Alors que la police a interpellé 2124 personnes suite aux quatre nuits de trouble du mois d’août, et que 1121 d’entre elles ont été inculpées, les tribunaux continuent à prononcer de lourdes peines. Hier, un garçon de onze ans a été condamné pour avoir volé une poubelle. Le 8 août, un groupe de manifestants avait brisé la vitrine d’un magasin de la banlieue londonienne. Le jeune homme y était alors entrer pour emporter une poubelle d’une valeur de 55 €. Condamné hier pour vol, il devra effectuer une peine de rééducation de 18 mois, peine qui peut prendre différentes formes: travail d’intérêt général, couvre-feu imposé,… De plus, durant les six prochains mois, c’est pouvoir local qui déterminera son lieu de résidence. A la fin de l’audience, le juge a précisé que s’il avait été un peu plus âgé, il aurait écopé d’une peine de prison.
Dans le cadre du projet européen ADDPRIV consacré à la vidéo-surveillance, des chercheurs de l’université de Kingston sont actuellement en train de développer un système de caméras CCTV (closed-circuit television) ‘intelligentes’. Ce dernier utilise une intelligence artificielle afin de reconnaître certains types de comportements spécifiques et est capable de suivre une personne sur de multiples caméras. Le fonctionnement est le suivant: un ordinateur apprend à reconnaître certains comportements qualifiés de ‘événements détonateurs’. Lorsqu’un événement de ce genre est repéré par l’ordinateur, le logiciel rassemble les séquences vidéo d’avant et d’après l’incident pour enregistrer l’historique complet des mouvements de la personne suivie. Par exemple, si une vitre est brisée en ville, le système pourra remonter pour trouver qui l’a cassée, et ensuite retracer ses pas afin de trouver quand et où il est entré en ville. Il pourra également découvrir où la personne est partie après avoir agi. Et au final, reconstituer tout le parcours de cette dernière.
Ce week-end se tiendra le carnaval de Notting Hill à Londres, et ce malgré les demandes répétées d’annulation de la part des autorités suite aux incidents du début du mois. Ce mercredi, ces dernières ont mené une vaste ‘opération préventive’ dans le quartier au cours de laquelle elles ont procédé à quarante arrestations. Un haut responsable de Scotland Yard a justifié cette action en affirmant qu’il disposait d’informations légitimant les arrestations afin d’éviter les troubles. En outre, plus de 12.000 policiers seront déployés dans le quartier durant tout le week-end et 4.000 agents supplémentaires seront mobilisés ailleurs dans la capitale pour venir compléter l’effectif policier habituellement de service.
Depuis la semaine dernière, trois personnes sont décédées en Grande-Bretagne après avoir été la cible d’un Taser ou de gaz incapacitant. La semaine dernière, Dale Burns est décédé quelques heures après avoir été ‘tasé’ durant son arrestation. L’autopsie aurait, selon les autorités, incapable de révéler les causes de sa mort. Lundi soir, Jacob Michael a été arrêté par onze policiers qui l’ont maitrisé en faisant usage de gaz incapacitant. Se sentant mal, il a été transféré à l’hôpital où il est mort un peu plus tard. Hier soir, Phillip Hulmes a été arrêté après avoir été touché par un tir de Taser. Une demi-heure plus tard, il est décédé. Les autorités ont annoncé que les autopsies de ces deux hommes n’avaient pas encore fourni leurs conclusions.
Le quotidien The Guardian a pu prendre connaissance d’une circulaire publiée par Scotland Yard au plus fort des troubles il y a deux semaines, circulaire transmise à tous les policiers en charges des enquêtes liées aux événements. Celle-ci, présentée comme la réponse dans l’urgence des autorités policières face aux troubles, demande que soit placées en garde à vue toutes les personnes qui pourraient avoir pris part aux émeutes d’une quelconque manière et recommande également aux tribunaux de refuser toute libération sous caution après que soit prononcée l’inculpation, quel que soit le chef de cette inculpation.
