Actualité de la répression et
de la résistance à la répression

Le 15 novembre dernier, le tribunal d’application des peines de Paris a ordonné la libération de Georges Abdallah, détenu depuis maintenant plus de 40 ans. Le parquet antiterroriste a immédiatement fait appel et une audience s’est tenue le 20 décembre dernier. La décision sera rendue le 20 février prochain. Si la Cour confirme la décision de novembre, cela signifiera la libération effective de notre camarade. C’est donc le moment d’un (ultime?) effort de mobilisation. A l’appel de la Campagne unitaire pour la libération de Georges Abdallah et plusieurs organisations, une manifestation de soutien est organisée à Paris le samedi 8 février dès 14H au départ de la place de la République.

Le lundi 3 février, l’actrice Melisa Sözen, qui incarnait une combattante kurde dans la série française « Le bureau des légendes » a été entendue plus de sept ans après les faits, par la police turque pour « propagande terroriste et soutien au PKK » à la demande du procureur général d’Istanbul qui a ouvert une enquête. Dans la série, elle portait l’uniforme d’une combattante kurde des Unités de défense de la femme (YPJ). L’interpellation de l’actrice s’inscrit dans la vague d’arrestation et de procès menée depuis des années par le pouvoir en place contre des journalistes, des avocats, des personnalités politiques ou des personnalités du monde culturel.

Les forces de l’ordre ont débarqué ce matin pour évacuer une nouvelle fois les militants écologistes opposés à la LGV ( Ligne à Grande Vitesse ) Bordeaux-Toulouse. C’est la deuxième évacuation en moins de 15 jours, la « guinguette vaillante » avait déjà été démantelée le 22 janvier, une douzaine de militants avaient alors été placés en garde à vue. Ce matin, la police, accompagnés de la CNAMO (cellule nationale d’appui à la mobilité) brigade spécialisée dans l’expulsion des ZAD et dans le dégagement d’obstacles complexes, sont intervenus pour enlever les installations au sol et en hauteur, dans les arbres. Ils ont délogé ceux qui s’étaient réfugiés dans des cabanes et tenté de dénicher  « les écureuils », militants perchés. Depuis le 30 août 2024, cette ZAD résiste sur un triangle boisé coincé entre le canal latéral de la Garonne, les voies ferrées et les travaux préparatoires. Les militants dénoncent un projet absurde, destructeur de terres agricoles et de biodiversité. Trois personnes ont été interpellées lors de l’intervention de la gendarmerie.

De nouvelles caméras de vidéo-surveillance feront leur apparition en Belgique, elles seront équipées de système d’intelligence artificielle à reconnaissance faciale. Une fois placées dans l’espace public, elles seront employées à des fins répressives, elles auront la capacité d’analyser les différentes données du visage d’une personne pour l’identifier. Transformées en données biométriques, les systèmes utiliseront des algorithmes permettant d’identification de ces personnes. La mise en place de ces caméras dans les rues de Bruxelles se fera au moment où l’Europe se dotera d’une législation sur l’intelligence artificielle.

Alors que la reconnaissance faciale en direct était interdite, de nombreuses exemptions ont été faites, utilisée plusieurs fois à l’aéroport de Zaventem, une septantaine de fois lors de la réunion Europol en 2020 et cinq zones de police flamandes affirmaient utiliser tréquemment la reconnaissance faciale en 2021. Désormais, celle-ci sera permise sous le prétexte de « lutter contre le terrorisme », pour la recherche de victimes dans des dossiers de disparition/ enlèvement d’enfants, contre la traite d’êtres humains et l’exploitation sexuelle.

La reconnaissance faciale pose problème lorsqu’il s’agit de reconnaitre des personnes non-blanches, des erreurs de données biometriques sont plus récurrentes pour ces personnes, cela pourrait donc renforcer les tendances racistes et inégalitaires. Elle a aussi pour vocation de suivre les trajectoires des personnes exilées au sein de l’espace européen. Dès l’âge de 6 ans, toutes personnes qui entrent sur le territoire européen est dans l’obligation d’entrer une image faciale dans le fichier « Eurodac » afin d’être intégré à la base de données biométriques européennes consultable par les états membres et par la police.

