Ces derniers jours, de nouvelles révoltes de prisonniers ont éclaté dans différentes prisons de Belgique, d’Iran et d’Argentine.

Mercredi 25 mars, une révolte a éclaté à la prison d’Arlon lorsque 30 prisonniers ont refusé de réintégrer leur cellule après avoir été au préau. La police fédérale est intervenue pour réprimer la révolte. La police a également réprimé un mouvement similaire à la prison de Leuze-en-Hainaut où 8 prisonniers refusaient de rentrer dans leurs cellules qui s’est terminé jeudi lorsque les deux derniers prisonniers ont accepté de retourner dans leurs cellules. Les prisonniers réclamaient d’une part plus de crédits d’appel pour leur téléphone et d’autre part une cantine complète. Actuellement, certains produits fournis par un supermarché, ne sont pas disponibles. Huit prisonniers considérés comme meneurs ont été placés en isolement en attendant une punition disciplinaire. Un autre mouvement de révolte a éclaté, vendredi, à la prison de Lantin donnant lieu à des affrontements entre prisonniers et gardiens où six prisonniers sont montés sur le toit. Le mouvement s’est terminé après l’intervention de la police fédérale et du Corps d’intervention (CIK), venus en appui à la police locale de la Basse-Meuse.

En Iran, des prisonniers se sont rebellés, vendredi 27 mars, à la prison de Saqqez car ne faisaient pas partie des prisonniers libérables dans le cadre des mesures sanitaires (voir notre article). Ils se sont affrontés avec les Gardiens de la Révolution et les gardiens permettant à 80 prisonniers de s’échapper. La veille, une révolte avait également éclaté à la prison de Tabriz  où les prisonniers avaient été exposés au Coronavirus. Les gardiens ont ouvert le feu sur les prisonniers en blessant au moins sept. Les prisonniers sont parvenus à désarmer les gardes et plusieurs d’entre eux ont ainsi pu s’échapper.

En Argentine, des nouvelles émeutes ont eu lieu, jeudi 26 mars, à la prison de Coronda (au sud de la ville de Santa Fe) qui avait déjà connu un mouvement de révolte il y a quelques jours (voir notre article). Les prisonniers de quatre pavillons de l’aile nord de la prison ont refusé de réintégrer leur cellule et plusieurs d’entre eux ont grimpé sur les toits. Des agents du Groupe spécial des opérations pénitentiaires (GOEP) ont fait irruption dans la zone provoquant de nouveaux affrontements. Deux prisonniers ont dû être hospitalisés pour des blessures par balles de caoutchouc et une douzaine de détenus sont tombés du toit de la prison pendant la répression. Par ailleurs, plusieurs détenus ont été blessés aux jambes. Quatre personnes, qui étaient des proches de prisonniers, ont été arrêtées à l’extérieur de la prison. Elles étaient soupçonnées d’attendre une possible évasion de leurs proches. Le même après-midi, des émeutes ont eu lieu dans deux pavillons de la prison de Piñero (à 20 kilomètres de la ville de Rosario). Les prisonniers s’opposaient à l’interdiction, par les gardiens, de faire entrer plus d’un colis de vivres apportés par leurs proches.

Révolte à la prison de à la prison de Coronda en Argentine

Révolte à la prison de Coronda en Argentine

Ces derniers jours, plusieurs mouvements de révoltes des prisonniers ont éclaté dans différentes prisons de France d’Italie et de Belgique dans le cadre de la crise liée au Coronavirus. Voici un compte-rendu non-exhaustif des événements.

En Italie, depuis l’annonce, le 7 mars, de la suspension des visites de proches, des troubles majeurs ont éclatés dans 49 prison du pays sur un total de 189. En date du 11 mars, on comptait : 6 000 prisonnier révoltés, 600 lits détruits, ainsi que des dégâts matériels estimés à 35 millions d’euros. Dimanche 8 mars, des mutineries ont éclaté dans quatre prisons du pays. Au moins six prisonniers y sont morts. À Modène, la révolte, particulièrement intense, a fait au moins un mort parmi les détenus alors que 20 gardiens ont été blessés et que le reste du personnel a du être évacué. Les prisonniers sont parvenus à se barricader et à s’emparer d’armes. Dans la prison de Frosinone (sud de Rome), une centaine de prisonniers se sont barricadés dans une section de l’établissement, et la police est intervenue pour réprimer la mutinerie. Les prisonniers ont dressé une liste de revendications, dont la possibilité de visites de leurs proches, et tentent de négocier avec la direction. À la prison Torre del Gallo à Pavie, les prisonniers sont parvenus à prendre deux agents de la police pénitentiaire en otage, et à libérer des dizaines de leurs camarades. Par ailleurs, les familles sont venues soutenir dans la rue la fronde des prisonniers dans plusieurs prisons du pays. Enfin, à la prison de Poggia, dans les Pouilles, plusieurs prisonniers étaient parvenus à s’échapper avant d’être rattrapé par la police.

