À la veille des décisions attendues du Conseil constitutionnel sur la réforme des retraites, les syndicats français ont organisé une nouvelle journée de mobilisation jeudi sur l’ensemble du territoire. La CGT a dénombré plus d’1,5 million de manifestants à travers le pays, avec des heurts dans plusieurs ville (sur la photo: à Paris). Des grèves ont perturbé à nouveau les secteurs des transports, de l’énergie ou de l’éducation. Des actions « coup de poing » ont été lancées dans la matinée avec le blocage d’axes routiers et ferroviaires dans plusieurs villes, d’un dépôt de camions poubelles à Aubervilliers et de l’incinérateur de déchets d’Ivry-sur-Seine, près de Paris. Des manifestants ont envahi à la mi-journée le siège de LVMH situé 22 avenue Montaigne, dans le VIIIe arrondissement de Paris, qui abrite également un magasin Louis Vuitton. Députés et sénateurs de gauche ont lancé une deuxième demande de référendum d’initiative partagée sur la réforme des retraites, un texte davantage « sécurisé » en termes juridiques que la demande sur laquelle le Conseil constitutionnel doit se prononcer vendredi. La préfecture a interdit toute manifestation dans les environs du conseil constitutionnel.

 

Des heurts ont éclaté jeudi à Paris entre des manifestants et les forces de l’ordre lors de la 11e journée de mobilisation contre la réforme des retraites. Des blocages de lycées et de sites universitaires s’étaient produits dans la matinée à Lyon, Rennes, Lille et Paris, dont celui de l’université de la Sorbonne. Des actions de blocages aux portes de grandes villes ont par ailleurs provoqué des embouteillages. Plus de 1.300 personnes ont été contrôlées avant la manifestation. Parti de l’esplanade des Invalides en direction de la place l’Italie, le cortège est passé devant La Rotonde, le célèbre restaurant où Macron avait célébré en 2017 sa qualification pour le second tour de la présidentielle. Des manifestants ont lancé des projectiles sur les forces de l’ordre qui s’étaient placées en protection de la brasserie. Un début d’incendie s’est déclaré après le jet d’un fumigène sur le auvent.

MaJ: Il y a eu au final des affrontements à Paris, Lyon, Nantes, Saint-Nazaire, Rennes, Brest, Quimper, Vannes, Toulouse, Strasbourg, Caen, Charleville Mézière, Albertville, Nancy (où l’entrée de la succursale de la Banque de France a été incendié), et Angers. La 12e journée d’action a été fixée le 13 avril.

L’association des Mutilé.e.s pour l’Exemple organise une manifestation dimanche 9 avril dès 14H au départ du métro Jean Jaurès pour dénoncer les violences policières. Dans leur communiqué, ils affirment « Nous avons été amputé.e.s, éborgné.e.s, mutilé.e.s ou blessé.e.s par les Forces de l’Ordre lors de différentes manifestations dans le contexte des Gilets Jaunes. […] Nous sommes à un moment historique où la question des violences policières est plus forte que jamais. Les rapports de force policiers et la violence s’intensifient et se multiplient, il est de notre devoir de s’écouter, de s’organiser et d’agir ensemble pour mettre fin à cette brutalité policière et étatique ! »

Cinq jours après avoir demandé la dissolution des Soulèvements de la Terre (voir notre article), le ministre de l’intérieur français, Gérald Darmanin, a annoncé vouloir interdire un nouveau groupe: Défense Collective. « Nous avons identifié (ce) mouvement qui appelle au soulèvement. Nous allons aussi lance sa dissolution » a-t-il indiqué. Défense Collective est un collectif de Rennes né au moment les luttes contre la Loi Travail de 2016 et qui pour but de soutenir les personnes confrontées à la répression policière et judiciaire, mais aussi d’agir en amont par son action dans la rue et par l’expérience tirée de la répression. Defco organise des formations antirep, une legal team, et met en ligne des conseils (comment réagir à une garde à vue, etc.). Depuis, des collectifs Defco ont été fondés à Marseille et à Paris, mais il semble que seul le collectif rennois soit dans le collimateur.

Le site de Défense collective

«L’ordure va vous parler demain à 13 heures». Ce message a été posté par une quinquagénaire du Nord de la France sur Facebook avant l’intervention de Macron à la télévision le 22 mars dernier. Pour ce simple message, des policiers ont débarqué chez elle et l’ont emmenée au poste. Placée en grade à vue, elle est convoquée en procès, et encourt jusqu’à 12.000 euros d’amende pour «outrage». Un sous-préfet a porté plainte, des policiers ont enquêté, un procureur a décidé qu’il fallait poursuivre.

