Les 25 février et 15 avril dernier, le site Netzpolitik a publié deux articles révélant des informations concernant le renseignement intérieur allemand. Dans le premier, Netzpolitik a révélé l’existence d’un budget secret alloué en 2013 par l’Office fédéral de protection de la Constitution (Bundesamt für Verfassungsschutz ou BfV), le renseignement intérieur allemand, à la surveillance de vastes quantités de données numériques, et notamment à la construction de «graphes sociaux». Le second dévoile en détail l’organisation d’une unité du BfV dédiée à «améliorer et étendre ses capacités de surveillance sur Internet», y compris par des «méthodes non conventionnelles de surveillance des télécommunications». Dans les deux cas, le site a publié, en plus des articles, les documents originaux sur lesquels ils s’appuient. Début juillet, Hans-Georg Maassen, le président du BfV, avait déposé plainte, la presse révélant qu’une enquête avait été ouverte pour retrouver les sources des informations révélées sur le site Netzpolitik. Ce jeudi, le rédacteur en chef du site d’information apprenait que lui ainsi qu’un de ses journalistes faisaient l’objet d’une enquête du parquet fédéral pour ‘haute trahison’. Hier, le procureur en a néanmoins annoncé la suspension, dans l’attente de la réception d’une expertise qui doit déterminer si Netzpolitik a publié des documents relevant du secret d’Etat. Plane donc toujours, au-dessus des deux journalistes la menace d’une accusation de «haute trahison». La peine encourue peut aller d’un an de détention par article publié à 15 ans de réclusion – voire, dans les cas les plus graves, la prison à vie.

Andre Meister et Markus Beckedahl, deux auteurs du blog Netzpolitik

Ce mardi 28 juillet, le verdict a été prononcé contre Özgür Aslan, Sonnur Demiray, Muzaffer Dogan et Yusuf Tas à Stuttgart, dans le cadre d’une procédure § 129b (« organisation terroriste étrangère »): 4 ans et 9 mois pour Ozgur Aslan, 5 ans 6 mois pour Sonnur Demiray et 6 ans pour Tas Yusuf et Muzaffer Dogan. Ils ont été condamnés pour un travail d’information, de collecte de fonds et l’organisation d’événements musicaux, notamment un grand concert du groupe « Yorum ».

Les quatre ont été arrêtés à la suite d’un raid de grande envergure le 23 iuin 2013 pour appartenance au DHKP-C. Tas Yusuf Aslan et Özgur ont été livrés par l’Autriche à l’Allemagne. Les poursuites, qui ont commencé en septembre 2014, et qui représentent un dossier de 60.000 pages, ont tenté d’établir une connexion directe entre le DHKP-C, le groupe Yorum et les accusés. Cela suit une logique déjà apparue dans d’autres procès ou toute activité est considérée comme venant du DHKP-C et servant le DHKP-C. La solidarité avec les accusés a débouché sur l’arrestation de 50 personnes, et sur plusieurs condamnations à des amendes administratives. Plus de 20 personnes ont été de la même manière condamnés pour avoir cotisé au DHKP-C.

Pour écrire aux prisonniers:
Ozgur Aslan, Muzaffer Dogan, Yusuf Tas : Asperger Str. 60 ; 70439 Stuttgart
Sonnur Demiray: Herlikofer Straße 19 ; 73527 Schwäbisch Gmünd
Il est probable que les prisonniers seront bientôt transférés dans l’autre prison. Pour suivre leur actualité (en allemand): http://political-prisoners.net, site allemand qui est part du Secours Rouge International.

Un rassemblement à Stuttgart

Un rassemblement à Stuttgart

Trois personnes ont été blessées vendredi dans des affrontements entre manifestants d’extrême-droite et contre-manifestants antifa dans la ville est-allemande de Dresde. Quelque 200 membres du parti fasciste NPD étaient rassemblés pour protester contre l’arrivée ce week-end de 800 nouveaux réfugiés à Dresde, en majorité syriens. Mais ils ont du faire face à 350 militants défilant en soutien aux demandeurs d’asile. Des pétards et des projectiles ont été jetés, laissant trois personnes blessées. Une équipe de télévision de la chaîne publique ZDF a également été prise à partie. La police est intervenue, une personne a été arrêtée.

Une contre-manifestante, légèrement blessée, montre aux fascistes tout le bien qu’elle pense d’eux

Une contre-manifestante, légèrement blessée, montre aux fascistes tout le bien qu'elle pense d'eux

Le 27 août 2014, un bâtiment de la Breite Strasse à Hambourg était occupé par des squatteurs. La police est rapidement arrivée sur les lieux pour les expulser, mais les occupants ne se sont pas laissé faire et ont répliqué en tirant des feux d’artifices en direction de la police, en leur déversant des pots de peinture colorée dessus et en leur lançant divers objets. Plus tard, plusieurs personnes ont été arrêtées hors du bâtiment, et accusées d’avoir prit part à la résistance du squat. Le procès de ces 6 personnes -depuis libérées- se tiendra à la fin du mois d’août 2015. Les inculpations sont lourdes, certains sont accusés de tentative d’homicide. Une semaine de mobilisation et d’actions solidaires aura lieu du 3 au 9 août.

Appel à la mobilisation pour les inculpés de la Breite Strasse.

Appel à la mobilisation pour les inculpés de la Breite Strasse.

Dans la nuit du 25 au 26 juin, deux véhicules de patrouille et une fourgonnette de police ont été incendiés à Mayence. Un communiqué a expliqué que les véhicules ont « choisi de se suicider par immolation spontanée… pour exprimer leur rejet de la violence institutionnalisée et non réformable de l’Etat. »

Patrouilleuses incendiées à Mayence.

