Dans les Etats du Conseil de coopération du Golfe (l’Arabie saoudite, Bahreïn, le Koweït, Oman, le Qatar et les Emirats arabes unis) qui interdisent pour la plupart les partis politiques et les manifestations, de nombreux dissidents se sont tournés vers les plateformes des réseaux sociaux. Des centaines d’entre eux ont été emprisonnées à l’issue de procédure incluant parfois des tortures et de retrait de nationalité. Parmi eux figurent l’opposant bahreïni Nabil Rajab, accusé d’avoir «insulté» les autorités de Manama et de Ryad, et l’activiste saoudien Walid Abulkhair qui purge une peine de 15 ans de prison, ou l’avocat émirati Mohammed al-Roken, emprisonné depuis 2013 pour «complot».

Les gouvernements du CCG ont utilisé de la technologie de surveillance achetée à des entreprises occidentales et israéliennes pour suivre les activités en ligne de certains de leurs citoyens. A l’exception du Koweït, tous les gouvernements de cette région ont utilisé un logiciel intrusif qui permet à un gouvernement d’accéder aux emails, aux messages texte, à l’historique des appels (téléphoniques), aux listes de contacts, aux dossiers et, potentiellement, aux mots de passe de l’internaute surveillé.

Walid Abulkhai

Walid Abulkhai

Suite à un attentat suicide de l’EI le mois dernier qui avait fait 26 morts, le gouvernement koweitien vient d’approuver une loi extrêmement lourde puisqu’elle va imposer à toute sa population (1.3 millions de Koweitiens et 2.9 millions de résidents étrangers) de fournir un échantillon d’ADN à une base de données nationale. Toute personne refusant sera passible d’une condamnation à un an de prison et à une amende de 33.000$ (30.000€). Toute personne qui fournira un faux échantillon sera passible de 7 années d’emprisonnement. Le budget total de l’opération est estimé à 400 millions de dollars américains.

En 2005, le Portugal avait souhaité faire passer une telle loi, avant de se raviser pour des questions de coût. En 2008, l’Union Européenne avait finalement interdit le fichage d’une personne tant qu’elle n’a pas été accusée d’un crime.

Tous les Koweitiens devront donner leur ADN à une base de données nationale

Tous les Koweitiens devront donner leur ADN à une base de données nationale

Un tribunal de Koweït a acquitté mardi les 67 apatrides qui avaient été arrêtés en octobre 2012 alors qu’ils manifestaient à l’occasion de la journée mondiale de la non-violence pour demander le droit à la nationalité koweïtienne. Libérés sous caution peu après leur arrestation, ils étaient aussi accusés d’avoir agressé des policiers, ce qu’ils ont nié devant le tribunal. Le verdict n’est pas définitif et le procureur a la possibilité d’interjeter appel.

Environ 110.000 apatrides sont nés au Koweït et en revendiquent la nationalité. Ces deux dernières années, ils ont manifesté à plusieurs reprises pour demander la nationalité et l’accès aux services publics. Les autorités en ont naturalisé 34.000 mais affirment que les autres détiennent d’autres nationalités. Ces manifestations ont été réprimées par la police et des centaines de manifestants ont été arrêtés et certains condamnés à des peines de prison.

Hejab al-Hajeri, un étudiant en droit, avait été condamné en avril 2013 à deux ans de prison par un tribunal de première instance qui l’avait reconnu coupable de tweets jugés critiques à l’égard de l’émir. Une cour d’appel a confirmé le jugement six mois plus tard. Le militant, qui avait été libéré sous caution, doit maintenant purger sa peine, le jugement de la Cour suprême étant sans appel. Des tribunaux koweïtiens ont, au cours des deux dernières années, inculpé et condamné à des peines de prison nombre d’internautes de l’opposition sous l’accusation d’offense envers l’émir, qui a par la suite accordé sa grâce à plusieurs d’entre eux. D’autres sont jugés pour des charges similaires. Au Koweït, critiquer l’émir constitue une infraction à la Constitution, dont l’auteur est passible d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison.

Houda al-Ajmi a été reconnue coupable de trois chefs d’accusations: insulte envers l’émir, appel à renverser le régime et mauvaise utilisation de son téléphone portable. Elle a écopé de cinq ans de prison pour chacune des deux premières accusations et à un an pour la troisième, soit la plus lourde peine de prison prononcée par un tribunal koweïtien dans ce genre d’affaire depuis que le gouvernement a lancé en octobre une campagne de répression contre les militants en ligne.