Ces trois dernières années, les tribunaux se sont servis de la jurisprudence et de lois antiterroristes rédigées à la hâte et introduites au Code pénal turc en 2005 pour poursuivre en justice les manifestants. Les tribunaux ont décidé que le simple fait d’être présent à une manifestation soutenue par le PKK équivalait à obéir aux ordres du PKK.
Faisant suite aux critiques visant les poursuites engagées à l’encontre d’enfants ayant participé aux manifestations kurdes sur la base d’accusations de terrorisme, le Parlement a amendé ces lois en juillet afin de casser ces condamnations et de mettre un terme aux procès d’enfants devant les tribunaux spécialisés dans les affaires de terrorisme. Toutefois les autres aspects de ces lois demeurent inchangés. Ainsi l’article 220/6 du code pénal turc, qui condamne les crimes commis au nom du PKK et est utilisé pour poursuivre les manifestants en conjonction avec l’article 314/2, qui condamne la participation armée à cette organisation, demeure applicable.
Parmi les cas cités dans le rapport figurent, notamment, les cas suivants: Un étudiant, Murat Isikirik, purge une peine de six ans et trois mois pour avoir fait le signe de la victoire lors de la procession funéraire de quatre membres du PKK à Diyarbakir en mars 2006 et pour avoir applaudi lors d’une manifestation organisée sur le campus de Dicle, à Diyarbakir, en mars 2007. Mère de six enfants, Vesile Tadik a été condamnée à sept ans de prison pour avoir tenu une banderole portant le slogan « La paix ne peut se faire qu’avec Öcalan », lors d’une manifestation organisée à Kurtalan, Siirt, en décembre 2009. Pour avoir crié « Longue vie au président Öcalan » lors d’une manifestation organisée le même jour à Eruh, Siirt, Medeni Aydin a également été condamné à sept ans de prison. Lors de la même manifestation, Selahattin Erden a été aussi sévèrement puni pour avoir tenu une banderole portant un slogan pro-PKK. Lui aussi est actuellement en prison. Fatma Gökhan, Tufan Yildirim et Feyzi Aslan ont été condamnés à des peines allant de 10 ans et cinq mois à 11 ans et 3 mois pour avoir scandé des slogans, fait le signe de la victoire et jeté des pierres lors de la manifestation du 26 mars 2008 à Diyarbakir. Leurs condamnations pour « crimes commis au nom du PKK », répréhensibles au nom de leur « participation à une organisation armée », ont été confirmées et ils purgeront une peine d’au moins sept ans de prison, un autre procès ayant par ailleurs été initié sur la base de nouvelles accusations portées contre eux suite à l’amendement, en juillet 2010, de la loi sur les manifestations et les rassemblements publics.
Les poursuites judiciaires visant des manifestants font partie de mesures de répression plus vastes prises à l’encontre des partis politiques pro-kurdes légaux. Parmi les prévenus se trouvent plusieurs anciens maires et maires en activité, un célèbre défenseur des droits humains, ainsi que des avocats. Six des maires en activité et un défenseur des droits humains arrêtés en décembre dernier sont toujours en détention. Depuis avril 2009, 53 autres personnes, dont certaines sont avocats, sont détenues. À travers toute la Turquie, environ 1.700 membres de partis sont en détention dans l’attente d’un procès reposant sur des accusations similaires.
Un rassemblement contre les poursuites contre les kurdes aura lieu demain 20 novembre, de 13h a 15 h, à la gare du midi.