Dès la levée du confinement sanitaire, les manifestations du vendredi ont repris dans plusieurs régions (wilayas) d’Algérie, notamment en Kabylie. A Bejaia, les forces de l’ordre ont essayé de disperser les manifestants avec des bombes lacrymogène et des balles en caoutchouc, engendrant des affrontements au centre-ville sur le chemin menant à la place Saïd Makbel. Dans la wilaya de Tizi-Ouzou, un dispositif policier a été mis en place au centre-ville pour empêcher les manifestants d’avancer, mais ces derniers ont emprunté plusieurs autres chemins menant vers le commissariat central pour exiger la libération des détenus d’opinion emprisonnés actuellement. Dans la wilaya de Bouira, les manifestants ont défilés, reprenant les slogans du hirak contre le système, et en appelant à la libration des détenus d’opinion. Des dizaines d’arrestations ont été signalés aussi dans plusieurs autres wilayas, à l’instar d’Alger, ou d’Annaba, ainsi qu’en Kabylie. Dans la ville de Constantine, un fort déploiement de la police a empêché l’organisation de la marche, notamment après des arrestations effectués dès la matinée.

La manifestation à Bejaia

À Béjaïa, dans le nord-est du pays, la police a empêché des manifestants de se rassembler vendredi en soutien aux dizaines de prisonnier du Hirak, le mouvement populaire de contestation qui a commencé en février 2019 (voir notre article). Près d’une vingtaine de personnes ont été arrêtées, dont deux qui sont en garde à vue dans un commissariat. Ils devait être présenté aujourd’hui devant un juge. La veille, une manifestation s’est tenue à Tigzirt en solidarité avec les prisonniers du Hirak.

Manifestation du Hirak, le 20 décembre à Alger

La pandémie de Covid-19 n’empêche pas la justice algérienne de punir militants du « Hirak »: une figure de la contestation a écopé lundi d’un an de prison ferme, et d’autres risquent de lourdes peines alors que le mouvement est en suspens. Abdelouahab Fersaoui, président du Rassemblement-Actions-Jeunesse (RAJ), une association citoyenne à la pointe du mouvement (« Hirak ») populaire antirégime, a été condamné pour « atteinte à l’intégrité du territoire national ». L’universitaire de 39 ans est en détention provisoire à la prison d’El Harrach à Alger depuis son arrestation le 10 octobre, alors qu’il participait à un sit-in de soutien aux détenus d’opinion. Quant au militant Karim Tabbou, une figure emblématique de la contestation, déjà condamné à un an de prison ferme, il doit comparaître le 27 avril dans un autre procès, accusé cette fois d' »atteinteau moral de l’armée ». Si le président Abdelmadjid Tebboune a gracié la semaine dernière plus de 5.000 prisonniers, cette mesure de clémence n’a bénéficié à aucun des 44 détenus du « Hirak ».

Manifestation du Hirak (archives)

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La marche des enseignants, organisée ce lundi à Alger, à l’appel de la coordination nationale des enseignants du primaire, a été réprimée par la police. Quelque 300 enseignants du primaire étaient regroupés tôt le matin à la place des Martyrs avant d’entamer la marche vers le Palais du Gouvernement. Mais les forces de l’ordre étaient décidés à empêcher la marche des enseignants, ce qui a provoqué quelques affrontements. Les enseignants du primaire, venus de plusieurs régions du pays, étaient déterminés à aller vers le Palais du gouvernement, une action par laquelle ils voulaient prouver la représentativité de leur coordination et la légitimité de leur démarche. Déterminés, les enseignants contestataires ont réussi à franchir le premier obstacle pour se lancer dans les ruelles de La Casbah, alors que d’autres collègues ont marché vers la rue Ben M’hidi, dans l’espoir de se retrouver rue Docteur Saâdane. Beaucoup d’enseignants ont été confinés au niveau des escaliers du Docteur Saâdane par les forces de l’ordre qui ont procédé à quelques interpellations. Pour rappel, les enseignants dénoncent la détérioration de leurs conditions socioprofessionnelles, la dégradation des services publics et le désengagement de l’Etat du secteur de l’éducation.

Répression des enseignants à Alger

L’élection présidentielle du 12 décembre 2019 n’a guère desserré l’étau sécuritaire sur la population algérienne. En dépit des appels au dialogue du président contesté Abdelmadjid Tebboune, les autorités algériennes ont arrêté des dizaines de militants qui ont participé à des manifestations pacifiques. D’impressionnants dispositifs policiers quadrillent les rues, des barrages filtrent les entrées de la ville chaque jour de manifestation, les têtes d’affiche du Hirak sont arrêtées, souvent avant même les manifestations. Début janvier cependant, 76 manifestants incarcérés ont été libérées attendant de comparaître devant les tribunaux algériens. Mais si des personnes ont parfois été acquittées, la plupart restent en liberté provisoire, en attente de leur jugement. Il s’agit surtout des personnes qui étaient poursuivies pour port du drapeau amazigh. 35 personnes incarcérées sont des détenus d’opinion antérieurs au Hirak (l’une d’entre elles est morte en prison en juin dernier, après y avoir contracté une infection lors de conditions de détention désastreuses), et une centaine de détenus du Hirak sont toujours derrière les verrous. Le décompte est très difficile en raison du flux continu des arrestations et des extraordinaires disparités du traitement juridique des affaires dans le pays.

