Après une période de plusieurs semaines sans bombardement, période concomitante avec la trève et les négociations entre le Rojava démocratique et le nouveau pouvoir islamiste de Damas, les frappes aériennes turques ont repris sur le Rojava. Le 17 avril, une frappe de drone a eu lieu près de Suluk, à quelques kilomètres de Girê Spî (Tal Abyad), une ville occupée par les Turcs et leur proxys. Il n’est pas clair si il s’agit d’une frappe des Turcs ou de leurs supplétifs de l’ANS. Il est par contre certain que la frappe qui a tué un responsable de la milice popuplaire d’autodéfense du Rojava le 19 avril, à Al-Tarwazia, dans la région de Raqqa (photo), était le fait de l’aviation turque.

Par ailleur, les forces de sécurité du Rojava ont fait l’objet le 22 avril de six attaques de harcèlement à l’arme automatique et au RPG dans la région de Deir ez-Zor faisant un total de trois blessés. Ces attaques n’ont pas été revendiquées. Le 14 avril, trois attaques dans la même région ont fait deux morts et trois blessés parmis les SDF. Ces attaques là avaient été revendiquées par le Daesh.

Les Forces Démocratiques Syriennes ont remporté sur le front de l’Euphrate une grande victoire contre les mercenaires de l’Armée « Nationale » Syrienne, – un ramassis de milices islamistes, et parfois même jihadistes, armés, payés et commandés par la Turquie. Malgré un appui aérien intensif turc, les SDF, exploitant un réseau de tunnels, a infligé de lourdes pertes à l’ANS et préservé des têtes de pont à l’ouest du fleuve (voir un article). Les pertes ont induit une démoralisation et un début de désagrégation de l’ANS.

Des négociations ont alors eu lieu avec le régime de Damas (qui a des relations étroites avec la Turquie mais qui a son propre agenda). Un cessez-le-feu a été établi (qui concerne aussi la Turquie qui a suspendu ses bombardements sur le Rojava), Le barrage de Tishreen sera démilitarisé et la ligne de fleuve devrait séparer les forces de Damas (qui prendraient la place de l’ANS devant d’évacuer la zone) des SDF (qui évacueraient la petite tête de pont à l’ouest de Tishreen). Des techniciens ont pu se mettre à l’oeuvre sur le barrage dont dépend la production d’électricité et l’alimentation de l’irrigation de la région de Deir ez-Zor. C’est le deuxième accord concret passé entre le Rojava et le nouveau pouvoir islamiste de Damas après celui concernant Alep (voir notre article).

Le 1er avril, le Conseil des deux quartiers kurdes d’Alep, la seconde ville de Syrie, les quartiers de Cheikh Maqsoud et d’Achrafiyah, ont passé un accord avec le nouveau gouvernement de Damas. Selon cet accord, les forces de sécurité kurdes (assayeshs) continueront d’assurer la sécurité de ces deux quartiers, mais les forces militaires kurdes (YPG et YPJ) se retireraient à l’Est de l’Euphrate. Depuis le début de la guerre civile, ces deux quartiers se sont auto-organisés et auto-défendus, parvenant presque toujours à rester en dehors des combats entre l’opposition islamiste et le régime baasiste (mais en combattant épisodiquement l’une et l’autre). Ces quartiers ont par ce fait servi de refuge aux habitants des autres quartiers de la ville.

Conformément à cet accord, les forces YPG et YPJ qui était stationnées à Alep ont quitté la ville et sont arrivées à Tabka hier 5 avril (pĥoto). L’accord a aussi permis un échange de prisonniers: 146 membres des Forces démocratiques syriennes (FDS), des YPG et des YPJ ont été libérés jeudi 3 en échange de 97 miliciens islamistes proches du gouvernement de Damas.

