Dans le quartier de Gazi, rattaché au district de Sultangazi à Istanbul, la population a monté des barricades en réponse à l’attaque de la police sur les manifestants et le Cemevi (lieu de culte alévi). Dans le quartier, où 3 personnes ont été blessées, les affrontements continuent. Dimanche, la police qui a attaqué une manifestation dénonçant les massacres au Kurdistan, a ensuite assiégé le Cemevi. Encerclant les alentours du Cemevi, la police a attaqué celles et ceux qui s’opposaient à eux avec du gaz et des tirs de balles en caoutchouc. La population du quartier a monté des barricades autours de leur Cemevi pour le protéger. Ils ont répondu aux attaques de la police en lançant des pierres. Par la suite, les véhicules blindés S84 et U1 de la police ont ouvert le feu sur la population du quartier. Suite aux attaques, trois personnes nommées ont été transporté à l’hôpital, blessé par les tirs de la police, deux grièvement.

A l’appel des organisation révolutionnaires, un grand nombre de personnes se sont rassemblées devant l’hôpital de Gazi. Suite à une nouvelle attaque de la police contre ce rassemblement, les affrontements ont repris dans les rues du quartier. Les gaz lancés par les véhicules blindés de la police ont noyé le quartier sous le lacrymogène, les lieux de travail ont spécifiquement été pris pour cible. Les milices révolutionnaires du TKP/ML-TiKKO, du DHKPC, du YDG-H et du MLKP ont monté des barricades dans les rues du quartier et résistent toujours.

Affrontements à Gazi

Affrontements à Gazi

Lundi 15 février, 2.000 à 3.000 manifestants se sont réunis sur la route menant au site d’extraction de la compagnie minière Cengiz Holding pour l’empêcher de raser des hectares de forêt vierge. La gendarmerie et la police locales ont été dépêchées sur place pour disperser les manifestants. Environ 800 policiers étaient sur place et que la Cengiz Holding avait engagé une cinquantaine de gardes.

Les manifestants ont bloqué le périmètre avec près de 300 véhicules pour barrer la route aux camions des forces de l’ordre. Ils ont également érigé des barricades de pierres, de bois et de poubelles pour tenir les forces de l’ordre à distance, tout en scandant « Nous gagnerons en résistant ». La police a fait l’usage de gaz lacrymogènes et a érigé des barrages pour séparer les véhicules de la compagnie minière et des services de sécurité des manifestants. Le bilan actuel fait états de 11 personnes arrêtées.

Lutte contre le Cengiz Holding

Lutte contre le Cengiz Holding

Une action kamikaze à la voiture piégée a tué 28 personnes mercredi soir à Ankara. La Turquie a accusé la résistance kurde de cette action, affirmant avoir identifié son auteur, Salih Necar, un Syrien de 23 ans. Quatorze suspects ont été arrêtés en rapport avec l’attentat. Le Parti de l’union démocratique (PYD), a démenti toute implication de son bras armé, les YPG, dans cette action qui a frappé un convoi de bus militaires arrêté à un carrefour en plein coeur de la capitale turque, où sont localisés de nombreux ministères, l’état-major des armées et le Parlement.

Sur le terrain l’intervention de la Turquie contre les Kurdes syriens est toujours plus active. Les bombardements se sont intensifiés et sous la supervision des autorités turques, au moins 500 rebelles syriens ont traversé la frontière turque pour se rendre à Azaz dans la province d’Alep (nord de la Syrie) pour lutter contre la progression des forces kurdes. L’aviation turque a également mené une série de frappes contre des camps du PKK dans le nord de l’Irak, dans le secteur d’Haftanin, non loin de la frontière syrienne. Ce matin, un convoi militaire a été visé par une attaque dans la province de Diyarbakir, tuant au moins six soldats et faisant de nombreux blessés.

Le théâtre de l’explosion à Ankara

EDIT:
L’attaque de ce matin a visé un convoi militaire dans la localité de Lice, dans la province de Diyarbakir. Au moins 7 soldats ont été tués par l’explosion d’un IED.

