Le gouvernement péruvien a dit et redit qu’il débarassera la région du Vizcatan des guérillas maoïstes. Celles-ci viennent de lui infliger un terrible échec ce jeudi 9 dans cette zone isolée et difficile d’accès du sud-est du Pérou, à 550 kimolètres de la capitale. Selon les témoignages recueillis par la presse locale, 200 combattants fortement armés ont mitraillé et lancé des explosifs sur deux convois militaires, à quelques heures d’intervalle. Treize militaires ont été tués. Ces attaques sont les plus meurtrières depuis celle d’octobre 2008, qui avait fait quatorze morts dans la même région. Elles interviennent alors que les militaires ont lancé une offensive pour récupérer la zone voisine de Vizcatan, aux mains des guérilleros.

Guérilleros péruviens

Guérilleros péruviens

L’ancien président péruvien Alberto Fujimori a été condamné ce mardi 7 à Lima à 25 ans de prison, au terme de son procès de 16 mois. Il a été reconnu coupable pour des massacres de civils perpétrés par des escadrons de la mort, entre 1990 à 2000. Le tribunal a reconnu Alberto Fujimori coupable ‘avec circonstances aggravantes‘. Il a assimilé ses crimes, ‘selon le droit international, à des crimes contre l’humanité‘. Il a précisé que l’ancien président âgé de 70 ans, en raison des deux ans qu’il a déjà passés en prison, devrait exécuter sa sentence jusqu’au 10 février 2032. Il devra aussi verser des dommages et intérêts aux familles de 29 victimes.

Alberto Fujimori avait envoyé dans les années 1990 l’armée combattre la guérilla maoïste du Parti Communiste du Pérou (P.C.P. ‘Sentier Lumineux’), provoquant une longue guerre qui a fait 70.000 morts et disparus, d’après les organisations des Droits de l’Homme. Les escadrons de la mort frappaient des militants progressistes ou jugés ‘sympathisants’ du P.C.P., et commettaient des massacres de paysans qui étaient ensuite attribués (avec l’aide de la presse internationale) à la guérilla maoïste.

Alberto Fujimori était jugé pour son rôle dans le massacre en 1991 de 15 habitants d’un quartier à Lima et l’assassinat en 1992 de 9 étudiants et d’un professeur de l’Université de la Cantuta, perpétrés par un escadron de la mort. Fujimori était aussi jugé pour les séquestrations à la même époque, par ses services secrets, d’un journaliste correspondant du journal espagnol El Païs et d’un entrepreneur. Le tribunal a reconnu Fujimori coupable de toutes les charges, mais n’a pas suivi l’accusation qui avait requis 30 ans de prison.

Charnier au Pérou

Le mois passé, des médecins-légistes ont commencé à exhumer les corps d’une fosse commune à Huanta, dans le sud-est du Pérou, dans la région d’Ayacucho où la guérilla maoïste était particulièrement active. Selon la Commission Vérité et Réconciliation, qui enquête sur les crimes commis durant la guerre civile entre la guérilla et l’Etat, la cinquantaine de victimes enterrées à Huanta sont des personnes, des paysans pour la plupart, disparues entre juillet et août 1984. L’armée péruvienne aurait conduit les victimes au stade de Huanta, transformé en une base militaire. Là, elles ont été torturées, exécutées et on a fait disparaître leurs corps. 4.000 charniers semblables ont été découverts ces dernières années au Pérou.

Charnier au Pérou

Depuis vendredi dernier, d’importants combats se déroulent dans la zone de Cerro Tincuya dans le Vizcatan entre la guérilla maoïste et des unités de fusillers-marins. Le ministre de la Défense Florez Araoz a regretté le nombre de victimes et la mort d’un Marine, mais a réaffirmé la décision de rester dans la zone. Parmi les militaires blessés, l’équipage d’un hélicoptère MI-17 des forces aériennes a été atteint pendant les combats dans la zone de Cerro Tinculla alors qu’il essayait d’approvisionner des fusillers-marins qui venaient d’être surpris par les guérilléros maoïstes. L’hélicoptère touché a pu se poser sur la base militaire de Pichari.

Le ‘Plan d’Opérations Excellence’, qui vise à anéantir les guérillas du Parti Communiste du Pérou (PCP, ‘sentier lumineux’), a débuté le 30 août 2008 dans une opération conjointe de 1.200 hommes de la Police et de l’Armée, avec la prise de Valle de los ríos Apurímac-Ene. Le but est de contrôler la région de Vizcatán, l’une des zones les plus importantes des maoïstes péruviens et dirigée par le Comité Régional Principal du Parti Communiste du Pérou. Comme d’habitude dans ce type d’opérations, les forces répressives ont perpétré des atrocités contre la population civile. Le maire du village Jésus de Belén, Tiófantes Camasa Bois, a dénoncé l’incendie des maisons et la disparition de onze personnes. Une survivante de l’incursion de l’armée, Lucy Pichardo, du village Pichis Río Seco, a dénoncé qu’après le passage de l’armée, son époux, ses trois frères et une cousine enceinte avaient disparus.

