Le journaliste turc Furkan Karabay, arrêté lors d’une opération à l’aube le 15 mai en raison d’une vidéo YouTube et de publications sur les réseaux sociaux, a été libéré ce mardi après que la 25e Cour d’assises d’Istanbul a ordonné sa remise en liberté lors de sa première comparution. Condamné à trois peines distinctes pour « insulte au président », « insulte à un agent public » et « mise en danger de fonctionnaires engagés dans la lutte antiterroriste », Karabay a toutefois été acquitté pour d’autres accusations visant deux magistrats. Quelques heures après la décision, le parquet a immédiatement fait appel, mais la procédure étant en cours, Karabay a pu sortir de la prison de Marmara à Silivri, où il a retrouvé ses proches et collègues, célébrant la fin de 201 jours de détention.

La libération conditionnelle de Mehmet Sait Yıldırım, prisonnier malade détenu depuis 31 ans à la prison de Buca Kırıklar, a été une nouvelle fois reportée, cette fois jusqu’au 27 août 2026. La décision a été justifiée par le comité de surveillance au motif que le détenu « ne montrait pas de bonne conduite » et « ne faisait pas preuve de remords ». Son avocate, Fatma Demirer, dénonce une décision arbitraire, soulignant que Yıldırım, âgé de 74 ans et souffrant de graves problèmes de santé, dont une maladie cardiaque, est confiné en cellule individuelle depuis huit ans et que des échanges téléphoniques avec sa famille ont été utilisés à tort pour bloquer sa libération. Condamné à perpétuité en 1995 pour son rôle important au sein du PKK, Yıldırım a affirmé qu’il souhaitait retrouver sa liberté « sans que son honneur soit bafoué ».

En grève de la faim depuis le 11 mars 2025 pour exiger la fermeture des prisons de type puits et la fin des violations des droits humains à la prison de Kırıkkale, Ayberk Demirdögen a été transféré de force à l’hôpital le 21 novembre après avoir annoncé qu’il cesserait également de boire de l’eau et du sucre. Emmené menotté sur une civière et maintenu 5H30 à l’hôpital, il a refusé tout traitement et a été renvoyé le jour même en détention. Son état de santé est décrit comme critique : perte de connaissance récente, incapacité à marcher, douleurs thoraciques et cardiaques, faiblesse extrême et gonflement persistant de la cheville. Ses avocats exigent que les autorités acceptent ses revendications, mettent fin aux abus signalés à Kırıkkale et transfèrent huit autres détenus de la prison de type puits d’Antalya vers un établissement ordinaire.

C’est au tour de la Turquie d’agir, a déclaré un des dirigeants de l’ex-PKK. Ce dernier n’ira pas plus loin dans les négociations de paix avec Ankara : « Nous avons fait ce qu’on nous a demandé, a déclaré le commandant Amed Malazgirt. C’est au tour de l’État turc. En Turquie il y a eu des discussions mais aucune avancée concrète (…). Désormais nous attendons que l’État turc prenne des mesures et c’est à lui de faire les prochains pas ». Le chef militaire de l’ex-PKK, rencontré samedi dans les montagnes du Kurdistan dans le nord de l’Irak, salue la création d’une commission transpartisane au sein du Parlement turc : « L’État turc a fait un geste positif, mais ce n’est pas la seule action nécessaire », juge-t-il tout en précisant « suivre de près » ses travaux. « Nous avons deux revendications. Premièrement, la libération du leader Apo. Faute de quoi, le processus ne réussira pas. La deuxième est la reconnaissance constitutionnelle et officielle du peuple kurde en Turquie ». Le responsable a tenu également à clarifier la notion de désarmement après une opération symbolique, en juillet, lors de laquelle une trentaine de combattants de l’ex-PKK avaient brûlé leurs fusils (voir notre article). « C’est l’État turc qui a promu ce récit affirmant qu’il nous avait appelés à déposer nos armes : nous, nous nous sommes engagés à ne pas les utiliser contre l’État turc. Il y a une différence et ce que nous avons fait correspond à ce que le leader Apo a demandé », a-t-il déclaré. « Nous avons dit que nous n’utiliserons pas les armes contre l’État turc et jusqu’à ce jour, nous ne les avons pas utilisées », a-t-il relevé.

À propos d’Abdullah Öcalan, un autre commandant, Serdar Mazlum Gabar, a fait valoir que « Nous visons d’abord la reconnaissance du droit à l’espoir et ensuite la liberté totale de la direction (…) Par liberté, nous entendons qu’il soit libre d’agir, de diriger son mouvement et de s’intégrer au peuple ». Cette notion de « droit à l’espoir » avait été avancée l’an dernier par le principal allié du gouvernement turc à l’initiative du processus de paix. « Nous pouvons garantir la sécurité de notre direction », poursuit-il en suggérant dans un premier temps « une assignation à résidence » d’Abdullah Öcalan. Une délégation de la commission parlementaire chargée du processus de paix a rendu visite le 24 novembre pour la première fois à Abdullah Öcalan.

