Pour avoir soigné des blessés, Ali Cerkezoglu, risque jusqu’à 12 ans et demi de prison. Au printemps dernier, ce médecin légiste de 47 ans, ancien secrétaire général de la chambre des médecins d’Istanbul, s’est chargé de coordonner l’aide médicale aux manifestants de la place Taksim (plus de 8.000 personnes ont été blessées au cours des émeutes). Ali Cerkezoglu et quatre autres représentants de Taksim Solidarité, qui regroupait plus de cent organisations, seront jugés par un tribunal d’Istanbul à partir de jeudi, pour avoir «fondé une organisation avec l’intention de commettre des crimes». Comme eux, 21 autres personnes sont également poursuivies pour «violation de la loi sur les manifestations». Pas moins de 95 procès ont déjà été ouverts par la justice contre plus de 5.500 personnes, parfois au titre de la loi antiterroriste. Des centaines, peut-être des milliers d’autres personnes restent sous la menace d’enquêtes et de possibles procès.
A l’opposé, les violences et les abus commis en masse par la police turque jouissent d’une impunité malgré au moins quatre décès suspects. Seuls cinq procès ont été ouverts, alors que des centaines de plaintes ont été déposées dans les seules villes d’Istanbul et Ankara. Dans l’un d’eux, quatre officiers de l’antiterrorisme sont accusés d’avoir participé au lynchage qui a entraîné la mort d’Ali Ismail Korkmaz. Mais chacun de ces dossiers doit surmonter des retards et des difficultés, la police bloquant les enquêtes qui sont menées sur ses propres membres.
Lundi, un enfant de 6 ans a été grièvement blessé par une cartouche de gaz tirée vers des habitations. Les forces antiémeutes ont même ouvert le feu à balles réelles, faisant une victime début juin à Istanbul.