Depuis la prise du pouvoir par l’armée en 2013, les agressions sexuelles commises par les forces de sécurité se sont accrues en Egypte et constituent un moyen de répression utilisé par le régime d’Abd El-Fattah El-Sissi pour réduire la société civile au silence. Des témoignages relatent des viols, viols avec objet, de « tests de virginité », d’attouchements sexuels, de chantage et de pratiques diffamatoires.

Les agressions se multiplient notamment lors d’opérations de contrôle. Depuis la prise du pouvoir par l’armée en juillet 2013, tout individu est susceptible d’être contrôlé à l’entrée des universités, du métro ou des hôpitaux. L’agression sexuelle est quasi systématique en cas d’arrestation. Auparavant, les arrestations de rue concernaient essentiellement les hommes et les jeunes. Mais depuis le 3 juillet, elles concernent aussi les enfants, les femmes, les jeunes filles et les personnes âgées. Malgré les multiples plaintes déposées par les victimes, une seule a abouti à un procès. Les similarités dans les méthodes utilisées et l’impunité générale dont jouissent les auteurs des violences sexuelles indiquent qu’il s’agit politique délibérée visant réduire la population au silence.

Policiers égyptiens

La haute cour administrative égyptienne vient de décider d’une nouvelle législation interdisant aux fonctionnaires de décréter une grève sur leur lieu de travail. Selon cette cour, cette mesure est conforme à la constitution, étant donné qu’elle se fonde sur la Charia. Selon les explications avancées par ce législateur, la Charia refuse toutes grèves portant des revendications dont l’importance reste en deçà des conséquences désastreuses subies par le pays et les citoyens. Elle rejette les grèves qui perturbent le bon fonctionnement des infrastructures de l’Etat et mettent en péril les intérêts de la communauté.

L’Union des syndicats ouvriers égyptiens a vivement réagi à cette décision, en rappelant, que dans l’article 15 de la constitution, la grève pacifique « est un droit règlementé par la loi ». Premières victimes , trois fonctionnaires viennent d’être mis en retraite anticipée ainsi que quatorze décisions de promotions bloquées, pour une durée de deux ans, après l’organisation d’une grève dans un conseil local au niveau du gouvernorat de Menufeya (dans le Nord du pays).

Des dizaines d’Egyptiennes ont manifesté jeudi passé au Caire contre la police pour dénoncer la mort récente de la militante du Parti de l’Alliance Populaire Socialiste Shaima al-Sabbagh, tuée par balle, samedi, lors d’une marche à la mémoire des jeunes tombés lors de la révolte de 2011. La police avait dispersé violemment cette marche interdite, en vertu d’une loi édictée par le gouvernement en novembre 2013 interdisant tout rassemblement ou manifestation non autorisé préalablement par le ministère de l’Intérieur. Shaima al-Sabbagh, 34 ans, était mère d’un garçon de 5 ans, a été tuée d’une décharge de chevrotine dans le dos.

Les autorités ont nié que la police avait une responsabilité dans cette mort, mais l’ONG Human Rights Watch a mis en ligne le 31 janvier une vidéo retraçant les instants qui ont précédé la mort de Shaimaa al-Sabbagh et mettant en évidence la responsabilité d’un policier masqué.

Les manifestants brandissent le portrait du ministre de l’Intérieur, barré par les mots

Hier mercredi 4 février, le militant de gauche Ahmed Douma, a été condamné à la prison à vie, avec 229 coaccusés, pour « rassemblement illégal », « possession d’armes », « troubles à l’ordre public », « vandalisme » et « incitation à la violence ». Trente-neuf mineurs ont également été condamnés à 10 ans de prison. Ces militants étaient accusés d’avoir pris part à des affrontements entre forces de sécurité et manifestants devant le siège du gouvernement au Caire, en décembre 2011, faisant 18 morts. Ils ont également été condamnés à une amende collective de 17 millions de livres égyptiennes (2 millions d’euros). Tous avaient participé à la révolution du 25 janvier 2011 qui a vu la chute de Hosni Moubarak et étaient déterminés à poursuivre leur combat pour plus de démocratie et de libertés. Ces peines, les plus sévères prononcées contre des militants progressistes depuis 2011, s’inscrivent dans la lignée d’une série de condamnations à mort et de longues peines de prison prononcées parfois lors de procès de masse expéditifs.

Ahmed Douma, 29 ans, avait été arrêté en décembre 2013, après une manifestation contre une nouvelle loi controversée limitant… le droit de manifester. Rejoignant de nombreux compagnons de manifestation sur le banc des accusés, il a été condamné à trois ans de prison. A l’occasion de ce deuxième procès, pour les événements de décembre 2011, Douma s’est mis en grève de la faim depuis le 20 août 2014, sa santé s’est rapidement détériorée jusqu’à nécessiter, en octobre, son transfert en soins intensifs. Obligation été faite à M. Douma d’assister à de longues audiences assis dans un fauteuil roulant. Le Syndicat des avocats a décidé de boycotter le procès pour protester contre les violations des droits de la défense

Ahmed Douma lors d'un précédent procès

Une cour d’appel égyptienne a réduit dimanche de trois à deux ans de prison la peine de 23 militants démocrates. Une fois libérés, ils seront placés sous surveillance policière pour une durée de deux ans. Ils avaient été arrêtés en juin après avoir pris part à un rassemblement appelant à l’abrogation d’une loi limitant le droit de manifester. Ils étaient accusés de «participation à une manifestation illégale, vandalisme et entrave au trafic routier». Ils avaient été condamnés en octobre à trois ans de réclusion.