Militants et militantes du PKK

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Après 245 jours de grève de la faim, le prisonnier politique Fikret Akar a obtenu gain de cause : il a été transféré de la prison d’isolement de haute sécurité de Çorlu-Karatepe, une prison de type puits, vers la prison de type F n°2 de Tekirdağ. Ce transfert constitue une nouvelle victoire dans la lutte menée depuis longtemps par des prisonniers révolutionnaires contre ces prisons qui imposent des conditions particulièrement inhumaines. Alors que son état s’était récemment aggravé et qu’il exprimait la crainte d’être nourri de force — affirmant préférer mourir plutôt que subir cette procédure —, sa demande a finalement été acceptée. Cette avancée fait suite à celle de Serkan Onur Yılmaz, qui a suspendu sa grève de la faim après 375 jours (voir notre article). Après ces victoires, l’attention se tourne désormais vers Ayberk Demirdögen et d’autres grévistes de la faim dont l’état est critique, tandis que l’appel à mettre fin aux prisons d’isolement reste central pour ces prisonniers et leurs soutiens.

Lors de la mobilisation organisée dans la soirée du 25 novembre à Taksim pour la Journée internationale de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, quatorze personnes ont été interpellées. Les organisatrices dénoncent une intervention policière visant deux personnes au motif qu’elles portaient un drapeau trans, ce qui aurait entraîné le nassage d’une cinquantaine de manifestantes et des fouilles forcées avant la dispersion. Certaines interpellées ont été conduites à l’hôpital avant leur transfert vers un commissariat.

Mardi 25 novembre à Istanbul, la police turque a mené une descente violente dans le centre culturel Idil Kültür Merkezi, où travaille le groupe musical Grup Yorum, et dans le foyer pour personnes âgées Sevgi Erdoğan Vefa Evi et des habitations privées. La police est entrée en brisant et incendiant des éléments du centre culturel et en saccageant le foyer pour personnes âgées, puis a arrêté neuf personnes : Turgut Onur, Hüseyin Kütük, Yeliz Kütük, Köksal Taş, Vedat Doğan, Şura Başer, Beyza Gülmen, Can Kaba, Barış Yüksel.

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À l’occasion du 25 novembre, la Journée internationale contre les violences sexistes et sexuelles, des prisonnières membres ou sympathisantes du TKP/ML ont publié une déclaration. Dans la déclaration envoyée au nom des Tutsak Partizanlar (Partisan·es prisonnier·es) depuis toutes les prisons, il est dit : « Nous, les femmes, sommes prêtes — et devons être prêtes — à retenir notre corps et notre âme dans le dernier et plus grand combat de la guerre de classes, qui est également la libération de toute l’humanité, afin de briser toutes les chaînes qui nous entravent. Nous n’avons jamais reculé, même un instant, dans la lutte contre ce système qui assombrit nos âmes, et nous ne reculerons pas. À toutes les époques de l’histoire, avec notre patience, notre volonté et notre résistance, nous n’avons jamais renoncé à écrire des épopées par des résistances qui ont fait des montagnes leur refuge, et nous ne renoncerons jamais. »

Le prisonnier révolutionnaire Serkan Onur Yılmaz a entamé une grève de la faim illimitée le 11 novembre 2024 pour demander la fermeture des prisons de type « puits » et son transfert vers une prison ordinaire où se trouvent ses camarades. Après 213 jours, sa demande de transfert a été acceptée et il a été déplacé vers la prison de type F de Bolu. Yılmaz a ensuite poursuivi son action en soutien aux détenus restés dans les prisons de type « puits » qui sont connues pour leurs conditions de détention particulièrement inhumaines. Après 375 jours de grève de la faim, Yılmaz a suspendu sa grève le 21 novembre 2025, tout en soulignant son engagement à poursuivre le combat et soutenir celui de ses camarades toujours mobilisés.

Ayberk Demirdögen, engagé dans une grève de la faim illimitée, connait une forte dégradation de son état de santé, évoquant des symptômes compatibles avec une possible crise cardiaque, dont pertes de connaissance, douleurs thoraciques, troubles respiratoires et baisse sévère du pouls. Ses soutiens indiquent qu’il a été inconscient plusieurs heures et souffre de problèmes de sommeil depuis plusieurs jours, bien que ses constantes vitales se soient récemment stabilisées. Ils affirment que les autorités turques n’ont pas répondu à ses demandes concernant des transferts et le droit à des visites, tandis qu’ils appellent à développer la solidarité avec les différents prisonniers en grève de la faim contre les prisons de type puits (voir notre article).

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