Nelson Mandela est devenu membre du Congrès National Africain (ANC) en 1944, afin de lutter contre la domination politique de la minorité blanche et la ségrégation raciale. Devenu avocat, il participe à la lutte non violente contre les lois de l’apartheid. C’est dans les luttes des années ’50 que se forme la triple alliance entre l’ANC, le COSATU (l’union des syndicats) et le parti communiste sud-africain (SACP, interdit depuis 1950). En 1960, après le massacre de Shaperville, (69 manifestants désarmés tués par la police) Mandela défend l’usage de la violence : « La dure réalité, c’est que cinquante années de non-violence n’ont rien apporté d’autre aux Africains qu’une législation plus répressive et de moins en moins de droits.»
Le massacre de Sharpville
L’option de la lutte armée fut mis sur la table par Mandela dans une réunion en juin 1961 avec le principal dirigeant du SACP, Moses Kotane. Celui-ci critiqua cette proposition avec les arguments habituelles dans les PC pro-soviétiques (la lutte armée était une « réaction désespérée », le fruit d’un « manque de patience, de détermination et d’imagination dans l’emploi des vieilles méthodes », etc.). Mandela lui répondit qu’il reproduisait l’erreur du Parti communiste de Cuba sous Batista qui, sous prétexte que « les conditions n’étaient pas réunies » avait laissé l’initiative aux castristes. A l’intérieur de l’ANC, Mandela dû batailler pour imposer l’idée de la lutte armée (notamment face aux Sud-Africains d’origine indienne, fort imprégnés de gandisme).
Mandela emporte la décision et est chargé de développer la lutte armée. Il fonde l’Umkhonto we Sizwe (La lance de la nation ou MK), une organisation militaire dont les militants proviennent du SACP, de l’ANC et du COSATU. Le commandement est formé de Mandela et Walter Sisulu (pour l’ANC) et de Joe Slovo (pour le SACP). Le 16 décembre (jour où les Sud-Africains blancs célébraient la victoire des Boers sur les Zoulous en 1838) 1961, les premières bombes de la MK explosent dans des centrales électriques et des bureaux du gouvernement à Johannesburg, Port Elizabeth et Durban.
sabotage de l’uMkhonto weSizwe
Affiche de la MK
Après 17 mois de clandestinité (comprenant un voyage de formation militaire et de recherche de soutien en Chine, en Algérie et en Ethiopie), Mandela est arrêté le dimanche 5 août 1962, en compagnie de Cecil Williams, un Blanc, directeur de théâtre et membre de MK, sur une route les menant à Johannesburg. Il est condamné à 5 ans de prison.
Les services secrets sud-africains parviennent à infiltrer la MK et le 11 juillet 1963, la police arrête plusieurs dirigeants de l’ANC et de la MK, parmi lesquels Walter Sisulu. Un nouveau procès à lieu pour sabotages, trahison, liens avec le SACP, et complot d’une invasion du pays par l’étranger. Le « procès de Rivonia » débute le 9 octobre 1963 à Pretoria. Dans sa déclaration pour sa défense le 20 avril 1964, devant la Cour suprême à Pretoria, Nelson Mandela défend le recourt à la lutte armée. Les accusés sont condamnés (sauf un) à la détention à perpétuité.
Les inculpés du procès de Rivonia
L’infiltration des services secrets sud-africain avait porté de grands coup à la MK mais n’arriva pas à la déraciner. Commandée par le seul Joe Slovo (futur secrétaire général du SACP), la MK revendique entre 1961 et 1963 environ 134 actions amées. Le 1er mai 1963, le gouvernement prit un décret qui donnait le pouvoir à tout officier de police d’arrêter sans mandat toute personne soupçonnée de crime politique. Ceux qui étaient arrêtés pouvaient être détenus, sans procès, sans chef d’inculpation, sans possibilité de contacter un avocat pendant 90 jours, cette détention pouvant être prolongée indéfiniment.
Les membres présumés de la MK furent systématiquement battus et torturés à l’électricité, par étouffement, etc. Des peines (de cinq ans de prison jusqu’à la peine de mort) punissaient pour ceux qui « favorisaient les objectifs » des organisations interdites. La reproduction de toute déclaration d’un membre de l’ANC ou du SACP était ainsi interdite et la possession d’une publication interdite était passible de deux ans de prison. Et comme le disait Mandela: « Pendant les moments les plus tristes, Amnesty International ne faisait pas campagne pour nous parce que nous avions utilisé la lutte armée et cette organisation ne défendait aucune personne qui avait choisi la violence. »
Mandela dans sa cellule
En 1965, La MK installe des bases dans les pays limitrophes, dont notamment en Angola, et en Tanzanie où ses combattants sont formés par des instructeurs soviétiques et cubains. Certains élèves reçoivent une formation en URSS, en Allemagne de l’Est ou en Tchécoslovaquie. La MK relance la guérilla rurale et urbaine. L’action la plus dévastatrice survient le 20 mai 1983. Une voiture piégée vise siège voisin de la South African Air Force. La bombe explose quelques minutes trop tôt, tuant les deux combattantes de la MK et 15 autres personnes (dont 7 de la SAAF), en blessant 217 autres (84 de la SAAF). Le régime réplique par les escadrons de la morts qui qui assassineront des centaines de personnes et frapperont jusqu’en Europe (assassinat de Dulcie September en France en 1988).
Combattant de la MK en formation en Tanzanie
L’attentat de Churchstreet
En février 1985, le président Pieter Botha avait proposé à Nelson Mandela la liberté conditionnelle en échange d’un renoncement à la lutte armée, ce que Mandela avait rejeté en disant : « Seuls les hommes libres peuvent négocier ». En juin 1988 a lieu le concert hommage des 70 ans de Nelson Mandela à Wembley, regardé par six cents millions de téléspectateurs dans 67 pays, qui expose au niveau mondial la captivité de Mandela et l’oppression de l’apartheid. Mandela mis en résidence surveillée le 7 décembre 1988 et relâché le 11 février 1990. Mandaté par l’ANC, il entame en déclarant à la presse: « il n’y a aucune contradiction entre mon soutien à la lutte armée et ma demande de négociations. C’était la réalité et la menace de la lutte armée qui avaient amené le gouvernement au seuil des négociations. »
Il mène les négociations avec le gouvernement qui aboutissent au cessez-le-feu, au démantèlement du système d’apartheid. En 1993, il reçoit, avec le président de Klerk le prix Nobel de la paix. En 1994, il devient le premier président noir d’Afrique du Sud en 1994. A ce moment, l’ANC est encore sur la liste des « organisations terroristes » des USA. Elle n’en sera rayée qu’en 2008…
Winnie Mandela, Nelson Mandela, Joe Slovo