Plusieurs procès et rendus de verdicts, attendus en février, seront éclairants sur les dispositions du pouvoir à l’égard du mouvement. Mercredi 5 février, la justice décidera du sort de 33 manifestants d’Aïn Temouchent (à 80 km à l’ouest d’Oran) arrêtés le 13 décembre, au lendemain du scrutin présidentiel. Le procès de 20 des 76 manifestants remis en liberté se tiendra, lui, dimanche prochain, le 9 février. Si des personnes ont été acquittées, plusieurs lourdes condamnations ont récemment été prononcées. Le journaliste de la webradio Sarbacane Abdelkrim Zeghileche a ainsi écopé, le 21 janvier, de six mois ferme de prison, pour avoir émis sans autorisation et pour offense au chef de l’État. Il doit également être jugé pour « attroupement non armé », mercredi 5 février. Le syndicaliste et défenseur des droits humains Kaddour Chouicha purge, lui, une année de prison. Il attend son procès en appel. Et le sort de plusieurs personnalités du mouvement, poursuivies pour atteinte à l’intégrité nationale, inquiète. Ceux, en particulier, de l’activiste Samir Benlarbi, du journaliste Fodil Boumala, de l’ancien secrétaire général du parti d’opposition Front des forces socialistes Karim Tabbou, voire du président du Rassemblement actions jeunesse, Abdelwahab Fersaoui. Autant de figures incarcérées depuis septembre ou octobre 2019.

Manifestation du Hirak, le 20 décembre à Alger

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La police algérienne a violemment dispersé hier mercredi, dans l’après-midi, dans le centre d’Alger, une large manifestation de protestation contre l’élection présidentielle, faisant plusieurs blessés, à moins de 24 heures d’un scrutin massivement rejeté par la rue. Plus de 200 policiers anti-émeute, armés de boucliers et de matraques, ont chargé près d’un millier de manifestants encore rassemblés devant la Grande Poste, haut lieu de la contestation dans la capitale, survolée par un hélicoptère.  La charge a provoqué un mouvement de foule et au moins huit personnes ont été blessées dans la cohue, dont cinq ont été évacuées sur des brancards ou par ambulance. La police a procédé à une trentaine d’arrestations. La foule a été dispersée mais une fois le gros des policiers partis, quelque 300 jeunes sont revenus scander des slogans anti-élections, déclenchant une nouvelle charge et de nouvelles arrestations.

Les forces de l’ordre avaient auparavant, durant la journée, tenté vainement de repousser les plusieurs milliers de protestataires qui avaient fini par forcer un cordon de police pour se rassembler devant le bâtiment de la Grande Poste, au cœur d’Alger, lieu traditionnel de rassemblement du Hirak. Ce mouvement populaire de contestation du régime, né le 22 février, exige le démantèlement total du système politique en place depuis l’indépendance de l’Algérie (1962) et refuse un scrutin perçu comme une manœuvre devant lui permettre de se régénérer. Toute manifestation est strictement interdite à Alger depuis 2001 et depuis février la police ne tolère que les cortèges hebdomadaires du Hirak le vendredi, et dans une moindre mesure ceux des étudiants le mardi. Des manifestations réclamant l’annulation du scrutin se sont aussi déroulé mercredi en province, notamment à Constantine (2e ville du pays), Bejaïa, Tlemcen ainsi qu’à Bouira et Tizi Ouzou.

Dans le centre d'Alger hier

Voici les initiatives prises lors du mois d’agitation pour Georges Abdallah: 30/10: Affichages en Seine-Saint-Denis ; 29/10: Tags à Bruxelles ; 29/10: Rassemblement à La Haye ; 29/10: Stand d’information à Paris ; 28/10: Initiative à Saïda ; 28/10: Affichages à Milan ; 27/10: Rassemblement à Beyrouth ; 26/10: Manifestation et tags à Lille ; 26/10: Rassemblement à Montréal ; 24/10: Rassemblement à Athènes ; 24/10: Tags à Clermont-Ferrand ; 24/10: Initiative à Toulouse ; 24/10: Rassemblement à Patra (Grèce)21-22-23/10: Trois journées solidaires à Bir-Zeit23/10: Soirée de soutien à Montréal23/10: Affichages à Paris et en Seine-Saint-Denis23/10: Rassemblement à Milan22/10: Initiative à Alger20/10: Intervention à Thessalonique20/10: Initiatives à Tripoli ; 19/10: Initiative à Göteborg ; 19/10: Soirée de soutien à Genève ; 19/10: Rassemblement et tags à Tunis ; 19/10: Initiatives à Beyrouth ; 19/10: 500 manifestants à Lannemezan ; 19/10: Initiative à Rafah ; 19/10: Rassemblement à Istanbul.

