Plus de 30.000 assassinats, 2.500 disparus en moins de vingt ans. Ces chiffres parlent d’une violence effroyable, tout juste comparable, en Amérique latine, à la répression de la dictature argentine qui aurait fait disparaître 30.000 opposants. Pour la première fois, le parquet colombien a donné le 17 février les statistiques officielles d’une vague de meurtres longtemps niée par le pays. Elles correspondent aux crimes avoués par les milices paramilitaires dans le cadre d’un processus dit de ‘justice et paix’ mis en place depuis leur démantèlement en 2003. Une loi, polémique, avait alors été adoptée: moyennant des aveux complets, les paramilitaires qui rendaient les armes ne pourraient pas être condamnés à plus de huit ans de prison.

Ces remises de peine ont permis de commencer à lever le voile sur des années de violences. Dans les salles d’audience, bien des mères de victimes se sont effondrées en écoutant les bourreaux raconter d’un ton mécanique comment ils avaient découpé le corps de leur fils à la machette pour le jeter dans un fleuve. Créées dans les années 1980 par des propriétaires terriens et des militaires pour lutter contre les FARC, les ‘Autodéfenses’ colombiennes ont contrôlé des régions entières, assassinant non seulement des guérilleros, mais aussi ceux qu’ils considéraient comme leurs complices. Paysans, militants de gauche, étudiants ou simples villageois ont été supprimés, parfois pour avoir vendu une cigarette à l’ennemi.

En 2002, alors que l’enlèvement d’Ingrid Betancourt faisait la une des journaux, les 30.000 combattants des groupes d’autodéfense expulsaient des milliers d’Indiens de la Sierra Nevada colombienne, brûlaient dans des fours certaines de leurs victimes, ou les jetaient aux caïmans dans les immenses haciendas de leurs chefs. Les confessions macabres ne sont pas finies. Luis Gonzalez Leon, chef de l’Unité de justice et paix qui reçoit les aveux de ces combattants, affirme qu’ils pourraient reconnaître 120.000 meurtres.

Près du tiers des parlementaires colombiens élus en 2002 font l’objet d’une enquête pour complicité avec ces escadrons de la mort. La grande majorité portait l’étiquette de partis proches de l’actuel président Alvaro Uribe. Parmi eux figure même l’ancien sénateur Mario Uribe, son cousin.

Les paramilitaires continuent à sévir. Ces bandes armées, héritières de leurs anciens chefs, ont fait remonter les indices de violence de Medellin, Cali et la côte pacifique colombienne à des niveaux préoccupants. Dans ces régions, certaines familles ont eu à peine le temps de récupérer les restes d’un proche tué par les Autodéfenses, qu’il leur fallait déjà enterrer une victime de ces nouveaux groupes.

Les frères Omar Alonso Restrepo Ospina et José de Jesús Restrepo étaient membres de la Fédération Agrominière du Sud de Bolivar (Fedeagromisbol). Ils étaient partis de la municipalité de Montecristo vers Caucasia (Antioche) le 10 février dans l’intention d’acheter des pièces détachées pour leur véhicule. Selon des habitants de la zone, les frères ont été abordés par un groupe armé 20 minutes avant d’atteindre la municipalité de Nechí et emmenés vers une destination inconnue. Deux jours après, leurs corps sans vie sont apparus avec signes de torture dans la rivière Cauca, à la hauteur des municipalités d’Achí et de Guaranda.

Les organisations populaires ont dénoncés ces meurtres comme relevant d’une stratégie intégrée de la part du Gouvernement National, des multinationales minières de l’or et de celles productrices de palme qui essaient de s’emparer des ressources naturelles de la région.

