Plusieurs dizaines de milliers de personnes s’étaient rassemblées sur les bords du lac Harsadi pour assister à la cérémonie de l’Irreecha qui marque pour les Oromo la fin de la saison des pluies. De nombreux participants brandissaient leurs bras croisés au dessus de la tête, un geste devenu le symbole de la contestation oromo face aux autorités éthiopiennes. Des dirigeants oromo liés au gouvernement ont été pris à partie par la foule, qui a tenté de prendre d’assaut leur tribune. Les manifestants ont lancé des pierres et des bouteilles sur les forces de sécurité, qui ont riposté d’abord à coups de bâton, puis avec des gaz lacrymogènes. Les tirs de gaz lacrymogène ont provoqué un mouvement de panique causant un nombre inconnu de victimes (peut-être plusieurs dizaines).

Le rassemblement pour l’Irreecha

Le rassemblement pour l’Irreecha

La police a à nouveau tiré à balles réelles contre des manifestants ces derniers jours, faisant au moins une centaine de morts (selon Amnesty). Les tensions proviennent à nouveau de la tentative du gouvernement éthiopien d’étendre la capitale du pays en expropriant les terres des paysans oromos, des tensions qui avaient déjà fait 400 morts il y a quelques mois. Les manifestations ont été réprimées dans l’Oromia et dans l’Amhara. Dans l’Amhara, les manifestations étaient principalement dirigées en opposition à des expropriations alors que dans l’Oromia, elles demandaient la libération de prisonniers politiques (qui luttaient également contre les expropriations). Dans la capitale, Addis-Abeba, 500 manifestants ont bravé le danger de manifester ce samedi, ils ont été brutalement dispersés mais il n’y a pas eu de tir à balles réelles. Le gouvernement éthiopien a demandé aux forces de sécurité de faire usage de « tous les moyens nécéssaires » pour réprimer les manifestations. Internet a été bloqué durant le wee tout comme une partie du réseau téléphonique, ces blocages semblent avoir été levés à présent.

Manifestation anti-gouvernementale le 6 août

Manifestation anti-gouvernementale le 6 août

Déclenchées en novembre dans la région de l’Oromia, les manifestations antigouvernementales ont fait plus de 400 morts, selon un rapport publié jeudi 16 juin, par l’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch, qui dénonce l’usage répété par les forces de sécurité éthiopiennes de tirs à balles réelles. Un plan d’urbanisme controversé d’extension des limites municipales de la capitale Addis-Abeba avait suscité des craintes d’expropriation de fermiers oromos, le plus important groupe ethnique du pays, qui étaient descendus dans la rue (voir notre article). Le rapport fait état de 400 personnes tuées, de dizaines de milliers d’arrestations et évoque des cas de tortures et de viols.

Pour les autorités, le bilan officiel de ces manifestations est de 173 morts, dont 28 policiers et officiels. Si le projet contesté a été abandonné en janvier, cela n’a pas suffi à calmer les manifestants. Le premier ministre s’est excusé en mars devant le Parlement pour n’avoir « pas suffisamment écouté les doléances du peuple », mais a rejeté la responsabilité des violences sur certains manifestants. Début juin, Amnesty international avait aussi publié un rapport dénonçant la répression en Ethiopie, notamment l’usage de la loi anti-terroriste contre des opposants pacifiques (voir ici).

Manifestation après la mort d’un Oromo tué dans le village de Yubdo

Manifestation après la mort d’un Oromo tué dans le village de Yubdo

Un projet d’agrandissement programmé de la capitale, Addis Abeba, suscite des craintes d’expropriation de terres. Au moins 75 personnes auraient été tuées ces dernières semaines par les forces de sécurité éthiopiennes qui ont ouvert le feu contre des manifestations dans les zones de Shewa et Wollega, à l’ouest d’Addis Abeba, dans la région de l’Oromia. Le gouvernement éthiopien n’a pas immédiatement réagi, mais son bilan officiel était jusque-là de cinq morts. Les manifestations , dans la région de l’Oromia, qui entoure Addis Abeba, avaient commencé le mois dernier pour protester contre un projet d’agrandissement programmé de la capitale qui a suscité des craintes d’expropriation de terres dans des zones traditionnellement occupées par le peuple oromo.

Obsèques le 17 décembre 2015 dans le village de Yubdo d’un homme tué lors de manifestations dans la région d’Oromia

Obsèques le 17 décembre 2015 dans le village de Yubdo d'un homme tué lors de manifestations dans la région d'Oromia

La répression contre les étudiants appartenant à l’ethnie Oromo, qui manifestent dans le sud de l’Ethiopie contre l’accaparement des terres par le gouvernement central, a fait au moins neuf mort dans plusieurs villes universitaires de la région d’Oromia. Les autorités reconnaissent que cinq personnes ont été tuées à Ambo, à 125 km au sud de la capitale, et trois à Bidire, à 415 km d’Addis Abeba. Des témoins parlent de dizaines de morts.