Des révoltes similaires ont également eut lieu cette semaine en France. Dans les région Alpes-Maritimes, une mutinerie a éclaté à la prison de Grasse, après une révolte de prisonniers inquiets face au coronavirus. Un groupe de six à sept hommes sont notamment montés sur le toit d’un des bâtiments de la prison et ont jeté des projectiles sur les gardiens. Le Raid est intervenu pour réprimer la mutinerie. La lendemain, on dénombrait une dizaine de mouvements de révolte dans tout le pays, principalement des refus par les prisonniers de réintégrer leur cellule après la promenade. Une mutinerie a cependant éclaté au centre de détention de Val-de-Reuil. Les corps d’intervention d’élite de l’administration pénitentiaire (Eris) étaient débordés par le nombre d’incidents et n’ont pas pu intervenir en même temps pour réprimer tous les mouvements.  Jeudi 19 mars, une autre mutinerie a également éclaté à la prison d’Argentan (Orne) avant d’être réprimée par les Eris. Une quinzaine de prisonniers révoltés sont montés sur le toit de la prison et refusaient d’en descendre.

En Belgique, une mouvement de révolte a éclaté à la prison de Saint-Gilles (Bruxelles) lorsqu’une vingtaine de prisonniers sont montés sur le toit pour protester contre la réduction de leur temps de préau.

Révolte de prisonniers en Italie dans le cadre de la crise du Coronavirus

Révolte de prisonniers en Italie dans le cadre de la crise du Coronavirus

Jeudi 19 mars, sous prétexte de mettre en place le confinement, la police a chassé les migrant·es du parc Maximilien. Des volontaires de la cuisine solidaire Zig-Zag qui distribuaient, comme à leur habitude, des repas aux migrant·es ont reçu des amendes pour « création d’un attroupement ». Les migrant·es se sont alors dirigés vers l’Allee du Kaai, espérant recevoir de la nourriture sur place. La police était cependant déjà présente et les a dispersé. La veille, des militant·es du Collectif 8 mars, ont assisté à l’expulsion de personnes sans-abris du Carré de Moscou (Place Marie Janson à Saint-Gilles) par 15 policiers. Lorsque celles-ci se sont mises à filmer la scène, les policiers ont contrôlé leur identité avant d’emmener deux personnes qui n’avaient pas leur carte (elles seront relâchées après identification).

La police chassant les SDF du Carré de Moscou

La police chassant les SDF du Carré de Moscou

Il y a près de deux ans, plus de vingt associations, une quinzaine d’anciens squatteurs et la FGTB avaient déposé un recours en annulation de la loi de 2017. Dans un arrêt rendu ce jeudi, la Cour constitutionnelle a annulé l’article de la loi de 2017, qui autorise le procureur du Roi à ordonner l’évacuation d’un bâtiment public ou privé squatté, y compris de longue date, sans passer par un juge. La Cour souligne que ce n’est pas au ministère public mais à un juge « d’ordonner des mesures portant atteinte aux droits et libertés individuels ». C’est une semi-victoire pour les requérants, 21 associations, une quinzaine d’anciens squatteurs qui demandaient l’annulation totale ou partielle de la loi. Mais pas pour la FGTB qui s’était jointe au recours. Le syndicat socialiste voyait dans la loi une atteinte à l’occupation de locaux d’entreprise pendant une grève. La Cour a estimé cet argument non fondé.

