La CGT a saisi la justice pour dénoncer la mise en place d’un système visant à infiltrer le syndicat et surveiller le personnel d’un groupe de maisons de retraite. Contrats de travail en poche, les faux salariés recrutés notamment comme brancardier ou agent d’entretien ont été envoyés en observation à Lyon et dans d’autres sites. Ces acteurs de métier ont été embauchés en 2010 au sein de l’exploitant de maisons de retraite et cliniques privées Orpea-Clinea, n°2 du secteur en Europe. «Sous couvert de gestion préventive du risque social, le but était de prendre le pouls social, repérer les hostilités à la direction et ensuite approcher le syndicat qui semblait le plus dangereux», rapporte l’avocat de la CGT.
Première étape pour l’ »implant »: se fondre dans la masse, puis «copiner avec les collègues», et enfin «prendre la défense de leurs intérêts jusqu’à se faire élire aux élections professionnelles», détaille l’avocat. Un contrat avait été passé en 2010 entre le groupe et la société de renseignements privée GSG, spécialisée dans le «conseil en gestion de risque social». Facturé 12.500 euros HT par mois au groupe, chaque espion rendait compte de ses observations par des rapports. Dans l’un d’eux, pour «favoriser la confiance de ces collègues», un espion fait savoir qu’il va «les convier à déjeuner chez lui la semaine prochaine, sorte de pendaison de crémaillère». Pauses cafés, tractage, mécontentement, jeux de pouvoir…. Les espions relevaient de manière quotidienne les faits et gestes des salariés en prenant un soin particulier à noter les activités syndicales, ou relevant des faits comme la consommation de cannabis par un salarié.
Orpea-Clinea prétend qu’il ne s’agissait que d’ »une étude sur les risques psycho-sociaux» et le climat social dans le cadre d’accords sur les conditions de travail, étude basée sur «l’observation in situ», en «immersion totale», et dont «la pertinence reposait en grande partie sur le caractère anonyme des intervenants». L’espionnage de salariés n’est pas une pratique nouvelle, mais faire appel à des comédiens apparaît comme une méthode assez inédite, les informations étant plutôt glanées sur les réseaux sociaux.