Istanboul, les forces de l’ordre ont réprimé une manifestation contre les attaques djihadistes ciblant les Kurdes du Rojava ( nous lire ici et ici ). Des membres des Forces du Travail, de la Paix et de la Démocratie d’Istanbul se sont rassemblés à Şişhane pour protester contre les attaques des HTC/HTS ( Al-Nosra, branche syrienne d’Al-Qaïda devenue Tahrir al Cham ) et  l’ASL/SFA ( Armée Syrienne Libre ) soutenues par la Turquie. Les manifestants, parmi lesquels des députés du parti DEM, ont été bloqués par la police et soumis à une répression brutale après avoir protesté contre cette intervention arbitraire en scandant « Bijî berxwedana Rojava » ( Vive la résistance du Rojava ). 50 personnes ont été interpelées et placées en garde à vue.

L’offensive des deux grands blocs islamistes, celui rassemblé autour du Hayat Tahrir al-Sham (anciennement al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaïda), et celui des supplétifs de la Turquie rassemblés sous l’étiquette « Armée Nationale Syrienne », se prolonge. Le premier bloc priorise son offensive contre le régime, nettoie les territoires conquis et continue sa progression vers le sud. La vitesse de cette progression s’est ralentie, sans que l’on sache où le régime a pu établir de nouvelles lignes de défense où si l’offensive touche à ses limites pour des problèmes d’effectif ou de logistique.

Le deuxième bloc, en bon supplétif de la Turquie, a concentré ses efforts à combattre les Kurdes. La région de Shebah/Tall Rifaat a été attaquée par l’ANS qui s’est emparée des campagnes et des villages environnants la ville de Tall Rifat et les grands camps de réfugiés (des dizaines de milliers de Kurdes ayant fuit l’invasion turque du canton voisin d’Afrin en 2018). La carte ci-dessous ne l’indique pas, mais il reste des unités kurdes dans cette zone. Les islamistes ont aussi réussi à couper les corridors que les Kurdes avait pu établir hier entre leurs différentes zones à l’ouest de l’Euphrate. Des négociations sont en cours pour l’évacuation des civils des camps de réfugiés et de Tall Rifaat.

Ayant perdu du terrain à Sheba/Tall Rifaat, les Forces Démocratiques Syriennes en ont gagné sur la rive ouest de l’Euphrate, par une attaque venant de Tabka. La partie de la banlieue Nord-Est d’Alep qui a été occupée hier, par une progression à partir des quartiers kurdes de la ville dans la tentative d’établir un corridor vers l’Est, a également été conservée. Toute cette zone kurde d’Alep est néanmoins totalement isolée du reste du Rojava.

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Après la victoire écrasante du parti DEM aux élections locales du 31 mars au Kurdistan turc, l’État cherche des raisons pour destituer les maires élus et les remplacer par des administrateurs désignés. Pour ce faire, des dossiers longtemps en souffrance sont ressortis des sous-sols du système judiciaire. Un nouveau cas de ce type semble se produire à Bahçesaray (Miks), dans la province de Van. Après neuf ans de procédures interminables, le co-maire de la ville, Ayvaz Hazır (parti DEM), a été condamné à trois ans et onze mois de prison pour « appartenance à une organisation terroriste » et « commission de crimes au nom d’une organisation terroriste » pour avoir participé à une manifestation en 2015.

La nomination d’un administrateur désigné par le pouvoir s’annonce donc à Bahçesaray, comme cela a déjà été le cas à Colemêrg, Êlih, Mêrdin/Mardin, Xelfetî/Halfeti, Dersim/Tunceli, Pulur/Ovacık et Esenyurt.

