Au moins 44 personnes ont été tuées et 140 blessées hier mercredi dans deux explosions provoquées par un attentat dans la ville de Qamichli, au Rojava. Il s’agit du plus gros attentat jamais perpétré dans la ville de Qamichli. Il a fait état de dégâts très importants et de corps ensevelis sous les décombres. L’attentat a été mené par un kamikaze qui s’est fait exploser à bord d’un gros camion près d’un point de contrôle proche des administrations de la zone autonome kurde dans la ville, dont l’organisme chargé des affaires de Défense. Cette explosion a provoqué celle d’une citerne de gaz. Les hôpitaux débordés par le grand nombre de victimes. Les forces du régime syrien contrôlent l’aéroport et certains quartiers de Qamichli. Le reste de la province fait partie de la zone autonome kurde et est défendue par les YPG et son équivalent féminin, les YPJ.

Le théâtre de l’attentat à Qamichli

Le théâtre de l'attentat à Qamichli

Le Daesh ayant refusé l’offre qui lui était faite d’évacuer la ville de Manbij, les combats ont repris dans la ville. Après avoir pris les silos situés au sud de Manbij, les QSD, surplombent désormais la moitié de la ville, en contrôle les principaux axes de ravitaillement, et gagnent petit à petit dans la ville et alentours les positions stratégiques qui réduisent les capacités de manœuvres des combattants du Daesh. Les affrontements se concentrent dans le quartier de Binawi, à l’intérieur de Manbij, et à la périphérie sud-ouest de la ville. C’est une lutte difficile et meurtrière. La tactique des jihadistes consiste à harceler les assaillants avec des snipers, à utiliser les civils comme boucliers humains, à piéger le terrain avec des mines et des IED, et à lancer de brèves contre-attaques au moyen de kamikazes conduisant des voitures bourrées d’explosifs.

Le Daesh est affaibli par les frappes aériennes des puissances impérialistes occidentales dont l’intensité s’explique par le fait que, parmi les quelques 2.000 jihadistes retranchés à Manbij, on compte un important contingent européen, dont de nombreux Français. Ces frappes ont fait de nombreuses victimes civiles à Manbij et dans quelques localités voisines, comme les villages d’al-Nawajah, et de Toukhan al-Koubra, où l’aviation française aurait tué 120 civils dans des raids de représailles après l’attentat de Nice.

Combattants du QSD au nord de Manbij

Au Rojava, l’Assemblée générale du canton de Cizire avait voté une loi rendant obligatoire un service militaire de courtes périodes régulières pour les habitants âgés de 21 à 30 ans. L’assemblée vient de modifier cette loi en reconnaissant aux habitants du cantons le droit à l’objection de conscience.

Combattants du QSD au nord de Manbij

La ville de Manbij, dont la libération a commencé le 30 mai dernier, est toujours le théâtre d’affrontements entre les QSD (représentés sur place par le ‘Conseil Militaire de Manbij’) et Daesh. Les combats sont difficiles et ont lieu dans le centre-ville. L’issue de la bataille ne fait aucun doute, mais l’Etat Islamique inflige de lourdes pertes aux combattants QSD, de très nombreux combattants ont probablement été tués depuis le début de l’opération il y a 6 semaines sans que l’on ait de chiffres exacts. La ville est totalement encerclée par les QSD, et un autre front est ouvert à l’ouest.

Les Forces Démocratiques Syriennes ont déployés des unités de snipers dans le centre-ville:

Les QSD arrachent le centre-ville de Manbij à Daesh.

Les QSD arrachent le centre-ville de Manbij à Daesh.

Une délégation internationale comprenant des membres du Secours Rouge International s’est récemment rendue au Rojava et a pu remettre en main propre un premier lot de pansements hémostatiques Celox, ainsi que du matériel médical et informatique au service médical du Bataillon international. D’autres livraisons suivront. A l’heure actuelle, près de 8.000€ ont été récoltés par les organisations participantes dont 2.600€ ont déjà été convertis en pansements et 1.000€ donnés en cash au Bataillon International de Libération.

Notre Celox au Rojava

Le soutien au Rojava est actuellement difficile. Certains présentent les Forces Démocratiques Syriennes (QSD) comme une marionnette américaine, mais il n’en est rien: le « soutien » américain se limite aux frappes contre l’État islamique. De soutien politique il n’y en a pas, il n’y en aura jamais, le projet du Rojava est un projet révolutionnaire et anticapitaliste. Les représentants du Rojava ne sont considérés comme des « alliés » qu’à l’intérieur des frontières syriennes, face à Daesh. Les représentants du PYD se voient refuser l’accès aux Etats-Unis, les internationalistes qui ont combattu aux côtés des YPG/YPJ sont inquiétés en Europe alors que les combattants sont emprisonnés et parfois torturés par le régime de Barzani au Kurdistan irakien et en Turquie. Les Etats-Unis ont distribué armes et entraîneurs à de nombreuses officines islamistes (dont le Front al Nusra, la succursale syrienne d’Al Qaeda…).

