Le bureau de presse des Forces de Défense du Peuple et des Femmes Libres du Kurdistan (HPG et YJA-Star les guérillas du PKK) a publié le bilan des actions du PKK pour le mois d’octobre. Ce mois, malgré la trêve unilatéralement respectée par la guérilla depuis le 10 octobre, a été particulièrement intense. Notons que la trêve du PKK ne sous-entend pas qu’ils aient baissés les armes : la guérilla protège les territoires sous son contrôle et se défend dés qu’elle est attaquée.

L’état turc a procédé à 26 opérations terrestres, 94 frappes aériennes par jets, 17 frappes aériennes par hélicoptères Cobra, 331 attaques d’artillerie lourde (mortier, obusier et tank), 53 opérations aériennes, 89 vols de reconnaissance et 7 opérations terrestres sans résultats.

La liste des actions opérées par la guérilla : un total de 116 actions et représailles incluant 20 sabotages, 17 éxécutions, 8 raids, infiltrations et encerclements, 9 contrôles routiers, 25 confrontations avec l’armée turque, 57 actions et frappes diverses et 23 actions aux résultats invérifiés.

Tout cela a coûté cher à la Turquie, voici les pertes : 315 soldats tués dans les affrontements, 4 policiers abattus, 15 membres des Opérations Spéciales, 12 officiers tués, 107 soldats blessés, 1 policier blessé, 11 bases militaires détruites, 5 blindés détruits, 17 véhicules militaires non-blindés incendiés, 4 hélicoptères endommagés et 6 véhicules lourds endommagés, dont un tank. Une douzaine d’armes diverses ont également été saisies par les guérilleros.

Enfin, selon les HPG, 53 guérilleros ont été tués, 3 autres sont morts sur le front du Mont Shengal en combattant l’Etat Islamique, deux guérilleros ont été faits prisonniers par la Turquie.

Drapeau du PKK.

Le Mont Shengal, montagne sacrée des Yézidis au Nord-Est de l’Irak est le théâtre d’affrontements entre les diverses forces kurdes et les islamistes depuis l’année dernière. Suite au sauvetage par le PKK des 40.000 Yézidis persécutés par l’Etat Islamique en août 2014, le mont est contrôlé à l’ouest par les forces kurdes progressistes (PKK, PYD, YPS,…), au sud par l’Etat Islamique et à l’est par les Peshmergas, l’armée régulière de la province autonome du Kurdistan irakien, souvent considérée comme la branche armée du PDK.

Les forces kurdes progressistes sont nombreuses, trois d’entre elles ont annoncé ce jeudi la création d’un commandement conjoint, il s’agit des Unités de Protection du Shengal (milices yézidies du PKK), des Unités de Protection des Femmes du Shengal (YPJ-Shengal), et des Forces de Protection du Shengal (HPS). Lors d’une conférence de presse, les porte-paroles ont souligné l’importance de la libération du Mont Shengal pour la libération du Kurdistan et du Moyen-Orient. Elles ont appelé les trois grands partis kurdes, le PKK, le PDK et le PUK à soutenir ce commandement conjoint.

Comme en témoigne cette carte, de nombreux groupes combattent pour la libération du Shengal. Les forces du PKK et du PYD, et leurs guérillas, les HPG, les YJA-Star les YPG, les YPJ, les YPS,… sont alliées.

Carte du conflit au Mont Shengal, 25 octobre

Cinq combattants étrangers (2 Espagnols, 2 Américains et un 1 Canadien) combattaient au Rojava aux cotés des YPG, dans la brigade internationale intégrée, les ‘Lions du Rojava’. Il y a deux semaines, ils ont prit la décision de sortir de Syrie, pour ce faire ils ont décidé de passer par la province du kurdistan autonome irakien (KRG). Les 5 se dirigeaient vers Erbil pour y prendre un avion, mais ils ont d’abord été arrêtés le 23 octobre à Dahuk et maintenus en résidence surveillée par la police kurdo-irakienne jusqu’au 25 octobre, date à laquelle on leur a rendu leurs passeports et où ils ont pu poursuivre leur route, c’est en tout cas ce qu’ils pensaient avant de disparaître. Le 26 octobre, l’ambassade espagnole à Bagdad a confirmé que les 5 étaient détenus en régime d’isolement par les autorités kurdes à Erbil.