« Si leur père était un général, ils auraient été acquittés, » a accusé l’avocat, en allusion aux acquittements dont ont bénéficié des officiers de police soupçonnés de violences; « C’est un verdict sévère et injuste, la cour s’est appuyée sur l’enquête du parquet et n’a pas pris en compte l’absence de preuves contre les accusés ». Parmi les condamnés figurent deux militantes des droits de l’Homme connues, Yara Sallam et Sanaa Seif, la soeur d’Alaa Abdel Fattah, une figure de la révolte de 2011 qui chassa Hosni Moubarak du pouvoir et dissident de longue date actuellement jugé pour des chefs d’accusations similaires. Les proches des détenus n’ont pas été autorisés à assister à l’audience. Les familles attendaient à l’extérieur du tribunal, installé dans une académie de police du Caire. « Les révolutionnaires sont tous en prison, les corrompus et les voleurs sont libres », a assené Amal Mahrous, la mère d’un des détenus, un étudiant qui a soutenu l’éviction de M. Morsi.

Depuis que l’ex-chef de l’armée et actuel président Abdel Fattah al-Sissi a destitué l’islamiste Morsi en juillet 2013, le nouveau pouvoir réprime toute opposition. Après les islamistes (1.400 partisans de Morsi ont été tués), le pouvoir s’en est pris à l’opposition laïque et de gauche, emprisonnant des dizaines de jeunes militants, qui avaient en grande partie soutenu l’éviction de M. Morsi avant de se retourner contre les nouvelles autorités.

Vingt-trois militants ont été condamnés dimanche à trois ans de prison pour avoir participé à une manifestation non autorisée. Ils avaient été arrêtés en juin après avoir pris part à un rassemblement appelant à l’abrogation d’une loi controversée limitant le droit de manifester. Ils étaient accusés de « participation à une manifestation illégale, vandalisme et entrave au trafic routier ». Parmi les condamnés figurent deux célèbres militantes des droits de l’homme, Yara Sallam et Sanaa Seif, la soeur de Alaa Abdel Fattah, une figure de la révolte de 2011 et dissident de longue date actuellement jugée pour des chefs d’accusation similaires. Sanna Seif est en grève de la faim depuis près de deux mois.

Depuis que les militaires ont destitué en juillet 2013 l’ex-président islamiste Morsi, les autorités mènent une répression implacable contre tout type d’opposition, notamment contre les mouvements de la jeunesse, fer de lance de la révolte de 2011 qui avait chassé Hosni Moubarak du pouvoir. Des dizaines de militants ont ainsi été emprisonnés pour avoir violé une loi controversée limitant le droit de manifester.

Parmi ces militants Alaa Abdel Fattah, jugé dans un nouveau procès après avoir été condamné, avec 24 autres personnes, par contumace à 15 ans de prison. Il était accusé d’avoir attaqué un policier durant une manifestation illégale. Ce verdict avait été annoncé par surprise, le jeune militant de gauche et deux autres prévenus qui se trouvaient à l’extérieur du tribunal s’étaient vu refuser l’entrée par la police. Ils avaient été arrêtés immédiatement après l’annonce du verdict. Un tribunal égyptien a ordonné hier lundi sa libération sous caution d’Alaa Abdel Fattah et de deux autres détenus.

Alaa Abdel Fattah

Le 18 août, Alaa Abd El fattah a commencé une grève de la faim illimitée. Cette grève de la faim conteste sa troisième détention depuis le 25 janvier, et a été motivée par la détérioration des conditions de santé de son père, ainsi que l’emprisonnement continu de sa sœur Sanaa depuis le 21 juin. Alaa a mentionné à sa famille que sa grève de la faim reflète de sa décision de ne plus coopérer avec un système égyptien. Arrêté le 28 novembre 2013 chez lui pour s’être engagé contre la nouvelle loi anti-protestation, il avait été libéré en mars dernier sous caution. Quelques semaines après sa libération, il a une nouvelle fois été condamné le 11 juin à 15 ans de prison, pour avoir participé à des manifestations non autorisées en compagnie de 24 autres militants.

Alaa Abd El Fattah est emprisonné une première fois en 2006, alors qu’il était venu protester en soutien à des activistes poursuivis pour avoir « insulté le président ». Co-fondateur avec sa femme de l’agrégateur de blogs en arabe Manalaa.net, il était alors déjà une figure importante de la liberté d’expression. Fin octobre 2011, il est emprisonné pour incitation à la violence contre le régime militaire transitoire. Alaa est libéré deux mois plus tard. En novembre, Alaa est arrêté une nouvelle fois puis remis en liberté sous caution avant d’être une nouvelle fois condamné, pour la quatrième fois depuis 2006.

Egypte: Alaa Abd El fattah en grève de la faim

En Egypte, des dizaines d’activistes égyptiens ont organisé samedi matin, comme il le font depuis des mois, un rassemblement contre la loi qui restreint le droit de réunion. Les organisateurs avaient annoncé leur intention de marcher sur le Palais présidentiel, et la police les en a empêchés. 24 manifestants ont été arrêtés. Un tribunal administratif a décidé de renvoyer la loi devant la Cour constitutionnelle pour révision. Le problème c’est que la loi sera révisée par la personne même qui l’a promulguée, l’ancien président Adly Mansour. À Berlin, en Irlande, à Londres et dans d’autres pays, des rassemblements ont eu lieu en opposition la loi anti-manifestation et en solidarité avec les prisonniers politiques.

Egypte: Manifestation contre la loi anti-manifestation