La Chambre vote jeudi deux projets de loi installant un nouveau cadre pour l’expulsion de personnes étrangères en séjour légal parfois de longue durée, un texte porté par le gouvernement au nom de la protection de l’ordre public et de la sécurité nationale. Il sera possible désormais d’expulser des ressortissants étrangers nés en Belgique ou y vivant depuis la prime enfance. Les personnes visées ne devront même pas nécessairement avoir été condamnées par la justice. Le flou règne sur les critères d’atteinte à l’ordre public ou à la sécurité nationale qui pourront justifier une expulsion. Les exceptions relatives à la liberté de manifester ses opinions ou à celle de réunion pacifique ou d’association sont retirées de la loi sur les étrangers, le secrétaire d’Etat les jugeant superfétatoire au regard de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.

Les expulsions relèveront dorénavant du seul Office des étrangers, en l’absence d’arrêtés du gouvernement et moyennant la disparition de l’avis de la commission consultative des étrangers. Les décisions doivent être motivées mais une exception est prévue lorsque les informations proviennent de la Sûreté de l’Etat (la défense des intéressés n’aura pas accès à ces informations puisqu’elles sont classifiées). Un contrôle de proportionnalité tiendra compte de l’intégration et de la situation familiale. Le Conseil du contentieux des étrangers (CCE) contribuera à en juger. Le recours suspensif de plein droit est supprimé, seule la procédure d’extrême urgence est maintenue. Des régimes distincts sont instaurés selon la longueur du séjour, selon qu’il s’agisse de citoyens européens ou non. Le projet de loi prévoit la possibilité d’imposer une interdiction d’entrée à des citoyens de l’UE. La loi cible les jihadistes partis combattre en Syrie mais tel qu’elle se présente, elle pourrait tout aussi bien s’appliquer à des militants proches de la gauche révolutionnaire turque ou kurde par exemple.

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La commission temporaire « Lutte contre le terrorisme » a adopté vendredi la proposition de loi qui imposera aux travailleurs sociaux de fournir au procureur du roi les renseignements administratifs jugés nécessaires à une enquête terroriste, et à signaler des informations dignes de constituer des indices sérieux d’une infraction terroriste. Le Conseil d’État n’y a pas vu de problème de légalité, laissant à l’appréciation du législateur de juger de la proportionnalité. Le secret médical ne sera pas, lui, visé par les nouvelles dispositions.

Travailleurs sociaux manifestants contre le projet de loi

Une demande d’asile peut être rejetée si le demandeur a participé aux activités d’un groupe terroriste, même s’il n’a pas commis personnellement des faits de terrorisme, ressort-il d’un arrêt rendu mardi par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) dans un dossier concernant la Belgique. La CJUE avait été saisie de questions préjudicielles posées par le Conseil d’Etat belge dans le dossier d’un Marocain condamné en Belgique pour participation aux activités d’un groupe islamiste et qui avait ensuite introduit une demande d’asile en Belgique. Sa demande d’asile avait été rejetée, avant d’être acceptée, à deux reprises, par le conseil du contentieux des étrangers. Le Conseil d’Etat voulait savoir dans quelles conditions un demandeur peut être exclu du statut de réfugié lorsqu’il a été condamné pour participation aux activités d’un groupe terroriste sans avoir lui-même commis un acte de terrorisme.

La Cour constate que la notion d’« agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies » que la directive sur le statut de réfugié pose pour refuser ce statut est plus large que la commission d’actes terroristes. On peut donc également exclure du statut de réfugié quelqu’un qui aurait uniquement participé aux activités d’un « réseau » terroriste. Une nouvelle fois, un précédent est créé, visant les islamistes, qui ouvre la porte au refus d’asile pour des militants qui auraient eu un lien avec le PKK ou le DHKP-C, toujours officiellement inscrits sur la liste des organisations terroristes de l’Union Européenne.