Du coté du Mont Shengal, où les HPG et les YPS repoussent l’Etat Islamique, les Peshmergas du Gouvernement Régional Kurde (KRG) ont fermé la route du Rojava, qui permettaient aux guérillas d’envoyer du matériel et des combattants. Des manifestations ont eu lieu à Kersê et à Serdeşt pour protester contre la décision du KRG.

Depuis l’attentat de Suruç, la guérilla du TKPML, le Tikko enchaîne les actions armées contre l’état turc et ses forces armées, notamment aux cotés des HPG, la guérilla du PKK. Hier soir, l’armée turque a attaqué le village de Mercan Şahverdi (région de Pulur/Ovacık, province du Dersim/Tunceli). Trois combattants de Tikko ont été tués lors des affrontements. L’opération militaire a commencé vers 23h et s’est terminée vers 3h du matin, elle était soutenue par l’aviation militaire turque. Quatre villageois ont également été arrêtés.

Guérilleros du TKP/ML - TIKKO

Notre dossier ‘Notes sur le Kurdistan’ vient d’être mis à jour. Deux diagrammes ont été ajoutés, ils présentent la composition de la nouvelle alliance ‘Syrian Democratic Forces’ qui regroupe 13 groupes armés au Rojava et dans le nord de la Syrie. Le second diagramme donne une idée de la composition politique de l’Armée Syrienne Libre (FSA). Les notes concernant les SDF et la FSA ont également été ajoutées.

Les informations concernant les BOG (Forces Unies de Libération) ainsi que le IFB (Front International de Liberation) ont également été complétées.

Voir notre dossier ‘Notes sur la géographie et les organisations politiques au Kurdistan’.

Drapeau du PKK.

Il y a quelques semaines, le réseau social Instagram -détenu par Facebook- avait supprimé une série de photos du photographe canadien Joey L. Celui ci avait voyagé en Syrie pour photographier ceux qui combattent l’État Islamique, et avait posté ses clichés en juin dernier sur le réseau social. Instagram à finalement supprimé les clichés, non pas pour leur contenu graphique, mais parce qu’ils représentaient des combattantes du PKK, et faisaient donc, selon Instagram, l’apologie du terrorisme. Aux côtés de celles du PKK figuraient d’autres combattantes, des YPJ cette fois, qui n’ont pas été censurées car les YPJ ne figurent pas dans la liste des organisations terroristes américaines. Le photographe a depuis reposté l’une des photos censurées, cette fois ci imprimée et dans ses mains.

Pour voir les photos, voyez le site de Joey L.

Joey L. et sa photo censurée.

Malgré la trêve unilatérale décrétée samedi dernier par le PKK, les forces de sécurité turques multiplies les opérations militaires, et notamment des bombardements aériens. Les guérilleros se défendent naturellement lrosqu’ils sont attaqués, et c’est ainsi qu’ils ont tué trois militaires, dont un officier, et six blessés six autres, dans des combats à Daglica, dans la province d’Hakkari. L’armée a précisé revendique avoir tué 17 combattants du PKK dans une opération terrestre qui se poursuit. Les forces armées turques ont aussi mené vendredi des raids aériens dans le secteur de Yüksekova, près de la frontière avec l’Iran et l’Irak, toujours dans la province d’Hakkari.

Effets d'un bombardement turc au Kurdistan

Le 10 octobre, quelques heures après le massacre d’Ankara, le KCK -organe politique du PKK et de ses organisations soeurs- déclarait une trève à l’encontre de l’armée et de la police turque. Les guérillas du PKK promettaient ainsi de ne pas attaquer les forces de l’état turc et de ne pas étendre les territoires qu’elles contrôlent. L’état turc a répondu à cette trève en poursuivant la guerre contre les kurdes et en bombardant les territoires kurdes en Turquie et en Irak.