Le théâtre de l’attaque de Lice

Le théâtre de l'attaque de Lice

Une troisième journée de bombardements turcs a eu lieu ce 15 février dans le Canton d’Afrin, au Rojava, tuant et blessant des dizaines de personnes et forçant des centaines d’autres à la fuite. L’armée turque pilonne les positions des QSD, et spécifiquement celles de ces principales composantes, les YPG et Jaysh al-Thuwar. Le Premier Ministre turc Davutoğlu a menacé à de nombreuses reprises les forces kurdes, en particulier que si les YPG restaient à Menbagh (voir notre précédent article), l’aéroport serait détruit, et que si les Kurdes d’approchaient de Azaz, ils en seraient délogés. Le spectre d’une intervention terrestre turco-saoudienne n’a jamais été aussi présent qu’à l’heure actuelle.

Malgré l’agression, les QSD enchaînent les libérations.Ce 14 février ils libéraient Kafr Naya, ce 15 février ils libéraient la ville de Tal Rifaat, un important bastion islamiste.

Situation dans le nord d’Alep au 1 février 2016.

Situation dans le nord d'Alep au 1 février 2016.

Prétextant une attaque venue du Rojava, l’armée turque a bombardé à coups de mortiers, et d’avions les positions des YPG et de Jaysh al-Thuwar (Front des Révolutionnaires, membre des QSD) dans le canton d’Afrin, à l’ouest du Rojava, du coté de la ville d’Azaz. Au moins deux civils ont été tués. Des drones survolent également le canton pour trouver et détruire l’artillerie lourde. Cette nouvelle attaque de la Turquie contre le Rojava fait suite à la récente avancée des forces kurdes à l’ouest de l’Euphrate, visant l’unification du Rojava. Voir notre précédent article.

L’armée turque a confirmé avoir bombardé plusieurs cibles appartenant aux QSD ainsi qu’à l’armée du régime syrien. Le président du PYD (Parti de l’Union Démocratique, dont émane les YPG) a déclaré que les YPG s’opposeraient à l’entrée de la Turquie en Syrie et que les QSD ne se retireraient pas du nord de la province d’Alep. Ces derniers jours, la Turquie a déclaré qu’elle était ouverte à une opération militaire terrestre aux cotés de l’Arabie Saoudite dans le nord de la Syrie.

Mise à jour 21:55 Le bilan des bombardements s’alourdit, 3 combattants des QSD ont été tués selon les forces en question alors que la Turquie prétend en avoir tué 37.

Vidéo après l’un des bombardements.

Bombardements à Menagh.

Bombardements à Menagh.

Pour dénoncer le massacre commis par le régime Erdogan à Cizre, des manifestations ont eu lieu dans plusieurs villes de Turquie le 8 février à l’appel du Bloc de la Paix et d’organisations syndicales. A Istanbul et à Izmir, les forces de police ont violemment réprimé les manifestations. On compte une trentaine d’arrestations et de nombreux blessés à Istanbul et 49 arrestations à Izmir.

Après avoir visité le Chili et le Pérou, le président turc Erdogan termine sa tournée sud-américaine par une visite en Equateur où il espère voir les accords commerciaux qui s’élèvent actuellement à 200 millions de dollars par an passer à 500 millions, voir à un milliard, entre les deux pays.

De nombreux manifestants se sont rassemblés dans la capitale équatorienne, Quito, pour protester contre la guerre menée par l’état turc contre les provinces kurdes du sud-est de la Turquie, contre le soutien de l’état turc aux factions islamistes en Syrie, et contre la collaboration économique entre l’Equateur et la Turquie. Des cordons de police anti-émeute protégeaient le trajet d’Erdogan. Et lorsque Diego Vintimilla, avocat présent parmi les manifestants, a réussi à s’approcher, il s’est fait attaquer par un garde personnel de ce dernier, lui fracturant le nez.

Plusieurs femmes ont réussi à rentrer dans la salle ou Erdogan faisait une conférence « masterclass » et on chanté des slogans avant de se faire copieusement tabasser elles aussi. La partie encourageante de cette histoire est que, à part ces manifestantes, les policiers et les gardes du corps, la salle était pratiquement vide, et le masterclass boycotté. Ce qui n’a pas empêché le président équatorien, Correa, d’annoncer que les relations diplomatiques, commerciales, culturelles, techniques et scientifiques entre les deux pays avaient été renforcées , et d’envoyer son ministre des finances visiter la Turquie à la fin du mois.

Diego Vintimilla

Diego Vintimilla

Depuis 14 jours, 31 personnes sont emprisonnées dans la cave d’un building où elles s’étaient réfugiées face aux attaques de l’armée turque. 7 d’entre-elles sont décédées, 15 autres sont blessées. Les ambulances qui osent s’approcher pour leur venir en aide sont également attaquées par l’armée. Les espoirs s’amenuisent puisque aucune nouvelle n’a été reçue depuis cinq jours et que les secours ne peuvent s’approcher à moins de 300m.

