Le 20 juin dernier, la police allemande a perquisitionné les domiciles de plusieurs administrateurs de « Zwiebelfreunde » (« Les amis des ognons ») une organisation sans but lucratif qui soutient des projets défendant la vie privée et l’anonymat sur le net et maintient plusieurs nœuds de sortie de Tor. Plusieurs domiciles, un hackerspace, un centre social et un cabinet d’avocats ont ainsi été perquisitionnés et les ordinateurs, téléphones, paperasses et disques durs ont été emportés. Zwiebelfreunde n’est ni accusé ni inculpé mais considéré comme témoin dans une affaire: les administrateurs d’un site internet anonyme appelant à des actions contre le congrès du parti d’extrême-droite AfD (Alternative pour l’Allemagne) ont utilisé une adresse e-mail @riseup.net, un fournisseur d’adresse e-mails qui offre une certaine protection à la vie privée de ses utilisateurs. Et Zwiebelfreunde permet (ou permettait selon les cas) de faire des dons à Riseup, ainsi qu’à Tails et à d’autres fournisseurs de services respectueux de la vie privée.

Ainsi les données des personnes qui seraient passées par Zwiebelfreunde pour faire des dons à Tails (avant le 18 octobre 2017) ou à riseup (jusqu’à la perquisition) et en utilisant un compte en banque européen sont entre les mains de la police allemande (numéro iban, nom, montant transféré et date). La police pourrait se servir de ces données pour identifier des réseaux de personnes, mais les dons faits à ces associations n’ont en soi rien d’illégal. Dans le cas de Tails, ils ont changé de sponsor depuis le 18 octobre 2017 et ne sont donc plus concernés. La police a saisi de très nombreux documents qui n’étaient pas visés par le mandat: ce mandat n’était censé concerner que les liens avec riseup.net (dont le seul lien avec Zwiebelfreunde est la récolte de fonds par les derniers) mais ce sont surtout des informations sur les noeuds Tor et Tails qui ont été saisies.

Le communiqué officiel (en anglais) avec la liste de tout ce qui a été saisi et de tout ce qui n’a pas été saisi est ici.

Une bombe atomique imprimée en 3D, saisie lors de la perqui.

Une bombe atomique imprimée en 3D, saisie lors de la perqui.

Près de onze mois après les affrontements du G20 à Hambourg, des descentes de police ont eu lieu mardi en Suisse, Italie, Espagne et France. Ces descentes de police concernaient principalement les affrontements ayant eu lieu sur l’Elbchaussee à Hambourg le 7 juillet 2017, qui avaient engendré d’importants dégâts. La recherche de suspects et de preuves est prise en charge par les différents services de police, coordonnés dans la commission spéciale « Schwarzer Block » de Hambourg.

En Suisse, un homme de 27 ans a été interpellé puis libéré quelques heures plus tard dans le canton d’Argovie. L’homme interpellé, un Suisse, a été interrogé par deux enquêteurs du Ministère public argovien. L’appartement où l’homme a été interpellé à Bremgarten a été fouillé, de même qu’un centre culturel alternatif. A Madrid, les enquêteurs ont investi trois bâtiments, dont deux maisons alors occupées. Trois Espagnols sont accusés d’avoir causé « de gros dégâts » et auraient pris part à « des actions violentes envers des policiers » lors du G20. En France, l’opération ciblait un manifestant qui aurait participé aux incidents sur l’Elbchaussee, selon la police de Hambourg. Enfin, en Italie, la police a notamment perquisitionné l’appartement d’un homme qui avait déjà été jugé dans la ville allemande pour l’agression d’un policier. Depuis, les enquêteurs l’accusent d’avoir aussi joué un rôle dans les émeutes.

A Berlin, la police berlinoise avait opéré la semaine passée une perquisition dans la bibliothèque anarchiste de Kalabal! K et dans quatre appartements privés. Cette perquisition a conduit à la saisie d’armes illégales et de pétards, la confiscation de clefs USB et deux arrestations pour diffamation (il s’agirait d’une série d’affiches réalisées pour le G20.

