« – Qui est encore membre du Comité central? Où sont les postes d’émissions? Où sont les imprimeries? Parle! Parle! Parle!
Maintenant je peux compter les coups plus tranquillement, la seule douleur que je sente, c’est la morsure de mes dents sur mes lèvres.

– Déchaussez-le

C’est vrai, la plante des pieds est encore sensible, je le sens maintenant.
(…)


– Parle! Parle!

Je passe ma langue sur mes gencives et j’essaie de compter les dents cassées. Je ne peux pas achever mon calcul. (…)

C’est maintenant seulement un rêve, un cauchemar fiévreux, les coups tombent, après on me lave à l’eau et encore des coups et encore: « Parle! Parle! Parle! » et encore des coups, je n’arrive pas à mourir. Mère, père, pourquoi m’avez-vous fait si fort?»
(Ecrit sous la potence, pp 30-32)

« Un beau jour, aujourd’hui sera du passé, on parlera de la grande époque et des héros anonymes, qui créé fait l’histoire. Je voudrais que tout le monde sache qu’il n’y a pas de héros anonymes. Ils étaient des gens, ayant des noms, des figures, des désirs et des espoirs, et la douleur du dernier d’entre les derniers n’était pas moindre que celle du premier dont le nom demeurera. Je voudrais que tous ceux-là vous soient toujours proches comme des gens que vous auriez connus, comme des membres de votre familles, comme vous-même. » (Ecrit sous la potence, pp 81-82)

Julius Fučík nait dans une famille ouvrière, son père travaillant dans la métallurgie. En 1913, la famille Fučík déménage de Prague à Plzeň où Julius étudie au lycée public fait du théâtre amateur et s’intéresse à la littérature.

En 1920 il commence des études à Prague et rejoint les rangs du Parti tchécoslovaque social démocrate des travailleurs, avant de se retrouver dans ses courants de gauche. En mai 1921, ce courant fonde le Parti Communiste Tchécoslovaque (PCT). Fučík écrit pour le journal communiste local de Plzeň et, après avoir fini ses études, Fučík travaille comme éditeur au journal littéraire Kmen et s’engage dans le mouvement d’avant-garde artistique Devětsil. Il devient responsable pour le travail culturel au sein du PCT. En 1929, il rejoint le magazine littéraire Tvorba et écrit pour le quotidien communiste Rudé Právo. Il fait de la propagande pour des grèves en Bohême il sera arrêté à plusieurs reprises par la police politique tchécoslovaque.

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En 1930 et 1934, il visite l’Union soviétique et en avait dressé un portrait enthousiaste dans plusierus reportages et un livre: Au Pays où demain est déjà hier (V zemi, kde zítra již znamená včera) (1932). il devint le correspondant du Rude Pravo à Moscou et épouse, en 1938, Fučík épouse Augusta Kodeřičová, plus tard connu sous le nom de Gusta Fučíková.

À la suite des Accords de Munich, le gouvernement à Prague dissout le PCT en septembre 1938 qui continue ses activités dans la clandestinité. Après l’invasion nazie en mars 1938, Fučík continue de publier dans des journaux, surtout sur des sujets historiques et littéraires, mais il travaille surtout pour le PCT clandestin, assume la publication du Rudé Právo, et en devient, début 1941, membre du Comité central.

Le 24 avril 1942, il est arrêté avec six autres membres du Parti à Prague par la Gestapo, probablement par coïncidence, durant une descente de police. Fučík fut d’abord détenu à la prison de Pankrác à Prague où il fut interrogé et torturé. À cette époque il écrivit son Reportage écrit sous la potence (Reportáž psaná na oprátce, connu en France et en Belgique sous le titre Ecrit sous la potence), avec un crayon et du feuilles de papier à cigarette qu’un gardien lui fournit secrètement. Lui et un autre gardien conservèrent par la suite les documents, les 167 pages manuscrites, pendant la guerre.

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Julius Fučík fut lui emmené à Berlin-Plötzensee, et pendu le 25 août 1943 en même temps que 186 autres personnes ce jour-là. C’est au camp de concentration de Ravensbrück que Gusta Fučíková appris l’exécution de son mari. Rescapée des camps, elle reçu la visite du gardien qui avait sauvé le manuscrit d’Ecrit sous la potence.

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Le reportage traite de la période de l’arrestation et de la détention, de la résistance et de la trahison, des bourreaux et des victimes, parfois avec ironie, toujours avec une immense humanité, un grand esprit d’observation, un courage lucide, plein de confiance dans la cause communiste. L’essentiel de ces pages fut publié après la guerre sous forme d’un petit livre dont le succès fut énorme. Il s’agit de l’ouvrage en langue tchèque le plus traduit de par le monde (88 langues pour 300 éditions) et le plus publié au 20e siècle ; rien qu’en Tchécoslovaquie, il y eut 38 éditions.

L’impact de l’exemple et du livre de Julius Fučík explique le déchaînement réactionnaire contre sa mémoire : il aurait été un traître qui informait la Gestapo, il aurait été un lâche qui n’aurait pas obéi à une consigne de suicide au moment de l’arrestation, il ne serait pas mort car les nazis l’auraient protégé et emmené avec eux en Amérique latine après 1945, tout le récit n’aurait été qu’une invention de la propagande communiste et le livre lui même serait un faux, etc.

A Berlin, dans un de Pankow se dresse un mémorial à Julius Fučík. Composé de quatre colonnes, on peut voir sur l’une, son portrait, et sur une autre, en allemand, en russe et en tchèque, les dernières lignes qu’Écrit sous la potence adresse aux hommes : « Je vous ai aimé. Soyez vigilant »

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