Les Forces Démocratiques Syriennes (QSD) ne sont plus qu’à 700 mètres de la porte sud de Manbij. Depuis la reprise de l’opération de libération de Manbij (le 30 mai dernier), la stratégie des QSD a été d’encercler d’abord largement la ville pour permettre aux civils de fuir et pour étouffer les ressources de Daesh. La « phase 2 » de l’opération consiste depuis quelques jours à se rapprocher de tous les cotés de la ville. Les combats sont à présents durs, les islamistes revendiquent sur Twitter une attaque suicide qui aurait décimé plusieurs combattants QSD, mais cette info n’a pas été confirmée.

Des représailles semblent avoir eu lieu à Al-Bab où Daesh aurait enlevé plusieurs centaines de Kurdes pour leur faire payer la défaite imminente à Manbij. La carte ci-dessous date d’hier.

Manbij

Manbij

A Erbil (Capitale du Bashur et principale ville du PDK), la police kurde (asayish) accompagnée de son service de renseignement a perquisitionné les locaux de REPAK (Bureau de Relation des Femmes Kurdes, une ONG pourtant reconnue par le régime kurde en 2014) ont été perquisitionné au matin du 5 juin 2016. Les Asayish sont entrés lourdement armés, sans présenter ni mandat ni explications et ont immédiatement « arrêté » trois femmes qui étaient là (dont la présidente de l’association) et leur ont saisi documents d’identité et téléphones portables. Elles ont été emmenées en-dehors de la ville où elles ont été libérées au milieu de la route de Slemani et où leurs documents et téléphones leur ont été rendus, la police leur a fait comprendre qu’il leur était à présent interdit de rentrer à Erbil. Cette décision probablement illégale sera pourtant certainement appliquée… Ce n’est pas la première fois que REPAK est persécuté par la police kurde irakienne, probablement pour leurs liens avec d’autres associations de femmes kurdes et pour leur opposition à la politique turque dans la région. Les trois déportées sont à présent à Slemani, REPAK est de fait interdit, leurs bureaux sont aux mains de la police.

Dans le Kurdistan irakien (Bashur), l’ouest du pays (provinces de Erbil et Dihoq) ainsi que la présidence du pays sont sous la domination du PDK, un parti féodal et réactionnaire, et de leurs Peshmergas, les associations de gauche y sont interdites alors que dans la province orientale (Slemani, gouvernée par le PUK et ses Peshmergas) les associations de la gauche kurde sont plus ou moins tolérées lorsque le gouvernement régional kurde ne vient pas les frapper d’illégalité.

Les trois femmes membres de REPAK déportées à Slemani.

Les trois femmes membres de REPAK déportées à Slemani.

Au moins cinq personnes ont été blessées lundi dans une attaque à la voiture piégée visant le palais de justice de la petite ville kurde d’Ovacik. Une violente explosion s’est produite devant le complexe qui abrite aussi les logements des magistrats et d’autre personnels. L’attaque n’a pas été revendiquée dans l’immédiat mais elle est attribuée au PKK.

Le théâtre de l'explosion

Le théâtre de l’explosion

EDIT: L’action, qui visait non pas directement le palais de justice mais les logements de fonction de son personnel, a été revendiquée par le HBDH (Mouvement Révolutionnaire d’Unité Populaire), qui l’a dédiée au commandant HPG Baran Dersin et ses camarades, tués dans un bombardement le 17 septembre à Ovacik. Le HBDH regroupe le PKK et 9 organisations de la gauche révolutionnaire de Turquie et du Kurdistan (voir notre article).

Funérailles du commandant Baran Dersin

Funérailles du commandant Baran Dersin

Le Mont Shengal est toujours au centre des tensions entre les partis Kurdes progressistes -PKK et PYD- et le PDK qui gouverne le quasi-état kurde irakien. Dernier échange de cette guerre froide, le Conseil Provincial de Ninive a « exigé » que les guérillas du PKK se retirent du Mont Shengal, au motif qu’elles violeraient l’intégrité territoriale irakienne. Le PKK a répondu qu’il ne se retirerait pas de Shengal car cela se ferait au bénéfice de l’Etat Islamique.

Le Mont Shengal est habité par les Yézidis, une minorité kurde. Lorsque Daech a envahi le Mont à l’été 2014, des centaines de Yézidis ont été massacrés, des centaines de femmes ont été kidnappées et réduites à l’esclavage (nombre d’entre elles sont toujours détenues par Daesh). Les combattants « Peshmergas » du PDK -responsables de la protection des Yézidis- ont fuit avant même l’arrivée des troupes djihadistes, laissant 200.000 civils désarmés errer dans les montagnes avec Daesh aux trousses. Ce sont finalement les guérillas du PKK et du PYD qui leur ont porté secours, les guérillas sont restées à Shengal et sont à présent la seule barrière entre les islamistes qui occupent Mossoul et le Rojava. Depuis que le Mont a été totalement libéré il y a quelques mois, le PDK tente de faire expulser le PKK, sans succès jusque là.