Alors que les QSD sont en train de devenir la première force politico-militaire en Syrie et la seule qui résiste efficacement à l’Etat Islamique, la totalité des autres forces voisines s’accordent à l’étouffer dans l’embargo. Au nord, la Turquie impose un blocus féroce, tout en assassinant des centaines de civils dans les villes kurdes de Turquie; à l’est le Kurdistan irakien, dirigé par des forces féodales liées à l’impérialisme, mène aussi un embargo contre le Rojava, ne laissant pas même passer les convois humanitaires.

Malgré ces difficultés, notre campagne a su apporter un soutien réel à ceux qui portent un projet révolutionnaire au Rojava et dans le nord de la Syrie, à ceux qui combattent l’Etat Islamique et à ceux qui ont aujourd’hui plus que jamais besoin de notre soutien. Pour participer à cette campagne de solidarité: continuez à envoyer vos dons. Nous remercions ceux qui ont déjà fait un don.

Notre Celox au Rojava

Notre Celox au Rojava

Jitse Akse, un ex-militaire qui avait combattu l’État Islamique aux côtés des YPG et qui avait été inculpé de meurtre aux Pays-Bas finalement été relaxé, l’affaire ayant été classée sans suite. « L’enquête n’a pas délivré suffisamment de preuves qu’il ait été impliqué personnellement dans des meurtres ou des tentatives de meurtres » selon le parquet néerlandais, alors même que Jitse avait déclaré dans les médias « En tuant un combattant de l’EI, je sauve probablement des dizaines de vies ». Depuis la début de la guerre de Syrie, plusieurs combattants et internationalistes européens ont été inquiétés pour avoir combattus aux côtés des forces kurdes. Jusqu’à présent, l’Espagne s’est démarquée en ayant choisi de considérer le PYD comme une succursale du PKK et ses soutiens comme des « terroristes ».

Jitse A

Jitse A

Les Forces Démocratiques Syriennes (QSD) ne sont plus qu’à 700 mètres de la porte sud de Manbij. Depuis la reprise de l’opération de libération de Manbij (le 30 mai dernier), la stratégie des QSD a été d’encercler d’abord largement la ville pour permettre aux civils de fuir et pour étouffer les ressources de Daesh. La « phase 2 » de l’opération consiste depuis quelques jours à se rapprocher de tous les cotés de la ville. Les combats sont à présents durs, les islamistes revendiquent sur Twitter une attaque suicide qui aurait décimé plusieurs combattants QSD, mais cette info n’a pas été confirmée.

Des représailles semblent avoir eu lieu à Al-Bab où Daesh aurait enlevé plusieurs centaines de Kurdes pour leur faire payer la défaite imminente à Manbij. La carte ci-dessous date d’hier.

Manbij

Manbij

Le Mont Shengal est toujours au centre des tensions entre les partis Kurdes progressistes -PKK et PYD- et le PDK qui gouverne le quasi-état kurde irakien. Dernier échange de cette guerre froide, le Conseil Provincial de Ninive a « exigé » que les guérillas du PKK se retirent du Mont Shengal, au motif qu’elles violeraient l’intégrité territoriale irakienne. Le PKK a répondu qu’il ne se retirerait pas de Shengal car cela se ferait au bénéfice de l’Etat Islamique.

Le Mont Shengal est habité par les Yézidis, une minorité kurde. Lorsque Daech a envahi le Mont à l’été 2014, des centaines de Yézidis ont été massacrés, des centaines de femmes ont été kidnappées et réduites à l’esclavage (nombre d’entre elles sont toujours détenues par Daesh). Les combattants « Peshmergas » du PDK -responsables de la protection des Yézidis- ont fuit avant même l’arrivée des troupes djihadistes, laissant 200.000 civils désarmés errer dans les montagnes avec Daesh aux trousses. Ce sont finalement les guérillas du PKK et du PYD qui leur ont porté secours, les guérillas sont restées à Shengal et sont à présent la seule barrière entre les islamistes qui occupent Mossoul et le Rojava. Depuis que le Mont a été totalement libéré il y a quelques mois, le PDK tente de faire expulser le PKK, sans succès jusque là.