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Les forces islamistes en Syrie se divisent en trois forces : primo le Daech (État islamique) qui n’a plus de territoire mais une solide organisation clandestine, secundo les supplétifs de l’armée turque baptisés Armée nationale syrienne (ANS) qui occupent depuis 2018-19 deux territoires conquis aux kurdes (Afrin et Serekanie), et un territoire conquis au Daech (al-Bab); tertio les forces rassemblées par Hayat Tahrir al-Sham (anciennement al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaïda) et qui tiennent la région d’Idlib, adossée à la Turquie, dans le nord ouest syrien. Ce sont ces forces qui viennent de passer à l’offensive.

L’offensive n’est sans doute pas commanditée par la Turquie, mais elle ne pourrait se faire sans qu’elle la tolère : la région d’Idlib est entièrement dépendante des approvisionnements venant de Turquie. L’offensive est un succès : ont été pris une grande partie de la ville d’Alep, la seconde ville du pays, qui avait été reprise en 2016 par le régime après des années de combats acharnés, 50 villages et plusieurs bases militaires. L’offensive se prolonge vers le sud, vers la ville d’Hama. Les combats sont limités : les troupes du régime se débandent.

Les forces du Rojava démocratique, à l’ouest de l’Euphrate, sont divisées en trois territoires : primo la région de Manbij, à l’est d’Alep, qui est adossée au reste du Rojava, secundo les quartiers kurdes d’Alep (qui jusqu’à présent ne sont pas touchés par les combats) et tertio le territoire de Sheba/Tell Rifaat, au nord d’Alep, – ces deux territoires n’étaient reliés à Manbij, et donc au reste du Rojava, que par des routes contrôlées (et parfois fermées) par le régime.

La volatilisation des forces du régime ont permis aux YPG et YPJ d’Alep et de Sheba/Tall Rifaat d’occuper plusieurs positions pour établir des corridors unissant toutes les zones kurdes non-occupées. Les YPG-YPJ ont reçu pour cela d’importants renforts des Forces Démocratiques Syriennes. Ces forces n’ont pas eu à livrer combat jusqu’à présent, mais les Turcs effectuent des bombardements et l’ANS a effectué une progression à partir d’al-Bab qui pourrait menacer le corridor. Les questions qui se posent sont : jusqu’à quel point le régime est en crise? Et quelle sera l’attitude de la Turquie ? (une offensive contre les territoires kurdes non-occupés à l’ouest de l’Euphrate est-elle envisagée?).

Edit 16H30: Les combats entre les SDF et les islamistes ont commencé. Le corridor entre les quartiers kurdes d’Alep et Sheba/Tall Rifaat est établi, le corridor en direction de Manbij est coupé par l’offensive de l’ANS qui a progressé vers le sud. L’ANS a lancée une attaque en direction de la ville de Tall Rifaat avec des blindés fournis par la Turquie.
Edit 21H30: La situation se dégrade, le deuxième corridor est à son tour coupé: les quartiers kurdes d’Alep sont à nouveau isolés.

Ce 25 novembre, la place Taksim d’Istanbul a été placée sous un important dispositif policier suite à l’interdiction de manifester et de scander le slogan « Jin, jiyan, azadî » (Femmes, vie, liberté) à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Malgré l’interdiction, les organisations féministes se sont rassemblées à 19 heures. Les forces de l’ordre avaient bloqué toutes les rues adjacentes, plusieurs femmes ont tenté de marcher vers la place Tünel, elles ont été dispersées et repoussées, plusieurs d’entre elles ont été appréhendées. Des groupes de manifestantes se sont alors dirigés vers le littoral pour se rassembler sur les quais en scandant des slogans en kurde, environ 200 femmes ont été arrêtées par les forces de sécurité.

Mercredi, dans la ville de Dersi, un tribunal a condamné deux maires pro-kurdes à 6 ans et 3 mois de prison pour « appartenance à une organisation terroriste ». Suite à cette condamnation, les maires peuvent être suspendus de leurs fonctions et remplacés par des administrateurs désignés par le gouvernement turc. Le ministère de l’Intérieur a le pouvoir de suspendre Cevdet Konak, co-maire de Dersim et membre du Parti de l’égalité des peuples et de la démocratie ( parti DEM ) et Mustafa Sarıgül, membre du Parti républicain du peuple (CHP). Il est nouveau que des maires du CHP soient démis de leurs fonctions pour des accusations de « terrorisme ». Récemment, quatre maires du CHP et du DEM ont été démis de leurs fonctions entrainant plusieurs manifestations de protestation sérieusement réprimées par la police turque ( voir article ici ).