Caméras de surveillance (archive)

Le 28 janvier, le militant des droits civils Elshan Karimov a été condamné à six ans de prison pour avoir publié sur Facebook des messages qui, selon les tribunaux azerbaïdjanais, constituaient un appel public à renverser le gouvernement par la force. En fait, il avait partagé des collages de photos de prisonniers politiques, avec le commentaire suivant : « Ce que vous voyez sur cette affiche n’est que la partie “visible” de l’iceberg des 289 prisonniers politiques d’Azerbaïdjan ». Outre les activistes sociaux et politiques que nous connaissons et soutenons, il y a également de nombreux prisonniers politiques dont nous ne connaissons pas l’existence ». « En ces jours de fête, n’oublions pas les fils et les filles de notre peuple qui vivent en tant que prisonniers politiques. Souvenons-nous de leur lutte et des sacrifices qu’ils ont consentis. Embrassons-les tous, ne les oublions pas et ne permettons pas qu’ils soient oubliés. Exigeons tous leur liberté ».

L’entreprise Graylark Technologies de Boston a développé Geospy, une intelligence artificielle capable d’identifier l’endroit où une photo a été prise, il s’agit d’un redoutable outil pour pister à peu près n’importe qui, il identifie des repères géographiques distincts tels que les styles architecturaux, la flore, les caractéristiques du sol et leurs relations spatiales, un niveau de précision qui intéresse les forces de l’ordre. Geospy dispose d’un algorithme qui a été formé sur plus de 46 millions d’images à travers le monde, il est capable d’identifier les signes distinctifs sur une photo et de fournir une liste des 10 emplacements les plus probables avec des coordonnées précises, si le système est capable d’analyser des endroits à travers le globe, il dispose d’une couverture particulièrement forte aux États-Unis. Les performances de Geospy ouvrent ainsi la voie à de nombreux usages. L’outil sert déjà aux forces de l’ordre qui ont pu le mobiliser pour retrouver les lieux impliqués dans différentes enquêtes notamment lors de manifestations. L’IA pourrait aussi intéresser les militaires qui permettrait l’identification de positions ennemies.

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Fin 2024, une investigation numérique a démontré que les autorités serbes avaient illégalement installé des logiciels espions IMSI-catchers, achetés aux Suisses pour une valeur de deux millions de francs suisses en 2023, sur des dizaines de téléphones appartenant aux opposants. Amnesty International parle d’une surveillance systématique, probablement menée à grande échelle contre la société civile. Ces logiciels ont permis d’aspirer des photos, des messages et d’activer caméras et micros pour espionner les cibles.

Des activistes et des journalistes ont été convoqués par la police pour des entretiens dits «informatifs », les opposants étaient interrogés sans motif clair. Les personnes convoquées devaient remettre leur téléphone portable à l’entrée. Pendant les entretiens, la police installait des logiciels espions sur les appareils. Selon le rapport d’Amnesty International, le produit israélien Pegasus et le logiciel de surveillance Novispy développé par la Serbie ont été utilisés.

Des syndicats, des organisations de défense des droits humains et plusieurs parlementaires ont dénoncé les actions de la police londonienne contre les manifestations pro-palestiniennes, des actions qualifiées de « répression barbare et préoccupante ». Les pressions contre la police londonienne se sont intensifiées après son intervention violente lors de la manifestation du 18 janvier au centre de Londres. Plus de 70 personnes, dont des figures proue de l’organisation du rassemblement, ont été arrêtées et le nassage avait été l’occasion de brutalités policières y compris contre des enfants, des femmes enceintes et des personnes âgées.

Plusieurs leaders syndicaux britanniques ont adressé une lettre à Yvette Cooper, ministre de l’Intérieur, exigeant une enquête indépendante sur ces violences policières. Cette demande s’ajoute aux requêtes précédentes formulées par des parlementaires, des juristes et le Comité des Palestiniens de Grande-Bretagne auprès du gouvernement. Une nouvelle manifestation de soutien à la Palestine est prévue pour le 15 février.

L’affaire opposant La Quadrature du Net à la ville de Moirans, en Isère, s’achève par une décision reconnaissant l’illégalité du logiciel de vidéosurveillance algorithmique Briefcam. La justice ordonne à la commune de cesser immédiatement l’utilisation de ce logiciel. Le logiciel de Briefcam est installé en toute opacité dans de très nombreuses communes de France. Techniquement, il permet d’appliquer des filtres algorithmiques sur les images de vidéosurveillance pour suivre ou retrouver les personnes en fonction de leur apparence, leurs vêtement, leur genre ou encore leur visage via une option de reconnaissance faciale.

Depuis des années, La Quadrature du Net dénonce cette vidéosurveillance algorithmique (VSA) comme outil inefficace et utilisé surtout pour le contrôle des populations dans l’espace public. Cette décision d’illégalité permet aux habitant·es des villes comme Saint-Denis, Reims ou encore Brest qui ont choisi de mettre en place ce type de surveillance algorithmique, d’en demander l’arrêt immédiat.