18/10: Tags à Milan ; 18/10: Grande soirée de soutien à Toulouse ; 18/10: Affichages et stickers à Zürich ; 17/10: Initiative à La Corogne ; 17/10: Soirée de soutien à Hambourg15/10: Stand d’information à Toulouse14/10: Tags à Genève14/10: Initiative à l’ambassade de France à Beyrouth13/10: Nouvelle vidéo “Georges Ibrahim Abdallah, prisonnier des raisons d’Etats”12/10: Soirée de soutien à Montpellier11/10: Rassemblement à Bruxelles11/10: Soirée de soutien à Bordeaux11/10: Salut solidaire de Gaza10/10: Conférence à Nanterre9/10: Débat à Toulouse9/10: Intervention à Bruxelles6/10: Stand et expo à Charleroi5/10: Intervention à Zürich5/10: Rassemblement à Göteborg4/10: Banderole et fumi à Liège3/10: Soirée solidaire à Toulouse2/10: Tag géant et collages à Toulouse01/10: Manifestation à Zürich29/9: Brunch à Toulouse26/9: Conférence à Genève24/9: Stand d’information à Toulouse21/9: Collage géant à Bruxelles21/9: Conférence à Bruxelles.

Manifestation pour la libération de Georges Abdallah à Lannemezan

Lire l’appel au mois d’agitation

Jeudi dès 18h, les Algérois se sont regroupés aux alentours de la place de la Grande-Poste, en scandant des slogans hostiles au régime et à la tenue de l’élection présidentielle. Ne s’attendant probablement pas à une mobilisation forte, dès lors que les entrées de la capitale avaient été quadrillées par des barrages filtrants, aucun dispositif de sécurité n’était encore mis en place à l’heure du départ de la manifestation.  Des policiers, en uniforme et en civil, ont procédé, néanmoins, à des dizaines d’interpellations, ciblant les gens ne résidant pas à Alger. La tentative sera vaine, les manifestants ne quitteront pas les lieux.

À 20h30, les forces anti-émeutes repousseront brutalement les manifestants, les empêchant d’occuper la place de la Grande-Poste, mais les manifestants resteront malgré tout jusque tard dans la nuit en scandant « Les martyrs l’ont arrachée (l’indépendance du pays), les traîtres l’ont vendue » en déployant l’emblème amazigh (interdit) aux côtés du drapeau national.

La manifestation de jeudi à Alger

Depuis quelques jours, les autorités algériennes procèdent à des nombreuses arrestations de manifestants ou de figures du mouvement populaire. Le but recherché est d’affaiblir un mouvement populaire qui ne perd rien de sa vigueur. Ainsi l’arrestation spectaculaire du militant politique Karim Tabbou, survenue la semaine dernière, quelques heures seulement après un discours musclé du chef d’état-major de l’armée. La réponse des Algériens ne s’est pas fait attendre : ils se sont mobilisés pour condamner ces arrestations suivies d’emprisonnement. Hier encore, plusieurs manifestants ont été arrêtés dès le début de la marche des étudiants. Ce qui n’a pas empêché une forte mobilisation. En effet, comme vendredi dernier, des milliers d’étudiants et de citoyens sont sortis manifester pour dire non à l’élection présidentielle et pour insister sur le rejet du système.

Arrestation en Algérie

 

La répression du mouvement populaire de protestation s’intensifie en Algérie et revêt différentes formes. Il y a d’abord les restrictions sur la liberté de circuler qui empêchent les Algériens et Algériennes de rejoindre la capitale pendant les manifestations du vendredi, les dispositifs sécuritaires intra-muros pendant les marches à Alger et les arrestations de manifestants opérées dès les premières heures des manifestations pourtant pacifiques. Il y a aussi la censure par des blocages internet que subissent les médias d’information. Il y a ensuite les poursuites à l’encontre des personnes ayant exprimé leur opposition comme tout récemment l’avocat Ramzi Chekhab poursuivi pour incitation à attroupement par le parquet de Khenchela rien que pour avoir exprimé sur sa page Facebook son opposition au 5e mandat de Bouteflika.

Il y a enfin les poursuites contre des manifestants ayant porté l’emblème Amazigh, alors qu’aucune disposition pénale ne sanctionne le port d’un emblème autre que l’emblème national. Plus de 60 personnes sont emprisonnées pour avoir exhibé cet emblème publiquement. Des peines sont prononcées. Deux jeunes à Chlef sont condamnés à deux mois de prison avec sursis après un séjour carcéral. Hier, à Annaba, le représentant du ministère public a requis 10 ans de prison ferme contre le jeune Nadir Fetissi.

Policiers algériens face aux manifestants le 12 avril

 

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