En vue des prochaines élections, les FARC ont remis la pression sur les autorités locales dans le sud de la Colombie. En effet, d’ici au mois de mai, trois scrutins auront lieu. Après avoir kidnappé et tué le gouverneur du département de Caqueta en décembre dernier, les guérilleros ont tendu ce dimanche une embuscade au gouverneur du département de Guaviare, Jose Alberto Perez, dans l’optique de l’enlever. Le conducteur du convoi, transportant le gouverneur et sa femme, ainsi que quatre autres personnes sont mortes dans l’assaut. Perez a quant à lui pu échapper aux guérilleros mais a été blessé et transporté à l’hôpital.

C’est sur le territoire du petit village de La Macarena, dans la région du Meta, à 200 kilomètres au sud de Bogota, un des coins les plus chauds du conflit colombien, que vient d’être découverte la plus grande fosse commune de l’histoire récente de l’Amérique latine. Le nombre de cadavres ‘SN’ (Sans Nom), enterrés sans être identifiés, pourrait s’élever à 2.000. Depuis 2005, l’Armée dont les forces d’élite sont déployées alentour, a entassé des centaines de cadavres, dans une fosse derrière le cimetière du village, avec l’ordre de les inhumer anonymement.

Le juriste Jairo Ramírez est le secrétaire du Comité Permanent pour la Défense des Droits Humains en Colombie, c’est lui qui a accompagné une délégation de parlementaires anglais sur place il y a quelques semaines, alors que l’on commençait à découvrir l’importance de la fosse de La Macarena. ‘Ce que nous avons vu était horrible. Une quantité incalculable de corps, et des centaines de planches en bois peintes en blanc réparties sur toute la superficie de la fosse avec inscrit dessus ‘SN’ (Sans Nom) et des dates depuis 2005 jusqu’à aujourd’hui’. À partir de 2005, le fossoyeur du village, avait commencé à marquer les tombes avec des tablettes sur lesquelles il inscrivait les dates d’inhumation des cadavres et les alias des personnes mortes. Ramírez ajoute: ‘Le commandant de l’armée nous avait dit que tous étaient des guérilléros tués au combat, mais les gens de la région nous parlaient d’une multitude de leaders sociaux, de paysans et de défenseurs de communautés qui avaient disparu sans laisser de traces.’

On a recensé plus de mille fosses communes emplies de cadavres non identifiés en Colombie. À la fin de l’an passé, les médecins légistes avaient recensé quelques 2.500 cadavres, dont 600 ont pu être identifiés et rendus à leur familles. La localisation de ces cimetières clandestins a été possible grâce aux déclarations en version libre de certains sous-chefs, en principe démobilisés, du paramilitarisme, et protégés par la très controversée Loi de Justice et Paix qui leur garantit une peine symbolique en échange de l’aveu de leurs crimes.

La dernière de ces déclarations est celle de John Jairo Rentería, alias Betún, qui vient de révéler devant le procureur et les familles des victimes que lui-même et ses hommes de mains ont enterré ‘au moins 800 personnes’ dans la propriété Villa Sandra, à Puerto Asís, dans la région de Putumayo. ‘Il fallait démembrer les gens. Tous ceux qui faisaient partie des Autodefensas devaient apprendre à le pratiquer et très souvent on le faisait avec les gens vivants’, a avoué le chef paramilitaire au procureur de Justice et Paix. Le Procureur Général, lui-même, parle de 25.000 ‘disparus’.

Charnier de La Macarena

Charnier de La Macarena

Une opération conjointe de l’armée de l’air et de la police nationale colombienne a visé le camp mobile de la colonne d’une centaine de combattants des FARC qui aurait procédé à l’enlèvement et à l’exécution du gouverneur Caqueta Luis Fransico Cuellar en décembre dernier. Douze guérilleros auraient été tués lors de cette opération qui s’est déroulée près de la ville du sud de Porto Rico dans la province Caqueta.

Quatre policiers et trois soldats ont été tués samedi dans une embuscade dans le département d’Arauca, situé dans le nord de la Colombie. Une patrouille motorisée composée de policiers et de soldats a été attaquée à l’explosif et à l’arme automatique alors qu’elle se dirigeait vers la municipalité de Puerto Rondon.

