Ce 6 septembre, à la demande du parquet général, le tribunal pénal d’Izmir a décidé d’interdire et de confisquer tous les livres «Les filles de Kobani: L’histoire de la rébellion – Courage et justice» écrit par la journaliste-auteure américaine Gayle Tzemach Lemmon en 2016. Le livre contient des souvenirs, des récits des femmes qui luttent contre l’Etat islamique (DAECH / ISIS) à Kobané et «La couleur pourpre de la politique kurde» compilé par Gültan Kisanak (voir article ici) en 2018, recueil d’écrits de vingt-deux femmes politiques kurdes emprisonnées en Turquie. Il explore les défis personnels et collectifs auxquels sont confrontées les femmes kurdes dans un système patriarcal et anti-kurde ainsi que leurs convictions politiques inspirées des mouvements anticapitalistes et socialistes en Turquie. Les 2 livres ont été saisis le 6 octobre 2023 lors de l’arrestation et de la perquisition au domicile Berna Çelik ancienne coprésidente provinciale d’Izmir du Parti démocratique des peuples (HDP). Selon le bureau du procureur «Il est entendu que les livres contiennent de la propagande terroriste de l’organisation du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK)».

Le tribunal a ordonné le rappel de tous les livres vendus jusqu’à présent. La culture Kurde est plus que jamais dans le collimateur du gouvernement turc.

Aujourd’hui, La Haute Cour pénale de Malatya a condamné Gültan Kışanak, maire destituée de Diyarbakir et membre du HDP, à 11 ans et 3 mois d’emprisonnement pour « appartenance à une organisation illégale » (elle était accusée de faire partie du PKK) et à trois autres années d’emprisonnement pour « propagande en faveur d’une organisation illégale ».

Gültan Kışanak est une rescapée de la tristement célèbre prison de Diyarbakir connue pour être une des pires prison au monde au niveau des tortures pratiquées sur les détenus. Première femme élue à la tête de Diyarbakir, elle avait été arrêtée en 2016 (avec son collègue Firat Anli) destituée et remplacée par un administrateur nommé par le gouvernement (voir notre article)

Au cours de cette audience, la Haute Cour Pénale a également prononcé à l’encontre de Sebahat Tuncel, co-présidente du Parti démocratique des régions (DBP), une peine d’emprisonnement de 9 ans et 9 mois pour « appartenance à une organisation illégale et à 5 ans et 3 mois pour faits de « propagande pour une organisation illégale ». Sebahat Tuncel avait été arrêtée en novembre 2016 alors qu’elle protestait contre l’opération politique menée contre les députés du HDP?. Elle n’a pu assister à l’audience car elle est en grève de la faim illimitée et l’objet pour ce fait d’une sanction disciplinaire.

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Gültan Kisanak et Firat Anli (archive)

Gültan Kisanak et Firat Anli (archive)

De violents affrontements ont éclaté entre policiers et manifestants à Diyarbakir hier mercredi, au lendemain du placement en garde à vue des deux maires de cette grande ville du Kurdistan. Des policiers déployés autour de la mairie de la ville ont repoussé à coups de matraques, de grenades lacrymogènes et en faisant usage de canons à eau des centaines de manifestants, dont certains jetaient des pierres. La connexion Internet a été coupée mercredi matin à Diyarbakir et n’avait toujours pas été rétablie en début de soirée.

Gültan Kisanak, première femme élue à la tête de Diyarbakir, et son collègue Firat Anli ont été interpellés mardi soir dans le cadre d’une enquête sur de présumées « activités terroristes ». Ils sont accusés d’avoir permis l’utilisation de véhicules municipaux pour les funérailles de membres du PKK tués par les forces de sécurité, d’avoir « incité à la violence » ou encore d’avoir soutenu des appels en faveur d’une plus grande « autonomie ». D’autres rassemblements de protestation contre ces gardes à vue étaient prévus ailleurs en Turquie, notamment à Istanbul, mais également en Europe. Le mois dernier, 24 maires du sud-est du pays soupçonnés d’être liés au PKK ont été suspendus et remplacés par des administrateurs nommés par le gouvernement, une mesure qui a déclenché des manifestations dans plusieurs villes de la région.

Gültan Kisanak et Firat Anli (archive)