La campagne ‘America go home, this country belongs to us’ qui dure depuis des mois et vise particulièrement la fermeture de la base US de Incirlik fait face à une répression policière constante. Cette base est utilisée depuis des décennies pour héberger les troupes déployées au Moyen-Orient par les Etats-Unis, notamment en Afghanistan. De nombreuses associations luttent pour sa fermeture grâce à des affiches, des distributions de tracts et des pétitions. Des douzaine de personnes ont déjà été arrêtées et torturées par les forces de l’ordre pour avoir protesté. De nombreux procès sont en cours contre ces militants.

Le 19 décembre, trois militants ont été arrêtés à Edirne. Le 27 décembre, les familles et amis des trois militants se sont rassemblés à Edirne dans un grand mouvement de solidarité avec les prisonniers. Ils ont également fait circuler la pétition contre la base américaine. Durant la manifestation, ils ont été assaillis par des groupes fascistes, manifestement incité par la police. En effet, au lieu d’intervenir pour protéger les manifestants, les forces de l’ordre ont arrêtés huit personnes qui subissaient ces attaques, dont six ont été relâchées le lendemain. Les jours suivants, les manifestations se sont poursuivies dans différentes villes turques, les lynchages aussi. Partout, des militants ont été arrêtés, la police arrivant toujours après les fascistes, utilisant le scénario ‘les civils attaquent, la police vient à leur secours’.

Le 3 janvier, 150 personnes, dont de nombreux membres du Front Populaire qui se rendaient en bus à Edirne pour y manifester ont été stoppé à l’entrée de la ville par la police. Ils y ont subi une violente attaque par les fascistes et les forces de l’ordre. Sept personnes ont été blessées. A l’heure actuelle, ces 150 personnes se trouvent toujours aux portes d’Edirne, dans l’attente de pouvoir organiser leur manifestation.

Fin 2009, la cour d’appel de Bruxelles (photo) avait écarté les préventions de terrorisme à l’encontre des militants et sympathisants du DHKP-C. Trois d’entre eux avaient toutefois été condamnés pour association de malfaiteurs, écopant de peines avec sursis. L’Etat turc a décidé de se pourvoir en Cassation contre cette décision. Le parquet fédéral devra décider jeudi s’il saisit lui aussi la Cour de Cassation pour cette affaire où l’Etat turc s’est constitué partie civile.

Au procès DHKP-C à Bruxelles

Après les arrestations de plus de trente personnes pour leurs prétendus liens avec le PKK le mois derniers, la police a remis ça ce matin du 5 janvier. Dans une opération conjointe à travers quatre provinces, les forces de l’ordre ont arrêté vingt personnes. Toutes ont été emmenées à Gaziantep pour interrogatoire. L’opération visait un groupe kurde clandestin, accusé d’être une ‘branche armée urbaine du PKK’ et accusé d’avoir organisé les manifestations violentes au Kurdistan.

Ce mardi, la police d’Ankara a fait une descente dans les locaux du BDP (Peace and Democratic Party, créé suite à la mise hors la loi du DTP début décembre). Elle était à la recherche de quatre membres fondateurs du DTP, qui avaient été convoqués par la Cour Criminelle d’Ankara pour avoir, lors de discours publics, ‘fait l’apologie du PKK’. Les quatre ne s’étant pas présentés à l’audience, la Cour a ordonné qu’ils y soient amenés de force, mais la police ne les a pas trouvé au bureau du parti. Deux d’entre eux ont également été interdits de toute participation à la vie politique turque pour les cinq prochaines années par la Cour Constitutionnelle. Mais il apparaît que cette décision n’a pas été publiée officiellement, ce qui entraîne que les deux députés jouissent toujours de leur immunité et ne peuvent dont pas être poursuivis ni interrogés.

A Diyarbakir, 23 personnes dont 13 bourgmestres ont été écroués à la suite des rafles policières visant les anciens et nouveaux bourgmestres des villes kurdes. Le mouvements de protestation des élus du Parti pour la Paix et la Démocratie et de la population continuent à l’heure actuelle. Cette opération menée sous l’égide d’Ankara, ayant donné son aval et centrée sur Diyarbakir, s’est déroulée conjointement dans plus de 11 villes kurdes, aboutissant à l’arrestation de plus de 80 personnes, dont 35 ont été déférées au parquer de Diyarbakir. Après l’annonce du réquisitoire du procureur demandant le placement en détention des prévenus, une foule de plusieurs milliers de personnes, comprenant notamment tous les bourgmestres et députés kurdes, s’est réunie devant le palais de justice de Diyarbakir. Encerclés par les blindés de la police, les manifestants parmi lesquels des députés, des bourgmestres, le Président et des dirigeants du BDP ont entamé un sit-in de protestation.

Le week-end a été particulièrement chaud et violent à Istanbul et dans le Kurdistan suite aux arrestations survenues vendredi. Une vaste opération policière dans onze villes avait abouti à l’interpellation de plus de 80 personnes, suspectées d’entretenir des liens avec le PKK. Dimanche, de nombreux militants kurdes s’étaient rassemblés pour un deuxième jour de protestations face à la répression policière. A Istanbul, la police a violemment dispersé les manifestants qui ont répliqué par des jets de pierre et de cocktails Molotov. D’autres affrontements ont éclaté entre les militants et la police anti-émeute dans le sud-est de la Turquie, la police faisant usage de canons à eau et de gaz lacrymogènes face aux manifestants. Il y aurait plus de dix blessés, dont deux policiers, et les forces de l’ordre auraient arrêtés une douzaine de personnes.