Les HPG -branche armée du PKK- se sont défendu aujourd’hui à Binbir (Yüksekova), 24 soldats turcs ont été tués alors que les tirs de mortiers et de bombardiers turcs se poursuivaient. Au moins 8 combattants du PKK ont été abattus dans les bombardements. Malgré les agressions, le PKK maintient pour le moment son cessez-le-feu unilatéral et n’entreprendra pas d’actions offensives.

La Fédération des Syndicats Progressistes (DISK), la Confédération des Employés du Secteur Public (KESK), l’Union des Chambres des Architectes et Ingénieurs Turcs (TMMOB), l’Association Médicale Turque ainsi que le Parti Démocratique des Peuples (HDP) dirigent ces 12 et 13 octobre une grève générale en solidarité avec les victimes de l’attentat le plus meurtrier de l’histoire de la Turquie, le massacre d’Ankara qui a coûté la vie à plus de 100 personnes issues des mouvements de gauche Turcs et kurdes qui manifestaient contre la guerre. Si c’est naturellement l’organisation État Islamique qui est pointée du doigt, les preuves indiquent que les kamikazes étaient téléguidés par les services secrets turcs dont la connivence avec les islamistes n’est plus à démontrer.

Le président turc, Tayip Reccep Erdogan s’est d’ailleurs fait très discret dans les médias Turcs ces trois derniers jours alors qu’il faisait la une en Belgique pour avoir fait pressions sur les journalistes bruxellois qui posaient des questions sur Mohammed Ismael Rasool, ce caméraman de Vice News emprisonné dans une prison de Type-F (haute-sécurité) après avoir filmé les affrontements entre le YDG-H et les forces turques dans le sud du pays.

EDIT: Affrontements dimanche à Ankara et au Kurdistan

La police a utilisé les gaz lacrymogènes pour tenir à l’écart les gens endeuillés, venus rendre hommage aux victimes, dont les co-présidents du HDP, sous prétexte que les enquêteurs étaient toujours à pied d’oeuvre sur le site des deux explosions. Des incidents ont aussi éclatés entre manifestants et policiers à Dyarbakir.

Rassemblement à ankara en hommage aux victimes de l'attentat

Comme nous vous l’écrivions il y a quelques jours, la population de la province kurde irakienne de Sulaimani se rebelle contre le pouvoir du KDP (Parti Démocratique du Kurdistan). Les manifestants réclament que les travailleurs du secteur public -infirmiers, professeurs et fonctionnaires- soient payés, ils n’ont en effet pas touché de salaire pour ces trois derniers mois, malgré les rentrées pétrolières dont est censé profiter le quasi état kurde irakien du Gouvernement Régional Kurde (KRG).

Massoud Barzani, le président -non élu- du quasi-état est accusé de piocher dans la manne financière et de profiter de la crise politique, provoquée notamment par la guerre contre l’Etat Islamique, pour rester au pouvoir.

Lors d’accrochage entre la police et les manifestants dans la région -traditionnellement plus hostile au KDP- de Sulaimani, plusieurs protestataires ont été tués : ce vendredi un garçon de 13 ans est mort de ses blessures à Qaladze alors que les locaux du KDP étaient incendiés. Dans la même ville, la même soirée, trois manifestants ont été abattus par balle et des dizaines d’autres blessés. Les émeutes se sont également propagées jusqu’à aujourd’hui à Said Sadiq et à Kalar où les locaux du KDP ont également été incendiés. Enfin, à la suite de la manifestation de jeudi soir à Sulaimani même, 9 personnes ont été blessées, dont 5 policiers. Ce samedi soir au même endroit, la police a utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les milliers de manifestants rassemblés.

A Qaladze où les émeutes ont été les plus intenses, un couvre-feu entre en application ce dimanche soir, les cafés et maisons de thé ont reçu l’ordre de fermer boutique.

Manifestation à Kalar.