La Cour de Justice de l'Union européenne, à Luxembourg

Donald Trump n’était pas encore investi président des États-Unis que, depuis quelques semaines, les Républicains de plusieurs États du pays essaient de faire passer des lois pour réprimer les manifestations de rue et blocages de voies publiques. Dans le Minnesota, une loi proposée par les Républicains début janvier envisage d’alourdir les amendes à l’encontre des personnes qui manifestent sur les autoroutes, et de relever à un an de prison les peines encourues pour avoir participé à ce type d’action. Des projets similaires ont été déposés dans les États de Washington et du Michigan.

Dans le Dakota du Nord, où les Sioux mènent une lutte contre un projet d’oléoduc, les Républicains viennent de déposer une proposition de loi : celle-ci autoriserait implicitement les automobilistes à renverser accidentellement les manifestants si ceux-ci bloquent une autoroute! « Nonobstant toute autre disposition légale, le conducteur d’un véhicule automobile qui, par négligence, causerait des blessures ou provoquerait un décès à l’encontre d’une personne qui fait obstacle à la circulation des véhicules sur une voie publique, une rue ou une route, ne pourra être tenu pour responsable des dommages », propose le projet de loi n°1203 déposé à l’Assemblée législative de l’Etat, largement dominé par les Républicains.

La mobilisation à Standing Rock

Le Sénat français a adopté, mardi 24 janvier en première lecture, le projet de loi assouplissant les règles de légitime défense des policiers après après l’attaque au cocktail Molotov de quatre d’entre eux le 8 octobre à Viry-Châtillon. Il sera examiné par les députés à partir du 7 février, avec comme objectif une adoption définitive avant la fin de la session parlementaire, à la fin de février.

Le texte définit un cadre commun de l’usage des armes à feu par les deux forces de l’ordre, la police (y compris les policiers municipaux) et la gendarmerie, alignant la première sur la seconde. Seuls les gendarmes peuvent actuellement faire feu non seulement lorsqu’ils sont agressés ou menacés par des individus armés, mais aussi pour « défendre » une zone qu’ils occupent, si des sommations répétées restent sans effet, ou pour immobiliser des véhicules. Avec la nouvelle loi, policiers pourront également « utiliser leur arme après sommations » dans ces cas également. Les sénateurs ont élargi une partie de ces dispositions aux policiers municipaux autorisés à porter une arme. Ils ont aussi autorisé les policiers municipaux à procéder à des palpations lorsqu’ils sont affectés à la sécurité de manifestations ou à la surveillance de l’accès à un bâtiment communal.

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Le Conseil des ministres français a adopté samedi un projet de loi prolongeant l’état d’urgence en vigueur depuis les attentats meurtriers du 13 novembre 2015 à Paris jusqu’au 15 juillet 2017, après les élections présidentielle et législatives. Les deux tours de l’élection présidentielle se tiendront le 23 avril et le 7 mai 2017 et les législatives les 11 et 18 juin. Le texte devrait être débattu mardi à l’Assemblée et jeudi au Sénat. L’état d’urgence, décrété le 13 novembre 2015 après les attentats qui avaient fait 130 morts à Paris et en région parisienne, a été prolongé depuis à quatre reprises, la dernière fois après l’attentat du 14 juillet à Nice.

Etat d'ugence en France (archive)

Le 30 octobre le ministère de l’intérieur français a fait publier un décret instaurant la base de données des « Titres électroniques sécurisés » (TES).Tout porteur d’une pièce d’identité ou passeport biométrique verra l’ensemble des données personnelles qu’il a transmis regroupées dans un fichier comportant ainsi l’identité, l’adresse postale et électronique, la signature, la taille, le sexe, la couleur des cheveux, mais aussi les empreintes digitales et la filiation. Au total, 66 millions de personnes sont concernées soit la quasi-totalité de la population.