Une situation identique pourrait avoir lieu dans le même quartier de la ville assiégée de Cizré. 37 personnes sont enfermées au premier étage d’un immeuble cerné par l’armée turque. Plusieurs d’entre-eux sont blessés, l’armée turque renvoie les ambulances qui tentent d’approcher.

Par ce procédé de « couvre-feu » (Cizré et Sur entrent dans leur 54ème jour de ce régime) l’état turc punit et réprime les villes rebelles du Bakuré, massacrant à coups d’artilleries lourdes, de snipers et de tanks des centaines de civils des villes insurgées. Les troupes de guérillas YPS et YDG-H résistent à l’agression turque en construisant des barricades, en creusant des tranchées et en s’attaquant à l’occupant.

Des militaires turcs appliquant le couvre-feu.

Des militaires turcs appliquant le couvre-feu.

L’armée et la police ont lancé en décembre une vaste offensive dans le district de Sur et dans plusieurs autres villes, sous couvre-feu total, pour réduire l’insurrection de la jeunesse kurde qui ont levé des barricades et creusé des tranchées. L’offensive des forces turques pour reprendre le contrôle du district est extrêmement brutale, n’hésitant pas à faire usage de tirs d’artillerie en zone urbaine. Près de 200 civils kurdes ont ainsi été tués. Dans le district historique de Sur, à Diyarbakir, le couvre-feu en place depuis le 2 décembre a été étendu à cinq quartiers supplémentaires et à une rue pour permettre aux forces de l’ordre de reprendre le contrôle de la ville. Un couvre-feu règne depuis près de 50 jours dans la ville de Cizre, alors que celui qui visait la ville de Silopi a été levé partiellement la semaine dernière.

Quatre soldats turcs ont été tués mercredi lors de violents affrontements avec des combattants du PKK à Diyarbakir, où un couvre-feu controversé a encore été renforcé. Les combats ont éclaté dans le district de Sur, lorsque des hommes du PKK ont ouvert le feu sur des soldats avec des armes automatiques et des lance-roquettes. Trois soldats ont été tués et six autre blessés, un quatrième soldat est décédé plus tard de ses blessures à l’hôpital.

Insurgé kurde à Cizre

Insurgé kurde à Cizre

Depuis le début du mois de janvier, des troupes des Forces Démocratiques Syriennes (QSD), l’alliance formée autour des YPG ont traversé l’Euphrate vers l’ouest dans l’objectif de libérer la ville de Manbij. L’état turc avait posé l’Euphrate comme une ligne derrière laquelle les forces kurdes de Syrie ne devaient pas avancer sous peines de représailles. Difficile de savoir à l’heure actuelle si les YPG ont effectivement traversé l’Euphrate (la Turquie le nie en tous cas), on sait par contre que Jaysh al-Thuwar (l’Armée des Révolutionnaire, un groupe de la gauche de l’ASL, membre des QSD) est effectivement présent au sud de Manbij.

La libération de Manbij est une énorme source de tensions pour les islamistes et pour l’état turc puisqu’elle pourrait aboutir à la libération de Jarabulus, à l’unification du Rojava et à couper la route aux aides de la Turquie vers l’Etat Islamique. Nous avions écrit il y a trois jours que la situation était extrêmement confuse à Manbij. Des sources fiables YPG auraient déclaré dans les dernières heures qu’une opération d’ampleur se préparerait pour libérer simultanément les villes de Jarabulus et de Manbij. Les YPG traverseraient alors l’Euphrate à deux ou trois endroits en même temps, s’exposant à un conflit ouvert avec la Turquie dans l’immédiat. Les troupes turques sont parées à l’éventualité et seraient déjà présentes à Jarabulus.

D’autres rumeurs, de sources moins sûres, prétendent que l’opération simultanée concernerait également la ville d’Azaz, contrôlée par les factions les plus islamistes de l’ASL et le Front al-Nusra. Ces sources prétendent également que l’opération serait imminente. Si une telle opération massive devait avoir lieu, les islamistes de Daesh, du Front al-Nusra et des factions islamistes de l’ASL se trouveraient coincés à l’ouest et à l’est par les QSD et au sud par les forces loyalistes du régime syrien, qui cherche lui à prendre la ville de al-Bab.

L’opération pourrait ressembler à ça.

L'opération pourrait ressembler à ça.