Le site Contre-attaque a rencensé quelques épisode de ce retour au crime de « lèse-majesté » en France:
En avril 2022, pour son dernier discours avant les élections, Macron était dans la petite ville de Figeac. Des habitants et habitantes ont déployé une banderole à leur balcon, sur la place où parlait le président : «Quand tout sera privé, on sera privé de tout». Des policiers étaient montés dans l’appartement, avaient menacé de défoncer la porte et d’embarquer les habitants, avant d’arracher la banderole. Ils étaient resté, illégalement, dans le domicile pendant tout le discours.
Durant le confinement, plusieurs personnes ont été intimidées voire placées en garde à vue à Toulouse, Marseille ou Caen pour avoir affiché des banderoles ou des pancartes contre Macron à la fenêtre de leurs domiciles. À chaque fois, le slogan était «Macronavirus, à quand la fin».
Le 27 mars 2023, un enseignant a été placé en garde à vue pour avoir posé sur les rails de la gare de Nice un pantin à l’effigie du président de Macron.
Le 7 avril 2018 à Nantes, lors d’une manifestation, une marionnette en papier et en chiffon à l’effigie de Macron a été jugée symboliquement et pendue. Pendant deux mois, une équipe de la Police Judiciaire de Nantes a enquêté, en récupérant des photos de journalistes et de vidéosurveillance. Un manifestant avait été interpellé à son travail, placé en garde à vue et perquisitionné, un autre, à la santé défaillante, a aussi été placé en cellule, et un mineur a été convoqué au commissariat.

Plusieurs marches et rassemblements ont eu lieu jeudi en France, principalement devant les préfectures pour dénoncer les violences policières le week-end dernier à Sainte-Soline. Au moins 10 préfectures avaient pris des arrêtés afin d’interdire ces manifestations. C’est le cas en Côte-d’Or, à Paris, en Haute-Vienne, dans le Tarn, le Finistère, le Doubs, la Haute-Saône, le Bas-Rhin et la Seine-Maritime. Dans certains départements, plusieurs villes sont concernées par ces interdictions. C’est le cas notamment de Rouen et du Havre en Seine-Maritime.

A Paris, le rassemblement devant l’Hôtel de ville de Paris s’est transformé dans la soirée en manifestation non-déclarée. Un cortège a circulé pendant quelques heures jeudi soir dans le centre de Paris. Du mobilier urbain et de nombreuses poubelles ont notamment été incendiés. Une manifestation sauvage a également eu lieu après le rassemblement devant la préfecture de l’Hérault, à Montpellier. Alors que la préfecture du Rhône avait pris un arrêté interdisant la manifestation, plusieurs milliers de personnes sont rassemblée à Lyon. Un cortège s’est formé et il y a eu des affrontements avec la police (photo). Les bassines ont volé au-dessus des grilles de la sous-préfecture de Lannion (Côtes-d’Armor). À la préfecture de Niort, ce sont des centaines d’éclats de grenades tirées par les forces de l’ordre à Sainte-Soline qui ont été lancés par dessus la grille. Un rassemblement a aussi eu lieu devant l’ambassade de France à Bruxelles.

 

Les familles des deux manifestants grièvement blessés lors de la manifestation de samedi contre les « méga-bassines » porte plainte à son tour pour « tentative de meurtre » et « entrave aux secours ». L’enquête judiciaire sur les conséquences de ces violents affrontements a été transférée mardi du parquet de Niort au parquet de Rennes en raison de sa compétence pour les affaires militaires (les gendarmes sont des militaires). Les investigations ont été confiées à l’IGGN (Inspection générale de la Gendarmerie nationale), ce qui n’est pas pour rassurer… « Quand on prévoit autant de grenades [4000 grenades ont été tirées) tirées, on peut anticiper pour prendre en charge de manière urgente les personnes qui peuvent être atteintes par ce dispositif », a déclaré l’avocate des familles. Un enregistrement a rpouvé que non seulement rien n’avait été prévu pour prendre en charge les blessés, mais que les secours ont même été interdit d’aller les prendre en charge: voir ici

Les parents d’un des blessés ont rendu publique cette déclaration: Notre fils Serge est actuellement hospitalisé avec un « pronostic vital engagé », suite à la blessure occasionnée par une grenade GM2L, lors de la manifestation du 25 mars 2023 organisée à Sainte-Soline (79) contre les projets de bassines irrigantes.
Nous avons porté plainte pour tentative de meurtre, entrave volontaire à l’arrivée des secours ; et pour violation du secret professionnel dans le cadre d’une enquête de police, et détournement d’informations contenues dans un fichier de leur finalité.
Suite aux différents articles parus dans la presse, dont beaucoup sont inexacts ou mensongers, nous tenons à faire savoir que :
– Oui, Serge est fiché « S » – comme des milliers de militants dans la France d’aujourd’hui.
– Oui, Serge a eu des problèmes judiciaires – comme la plupart des gens qui se battent contre l’ordre établi.
– Oui, Serge a participé à de nombreux rassemblements anticapitalistes – comme des millions de jeunes dans le monde qui pensent qu’une bonne révolution ne serait pas de trop, et comme les millions de travailleurs en lutte actuellement contre la réforme des retraites en France.
Nous considérons qu’il ne s’agit là nullement d’actes délictueux qui saliraient notre fils, mais que ces actes sont au contraire tout à son honneur.
Les parents de Serge
Le mercredi 29 mars 2023

