Malgré les 3354 morts et les 4508 blessés, 220 disparus sous les décombres, la guerre civile continue. La junte a mené plusieurs attaques contre la guérilla après le séisme qui a ravagé le pays. Depuis le vendredi 28 mars, malgré le « cessez le feu », la junte a mené au moins 61 opérations militaires. Certaines quelques heures seulement après le tremblement de terre. Des frappes avec des avions, mais aussi, avec des parapentes motorisés, une nouvelle spécialité de la junte. Des soldats, équipés de parapente survolent leurs cibles et lancent des bombes directement à la main. Silencieux, ils sont difficilement détectables, les guérilleros et les civils sont surpris lorsqu’ils arrivent.

La maison et les propriétés du célèbre commerçant U Kyauk Taung ont étés confisquées par l’armée de l’Arakan à Taung Kot et Maung Daw, Myanmar, le 6 mars. Taung est un milliardaire qui possède plusieurs entreprises dans l’État de Rakhine, site du génocide du peuple Rohingya. Il contrôle également les projets de logements urbains dans l’État de Rakhine. Certains groupes ethniques en Rakhine affirment qu’il a le monopole des travaux de construction départementaux et de la construction de routes et de ponts dans la région depuis des générations. Les résidents locaux ont exprimé leur soutien à la saisie de ses biens. Il a maintenu le commerce maritime avec Yangon, Rakhine et le Bangladesh tout au long de la guerre et vit actuellement à Yangon.

L’armée d’Arakan (AA) contrôle le reste de l’État de Rakhine, à l’exception de Kyaukphyu, Sittwe et Manaung. Tous les biens ont été confisqués et confiés à l’administration du gouvernement populaire de l’Arakan, dirigé par le gouvernement populaire national (ULA). Dans les communes conquises, l’AA a déclaré qu’elle avait inspecté et restitué les biens des habitants qui avaient été volés pendant les combats.

La junte militaire du Myanmar a mis en place une nouvelle loi sur la cybercriminalité ce 1er janvier, renforçant son contrôle sur les canaux de communication dans un contexte de guerre civile exacerbée. Cette loi est une réponse directe aux manifestations de masse et à la résistance armée qui ont éclaté après la prise de pouvoir de la junte en février 2021 ( voir article ici ). Les plateformes de médias sociaux, en particulier Facebook, X et Telegram, sont devenues des outils essentiels pour les groupes d’opposition et le grand public qui contestent le régime militaire. Le contrôle de ces moyens de communication est devenu une priorité absolue pour la junte. Une  version finale de la loi promulguée ce 1er janvier, reflète une approche plus agressive du contrôle en ligne. La loi accorde un pouvoir excessif à la junte pour censurer l’expression en ligne et miner la protection des données. Selon elle,  la loi pourrait étouffer la dissidence et l’expression contre le régime.

Un point important de la criminalisation est la fourniture de réseaux privés virtuels (VPN) sans autorisation. Les VPN sont essentiels dans le Myanmar de l’après-coup d’État, ils permettent d’accéder à des informations non censurées et de contourner les restrictions imposées par l’État. La loi prévoit une peine d’emprisonnement de six mois et une amende pour « installation ou service VPN non autorisé ». Elle étend son application aux citoyens du Myanmar vivant à l’étranger, les tenant pour responsables des infractions commises en vertu de la loi. Le texte intégral de la loi sur la cybersécurité n’a pas encore été rendu public, il oblige les fournisseurs d’accès à Internet à censurer les contenus jugés nuisibles ou répréhensibles par la junte et les oblige à transmettre les données des utilisateurs.

Lors d’une opération militaire menée par la faction de résistance Chin Brotherhood le 21 décembre, la ville de Mindat a été libérée du contrôle du Conseil administratif d’État, la junte militaire présidée par le général Min Aung Hlaing, soutenu par la Chine, la Russie, et l’Inde. Le drapeau de l’État Chin a été hissé sur la place de la ville et les portraits du dictateur ont été retirés des espaces publics. Cette victoire militaire est le résultat d’un mois de lutte continue de l’alliance Chin Brotherhood contre la junte militaire. Une énorme quantité d’armes a été confisquée et réappropriée par les forces rebelles.

Cette opération intervient après la défaite de la junte gouvernementale dans la ville voisine de Matupa, le 28 juillet, qui a été prise par la Chin Brotherhood Alliance. Des prisonniers y ont été libérés et un grand nombre d’armes ont également été confisquées. La lutte de libération de l’État Chin se poursuit et d’autres états du Myanmar pourraient suivre la même voie. La situation géographique de l’État Chin en fait un point central, partageant une de ses frontières avec l’État de Rakhine, site du génocide du peuple Rohingya mais aussi avec l’Inde et le Bangladesh. Ces deux pays ont toujours refusé de négocier avec les factions rebelles qui occupent désormais une grande partie du Myanmar, malgré le million de réfugiés Rohingyas dans le sud du Bangladesh qui ont fui leur pays en raison des politiques extrêmement répressives et de nettoyage ethnique de Min Aung Hlaing.

La nuit du jeudi 5 au vendredi 6 septembre, onze civils ont été tués, onze autres personnes ont été blessés lors d’une attaque aérienne attribuée à la junte birmane dans la ville de Namkham (État Shan au Myanmar), près de la frontière chinoise. La junte, au pouvoir depuis le coup d’État de 2021, est régulièrement accusée d’être à l’origine de bains de sang lors d’opérations aériennes et terrestres visant à punir des civils soupçonnés de soutenir l’opposition. Mardi, le chef de la junte, Min Aung Hlaing, avait menacé de lancer des «contre-attaques» visant ses adversaires accusés d’utiliser «des bâtiments administratifs et des civils innocents comme boucliers humains».