Les affrontrements du G20

Les affrontrements du G20

Des dizaines de milliers de personnes manifestaient aujourd’hui jeudi dans les rues de Munich pour protester contre un prochain élargissement des pouvoirs policiers dans le land de Bavière. Les manifestants s’opposent à la loi PAG votée l’été dernier par les parlementaires locaux – qui n’est pas encore effective – qui permet aux juges plus de discrétion dans les détentions de suspects, notamment en étendant la détention préventive de 14 jours à trois mois. Elle autorise aussi la police à surveiller préventivement les téléphones et ordinateurs de suspects, à titre préventif. La mobilisation contre cette loi a déjà permis des aménagements de celle-ci: la technologie de reconnaissance faciale ne sera plus utilisée dans la vidéosurveillance.

La manifestation No-PAG ce jeudi à Munich

La manifestation No-PAG ce jeudi à Munich

Le 2 mars 2017, le ministère allemand de l’Intérieur a envoyé un avis aux Lands exigeant l’interdiction de divers drapeaux des institutions et des partis kurdes, y compris le PYD, YPG, YPJ, PJAK, YXK et NAV-DEM. Le ministère justifiait cela comme « mise à jour » de l’interdiction du PKK en vigueur depuis 1993. En juin dernier, les Kurdes et leurs amis ont organisé une manifestation dans la capitale allemande Berlin pour protester cette interdiction des drapeaux du PYD, des YPG et YPJ. Cette manifestation a été l’occasion d’une intervention brutale de la police allemande qui a blessé trois personnes (voir notre article).

Récemment, un citoyen kurde en Allemagne a déposé une plainte contre l’interdiction par la police de Berlin. Un policier a déclaré à ce procès que les drapeaux des PYD, YPG et YPJ n’étaient plus interdits dans le Land. Dans un procès récent, la police avait poursuivit un Kurde qui a partagé un drapeau de YPG sur Facebook, mais le tribunal d’Aix-la-Chapelle l’avait relaxé, déclarant que partager ce drapeau sur les médias sociaux ne constituait pas un crime. La police bavaroise se distingue par son zèle à effectuer des raids chez les personnes qui postent des drapeaux YPG ou YPJ sur les réseaux sociaux. Plus encore, un musicien résidant à Munich, Johannes König, est poursuivi pour avait posté un lien vers un article de la radio-télévision publique bavaroise (la Bayerischer Rundfunk) sur un militant dont la maison avait été perquisitionnée parce qu’il avait publié des drapeaux YPG / YPJ sur son compte Facebook en août dernier. Le parquet de Munich a ouvert une enquête contre König parce que le drapeau de YPG est visible dans l’aperçu de l’article de la Bayerischer Rundfunk!

Drapeaux du PYD et des YPG

Drapeaux du PYD et des YPG

Un incendie volontaire d’un véhicule de DITIB (Union des affaires culturelle Turquo-Islamiques) a eut lieu le 19 février en solidarité avec Afrin. Le DITIB est une organisation religieuse qui diffuse la propagande du régime Erdogan en Allemagne. Les sermons de cette organisation sont écris par Ankara et ses prêcheurs sont entraînés en Turquie.

Le commando Kendal Breizh (du nom d’un internationaliste tué récemment dans les combats contre l’armée turque) a revendiqué cette attaque dans un communiqué. Ce commando a également dénoncé la collaboration de l’état allemand dans la répression du mouvement Kurde et de la révolution sociale au Rojava (Kurdistan syrien). Enfin le commando a appelé intervenir dans le conflit directement dans les villes allemandes.

Le minibus incendié du DITIB

Le minibus incendié du DITIB

Dix communistes turcs actifs dans l’immigration (et notamment dans l’organisation ATIK) avaient été arrêtés par la police allemande et détenus suite à des opérations découlant de la coopération des gouvernements allemand et turc (voir notre article). Leur procès se déroule toujours à Munich mais quatre d’entre eux, Sami Solmaz, Musa Demir, Banu Büyükavcı et Sinan Aydin ont été libérés. Ils doivent cependant rester en Allemagne, signer deux fois par semaine au commissariat, et assister aux audiences de leur procès. Un autre de ces dix prisonniers, Mehmet Yeşilçalı, avait déjà été mis en liberté provisoire pour des raisons de santé (voir notre article).