Carte du Mont Shengal

Carte du Mont Shengal

L’un des principaux objectifs des Forces Démocratiques Syriennes à l’heure actuelle est toujours l’unification des cantons du Rojava puisque le canton d’Afrin est toujours séparé des deux autres cantons de Kobané et Ciziré. La Turquie refuse que les QSD approchent de la bandelette de territoire comprise entre Azaz et Jarabulus le long de la frontière turque. La nouvelle stratégie est donc à l’heure actuelle de joindre les cantons « par le sud » en prenant des villes difficilement accessibles à l’artilerie turque. En pratique, cette opération consiste en la libération de Manbij (qui sera libérée et administrée par un « Conseil Militaire de Manbij » arabe pour éviter toute accusation d’occupation kurde). Les QSD progresseront ensuite en ligne droite vers l’ouest, à travers Qabbasin et Al-Bab (toutes deux sous occupation de Daech), pour finalement rejoindre Mare, si tout se passe comme prévu.

Aujourd’hui, les QSD ont terminé d’encercler Manbij et poursuivent leur progression vers l’ouest alors que des civils ont réussi à s’échapper de la ville et ont trouvé protection chez les QSD. Sur la carte: QSD en jaune, Daech en noir, le régime en rouge et la FSA en vert.

La situation actuelle à Manbij.

La situation actuelle à Manbij.

Depuis près de trois mois, la frontière de Semalka, entre le Kurdistan Sud (Bashur) et le Rojava était fermée. En causes, les tensions politiques entre le PDK (Parti Démocratique du Kurdistan, droite) et la gauche kurde (PKK et PYD), le premier accusant les seconds « d’arabiser » le Rojava. Le PDK est en outre très favorable au régime turc qui bombarde les bases de la guérilla dans les Monts Qandil. La fermeture de Semalka n’a pas manqué de provoquer d’autres tensions à l’intérieur du Bashur où toute l’opposition kurde (PUK et Goran en tête) critiquait l’embargo imposé alors que le Rojava souffre d’une crise économique qui s’ajoute à la pénurie et à la guerre contre l’Etat Islamique. Suite à la visite à Kobané du chef des renseignements kurdes irakiens (PUK) il y a deux jours, la frontière de Semalka aurait finalement été rouverte aux passages humanitaires, mais l’administration autonome du Rojava et du Nord de la Syrie a nié ce matin cette ouverture. A l’heure actuelle, il est difficile de savoir si la frontière est bien ouverte et qui peut la franchir, mais il y a du mouvement.

La frontière de Semalka

La frontière de Semalka

Les Forces Démocratiques Syriennes (QSD) poursuivent la libération du nord de la Syrie. Dans le nord de la province de Raqqah, la progression est prudente et donc lente, mais elle se poursuit sur quatre lignes de front (une de plus qu’au début de l’opération), il y aurait près de 15.000 combattants QSD sur cette seule opération. Les islamistes qui fuient vers la ville de Raqqah ou vers Manbij laissent derrière eux des centaines de mines qui sont retirées dés que les QSD y arrivent, permettant ainsi le retour des populations chassées par Daesh.

Dans le nord de la province d’Alep, le refroidissement des relations entre Daesh et l’État turc a pour conséquence que Daesh attaque à présent les groupes de l' »Armée Syrienne Libre » (FSA) soutenus par la Turquie. 165.000 civils et réfugiés sont donc menacés par l’avancée du « caliphat », la ville de Sheikh Issa (à l’ouest de Marea) est donc passé sous contrôle des QSD sans le moindre combat, permettant l’évacuation des civils et la défense de Marea par les rebelles FSA. Dans la ville d’Alep même, le quartier kurde de Sheikh Maqsood essuyait il y a peu encore les tirs d’artillerie de la FSA, la situation humanitaire y est terrible: embargo total, population principalement civile (malgré la présence de combattants YPG/YPJ), bombardée nuit et jour. Enfin, entre Raqqah et Alep, à l’ouest du barrage de Tichrin, les QSD auraient repris hier la progression vers Manbij, qui avait été arrêtée il y a quelques mois.

Enfin, du coté « irakien » de la frontière, les YBS (Unités de Protection du mont Shengal, proches du PKK) ont repoussé plusieurs assauts de Daesh et abattu 17 djihadistes au sud du Mont Shengal. Trois guérilléros ont été tués au combat dont l’un n’avait que 17 ans.

Le front de Manbij réouvert.

Mise à jour 13.40: le quatrième front de Raqqah vise le barrage de Taqba (celui qui suit le barrage de Tichrin plus au sud de l’Euphrate), ceci renforce la théorie selon laquelle les SDF ne veulent pas immédiatement libérer Raqqah mais plutôt réunir le canton d’Afrin par ce chemin pour éviter les représailles turques. Salih Muslim, co-président du du PYD, a lui même confirmé que la libération de la ville de Raqqah nécessitait la création d’une administration arabe pour que les YPG ne se comportent pas comme une armée d’occupation.

Le front de Manbij réouvert.