Radio Begum, station afghane animée par des femmes pour les femmes, se trouve privée d’antenne depuis ce mardi 4 février, des officiers de la Direction générale des renseignements, assistés par des représentants du ministère de l’Information et de la Culture, ont fait une descente dans les locaux à Kaboul. Deux travailleurs ont été arrêtés, deux hommes employés pour se conformer aux lois des talibans. Des ordinateurs, disques durs et téléphones ont été saisis. La diffusion est suspendue jusqu’à nouvel ordre. Le ministère tente de justifié cet acte en affirmant qu’« en plus de commettre de multiples infractions, la radio fourni du matériel et des programmes à une télévision basée à l’étranger ». Radio Begum restait la seule à diffuser des programmes éducatifs, des émissions sur la santé pour les femmes et d’autres émissions plus divertissantes ainsi que des sessions dites « psychologiques », à l’écoute des auditrices qui, de plus en plus nombreuses, se disent envahies par les pensées suicidaires.

Radio Begum a été fondé par Hamida Aman, journaliste afghane. Elle avait choisi le 8 mars 2021, Journée internationale des droits des femmes, pour lancer sa station à Kaboul, mais cinq mois plus tard, la capitale afghane tombait à nouveau entre les mains des talibans. La direction de la radio demande la libération de ses employés. 

La semaine dernière, les autorités afghanes ont rappelé aux ONG, nationales et internationales, qu’il leur était interdit de travailler avec des femmes afghanes. Le régime a annoncé vouloir fermer toutes les organisations non gouvernementales, qu’elles soient nationales ou étrangères en Afghanistan, si elles ne respectent pas cette nouvelle règle. Le non-respect de ce nouvel ordre entraînerait pour les ONG la perte de leur licence d’exploitation. Depuis le retour des talibans à Kaboul en août 2021, les femmes ont  progressivement été chassées de l’espace public.

Actuellement, les Afghanes ne peuvent plus étudier au-delà du primaire, aller dans les parcs, les salles de sports, les salons de beauté, ni quasiment sortir de chez elles sans chaperon. Une récente loi leur interdit de chanter ou de déclamer de la poésie. Elle les incite aussi à « voiler » leur voix et leurs corps hors de chez elles. Ce n’est pas moins de 28 millions de femmes et filles que les talibans emmurent vivantes.

Samedi 28 décembre, le gouvernement impose une nouvelle loi en cas de construction d’un nouveau bâtiment, celui-ci sera dépourvu de fenêtres par lesquelles il est possible de voir de près « des femmes travaillant dans des cuisines, dans des cours ou collectant de l’eau dans des puits et qui peut engendrer des actes obscènes”, indique un document diffusé par sur X. La mairie et les services compétents devront surveiller les chantiers de construction pour s’assurer qu’il n’est pas possible de voir chez les voisins, poursuit le texte. Si de telles fenêtres avec vis-à-vis existent, les propriétaires sont invités à construire un mur ou à obstruer la vue, “pour éviter les nuisances causées aux voisins”, selon le décret.

Le régime taliban a instauré le mercredi 21 aout une nouvelle loi qui interdit aux femmes de chanter ou de lire à voix haute en public. L’objectif de cette loi est de « combattre le vice et promouvoir la vertu » selon le gouvernement afghan. La voix d’une femme est considérée comme intime. Le ministère de la Propagation de la vertu et de la Prévention du vice (PVPV) est désormais chargé d’appliquer cette loi. Cette nouvelle législation de 35 articles contrôle tous les aspects de la vie des femmes Afghanes, dans une interprétation ultra-rigoriste de la charia (loi islamique).

Les sanctions imposées par la police des mœurs vont de l’avertissement verbal aux menaces, amendes et détentions à la durée variable. La nouvelle loi stipule que les femmes doivent se couvrir le visage et le corps si elles quittent la maison, veiller à ce que leur voix ne soit pas entendue. « L’amitié » avec « un infidèle », à savoir un non-musulman, est proscrite, tout comme l’homosexualité, l’adultère, les jeux d’argent ou prendre le volant sauf dans certaines conditions. Les femmes ont aussi l’interdiction d’entrer dans les parcs, jardins, salles de sport et bains publics.

Quelques dizaines de de femmes scandant « Pain, travail et liberté” ont défilé devant le ministère de l’Éducation à Kaboul. Les manifestants ont déployé une grande banderole sur laquelle ont pouvait lire: “Le 15 août est un jour noir”, en référence à la date de la prise de Kaboul par les talibans dont c’est le premier anniversaire. Alors que les femmes défilaient “Justice, justice. Nous en avons marre de l’ignorance”, les forces de sécurité talibanes ont commencé à saisir les téléphones et les appareils photo des journalistes afghans, des correspondants internationaux, et des passants qui tentaient de filmer. Immédiatement après, des talibans en tenue militaire et armés de fusils d’assaut ont bloqué un carrefour devant les manifestantes et commencé à tirer en l’air pendant de longues secondes. L’un d’eux a simulé un tir en visant les manifestantes. Certaines manifestantes se sont ensuite réfugiées dans des magasins proches où elles ont été pourchassées puis battues à coups de crosse de fusil par des talibans. Plusieurs reporters ont été arrêtés, et au moins trois d’entre eux sont toujours en détention.