Un collectif d’avocats, qui vient de mener un premier examen judiciaire des procédures de mise en garde à vue, indique que dans la pratique, 62% des personnes arrêtées ont été replacées en garde à vue après leur première comparution (contre 10% en temps normal), ce qui pour eux, représente clairement une politique globale d’emprisonnement massif. Selon la police, cette politique était nécessaire afin de prévenir davantage de problèmes. Par ailleurs, la circulaire suggérait aux policiers d’utiliser des règles spéciales pour expédier rapidement les affaires devant les tribunaux, même si les preuves rassemblées n’auraient normalement pas été suffisantes. Enfin, le document suggérait une déclaration à l’usage des enquêteurs pour leurs rapports d’accusation: ‘une décision stratégique a été prise par le MPS (Metropolitan Police Service) pour que dans toutes les affaires, une demande de maintien en détention provisoire soit faite, tant au commissariat que plus tard au tribunal (…) La nature spontanée des délits et la charge significatif de travail qu’ils ont placé sur les effectifs de la police font que toutes les enquêtes n’ont pas encore pu être clôturées. Certaines investigations, telles que l’analyse des images vidéos, ne peuvent être accomplies pour l’instant en raison des troubles en cours. En conséquence, cette affaire nécessite la demande d’un ‘examen minimal’ afin que soit prise une décision d’inculpation basée sur les preuves existantes et l’espérance que davantage de preuves puissent être apportées’.
Cet ‘examen minimal’ permet donc au procureur de diminuer la charge de preuve nécessaire pour un maintien en garde à vue. Et cette procédure a largement été utilisée. Aujourd’hui, cette circulaire met en lumière les procédés répressifs des autorités et expliquent comment elles ont pu placer autant de personnes derrière les barreaux.
La technologie de reconnaissance faciale étant envisagée pour sécuriser les Jeux Olympiques qui se tiendront à Londres l’année prochaine. Des officiers de police alimentent de photographies des suspects des émeutes le programme nouvellement mis à jour pour Scotland Yard dans cette perspective.
Ne paniquez pas. Les photos publiées ne sont pas forcément une preuve. Ce n’est pas parce que la police a une photo floue qui est peut-être de vous que cela veut dire qu’elle sait qui vous êtes.
Ne vous livrez pas. La police utilise souvent la technique de vous faire savoir qu’elle a votre photo comme une pression psychologique afin de vous persuader de ‘vous présentez’ alors qu’elle ne sait pas qui vous êtes et n’ont aucune preuve contre vous.
Ne présumez pas que, parce que vous pouvez vous identifier sur une vidéo, un juge sera en mesure d’en faire autant. ‘Ce n’est pas moi’ en a déjà tiré plus d’un d’affaire.
Débarrassez-vous de vos vêtements. Vous n’aurez pas la moindre chance de suggérer que la personne sur la vidéo n’est pas vous si les vêtements qu’elle porte ont été retrouvé dans votre garde-robe. Débarrassez-vous de TOUS les vêtements que vous portiez à la manifestation, y compris de VOS CHAUSSURES, de votre sac, et de tous les bijoux que vous portiez à ce moment-là.
Adoptez une attitude discrète pendant quelques temps. Aux autres manifestations, les policiers seront à l’affut des personnes qu’ils ont placé sur leur liste de recherche.
Pensez à changer d’apparence. Peut-être est-ce le bon moment pour un changement de look. Faites-vous couper et colorer les cheveux, laissez-vous pousser la barbe, portez des lunettes.
Gardez vous maison propre. Débarrassez-vous des bombes de peinture, de toutes les affaires en rapport avec la manifestation et des SMS/photos douteux sur votre téléphone. Ne leur facilitez pas la tâche en ayant de al drogue, des armes ou quoi que ce soit d’autre d’illégal dans votre maison.
Faites attention à qui vous racontez ceci. Ne reconnaissez votre participation qu’aux personnes en qui vous avez vraiment confiance. Faites attention à ce que vous dites sur l’internet.