Patrouilleuses incendiées à Mayence.

Sadi Özpolat et Gülaferit Ünsal ont obtenu une victoire après avoir observé respectivement 43 et 54 jours de grève de la faim contre la censure de leur courrier, contre les uniformes de prison et contre l’intimidation. Sadi et Gülaferit sont emprisonnés via la loi 129bis qui les accuse d’être membres du DHKP-C. 6 autres prisonniers politiques en Allemagne (Ahmet Düzün Yüksel, Muzaffer Dogan, Özgur Aslan, Sonnur Demiray, Yusuf Tas et Özkan Güzel) se sont également mis en grève de la faim en solidarité. A l’extérieur, plusieurs manifestations ont eu lieu à Berlin et ailleurs en Allemagne, réunissant l’immigration turque et la gauche solidaire. L’Allemagne est l’un des états les plus coopératifs avec la politique répressive de la Turquie, notamment via la loi 129bis qui permet d’emprisonner des personnes suspectées d’être membres d’organisations considérées comme terroristes à l’étranger (mais pas forcément en Allemagne). Récemment, le journal de gauche turc Yürüyüs (La Longue Marche) a été interdit en Allemagne alors qu’il n’est pas (encore?) illégal en Turquie.

Sadi Özpolat et Gülaferit Ünsal sont régulièrement en grève de la faim contre leurs propres conditions de détention mais également en solidarité avec d’autres prisonniers. Dernièrement, ils avaient participé à la grève de la faim des prisonniers révolutionnaires en Grèce.

Manifestation de solidarité avec Sadi Ozpolat en décembre 2012.

Manifestation de solidarité avec Sadi Ozpolat en décembre 2012.

Federico Annibale ’Fede’, qui avait manifesté à Francfort le 18 mars dernier contre le nouveau siège de la BCE, était accusé de ’violation grave de la paix’ et ’tentatives de lésions corporelles graves’. De nombreux affrontements avaient éclatés entre les milliers de manifestants et les policiers anti-émeute lors de l’inauguration du nouveau siège de la banque centrale européenne. Federico est italien et étudie à Londres, les autorités allemandes justifiait son maintien en détention provisoire par le risque de fuite à Londres (voire notre article). Après plus de deux mois de détention, un tribunal a décidé le 3 juin de sa libération avec une condamnation de 14 mois en cas de nouveau délit en Allemagne.

Rassemblement solidaire pour Frederico

Rassemblement solidaire pour Frederico

Après la grande manifestation de jeudi à Munich (34.000 personnes), c’était la petite ville de Garmisch-Partenkirchen qui recevait les opposants au sommet G7 qui se tenait dans un chateau à 15 kilomètres de là. 4000 personnes étaient présentes à Garmisch, quelques incidents ont opposés manifestants et policiers. Plus de 22.000 policiers ont été déployés en Bavière pour veiller sur le G7 mais c’est à Leipzig qu’un black bloc d’une centaine de personnes est intervenu par surprise dans le centre ville. Une barricade de pneus enflammés a barré une des rues du centre; des pierres, des cocktails Molotov ainsi que des engins pyrotechniques ont été lancés sur des édifices publics et sur le consulat américain qui ont subis des dégradations. Lors d’un face-à-face avec les manifestants, plusieurs policiers ont été blessés. Trois véhicules de police ont par ailleurs subi d’importants dégâts et ont été rendus inutilisables. Un homme a été arrêté.

Incidents à Leipzig

Incidents à Leipzig

Jusqu’au 15 juin, le Traité de Schengen est suspendu pour tout le territoire allemand, ce qui autorisera policiers et douaniers à éventuellement contrôler ceux qui passent les frontières. Ce sont surtout la frontière autrichienne et l’aéroport de Munich qui sont visés par cette mesure. La gare de Garmisch sera également contrôlée plus que d’habitude.

Le G7 approche et la police allemande veut éviter de se retrouver -encore une fois- en désavantage par rapport aux milliers de manifestants italiens, autrichiens et européens qui font le voyage pour participer aux manifestations. Dernier fiasco en date, l’inauguration de la Banque Centrale Européenne à Francfort où les milliers de policiers déployés n’ont pas suffit à contenir les milliers de manifestants venus de partout.

Affrontements à Francfort au Blockupy.

Affrontements à Francfort au Blockupy.

Le mouvement de grève illimité lancé mardi dernier par le petit mais puissant syndicat des conducteurs de locomotives (GDL) a été suspendu ce jeudi, évitant ainsi à l’Allemagne d’être paralysée pendant la Pentecôte et au-delà. Pourtant la perspective de conflit social est loin d’être écartée. En effet, la « Loi sur l’unité syndicale » (Tarifeinheitsgestz), que le Bundestag doit adopter ce vendredi matin pourrait bien venir jeter de l’huile sur le feu. Le texte de loi prévoit en effet que si deux syndicats d’une même entreprise n’arrivent pas à s’entendre sur leur périmètre de représentation, alors, c’est la convention collective négociée par le syndicat affichant le plus d’adhérents dans l’entreprise qui l’emportera. Le petit n’aura alors plus le droit de faire grève pour imposer ses revendications: Dans le cas de Deutsche Bahn, où le GDL est en concurrence avec le grand syndicat du rail EVG, c’est l’EVG qui gagnera et le petit GDL n’aura plus rien à dire.

En conséquence, la plupart des petits syndicats sectoriels allemands mais aussi les grands syndicats des services (Verdi), de l’alimentation (NGG) ou encore de l’éducation (GEW) ont annoncé qu’ils déposeraient une plainte devant le Tribunal constitutionnel dès que la loi, dont l’entrée en vigueur en prévue pour le 1er juillet, aura été votée.

Une grève de la GDL

Une grève de la GDL