 

Quatre militantes féministes afghanes incarcérées à Kaboul ces dernières semaines, après avoir manifesté pour les droits des femmes, et portées disparues depuis, ont été relâchées par les talibans. Deux d’entre elles, Tamana Zaryabi Paryani et Parwana Ibrahimkhel, avaient été arrêtées le 19 janvier, les deux autres, Mursal Ayar et Zahra Mohammadi début février. À chaque fois les talibans avaient nié toute implication dans leur disparition et disaient avoir ouvert une enquête. Ces libérations interviennent alors que le régime, asphyxié économiquement, cherche à convaincre la communauté internationale, avec laquelle il négocie une aide humanitaire, financière et économique, qu’il a assoupli son attitude à l’égard des femmes. Mais, dans la pratique, ces dernières n’ont pas vu grand-chose changer dans leur condition de citoyennes de seconde zone.

La protestation contre l’obligation du hijab suite à laquelle Tamana Zaryabi Paryani avait été arrêtée

 

Les talibans ont pu mettre la main sur des dispositifs biométriques américains qui pourraient les aider à identifier les personnes étant venues en aide aux forces de coalition. Connus sous l’acronyme HIIDE (pour « Handheld Interagency Identity Detection Equipment »), ces appareils auraient été saisis il y a quelques jours seulement, dans le cadre de l’offensive des talibans. Or, ces dispositifs contiennent de nombreuses informations stratégiques, y compris des empreintes digitales et des scans d’iris de populations afghanes, regroupés au sein de bases de données centralisées.

Servant notamment sur le terrain pour l’usage de cartes d’identité, elles pourraient aujourd’hui permettre aux talibans de retrouver les populations ayant travaillé avec l’ancien régime ainsi que les armées étrangères sur place. Si ces données ne sont pas immédiatement accessibles dans les systèmes HIIDE, les talibans n’auront pas beaucoup de mal à y accéder in fine, peut-être avec l’aide de l’agence de renseignements pakistanaise, qui a déjà collaboré avec les talibans. La plateforme HIIDE contiendrait les données biométriques d’une majorité d’Afghans, utilisées par l’armée américaine il y a plusieurs années dans le cadre de la traque d’Oussama Ben Laden et d’autres personnes.

9.400 CV envoyés à la firme américaine de sécurité privée TigerSwan ont été exposés en ligne. Il ne s’agit pas d’un piratage, mais d’une erreur de la part d’une firme de recrutement externe, UpGard, qui les a exposé sur un compte Amazon Web Services (AWS), via l’outil TalentPen. Upgard était chargée jusqu’en février dernier de fournir un service de tri à TigerSwan en évaluant les CV qu’elle recevait. Les aspirants mercenaires font état dans leurs CV de leur participation à la Guerre d’Irak, à la sécurité des Jeux Olympiques de Sochi ou plus récemment à contrer les manifestations autour du Pipeline dans le Dakota du Nord, à Standing Rock. Les documents contiennent la plupart du temps l’adresse postale, les numéros de téléphone, les adresses e-mail, numéros de permis de conduire, de passeport et de sécurité sociale. De très nombreux CV se vantent également de bénéficier d’autorisations d’accès à des informations top secrètes via leurs anciens employeurs dans la défense ou dans les renseignements. La très grande majorité sont Américains, mais on retrouve également des citoyens irakiens et afghans qui retrouvent ainsi leur collaboration avec l’armée américaine exposée aux yeux de tous. On retrouve également des profils très hauts gradés, comme un ancien ambassadeur américain en Indonésie ou un ancien directeur des opérations clandestines de la CIA. Les CV sont restés accessibles au moins un mois et n’ont été supprimés que le 24 août.

TigerSwan est une firme de sécurité privée, une organisation paramilitaire, dans le même genre que Black Water.

Face à face à Standing Rock

A Nuremberg, 300 étudiants ont tenté d’empêcher l’expulsion d’un réfugié afghan également étudiant. Les étudiants ont tenté d’immobiliser la patrouilleuse qui embarquait le réfugié avant d’être matraqués, gazés, plaqués au sol et brutalisés. Les nombreux policiers déployés auront finalement arrêté le réfugié après plusieurs heures. Le même jour, le 31 mai, l’Allemagne a du repousser un vol charter destiné à l’expulsion de réfugiés en raison d’un attentat au camion piégé qui a fait plus de 90 morts et 400 blessés à Kaboul.

Cinq étudiants ont été arrêtés dans l’action, l’un d’entre eux était membre de Young Struggle.

La police forçant le blocage des étudiants.

La police forçant le blocage des étudiants.