Le Ministre de la Défense du Pérou, Antero Florez Aráoz, a défendu les militaires en affirmant que ces plaintes faisaient partie d’une ‘opération psychologique de la part des terroristes’. A cette version s’est ajoutée celle de la dirigeante du parti de gouvernement (APRA), Mercedes Cabanillas, qui a déclaré que les disparus supposés étaient des subversifs qui avaient fui. Une commission d’organisations des droits de l’homme a visité le lieu des faits. Le 3 octobre, la commission a recueilli le témoignage de villageois torturés par l’armée. La commission a établi que les militaires avaient violé une femme, détruit 75 maisons, et déplacé 65 familles des villages Canayre, Pichari, Llochegua et Virgen Villa. Confrontée à ces faits, la commission s’est engagée… à demander la constitution d’une Commission d’enquête parlementaire.

Cependant, le 6 octobre, quatre cadavres ont été trouvés dans la Valle del río Apurímac-Ene. Il s’agissait des parents de Lucy Pichardo (Maximiliano Pichardo Fernández, Jésus Pichardo Fernández et José Félix Canchaya Limache). Selon le rapport de l’autopsie, ils ont été tués par balle à bout pourtant et dans le dos. L’autre cadavre est celui de Rosa Chávez Sihuincha, la cousine enceinte. Elle avait deux balles de pistolet de 9mm dans la tête.

Arrestation de paysans péruviens

Arrestation de paysans péruviens

Des poursuites ont été engagées contre 13 dirigeants de la gauche sur qui s’est traduite par un mandat d’arrestation sur un des leaders de l’opposition Ollanta Humala avec l’argument incohérent d’être impliqué dans la collaboration avec le terrorisme international. Une action policière qui met en lumière le processus accéléré de criminalisation et la poursuite des luttes politiques et sociales au milieu de la corruption qui ronge les entrailles du régime péruvien. L »engagement’ du Premier Ministre de faire la lumière sur cet imbroglio répressif conçu par le Service de Renseignements du Ministère de l’Intérieur contre les partis politiques progressistes, n’a été qu’une promesse verbale et a disparu devant la décision politique des plus hautes sphères du gouvernement dirigé par Alan García Pérez.

Le mandat d’arrêt, lancé le 24 décembre, est dirigé contre Renán Raffo Muñoz, dirigeant de la Commission Politique du Parti Communiste Péruvien (qui n’est le Parti Communiste Péruvien maoïste aussi connu sous le nom de ‘Sentier Lumineux’) , Alberto Moreno Rojas, Secrétaire général du Parti Communiste du Pérou Patria Rouge, Nicolás Olmedo Auris Melgar, Vice-président de la CGTP, Jorge Luis Jaime Cárdenas, Julio Isaías Céspedes Olórtegui, Yen Amadeo Campos Cuadrao, Luis Gastón Marquina Hernández, Luis Alberto Benites Jara, un dirigeant national du Peuple Unido-UPP, Eder Gerardo Cava, de Jacinto Cunia García, Rogger Abel Taboada Rodríguez et Felícita Cueva Capa.

Le gouvernement péruvien a prolongé de 60 jours l’état d’urgence dans plusieurs provinces des régions andines d’Ayacucho, de Junín et de Cusco. Dans cette vallée du sud des Andes se trouve la zone montagneuse et forestière du Vizcatán, bastion de la guérilla maoïste du Parti Communiste du Pérou (‘Sentier Lumineux’). La résolution publiée samedi 10 janvier, présentée par le ministre de la défense Antero Flores Aráoz, affirme que la décision de prolonger l’état d’urgence s’explique par ‘des situations contraires à l’ordre intérieur qui affectent le développement normal de la population.’ Le ministre a précisé: ‘La vallée de l’Apurimac-Ene est devenue une région militaire transitoire, mais autonome, afin de garantir l’approvisionnement en logistique et fournitures dans la lutte contre les reliquats du narco-terrorisme.’

Sous l’état d’urgence sont suspendus les droits constitutionnels de liberté et sécurité personnelle, l’inviolabilité du domicile et la liberté de réunion et de circulation. La mesure gouvernementale établit que l’Armée persistera dans son rôle de maintien de l’ordre dans la zone concernée par l’état d’urgence. Le ministre a expliqué que ‘la nouvelle organisation militaire permettra en outre de faire un meilleur usage des hélicoptères russes MI-17 et MI-18.’

Le gouvernement péruvien a lancé en août 2008 une offensive militaire dans cette vallée avec l’objectif d’éradiquer la présence de la guérilla. L’offensive militaire lancée par l’armée dans cette région au cours des derniers mois est un échec: 24 militaires ont été tués, 48 autres sont blessés, tandis que la guérilla n’aurait subi aucune perte. Une embuscade menée contre un convoi de l’armée péruvienne avait notamment fait seize morts en octobre dans le sud-est du pays.