La loi du 18 octobre 2017 relative à la pénétration, à l’occupation ou au séjour illégitimes dans le bien d’autrui avait déjà été critiquée par le Collège des procureurs et par le Conseil d’État, l’avis de ce dernier ayant contraint le gouvernement Michel à remanier le texte. Elle rend passible de poursuites pénales (amendes et jusqu’à un mois de prison) le fait de squatter un bâtiment vide et raccourcit les procédures d’expulsion des occupants à huit jours, avec un recours possible en justice de paix (voir notre article). La loi n’a été que peu appliquée depuis son entrée en vigueur. L’article 12, annulé par la Cour constitutionnelle, stipule que le procureur du Roi peut édicter une ordonnance d’évacuation du bâtiment squatté, qui doit être affichée à un endroit visible du bien. Les requérants estimaient que cela portait atteinte à la vie privée des occupants ; des squatteurs qui deviendraient dès lors « la seule catégorie de justiciables qui se verraient signifier des décisions de justice par affichage sur l’espace public ». En plus de considérer que c’est la prérogative d’un juge, la Cour leur a donné raison, l’affichage de l’ordonnance étant qualifié d’« ingérence dans le droit au respect à la vie privée et à l’inviolabilité du domicile ». Pour le Conseil des ministres, le texte protège le droit de propriété et le droit au logement « n’est pas un droit absolu ».

Contre la loi anti-squat (archives)

Orange, Proximus et Telenet, les trois principaux opérateurs télécoms belges, sont prêts à utiliser les données de leurs clients dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de covid-19. Les données pourraient être utilisées pour cibler les déplacements mais aussi les contacts humains. Cette technique avait déjà été utilisée dans le cadre de l’épidémie d’Ebola, mais aussi celle de malaria ou du Zika. Pour Ebola, en 2014, un opérateur télécoms avait pu cartographier les déplacements de certaines personnes et même les comportements de mobilité d’un village entier. Différents canaux ensuite permettaient de prévenir les personnes identifiées comme potentiellement à risque.

En se basant sur un historique de trois mois des registres d’appels et de géolocalisation, le modèle permet de calculer le graphe social et les cartes de mouvements réels. L’analyse de ces données permettraient d’identifier non seulement les personnes posant les plus grands risques d’amplification de l’épidémie (les personnes qui se déplacent beaucoup) ainsi que les lieux avec les plus grands risques. Les données existent pour y parvenir et un cadre régulatoire le permettrait (le règlement RGPD sur la protection des données prévoit, le cas échéant, une clause particulière en cas d’intérêt public dans le domaine de la santé publique). Le gouvernement n’a pas encore donné sont feu vert pour une telle utilisation. Les données télécoms ne sont pas directement associée à une identité mais à un numéro de téléphone et ne sont donc pas nominatives. Malgré cela, certaines métriques permettent de calculer un probable domicile, un probable lieu de travail, etc. tout en restant approximatif.

Utilisation des données télécoms

Utilisation des données télécoms

Ce samedi 14 mars, un concert en soutien au groupe Yorum se tiendra au théâtre Molière, à Bruxelles. Les membres du groupe Yorum sont considéré.e.s par le gouvernement turc comme des terroristes, plusieurs d’entre eux/elles ont été emprisonné.e.s pour « appartenance à une organisation terroriste ». D’autres membres du groupe se sont réfugié.e.s à l’étranger pour échapper à la prison.

Helin Bölek et İbrahim Gökçek, membres du groupe de musique du Groupe Yorum, sont en grève de la faim depuis le 16 mai 2019 en raison des restrictions à leur liberté d’expression artistique imposées par les autorités. Le guitariste du Groupe Yorum, İbrahim Gökçek et 5 autres membres du groupe ont été placés par la Turquie sur la liste des « terroristes les plus recherché.e.s » avec une récompense de 300 000 lires turques (46 000 euros) pour chacun d’entre eux.

Entrée au concert en prix libre en soutien aux membres du groupe Yorum:
Date : Samedi 14 mars 2020
Heure: de 17h à 19h30
Lieu: Théâtre Molière, square du bastion, 3 à 1050 Bruxelles

Grup Yorum

À Bruxelles, ce 8 mars, plus de 6 000 personnes ont manifesté à l’occasion du 8 mars. Lors de la manifestation, la police a attrapé violemment deux femmes faisant des tags sur le sol du parcours. L’une d’elles a été traînée au sol et étranglée. L’autre manifestante voulant la protéger sera traînée sur la longueur de la rue par quatre policiers, puis maintenue au sol un genou sur sa poitrine et frappée au visage. D’autres manifestants et des manifestantes sont intervenus, ils et elles se sont pris des coups de matraque (un manifestant aurait le poignet cassé) mais les deux personnes appréhendées ont pu être libérées et exfiltrées. Une partie de la manifestation a par la suite déviée du parcours et a été bloquée par la police pendant un moment dans les rues de Bruxelles avant d’être nassée. Aucune arrestation ne semble avoir eu lieu. 

Au rassemblement de Bruxelles