Affrontements à Istanbul

Moins de 24 heures après le passage des 94 bourgmestres du parti interdit, le DTP, au BDP, une opération de police a été menée visant ce parti dans plus de 11 villes. Plus de 80 personnes, dont le co-Président du Congrès de la Société Démocratique (DTK) ainsi que 9 bourgmestres, ont été interpelés. Des opérations conjointes ont été menées à Diyarbakır, Siirt, Hakkari, Dersim, Batman, Urfa, Şırnak et Van sur ordre du Procureur de la République de Diyarbakir. Parallèlement, d’autres descentes ont eu lieu à Ankara, Istanbul et Izmir. Les informations relatées parlent d’au moins 80 placements confirmés en garde à vue, touchant notamment certains maires.

Une descente a aussi eu lieu dans les locaux de l’Association des Droits de l’Homme. Alors que la police a interdit aux personnes présentes de quitter les lieux lors de la perquisition, tous les documents et le matériel informatique ont été saisis à fin d’expertise. Nous avons pu apprendre que la perquisition continuait.

Lors des descentes dans différents locaux d’habitations à Batman, Dersim et Ankara, 7 personnes ont été interpelées. Les policiers de la section antiterroriste de la direction de la sûreté de Batman ont perquisitionné plusieurs maisons tôt dans la matinée, dont celle d’Huseyin Kalkan, l’ancien bourgmestre de Batman. La perquisition ayant duré plus de trois heures. A la suite de ces perquisitions Huseyin KAlkan, ainsi que l’ancien dirigeant du DTP local, l’ancien dirigeant régional, un membre du Conseil Municipal de Batman et une membre de l’assemblée des femmes ont été placés en garde à vue.

A Dersim, ce sont les maisons des membres de l’Assemblé des femmes qui ont été perquisitionnées par les policiers de la direction de la sécurité publique. A Ankara, l’ancien dirigeante locale du DTP de Altindag a été interpelée. A Van, les policiers de la section anti-terroriste de la direction de la sécurité publique ont perquisitionné en même temps le Centre d’Affaire de la Mairie, le Centre Culturel de Mésopotamie et certaines habitations. Alors que tous ces lieux ont été fouillés de fond en comble, de nombreuses personnes ont été arrêtées, dont d’anciens dirigeants locaux du DTP dissout.

C’est dans le cadre d’une enquête concernant le PKK et ses bases dans les centres urbains que la police a organisé des descentes dans les maisons de personnes suspectées d’entretenir des liens avec ce parti. Ces raids constituent un des pans de la grande opération menée par les autorités. Ils se sont déroulés dans onze provinces ce jeudi matin et les forces de l’ordre ont interpellé 33 personnes, dont huit bourgmestres kurdes. Ces huit maires de villes à majorité kurde étaient membres de l’ex-DTP (parti interdit depuis quinze jours pour ses prétendus liens avec le PKK). C’est la troisième opération de ce genre depuis le début de l’année en Turquie, les autorités comptabilisant au total plus de cent interpellations.

Notre Secours Rouge a envoyé une délégation au rassemblement organisé par la section belge du Comité des Libertés ce vendredi 18 décembre devant l’ambassade d’Allemagne à Bruxelles. Ce rassemblement protestait contre les poursuites de la justice allemande contre la Fédération anatolienne (organisation turque luttant pour les droits politiques et sociaux des immigrés en Europe). Depuis 14 mois, la présidente et deux dirigeants de cette organisation sont soumis à un régime d’isolement intense, ne disposant d’un parloir d’une demi-heure que toutes les deux semaines. En outre, la plupart des membres de leur famille proche sont interdits de visite sous prétexte qu’ils pourraient servir de relais entre les prisonniers et le mouvement politique auquel ils appartiendrait. Aucune date de procès n’a encore été fixée, mais l’on sait qu’ils seront poursuivis en vertu de la loi antiterroriste allemande.

Rassemblement pour la Fédération anatolienne

La semaine dernière, le Parti pour une société démocratique (DTP) était dissout par la cour constitutionnelle turque pour collusion avec le PKK. De nombreuses manifestations très violentes se sont déroulées suite à cette décision un peu partout dans le pays. Mercredi, devant le bureau du parti kurde, à Dolapdere, à 50 mètres d’un commissariat gardé par un véhicule blindé, l’enseigne DTP a été décrochée. Mais les élus et les militants kurdes, dont la combativité n’est en rien entamée, avaient depuis plusieurs mois anticipé la manoeuvre, et déposé les statuts d’une nouvelle formation politique. L’enseigne du parti dissout a donc immédiatement été remplacée par celle de son successeur: le Parti pour la Paix et la Démocratie (BDP). Pour la sixième fois depuis vingt ans et après plusieurs interdictions par la justice turque pour des liens supposés avec le PKK, le mouvement politique renaît sous un autre nom.