Hier, une bombe a explosé au passage d’un fourgon de police au centre-ville de Hakkari, dans le sud-est de la Turquie. L’explosion a fait une douzaine de blessés et n’a pas été revendiquée. Néanmoins, les autorités ont d’ores et déjà affirmé que la province d’Hakkari étant proche de la frontière irakienne et que sa population étant à majorité kurde, elle devait être l’oeuvre du PKK.

Les opérations des autorités turques à l’encontre de la communauté kurde dans le cadre de l’enquête visant la KCK (Kurdish Communities Union) se poursuivent. Aujourd’hui, la police a interpellé 32 personnes. Tôt ce matin, des descentes ont été organisées dans plusieurs provinces parmi lesquelles Istanbul, Diyarbakir, Ankara, Siirt et Adana. Une des personnes arrêtées a été identifiée comme étant une ancienne députée du Democratic Society Party (DTP) aujourd’hui dissout par le gouvernement turc. Un certain nombre de bâtiments appartenant à son successeur, le BDP (Peace and Democracy Party) ont également été fouillés, tout comme la maison de la député indépendante Leyla Zana, qui avait récemment critiqué toutes ces actions.

Plus de quarante personnes ont été interpellées hier dans le cadre des opérations en cours visant le KCK (Kurdish Communities Union) à Istanbul et dans le sud-est du pays. Les autorités turques accusent le KCK d’être la branche urbaine du PKK, organisée considérée comme terroriste. Hier, des officiers de police ont mené des opérations de grande envergure à Istanbul et dans la province de Diyarbakir, ramassant des douzaines de personnes en rapport avec les enquêtes en cours. Vingt personnes ont également été placées en garde à vue le 10 janvier dans le district de Silopi (province de Sirnak) alors que quinze autres suspects, parmi lesquels trois mineurs, ont été interpellés à Istanbul en raison de leur prétendue appartenance au KCK. Toutes ces rafles ont lieu autour des enquêtes actuellement en cours contre le KCK. 152 personnes ont déjà été arrêtées, 104 d’entre elles sont en instance de procès, toutes accusées de faits de terrorisme ou de liens avec une organisation terroriste.

En août dernier, les autorités turques avaient déposé plainte contre la chaine de télévision kurde ROJ TV ainsi que contre sa maison-mère, Mesopotamia Broadcast A/S METV devant la justice danoise. ROJ TV ne possède pas de studio à Copenhague mais émet vers 68 pays depuis la capitale danoise via satellite grâce à une licence obtenue en 2004. Le gouvernement d’Ankara exigeait l’interdiction pure et simple d’émission pour la chaîne en raison du fait qu’elle ferait de la propagande pour le PKK. Hier, un tribunal a statué que ROJ TV avait violé la loi antiterroriste danoise mais que la législation nationale ne permettait pas d’exiger sa fermeture. Néanmoins, elle a été condamnée à une amende de 400.000 euros pour avoir fait la propagande d’une organisation terroriste ainsi que pour avoir reçu des fonds de celle-ci. Les autorités turques ont immédiatement réagi à l’annonce du verdict en disant qu’elles allaient probablement faire appel de cette décision afin d’empêcher ROJ TV de poursuivre ses activités. Quelques 300 manifestants pro-kurdes s’étaient rassemblés devant le tribunal et ont scandé des slogans et chanté à l’annonce du verdict.

D’après les informations de certaines agences de presse turques, de violents affrontements auraient opposé les forces de sécurité et des militants du PKK ce dimanche. Il semblerait que des milliers de militaires, soutenus par des hélicoptères et l’artillerie, aient effectué une mission dans les Mount Cudi, dans le sud-est du pays, mission au cours de laquelle ils se seraient confrontés aux guérilleros durant plusieurs heures. A la tombée de la nuit, les combats se poursuivaient, et des troupes additionnelles auraient été envoyées en renfort. Aucun bilan n’a été communiqué.

Hélicoptère militaire

Hélicoptère militaire

Cinq jeunes Kurdes ont été condamnés mardi à cinq mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Paris pour avoir saccagé le 1er novembre un café parisien fréquenté par une clientèle turque.

Plusieurs heurts entre Turcs et partisans du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) s’étaient déroulés pendant le week-end de la Toussaint à Paris. Ainsi, quelque 150 fascistes turcs s’étaient rassemblés le 30 octobre place de la Bastille pour protester contre «le terrorisme en Turquie». Des affrontements avaient eu lieu avec des contre-manifestants kurdes. Deux jours plus tard, à l’issue d’une manifestation, 27 jeunes Kurdes étaient arrêtés après l’attaque à coups de bâtons et de barres de fer un café du 10e arrondissement. A l’audience, les Kurdes ont déclaré avoir été insultés par les clients du café. Sur les 22 jeunes de 19 à 29 ans jugés mardi, cinq ont été condamnés à une peine de cinq mois de prison avec sursis.