Toutes ces informations seront consultables par la police, la gendarmerie, les préfectures ainsi que les services du renseignement. Interpol et le système d’information Schengen pourront également obtenir des données sur la perte ou le vol d’une carte d’identité ou d’un passeport. Cette loi avait été votée en 2012 mais jamais appliquée. La France n’a créé qu’une seule fois un fichier général de la population, c’était en 1940 sous Pétain. Il fut d’ailleurs détruit à la Libération.

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Les institutions de sécurité sociale et leur personnel pourraient être bientôt contraints par le Parquet de rompre le secret professionnel qui les lie aux usagers s’ils prennent connaissance d’« informations pouvant constituer des indices sérieux de l’existence d’une infraction terroriste », selon une proposition de loi de la N-VA actuellement débattue en commission de la Chambre. Le texte vise en outre à permettre au Parquet d’exiger, sous peine d’amendes, des travailleurs sociaux qu’ils lui fournissent les « renseignements administratifs » relatifs aux personnes qui font l’objet d’une enquête concernant des infractions terroristes.

La proposition de loi bénéficie du soutien du ministre de la Justice, qui a planché, avec le ministre de l’Intégration sociale sur un projet de loi sur lequel s’est fondé le collège des procureurs généraux dans une proposition de texte transmise à la commission Terrorisme de la Chambre. Les débats au sein de la commission Terrorisme ont évolué alors qu’une proposition de loi précédente, ne visant que les travailleurs et bénéficiaires des CPAS avait été retoquée par le Conseil d’Etat supputant une traque des allocataires. L’opposition a demandé en vain un avis du Conseil d’Etat sur la nouvelle proposition de loi. Celle-ci devrait revenir au coeur des débats en commission la semaine prochaine.

La commission Terrorisme de la Chambre a été instaurée le 26 novembre 2015

Le parlement israélien a rendu possible, mercredi dernier, l’emprisonnement de l’auteur d’un acte « terroriste » grave dès l’âge de 12 ans. Le texte « permettra aux autorités d’emprisonner un mineur reconnu coupable d’un crime grave comme un meurtre, une tentative de meurtre ou un homicide, même si il ou elle a moins de 14 ans ». Cela revient à abaisser à 12 ans l’âge minimal. Parce qu’un enfant de moins de 12 ans ne peut être jugé pour un acte criminel, a expliqué une porte-parole du ministère de la Justice. Dans les faits, la nouvelle loi s’applique là où est appliquée la loi civile israélienne. En Cisjordanie occupée, la loi militaire permet déjà à Israël d’emprisonner des enfants de 12 ans.

Présenté et défendu par le ministre de l’emploi et des affaires sociales, le projet de loi organique relatif au droit de grève est en examen depuis le 28 juillet au Conseil de gouvernement. En cas très probable d’approbation, ce texte sera ensuite soumis aux parlementaires. Le projet de loi énumère les parties autorisées à appeler à la grève. Il s’agit d’abord du syndicat le plus représentatif au niveau de l’entreprise ou l’institution. Si cette condition n’est pas satisfaite, c’est le syndicat qui a le plus grand nombre de délégués. En dernier recours, en cas d’absence de toute représentation syndicale au sein de l’établissement en question, ce serait à la simple majorité des salariés d’appeler à cette grève.

Le texte interdit en principe aux employeurs de recourir à la sous-traitance pour pallier le manque d’effectif durant cette grève, mais si les salariés refusent d’assurer un « service minimum », les employeurs peuvent, sur ordre de justice, de recourir à d’autres salariés pour garantir la continuité des activités. Par ailleurs, en cas d’arrêt de cette grève d’un commun accord, la loi 23 interdit aux employés de mener une grève pour les mêmes motifs et ce, dans un délai d’une année suivant l’arrêt ou l’annulation de la grève. La loi interdit de grève: les magistrats, les militaires, les fonctionnaires (douaniers, policiers etc.) porteurs d’armes.

Manifestation gréviste au Maroc (archive)