Manifestation de solidarité aux inculpés du procès ATIK à Munich (archive)

Manifestation de solidarité aux inculpés du procès ATIK à Munich (archive)

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La police allemande a ordonné aujourd’hui samedi la dispersion à Cologne d’une manifestation de Kurdes contre l’offensive turque en Syrie en raison de la présence dans le cortège de symboles, interdits en Allemagne, du PKK. La manifestation à laquelle participaient plus de 14.000 personnes a été stoppée et dispersée après que plusieurs manifestants ont montré des drapeaux à l’effigie du dirigeant historique du PKK Abdullah Öcalan. Deux personnes ont été interpellées.

La manifestation de Cologne

La manifestation de Cologne

L’ayatollah Mahmoud Hashemi Shahroudi a quitté d’urgence jeudi matin l’hôpital de Hanovre où il séjournait depuis le mois dernier pour une tumeur au cerveau, escorté par des forces de sécurité allemandes. Il s’est envolé quelques heures plus tard vers Téhéran depuis l’aéroport de Hambourg, bénéficiant d’un accès séparé à l’avion où une demi-douzaine de places avaient été réservées en classe affaires. Les protestations spontanées d’exilés iraniens sur place n’ont pas empêché ce départ.

Ce proche du guide suprême de la révolution Ali Khamenei a été à la tête durant vingt ans de la justice iranienne. 2000 personnes dont des enfants ont été exécutés lorsqu’il était aux responsabilités. La torture était couramment utilisée. Le dépôt de plusieurs plaintes en Allemagne pour crimes contre l’humanité a conduit le parquet fédéral à se saisir du dossier. Une demande de mandat d’arrêt aurait pu empêcher le débat de l’ayatollah Shahroudi d’Allemagne, mais la justice devait encore examiner les plaintes déposées.

Mahmoud Hashemi Shahroudi

Mahmoud Hashemi Shahroudi

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Berlin a ouvert la porte ce lundi à une modification d’une nouvelle loi très controversée visant à faire la police sur les réseaux sociaux. Cette loi, l’une des plus stricts en Europe sur le sujet, oblige les plateformes d’échange telles que Twitter, Facebook ou YouTube à supprimer les messages au contenu incitant à la haine, passibles de poursuites pour diffamation ou véhiculant de fausses informations. Elles doivent le faire dans un délai de 24 heures après avoir été alertées par des utilisateurs, sous peine d’amendes pouvant aller jusqu’à 50 millions d’euros.

Les plateformes ont vigoureusement protesté l’an dernier contre cette initiative, prise notamment après une accumulation de commentaires haineux sur Internet en Allemagne consécutive à l’arrivée de plus d’un million de migrants en 2015 et 2016. Les détracteurs de la loi dénoncent un texte qui aboutit à restreindre la liberté d’expression et à confier aux géants de l’internet le rôle de censeur. La controverse a été relancée au cours du week-end lorsque l’initiateur de la législation, le ministre allemand de la Justice Heiko Maas, a vu l’un de ses tweets supprimé en vertu du texte. Le tweet en question remontait à 2010, à une époque où il n’était pas encore ministre. Heiko Maas s’en était pris à un essayiste à succès néo-conservateur en Allemagne en le traitant de « crétin ».

Heiko Maas

Heiko Maas

Gulaferit Unsal est une militante d’origine turque qui menait une activité syndicale à Ankara jusqu’en 1992. Après avoir été persécutée et emprisonnée, avec son mari, en Turquie, elle avait quitté le pays et fait une demande d’asile en Allemagne en 1999. De 2001 à 2011, elle a vécu à Thessalonique en Grèce avant d’y être arrêtée en juillet 2011 sur base d’un mandat d’arrêt émis par l’Allemagne, l’accusant d’appartenir au DHKP-C. Le mois suivant, elle avait été déportée vers l’Allemagne (voir l’article que nous avions écrit à l’époque) et condamnée à une peine de prison ferme. Après sept années de résistance (Gulaferit a mené plusieurs grèves de la faim dont une en 2015 (voir notre article) contre la censure de son courrier) et d’emprisonnement, elle vient d’être libérée.

Gulaferit Unsal

Gulaferit Unsal