Tâchez de gardez votre sang-froid et de contrôler votre panique. Attendre qu’on frappe à votre porte est stressant à l’extrême, mais il est nécessaire que vous trouviez une manière de continuer à vivre comme d’habitude. Sinon, vous commencerez à purger votre peine avant même d’avoir été arrêté.
NO COMMENT
Si vous vous faites pincer, utiliser votre droit au silence. Répondez ‘je n’ai rien à déclarer’ à toutes les questions, avant et après l’arrestation et pendant les interrogatoires.
Ne dites rien aux policiers, même s’ils vous disent que ‘c’est dans votre intérêt’. On ne peut jamais faire confiance aux policiers. Dès l’instant où vous êtes arrêté, tout ce que vous dites est une preuve – le bavardage amical, cela n’existe pas. Ils essayeront de trouver des preuves contre vous et contre d’autres personnes. Il est plus facile de ne rien dire du tout que de répondre aux questions de manière sélective. Ne dites rien et ne signez aucune déclaration sans conseil juridique.
A Barrow, dans le nord-ouest de la Grande-Bretagne, un homme est décédé après avoir été ‘tasé’ par les forces de l’ordre. Mardi, en fin de journée, celles-ci sont intervenues pour arrêter Dale Burns, une vingtaine d’année, pour troubles de l’ordre public. Dans l’opération, un policier a fait usage d’un Taser, pistolet à impulsion électrique qualifié d’arme non-léthale. Quelques minutes plus tard, Burns a fait un malaise. Transporté à l’hôpital, il y est décédé vers 21h30. Alors que la société Taser poursuit son expansion et que de plus en plus de pays autorisent l’utilisation de ses armes affirmant qu’elles n’ont à ce jour jamais tué quelqu’un, Amnesty International a publié une enquête selon laquelle plus de 290 personnes sont décédées aux Etats-Unis entre 2001 et 2008 après avoir reçu une décharge.
Depuis une semaine, les tribunaux britanniques fonctionnent à plein régime pour faire face à l’afflux de personnes interpellées lors des troubles urbains de la semaine dernière. Au total, plus de 1.700 personnes ont été interpellées à travers le pays. A Londres, la police a annoncé 1051 arrestations et près de 600 mises en accusation. Hier soir, à Chester, les premières peines ont été prononcées. Jordan Blackshaw, 21 ans, et Perry Sutcliffe-Keenan, 22 ans, ont chacun été condamnés à quatre ans d’emprisonnement pour incitation aux troubles via les réseaux sociaux. Blackshaw avait créé une page Facebook intitulée ‘Détruire la ville de Norwich’ le 9 août dernier. Sutcliffe-Keenan est quant à lui à l’origine d’une page sur le même réseau: ‘Organisons une émeute!’. Les deux hommes ont été jugés coupables en vertu du Serious Crime Act pour avoir intentionnellement incité autrui à commettre une infraction majeure. Le tribunal avait requis une peine de dix ans. Le juge a néanmoins affirmé qu’il espérait que la peine prononcée aurait un effet dissuasif. L’avocat de Blackshaw a annoncé dès ce matin qu’il allait interjeter appel de cette condamnation.
Deux condamnés suite aux émeutes en Grande-Bretagne
Vendredi dernier, la police d’Essex a procédé à l’arrestation d’un jeune homme de vingt ans, dont l’identité n’a pas été dévoilée. Ce dernier passera devant les tribunaux le 1er septembre. Son délit? D’avoir tenté d’organiser, via les réseaux Blackberry Messenger et Facebook, une bataille d’eau géante à Colchester. Il a été arrêté le jour J sur les lieux annoncés de l’affrontement après que les autorités aient intercepté ses messages. L’homme qui l’accompagnait a également été interpellé mais immédiatement libéré. L’initiateur du projet est quant à lui accusé ‘d’avoir encouragé ou aider à commettre une infraction’. Les autorités ont pour leur part refusé de commenter le fait qu’elles surveillent les réseaux sociaux ou de donner des détails sur les mesures mises en place depuis les troubles de la semaine dernière.