Carte du Mont Shengal

Carte du Mont Shengal

L’un des principaux objectifs des Forces Démocratiques Syriennes à l’heure actuelle est toujours l’unification des cantons du Rojava puisque le canton d’Afrin est toujours séparé des deux autres cantons de Kobané et Ciziré. La Turquie refuse que les QSD approchent de la bandelette de territoire comprise entre Azaz et Jarabulus le long de la frontière turque. La nouvelle stratégie est donc à l’heure actuelle de joindre les cantons « par le sud » en prenant des villes difficilement accessibles à l’artilerie turque. En pratique, cette opération consiste en la libération de Manbij (qui sera libérée et administrée par un « Conseil Militaire de Manbij » arabe pour éviter toute accusation d’occupation kurde). Les QSD progresseront ensuite en ligne droite vers l’ouest, à travers Qabbasin et Al-Bab (toutes deux sous occupation de Daech), pour finalement rejoindre Mare, si tout se passe comme prévu.

Aujourd’hui, les QSD ont terminé d’encercler Manbij et poursuivent leur progression vers l’ouest alors que des civils ont réussi à s’échapper de la ville et ont trouvé protection chez les QSD. Sur la carte: QSD en jaune, Daech en noir, le régime en rouge et la FSA en vert.

La situation actuelle à Manbij.

La situation actuelle à Manbij.

Le 7 juin, une attaque à la voiture piégée visant la police anti-émeute a fait 11 morts à Istanbul, dont 7 policiers et 4 civils. TAK a finalement revendiqué l’attaque, en accusant l’état turc d’avoir sous-déclaré le nombre de policiers tués dans l’attaque. TAK termine son communiqué en s’adressant aux touristes « vous n’êtes pas des cibles mais ce pays n’est pas sûr pour vous » puis « certains peuvent regretter la paix, mais nous commençons tout juste la guerre ».

L'attaque du 7 juin à Istanbul.

L’attaque du 7 juin à Istanbul.

Depuis près de trois mois, la frontière de Semalka, entre le Kurdistan Sud (Bashur) et le Rojava était fermée. En causes, les tensions politiques entre le PDK (Parti Démocratique du Kurdistan, droite) et la gauche kurde (PKK et PYD), le premier accusant les seconds « d’arabiser » le Rojava. Le PDK est en outre très favorable au régime turc qui bombarde les bases de la guérilla dans les Monts Qandil. La fermeture de Semalka n’a pas manqué de provoquer d’autres tensions à l’intérieur du Bashur où toute l’opposition kurde (PUK et Goran en tête) critiquait l’embargo imposé alors que le Rojava souffre d’une crise économique qui s’ajoute à la pénurie et à la guerre contre l’Etat Islamique. Suite à la visite à Kobané du chef des renseignements kurdes irakiens (PUK) il y a deux jours, la frontière de Semalka aurait finalement été rouverte aux passages humanitaires, mais l’administration autonome du Rojava et du Nord de la Syrie a nié ce matin cette ouverture. A l’heure actuelle, il est difficile de savoir si la frontière est bien ouverte et qui peut la franchir, mais il y a du mouvement.

La frontière de Semalka

La frontière de Semalka

Un véhicule bourré d’explosifs a tenté de forcer un barrage de sécurité devant le siège de la police de la ville de Midyat, dans la province kurde de Mardin. Les policiers en faction ont ouvert le feu sur le chauffeur et l’explosion est survenue avant que la voiture n’ai atteintavant d’avoir atteint l’immeuble. Un policier et deux civils ont été tués dans l’explosion, et une trentaine de personnes blessées. Une épaisse colonne de fumée s’élevait du bâtiment de la direction de la sûreté qui a subi d’importants dégâts tout comme les bâtiments avoisinants alors que les pompiers déployaient d’importants moyens sur place.

Le siège de la police de Midyat

Le siège de la police de Midyat

Sept policiers et quatre civils ont perdu la vie dans une attaque, qui s’est produite à Beyazit, secteur fréquenté par des dizaines de milliers de personnes tous les jours, a également fait 36 blessés dont trois sont dans un état critique. Une voiture piégée actionnée à distance a explosé à une heure de pointe aux alentours de 05H40 GMT au passage d’un bus transportant de membres de la police anti-émeute. L’explosion s’est produite près de la station de tramway de Vezneciler, proche des principaux sites touristiques du centre historique, dont la mosquée Suleymaniye. La station de tramway a été fermée. Cette zone est également à proximité du Grand Bazar, important site touristique de la mégapole turque et de l’Université d’Istanbul, la plus grande de la ville. Les examens ont été reportés dans cet établissement. L’explosion a soufflé les devantures des magasins avoisinants, et plusieurs voitures ont été endommagées.

Le modus operandi de l’attaque de ce mardi à Beyazit rapelle celui des deux autres attaques à la voiture piégée ont frappé en février et mars Ankara, faisant une soixantaine de victimes. Ils ont été revendiqués par les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), un groupe issu du PKK. La police stambouliote a arrêté quatre suspects.

Le théâtre de l'attaque de ce matin à istanbul

Le théâtre de l’attaque de ce matin à istanbul

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Un IED, installé sous une plaque d’égout, a explosé au passage d’un véhicule blindé de la police qui patrouillait lundi à Silopi, dans le district de Sirnak. Plus tôt dans la journée, près de la ville de Van, un autre IED a été déclenché au passage d’un blondé de la police, tuant ses deux occupants.

Un blindé de la police en patrouille à Sirnak

Un blindé de la police en patrouille à Sirnak