La situation stratégique du Rojava a beaucoup évolué même si, paradoxalement, la ligne de front n’a pas bougé. Le Gouvernement de transition syrien (GTS), les islamistes d’Al-Nosra et leurs alliés, avait annoncé une « Conférence de dialogue national » qui excluait 35 partis politiques, dont les principaux partis syriaques, kurdes et druzes et l’Administration autonome du nord-Est syrien (AANES). Mais le GTS a sous-estimé la résistance des communautés non arabo-sunnites. Un soulèvement armé des Alaouites a fait des centaines de morts de part et d’autres parmi les combattants dans la région côtière. Ces combats ont été suivis par des massacres d’un millier de civils alaouites par les islamistes devenues « forces de sécurité » du GTS. Outres ces massacres, il y a eu des arrestations de masses, des mauvais traitements et des pillages (photo).

Les Druzes de la région de Souweïda (dans le Sud-Ouest, où ils sont majoritaires) ont rejetté l’autorité du GTS et leurs milices d’autodéfense ont refusé de rendre les armes aux « forces de sécurité » du GTS. Israël a tenté d’instrumentaliser cette résistance en se posant en défenseur (potentiel) des Druzes syriens, et a étendu son occupation du plateau du Golan. Ces difficultés ont contribué à ce qu’hier, le premier ministre du GTS signe avec le commandant en chef des FDS un accord de principe sur l’incorporation des organismes politiques (AANES) et des forces armées (FDS) du Rojava dans un état syrien démocratique et garantissant tous les droits à toutes ses communautés. Le flou extrême de ce texte (voir ici) permet toutes les interpétations, mais le spectre du conflit armé entre le GTS et le Rojava s’est éloigné pour cette année.

Dans le Nord, l’offensive de la Turquie contre le Rojava, via ses proxys de la prétendue « Armée Nationale Syrienne » (ANS), a commencé comme une promenade militaire (chute rapide de Manbij en décembre) et s’est terminée sur une défaite totale sur l’Euphrate. Les FDS n’ont pas simplement tenu la ligne du fleuve (ce qui est militairement relativement facile) mais aussi d’importantes têtes de pont sur la rive occidentale (ce qui, considérant le rapport de force, est militairement un exploit). L’ANS a subi de très lourdes pertes. Individuellement ou collectivement, les effectifs de l’ANS désertent celle-ci pour rallier le GTS de Damas.

La proposition de « paix démocratique » faite par Ocalan à la Turquie, qui impliquerait la dissolution du PKK et l’arrêt de la lutte armée (voir notre article), est en attente d’une réponse de la Turquie. Le PKK a simplement annoncé un cessez-le-feu (sauf en cas d’attaque) et une demande de liberté de mouvement pour Öcalan pour qu’il puisse mener les discussions (y compris dans le PKK). Pour les Kurdes, ces négociations n’impliquent que la Turquie et l’Irak, alors que les Turcs en parlent comme si le Rojava était inclus dans la discussion. L’éventualité de négociations n’a pas stoppé ni même réduit les bombardements quotidiens du Rojava par l’aviation, l’artillerie et les drones turcs.

Les révolutionnaires de Syrie commémorent le 16 février l’assassinat d’Omar Aziz. Né à Damas, où il est revenu d’exil au début de la révolution syrienne Omar Aziz était un économiste, anarchiste et père de famille, il s’est engagé à 63 ans dans la révolution. Il a travaillé aux collectes pour aider les banlieues de Damas attaquées par le régime. Par ses écrits et son activité, il a promu l’autonomie locale, l’organisation horizontale, la coopération, la solidarité et l’entraide. Il fut l’un des fondateurs du premier comité local, à Barzeh (Damas). Les agents des services de renseignements sont venus l’arrêter chez lui et il a été assassiné dans les prisons-abattoirs du régime baasiste le 16 février 2013. pour en savoir plus

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Depuis un mois des civils sont venus et mènent une résistance historique sur le corps du barrage de Tishreen font face aux attaques continues de l’État turc contre le nord et de l’est de la Syrie, ils protègent le barrage vital pour la vie. Les manifestations autour du barrage de Tishreen ont commencé le 8 janvier, un convoi de civils était alors parti de la province de l’Euphrate, trois des provinces de Tabqa, Raqqa et Deir ez-Zor, et six convois de la province de Jazira. À ce jour, La Turquie n’a cessé de lancer des attaques agressives contre le barrage ( voir nos articles ici, ici et ici ), ciblant les manifestants, entraînant la mort de 24 civils, hommes et femmes, et faisant plus de 200 blessés.