De nouveaux heurts ont éclaté mardi en France lors de manifestations contre la réforme des retraites. La participation a connu un recul à 740.000 personnes, selon les autorités, et à plus de deux millions, selon la CGT, lors de la dixième journée de manifestations depuis janvier. Des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre se sont poursuivis mardi dans des dizaines de villes en France, de Lille à Toulouse, en passant par Rennes (plusieurs blessés, 6 arrestations), Bordeaux, Nantes (une banque incendiée, deux manifestants blessés, 49 arrestations), ou Lyon, mais aussi dans plusieurs petites villes (Rouen, Vesoul, Besançon, Lorient, etc.).

A Paris, les forces de l’ordre ont interpellé 27 personnes peu avant 19 heures et procédé à 10 000 contrôles. Depuis des semaines, les manifestations ont pris de multiples formes : baisse de la production d’électricité, 15% des stations-service sans carburant, trains et vols annulés, transports en commun parisiens perturbés et même fermeture de la Tour Eiffel et du Louvre. Les éboueurs parisiens ont décidé de mettre fin mercredi prochain à trois semaines de grève, qui ont laissé des milliers de tonnes de déchets s’amonceler dans les rues, mais avec l’objectif de reprendre la lutte avec plus de force, selon la CGT. Les syndicats ont de nouveau appelé à manifester le jeudi 6 avril.

 

Interpellé mardi 28 mars lors des questions au gouvernement quant aux affrontements violents de ce week-end à Sainte-Soline, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé engager la dissolution du collectif Les Soulèvements de la Terre, l’un des organisateurs des cortèges contre les mégabassines. Le ministre a rappelé que la manifestation avait été interdite par la préfecture. Darmanin a précisé que cette mesure de dissolution serait bientôt présentée en conseil des ministres, sous la forme d’un décret à l’issue de la procédure contradictoire. Darmanin a insisté sur « l’extrême violence de groupuscules fichés par les services de renseignement parfois depuis de très nombreuses années, comme le groupement de fait Soulèvements de la Terre ».

Tout cela donne envie d’en faire la promotion, donc: voir ici

 

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25.000 personnes ont répondu à l’appel du collectif d’associations « Bassines non merci », des « Soulèvements de la Terre » et la Confédération paysanne. La manifestation, interdite comme la dernière à l’automne, a convergé vers la « bassine » de Sainte-Soline, ce réservoir d’eau prélevée dans la nappe phréatique pour l’irrigation de l’agriculture industrielle en période de secheresse. 3.200 gendarmes et policiers et 9 hélicoptères avaient été mobilisés par les autorités pour défendre le site. Les  manifestants ont réussi à encercler le chantier et un des cortèges a réussi à s’introduire brièvement dans le chantier, les affrontements ont éclaté à coups de  jets de projectiles, de tirs de mortier et de cocktails Molotov d’un côté; de gaz lacrymogènes, de grenades de désencerclement et de canon à eau de l’autre. Des binômes de policiers en quad ont massivement bombardé les manifestants de grenades de désencerclement. Plusieurs véhicules de gendarmerie ont été incendiés (photos) par les manifestants qui ont forcé le premier cercle de défense sans parvenir à forcer le deuxième.

Au final, plus de 200 blessé.e.s sont recensé.es pour cette journée dont une quarantaine avec des plaies profondes (délabrantes) et des éclats surtout au niveau des jambes et du visage (dues aux grenades de désencerclement et aux tirs de LBD). Une dizaine de blessés graves ont été transférés au CHU. Un manifestant est dans le coma avec son pronostic vital engagé, deux autres ont leur pronostic fonctionnel engagé. Des équipes de medic ont été la cible de la police. La police ayant également bloqué la route aux secours et retardée la prise en charge des blessés. Le Samu a été interdit d’aller chercher les manifestants blessés. Certains ont du attendre plus d’une heure avant d’être évacué dans des voitures personnelles. 16 gendarmes ont également été blessés, dont six évacués vers les hôpitaux de la région et un grièvement touché qui a été héliporté.

Avant de repartir du chantier, les manifestant.e.s ont excavé et désarmé une pompe et une canalisation centrale de la bassine de Sainte-Soline. La Confédération paysanne a planté 300 m de haies et également monté une serre maraîchère afin d’aider à l’installation d’un paysan sur une parcelle proche de la bassine.