Trois guérilleros des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) ont été tués dans une fusillade avec l’Armée colombienne dans la province du Nord-Ouest d’Antioquia jeudi. Ils appartiendraient au 9ème Front de FARC et l’un d’entre eux était responsable de la levée de l’impôt révolutionnaire chez les commerçants de la ville de Luis San. L’armée a récupéré 3 fusils d’assaut, une grenade et des munitions.

Hier, trois autres guérilleros des FARC auraient été abattus par la police panaméenne dans une fusillade dans la province frontalière de Darien mercredi. Deux de ces guérilleros auraient été immédiatement tués tandis que le troisième a succombé à ses blessures quelque heures plus tard. Deux autres ont été capturés. L’échange de coups de feu a éclaté quand six hommes armés ont été découverts dans un canoë sur la rivière Tuira par des gardes-frontières panaméens. Les guérilleros appartiendraient au 57ème Front des FARC.

Neuf combattants des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) ont été tués par l’armée colombienne dans le département de Putumayo. Quatre guérilleros blessés pendant le raid ont été capturés, dont une femme. Les guérilleros appartenaient au 48e Front des FARC (frontière sud de la colombie), leur camp a été attaqué par le 17e commando de jungle de l’Armée appuyé par l’aviation. Ce sont en tout trois camp des FARC qui ont été attaqués. Un des objectif de l’opération était la capture du dirigeant des FARC, Angel Gabriel Lozada Garcia, alias ‘Edgar Tovar’, mais en cela l’opération a échoué.

Au moins six combattants des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie, parmi lesquels le commandant en second du 51e Front, Eliseo Mancilla Garces ont été tués lors d’une fusillade les opposant à l’armée. Trois autres guérilleros auraient été capturés dans ce combat qui a opposé la guérilla des FARC (photo) à une unité spéciale de l’armée, la Task Force Omega, près de la ville d’Uriben dans la province de Meta, à 250 kilomètres au sud de Bogota.

Guérilleros des FARC

Guérilleros des FARC

En fin de semaine dernière, les forces armées ont repris l’offensive contre les FARC. La nuit du nouvel an, elles ont attaqué deux bases de la guérilla pouvant abriter 200 personnes. L’opération s’est soldée par la mort de 25 guérilleros (nous annoncions le 2 janvier le chiffre erroné de 18 décès) et la capture de 13 autres. Parmi les morts figuraient trois cadres qui appartenaient à la ceinture de sécurité destinée à protéger Jorge Briceno Suarez, leur principal chef militaire. Deux d’entre eux étaient membres des FARC depuis 18 ans.

Le 3 janvier, l’armée a annoncé le démantèlement de deux camps dans les départements du Putumayo (sud) et du Meta (centre). Le gouvernement, accusé d’avoir sous-estimé les capacités des révolutionnaires qui disposeraient encore de 6.000 à 10.000 guérilleros, reprend donc en force la lutte contre la guérilla. Il a annoncé la coordination des diverses forces de sécurité au sein de théâtres d’opérations conjointes dans les régions concernées. Par ailleurs, dans un communiqué diffusé par l’agence ANNCOL, leur canal habituel de communication, le bloc sud de la guérilla a revendiqué l’exécution du gouverneur Luis Francisco Cuéllar. Les FARC affirment avoir eu l’intention de juger Cuellar, pour corruption et liens avec les paramilitaires d’extrême-droite. Mais ils disent n’avoir pas prévu de le tuer ou de l’échanger contre une rançon. D’après eux, sa mort a été ‘une conséquence non désirée et tragique de l’ordre d’Alvaro Uribe aux forces armées de secourir par le feu et le sang’ les prisonniers des FARC. En plus du gouverneur de 69 ans, les FARC détenaient dans le secteur une vingtaine de soldats et de policiers.