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Voila plusieurs semaines que les lignes ne bougent pas au Rojava, – ce qui ne veut pas dire qu’il ne se passe rien. Les supplétifs de la Turquie (les islamistes de l’Armée nationale syrienne) continuent leurs attaques pour passer à l’Est de l’Euphrate, mais ils sont toujours repoussés par les SDF qui tiennent une petite tête de pont sur la rive occidentale. Des civils se sont rassemblés sur le pont-barrage de Tichrine, un des deux points de passage, non loin de la ligne de front, pour marquer leur soutien aux SDF. Ces manifestations sans armes, ont été bombardées à deux reprises par des drones turcs. Les bombardements turcs se sont intensifiés sur tout le Rojava, frappant les forces armées, les infrastructures économiques, les administrations et les populations civiles.

À Damas, le nouveau pouvoir installé par les anciens dirigeants d’al-Qaida/al-Nosra bénéficie d’un intense ballet diplomatique. La Turquie se montre particulièrement assidue, avec des visites à différents niveaux (diplomatique, militaire, etc,). Les premières rencontres entre le nouveau régime et les représentants du Rojava démocratique ont débouché sur des échecs.

 

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Ce jeudi 16 janvier, les manifestant.es regroupé.es autour du barrage de Tishreen (Tişrîn) ont été la cible d’une nouvelle attaque turque tuant plusieurs civil.es et en blessant dix autres. Pour le deuxième jour consécutif, des avions de guerre turcs et des drones de combat ont pris pour cible des sit-in organisés près du barrage de Tishreen, au sud de Manbij, où des civils se regroupent pour réclamer la fin des attaques de l’occupation turque et de ses factions de mercenaires.

Selon les témoins sur place, le bombardement pose un risque grave d’effondrement du barrage, ce qui pourrait entraîner l’inondation de dizaines de villages et entraîner une panne totale d’électricité dans toute la région, privant des millions de personnes d’électricité et démultiplierait les risques de crises humanitaires dans la région.

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Ce mercredi 15 janvier, un convoi de civils se rendant au barrage de Tishreen a été atteint par une double attaque de drones turques faisant 4 morts et 23 blessés. C’est la deuxième attaque contre des civils à proximité ou sur le barrage de Tishreen depuis le 8 janvier (voir notre article).

Depuis le 8 janvier, la population de différentes régions de l’AANES se relaient au barrage pour protéger le lieu et soutenir les Forces démocratiques syriennes (FDS) et les Unités de défense des femmes (YPJ) contre les attaques de l’ANS soutenu par la Turquie qui tentent de prendre le contrôle du barrage de Tishreen et d’avancer vers Kobané.

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Des milliers de personnes venant de différentes région (Hasakah, Raqqa, Jazira) de l’Administration Autonome du Nord-Est Syrien (AANES) était en route, ce mercredi 8 janvier, avec comme objectif de se rassembler au sommet du barrage de Tishreen pour protester et condamner les attaques militaires turques en cours. Sur la route du barrage, le convoi a été attaqué par un drone turc faisant 5 morts et blessants 15 personnes.

L’attaque n’a pas arrêté le convoi et des manifestants sont arrivés sur le barrage. Une déclaration de l’AANES a été lu appelant la coalition internationale à trouver une solution aux problèmes du nord et de l’est de la Syrie et à mettre fin aux attaques de la Turquie et des groupes mercenaires alliés contre la région.

Le barrage risque de s’effondrer depuis plus d’un mois en raison des bombardements turcs incessants alors qu’il est crucial pour la région. Il renferme environ 1,9 milliard de mètres cubes d’eau et génère une grande quantité d’électricité et d’énergie dans la région dont dépend des dizaines de milliers de personnes.

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