Les combattants du TNLA (Ta’ang National Libération Army) ont revendiqué le contrôle de Namkham, ville stratégique située à cinq kilomètres de la frontière avec la province chinoise du Yunnan. L’État Shan est le théâtre de combats intenses entre la junte et ses adversaires, l‘armée a perdu des pans entiers de territoire près de la frontière avec la Chine, au profit d’une alliance de groupes armés de minorités ethniques et des « Forces de défense du peuple » (FDP) qui luttent pour renverser le gouvernement militaire issu du coup d’État. Ces groupes se sont emparés d’un commandement militaire régional et ont pris le contrôle de points de passage frontaliers.

La junte affronte une opposition armée généralisée, elle a annoncé ce 2 septembre que les trois principaux groupes armés issus de minorités ethniques combattant l’armée dans l’État Shan avaient été officiellement classés organisations « terroristes » et ceux qui les soutiennent ou sont en contact sont désormais passible de poursuites judiciaires.

Deux ans jour pour jour après le coup d’État, la junte birmane a annoncé mercredi la prolongation de l’état d’urgence pour six mois. Dans le centre de Rangoon, la capitale économique et la plus grande ville du pays, des manifestants ont déployé des bannières sur plusieurs ponts, appelant les gens à rejoindre la révolution. Les militants ont appelé les habitants à fermer les commerces et à ne pas sortir dans les rues ce mercredi de 10 heures à 16 heures. De fait, les rues d’ordinaires très animées de Rangoon, étaient calmes 1er février. Des images partagées sur les réseaux sociaux montrent les rues complètement vides, ce qui est confirmé par les logiciels de veille de la circulation. Les grandes villes n’ont pas été les seules à participer à la manifestation. Même les habitants de petites villes rurales ont observé cette « grève silencieuse ».

Quatre prisonniers politiques, dont la mise à mort prochaine avait été annoncée le 4 juin, ont été pendus a communiqué le quotidien officiel du régime. Deux des prisonniers sont des figures très plus connues : le militant et écrivain Ko Jimmy, de son vrai nom Kyaw Min Yu, 53 ans, était un ancien leader étudiant du soulèvement de 1988. Il avait déjà passé plus de quinze années en détention, entre 1988 et 2012. Le second, le chanteur Zayar Thaw, 41 ans, est le cofondateur du premier groupe de hip-hop birman, Acid. Emprisonné de 2008 à 2011 pour avoir mené une campagne de graffitis contre la junte d’alors, il avait siégé comme député de la Ligue nationale pour la démocratie à partir de 2012.

Arrêtés fin 2021, ils avaient été condamnés, en janvier, pour avoir « donné des directives, effectué les arrangements et commis des conspirations pour [mettre en œuvre] des actes inhumains de terreur ». Zayar Thaw était ainsi accusé d’avoir orchestré dans un train de Rangoun une attaque qui a tué cinq policiers. Les deux autres prisonniers, accusés d’avoir assassiné une informatrice présumée, s’appelaient Hla Myo Aung et Aung Thura Zaw.

 

En Birmanie des « groupes de défense » ont été constitués par des militants opposés au putsch du 1er février. Dotés de fusils de chasse et d’armes artisanales, ils s’opposent aux forces militaires. La région autour de Saigaing (centre) connaît en particulier une multiplication d’escarmouches entre ces groupes et des militaires.  C’est lors d’un affrontement de ce type que 25 combattants et civils opposés au coup d’État ont été tués par l’armée dimanche 4 juillet.

 

 

Samedi 27 mars, des manifestations se sont à nouveau tenues dans les différentes villes du pays. Les militants avaient appelé à une grande mobilisation ce samedi 27 mars, « journée des forces armées », où un grand défilé militaire est organisé dans la capitale Naypyidaw. Les forces de sécurité déployées dans les différentes villes ont commencé à réprimer avant même le début des manifestations. En fin de journée, on comptait près de 110 personnes tuées, journée la plus sanglante depuis le 1er février. Au total, depuis cette date, plus de 400 personnes ont été tuées et plus de 3 000 ont été arrêtées.

 

Myanmar - 27 mars 2021

Dimanche, le quartier industriel de Hlaing Tharyar, à Rangoun, a été le théâtre d’affrontements entre forces armées et manifestants, parmi les plus sanglants depuis le coup d’État du 1er février. Accusant la Chine de soutenir la junte militaire, les manifestants ont volontairement incendié plusieurs dizaines d’entreprises chinoises dans ce quartier pauvre de la ville. Face aux manifestants, les militaires ont ouvert le feu, tuant au moins 22 civils, auxquels s’ajoutent 16 décès dans différentes villes du pays, ainsi que celui d’un policier, le deuxième depuis le coup d’État. Ces 39 morts font de dimanche la journée la plus sanglante depuis le début du mouvement de protestation. Ils portent à 138 le bilan humain officiel de la répression. Après avoir décrété la loi martiale dans deux quartiers de Rangoun dimanche soir, la junte militaire a fait savoir lundi matin que cinq autres de l’ex-capitale étaient désormais concernés, ainsi que certains quartiers de la ville de Mandalay.