu dans les médias. Le chef de la police du campus a déclaré que l’usage des gaz se justifiait parce que les manifestants empêchaient les agents de se déplacer librement – ce que les vidéos démentaient. Le chef de la police universitaire et deux agents gazeurs, dont John Pike, furent mis en congé administratif. Un groupe de travail composé d’étudiants, de professeurs, d’employés de l’UC et dirigé par un professeur de l’UC qui avait été juge de la Cour suprême de Californie, a conclu à l’abus d’usage de la force.
Le lieutenant Pike a été licencié, mais en octobre 2013, un juge lui a maintenu ses droits à la retraite et attribué une indemnité de 38.000 $ pour « compenser sa douleur psychologique ». Suite à un appel des Anonymous, Pike avait reçu 17.000 mails, 10.000 sms et des centaines de lettres hostiles. Trois douzaines d’étudiants ont quant à eux obtenu collectivement 1 million $ de l’UC suite à un procès fédéral. Chaque élève gazé ayant reçu 30.000 $ individuellement.
La doyenne allait finalement démissionner après que l’on eu notamment appris qu’elle avait fait payer par l’université 175.000 $ à des sociétés de relations publiques pour enlever de Google les références à l’affaire du pepper spray cop.

L’image de Pike gazant des manifestants pacifiques et assis a fait le tour du monde. Elle est devenue un symbole de l’abus de violence par la police, puis un meme internet avant d’être déclinée de mille manières.

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A la fin des années vingt, les charbonnages en Belgique représentaient le deuxième secteur industriel du pays, juste après la métallurgie. Avant la grande crise, le prix du charbon chuta et les stocks s’accumulèrent. Entre juillet 1930 et mars 1932, les revenus des mineurs diminuent de 29 %, alors que les loyers restent inchangés, et que le pain augmente. Aux réductions de salaire s’ajoutaient le chômage partiel et les licenciements. Le nombre de sans-emploi passe de 181.000 en décembre 1930 à 326.000 en 1932, sans compter 200.000 chômeurs non indemnisés!

Le 17 mai 1932, les patrons charbonniers borains annoncèrent une diminution de salaire de 5%. Le 30 mai, la grève démarra spontanément au charbonnage du Grand Trait et les autres fosses firent de même les jours suivants. Achille Delattre, secrétaire national (socialiste) de la Centrale des Mineurs, tempérait en demandant aux mineurs « de ne pas se laisser entraîner par des agitateurs ». Mais quand la baisse des salaires devint effective le 19 juin, 10.000 mineurs de Wasmes et de Hornu partent en grève. Dès le 1er juillet, tout le Borinage était à l’arrêt et on assista aux premières manifestations de femmes. Le 5 juillet, 35.000 manifestants défilent à Mons. Le 6 juillet, des grévistes partent à vélo vers le bassin du Centre pour y faire débrayer les charbonnages et les usines. Les métallurgistes et les travailleurs des transports se joignent au mouvement: plus de 150.000 ouvriers étaient en grève.

Dans un coron borain pendant la grève

Dans un coron borain pendant la grève

Au cours des années vingt, les militants révolutionnaires exclus des syndicats pour leurs opinions politiques avaient formé la Centrale révolutionnaire des Mineurs (CMR), liée au Parti Communiste. Ils avaient pris la tête du mouvement alors que les chefs socialistes prêchaient le calme. La gendarmerie charge les cortèges de grévistes, sabre au clair. Des manifestants sont blessés et des barricades érigées.

Des mineurs incendient le château d’un directeur à Dampremy. Le gouverneur du Hainaut interdit les rassemblements de plus de cinq personnes. Le ministre de l’Intérieur décréte l’état de siège dans les régions minières et envoie 2.500 gendarmes, des militaires et même des automitrailleuses quadriller les corons. Le dimanche 10 juillet la gendarmerie dispersa une manifestation à Roux et tua un ouvrier, Louis Tayenne. La sûreté générale arrêta Julien Lahaut, secrétaire de la CMR ainsi qu’une série d’autres dirigeants du PCB, accusés de complot. Le Secours Rouge et d’autres organisations sont interdites.

La gendarmerie charge des grévistes à Charleroi

La gendarmerie charge des grévistes à Charleroi


Souscription du Secours Rouge pour le monument funéraire de Louis Tayenne

Souscription du Secours Rouge pour le monument funéraire de Louis Tayenne

A partir du mardi 12 juillet les gendarmes reprirent possession de la rue. Les manifestations de Gilly et de Châtelineau, les dernières dans le Hainaut, furent réprimées et les gendarmes pénétrèrent à cheval dans les Maisons du Peuple. Du 11 au 13 juillet près de 300 arrestations furent opérées. Le 14, au Congrès de la Centrale des mineurs socialistes, la base refusa l’accord proposé par la direction. Cela n’empêcha par les dirigeants socialistes d’appeler à la reprise du travail dès le lundi matin, présentant comme une victoire de vagues promesses patronales. Le 18 les verriers et les métallos reprirent le travail.

Seuls les mineurs du Hainaut continuaient la grève. Le 7 septembre, ils gagnent une hausse de 1% des salaires, la révision des bas salaires, et le ré-embauchage. Les mineurs, isolés et trahis, mettent fin à la grève à la mi-septembre. De nombreux ouvriers, ulcérés par les trahisons successives des socialistes, rejoignent un PCB qui, jusque là groupusculaire, allait dès lors prendre un caractère ouvrier de masse.

L’histoire de cette grève est le sujet d’un film muet, Misère au Borinage (1934, voir ici sur youtube), réalisé par Henri Storck et Joris Ivens. Ce documentaire social, réalisé dans une semi-clandestinité, est devenu aujourd’hui une référence cinématographique et historique incontournable. Moins connu est le documentaire Manifestation pour Tayenne – l’ouvrier abattu par la gendarmerie lors de ces grèves. Tourné en 16mm, en 1933 par Van Ommeslaeghe et Jean Fonteyne, qui avaient participé à la réalisation de Misère au Borinage. Manifestation pour Tayenne est le premier documentaire social de l’histoire du cinéma. Il montre la manifestation organisée par le Secours Rouge pour le premier anniversaire de la mort de Louis Tayenne, d’abord sur les lieu du drame et puis au cimetière.

L'appel à la manifestation Tayenne 1933 dans le journal du Secours rouge

L’appel à la manifestation Tayenne 1933 dans le journal du Secours rouge

9 juillet: notre SR fleurit le monument Tayenne au cimetière de Marchienne

9 juillet: notre SR fleurit le monument Tayenne au cimetière de Marchienne