Deux manifestants ont été tués dans le coeur historique et commerçant de Bagdad et dans la ville sainte chiite de Kerbala, à 100 km plus au sud. Dans l’un des pays les plus riches en pétrole du monde -mais aussi l’un des plus corrompus-, les protestataires réclament la refonte du système politique et le renouvellement total de leur classe dirigeante. Ils s’en prennent également au voisin iranien qu’ils accusent de tirer les ficelles chez eux. A Bagdad, dans un nuage de lacrymogène, alors qu’il tentait de se protéger avec un maigre bouclier de tôle, un jeune a été mortellement blessé par les balles en caoutchouc des forces de l’ordre. Une vingtaine d’autres ont été blessés. Aux abords du pont al-Ahrar, près de la place Tahrir, épicentre du mouvement de contestation, protégés par des murs de béton montés en travers des rues, les forces tirent, parfois à balles réelles sur les jeunes manifestants.
Mardi semble marquer un tournant: les violences qui ont déjà fait plus de 350 morts en deux mois ont gagné des villes du sud. Les manifestants brûlent des pneus pour barrer les principaux axes, comme à Kerbala. Là, les violences sont habituellement nocturnes mais mardi des policiers casqués et brandissant des boucliers antiémeutes ont tiré en plein jour sur les manifestants qui jetaient des pierres. Un manifestant a été touché d’une balle à la tête et les médecins ont fait état d’un mort. Dans la province de Zi Qar, les protestataires essayent de frapper le pouvoir au seul endroit qui peut lui faire mal, ses ressources en pétrole, unique source de devises du pays. Ils bloquent les accès à trois champs pétroliers –Garraf, Nassiriya et Soubba. A Diwaniya, des milliers de manifestants bloquent le centre-ville, des ponts, une des trois centrales électriques de la province et les autoroutes menant vers le nord, le sud et l’ouest. Al-Hilla, où la contestation était jusque là pacifique, a été aussi gagnée par les violences, avec une soixantaine de manifestants blessés par des tirs de grenades lacrymogènes.