Istamboul, ce lundi matin, le bureau du Parti de l’égalité des peuples et de la démocratie (Parti DEM) a été perquisitionné par la police. Les forces de l’ordre sont entrées dans le bâtiment, ils ont fait sauter la serrure de la porte, au préalable, sans en informer les membres du parti. Les policiers ont jeté au sol des photos, des drapeaux du parti et des livres, ils ont aussi  emmené certains livres et quelques photographies. Rojda Yılmaz et Abdullah Arınan, les coprésidents du parti DEM du district d’Esenyurt ont été convoqués au département de la police d’Istanbul.

La prisonnière politique kurde iranienne Warisha Moradi a été condamnée à mort par la 15e chambre du tribunal révolutionnaire islamique de Téhéran pour « trahison ». Ses avocats ont été informés dimanche de la condamnation à mort prononcée contre sa cliente. Les audiences du procès ont eu lieu les 16 juin et 5 octobre 2024. Le président le tribunal, n’a pas permis à Moradi de se défendre pendant les audiences. Il n’a même pas permis à ses avocats de la défendre. De plus, les avocats, qui s’étaient vu refuser le droit d’examiner l’affaire, n’ont pu examiner le dossier de leur cliente que quelques heures après la fin de la deuxième audience.

Warisha Moradi, également connue sous le nom de Ciwana Sine, a été arrêtée le 1er août 2023 lors d’un contrôle de police près de sa ville natale de Sine (Sanandaj) et a d’abord été victime d’une disparition forcée. Elle a été torturée et interrogée par les services secrets iraniens à Sine pendant des semaines après son arrestation. Elle a ensuite été transferée à Téhéran fin août 2011 dans le tristement célèbre quartier de haute sécurité 209 de la prison d’Evin. Moradi est membre de la Communauté des Femmes Libres du Rojhilat » (KJAR), que le pouvoir iranien considère comme une « organisation terroriste séparatiste » car faisant partie du Parti pour une Vie Libre au Kurdistan (PJAK).

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Plus de 250 personnes ont été interpellées depuis lundi pour avoir participé à des manifestations contre la destitution de trois maires pro-kurdes ( voir article ici ), trente-trois d’entre elles ont été inculpées et écrouées, 37 ont été placées sous contrôle judiciaire et trois autres assignées à résidence. L’éviction, lundi, par des administrateurs nommés par l’État de trois maires pro-kurdes, dont ceux des grandes villes de Mardin et de Batman, a suscité la colère des habitants. Les trois élus déchus sont membres du DEM, principal parti pro-kurde et troisième force au Parlement turc. Les autorités avaient aussitôt interdit tout rassemblement dans plusieurs provinces pour tenter d’étouffer la fronde. A Batman, les forces de l’ordre ont été visées par des tirs de mortier d’artifice, ils ont répliqué en dispersant les manifestants à l’aide de blindés surmontés de canons à eau.

Depuis hier, des manifestations ont lieu pour protester contre le remplacement des maires élus des municipalités de Mardin, Batman et Halfeti par des administrateurs nommés par le ministère de l’Intérieur. Tous les maires évincés sont des élus du peuple kurde du Parti pour l’égalité des peuples. et Démocratie (Parti DEM). À Batman, 75 personnes ont été arrêtées et soumises à des violences policières. De nombreuses personnes ont été arrêtées lors de perquisitions dans des maisons du quartier Halfeti d’Urfa. 9 personnes ont été arrêtées lors de perquisitions à Mardin et emmenées à la Direction provinciale de la sécurité.