En cette année 2012, la Turquie entend accentuer sa lutte contre le PKK et a donc annoncé qu’elle allait acquérir divers systèmes armés pour combattre les guérilleros. L’entreprise italienne AgustaWestland et TAI (Turkish Aerospace Industries) collaborent actuellement à la construction d’un hélicoptère d’attaque T-129 qui sera une ‘version turque’ du A129 de la compagnie Mangusta International. AugustaWestland devrait livrer les neuf premiers appareils (sur les 59 prévus) à l’armée avant la fin 2012. Les autorités turques assembleront ensuite les systèmes d’armes requis sur les plateformes et les hélicoptères de combat seront opérationnels courant 2013. Séparément, les USA doivent fournir trois hélicoptères AH-1W Super Cobra au début de l’année. En plus de tout cela, TAI va livrer à l’armée turque trois MALE (Anka Medium Altitude Long Endurance), des drones destinés à des missions de reconnaissance. Les autorités turques ont également passé une commande pour quatre drones RQ-1 Predator et deux MQ-1 Reapers aux Etats-Unis, mais ceux-ci n’y ont pas encore donné suite.

Hélicoptère d’attaque turque

Hélicoptère d'attaque turque

On en sait maintenant davantage sur l’incident qui a coûté la vie à deux membres présumés du PKK à Diyarbakir. La police turque a donné l’assaut à un appartement occupé par les deux jeunes Kurdes. Des grenades ont été lancées à l’intérieur de l’appartement, et les deux jeunes gens se sont alors jetés par la fenêtre. Ils étaient en pyjama. Ils sont restés au sol pendant un moment, puis ils ont essayé de se mettre debout. Ils étaient entourés de policiers qui se moquaient d’eux, avant de les exécuter en tirant dans la tête. Les policiers ont ensuite ouvert le feu sur le bâtiment pour faire croire qu’il s’agissait d’un affrontement. Plusieurs milliers de personnes se sont rassemblés pour protester contre cette exécution. Des heurts ont été éclatés entre les policiers et les manifestants. Plus de 50 manifestants ont été arrêtés par la police.

Turquie/Kurdistan: Deux exécutions extra-judiciaires

L’AKP, le parti actuellement au pouvoir en Turquie, a déposé un projet de loi visant à couper toute communication entre le dirigeant emprisonné du PKK Abdullah Ocalan et ses militants via ses avocats. Le projet qui a été soumis au parlement offre la possibilité aux autorités d’interdire aux avocats de rendre visite aux prisonniers jugés pour des périodes allant jusque six mois. ‘Cette interdiction serait activée par un juge si des faits concrets prouvent que le prisonnier dirige les activités d’une organisation criminelle par l’intermédiaire des gens qu’il rencontre en prison’, prévoit le texte. Cela fait longtemps que les avocats d’Ocalan sont critiqués et accusés d’agir en tant qu’intermédiaires pour faire passer les ordres et les instructions d’Ocalan au PKK. D’ailleurs, depuis le mois de juillet dernier, aucun d’entre eux n’a eu la possibilité de lui rendre visite sous prétexte que les bateaux qui font la navette entre le continent et l’île où est détenu Ocalan sont en panne.

Par ailleurs, deux membres du PKK ont été tué aujourd’hui dans la ville de Diyarbakir, dans le sud-est de la Turquie. La police a effectué une descente dans une maison où ils se cachaient. Encerclés, ils ont refusé de se rendre et ont jeté des grenades aux forces de l’ordre. Deux militants sont décédés au cours de la fusillade qui a suivi. En outre, la police a saisi deux fusils et trois grenades.
EDIT: L’information ci-dessus a été démentie par les médias kurdes qui parlent d’exécutions extra-judiciaires.

Dans le courant de la nuit, les autorités turques ont mené un raid aérien à la frontière avec l’Irak dans le sud-est du pays. L’armée avait eu vent de potentiels mouvements de guérilleros du PKK dans la région et a déclenché une attaque aérienne. Au cours de celle-ci, 35 civils ont été tués.

Le BDP a organisé une manifestation qui a réuni plus de 2.000 personnes sur la place centrale de Taksim à Istanbul pour protester contre le raid de l’armée. Ce rassemblement s’est terminé en heurts avec les forces de l’ordre. Les manifestants, dont certains portaient des photos des cadavres de victimes du raid aérien, ont scandé des slogans favorables au PKK et à son chef emprisonné, Abdullah Öcalan.

Des heurts se sont également produits à Diyarbakir et Sirnak, deux villes du sud-est anatolien peuplé en majorité de Kurdes, où les manifestants ont jeté des pierres et des coktails molotov sur la police qui a riposté avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau.

Turquie/Kurdistan: L’aviation turque tue 35 civils