Dimanche, des milliers de manifestants ont fait le siège du palais de la Kasbah, où travaille le premier ministre. La foule brandissait des portraits des victimes de la répression du soulèvement populaire, exigeant que le nouveau gouvernement, actuellement dominé par les ministres de l’ancien régime, soit modifié. ‘Nous sommes venus pour faire tomber les derniers restes de la dictature’, ‘Ils ont volé nos richesses, ils ne voleront pas notre révolution’ scandaient les manifestants. Depuis hier soir, bravant le couvre-feu, des dizaines d’entre eux ‘campent’ devant le siège du gouvernement tunisien. Ce matin, de violents affrontements ont éclaté avec les policiers anti-émeutes qui tentaient d’exfiltrer des fonctionnaires du bâtiment. Les policiers ont tiré des grenades lacrymogènes pour disperser le groupe, qui lui a jeté des pierres et des bouteilles.

Siège du gouvernement à Tunis

Siège du gouvernement à Tunis

Un vaste appel à la manifestation avait été lancé pour ce samedi à Alger pour réclamer une ‘Algérie démocratique’. Malgré l’interdiction décrétée par la préfecture en cours de semaine, l’appel a été maintenu. Dès vendredi soir, les autorités ont quadrillé la capitale. En milieu de nuit, des dizaines de véhicules blindés étaient en position dans le vieux centre historique et des barrages étaient dressés aux entrées de la ville. Ainsi, dès vendredi soir, trois bus de manifestants arrivant de Kabylie ont été bloqués à l’entrée est de la ville. Ce matin, plusieurs centaines de personnes se sont retrouvées bloquées par des centaines de policiers casqués et équipés de matraques, de boucliers et de gaz lacrymogènes. Lorsque ceux-ci les ont empêché de marcher vers le Parlement, plusieurs personnes ont été blessées et d’autres arrêtées. Des témoins présents sur places parlent de six blessés au moins et de nombreuses arrestations musclées, surtout des jeunes.

Déploiement policier à Alger

Déploiement policier à Alger

En avril 2009, le sommet du G20 s’est tenu à Londres. De nombreuses manifestations avaient émaillé le sommet, avec leur lot de répression policière habituel. Un passant était même décédé après avoir été violemment poussé au sol par un policier. Une commission d’enquête parlementaire a été mise en place pour analyser les événements. Hier, la police londonienne s’est vue obligé d’admettre qu’un de ses commandants haut placés avait menti à cette commission. Le 19 mai, le commandant Broadhurst avait affirmé qu’aucun policier en civil n’était présent dans la foule rassemblée pour protester contre le G20, ajoutant ‘Les seuls officiers que nous déployons à des fins de renseignements dans ces situations sont des officiers de l’équipe de renseignements qui portent l’uniforme de police complet et une veste jaune et bleue. Il n’y avait absolument aucun officier en civil déployé’. Après enquête, la commission a révélé que la déclaration de Broadhurst n’est pas exacte. ‘Des officiers ont été déployés en secret dans les manifestations anti-G20 pour identifier les individus qui pourraient être impliqués dans l’organisation d’activité criminelle et pour donner en direct des informations de renseignements et de preuves concernant les activités des manifestants’. Elle ajoute que contrairement à ce que Broadhurst avait déclaré en 2009, elle a découvert qu’il se pourrait que certains policiers auraient peut-être été utilisés comme agents provocateurs. Le commandant Broadhurst a été convoqué mardi prochain par la commission d’enquête pour s’expliquer quant à son faux témoignage et aux actions policières menées durant le sommet.

A Lyon en octobre dernier, 249 personnes avaient été interpellées en marge des manifestations contre la réforme des retraites. Lors de l’une d’entre elles, neuf jeunes ont été interpellés alors qu’ils allaient apporter leur soutien à un piquet de grève vers lequel se dirigeait une centaine de militants de la droite radicale. Au final, trois de ces jeunes sont poursuivis pour ‘participation et complicité de participation – pour l’un d’eux – à un attroupement en étant porteur d’une arme’, armes qualifiés d’armes par destination et non par nature. Ces armes sont deux barres d’aluminium (trouvées dans le sac à dos d’un des jeunes), un ceinturon à l’effigie d’un poing américain porté par un autre à son pantalon et une tringle à rideau trouvée dans un fourré. Leur avocat dénonce tant la notion d’attroupement que la réalité des armes. ‘Une arme par destination est une arme si on s’en sert. Ici, personne ne s’en est servi’. Il ajoute que les jeunes n’étaient pas porteurs d’armes, mais simples transporteurs, d’un ceinturon au pantalon ou de barres d’aluminium dans un sac. Le procureur a requis trois mois de prison avec sursis. Le jugement sera rendu le 24 février.

A 11 heures ce matin, quelques centaines de manifestants ont été rejoints dans le centre de Tunis par plusieurs milliers de personnes issues de différents cortèges. Devant le ministère de l’Intérieur, ils ont scandé les slogans, ‘Le ministère de l’Intérieur est un ministère de la terreur’, ‘Hommage aux sangs des martyrs’ et ‘Soulèvement continu, non à Ben Ali’, avant que ne se déploient les blindés de l’armée. La police et sa milice ont dispersé les manifestants avec des grenades lacrymogènes. Les unités anti-émeutes ont pourchassé les jeunes dans les escaliers d’immeubles et dans un centre commercial où ils se réfugiaient. Juste avant, la police était intervenue pour empêcher la jonction d’un groupe important de manifestants et l’essentiel du rassemblement devant le ministère. Certains manifestants ont répliqué en lançant des pierres, des chaises et des parasols en direction des forces de l’ordre. De source médicale, treize personnes ont encore été tuées par des tirs policiers hier soir. Dans le reste du pays, les mobilisations et les rassemblements se poursuivent. L’état d’urgence a été déclaré sur tout le territoire, et un couvre-feu a été décrété de 18h à 6h du matin. Le gouvernement a donné à l’armée et à la police l’autorisation de tirer sur tout ‘suspect’ refusant d’obéir aux ordres.

Manifestation réprimée à Tunis

Manifestation réprimée à Tunis

Depuis le mois d’octobre, 151 personnes accusées d’entretenir des relations avec le PKK sont jugées à Diyarbakir, parmi lesquelles douze maires élus, membres du BDP (Peace and Democracy Party). Les accusations retenues sont l’adhésion à un groupe armé illégal, la diffusion de sa propagande, la perturbation de l’intégrité territoriale de la Turquie et la tenue de meetings publics illégaux. Ce jeudi, le procès a repris, les vacances judiciaires étant terminées.

A l’appel du BDP et du DKT (Democratic Society Congress – organisation qui chapeaute plusieurs groupes pro-kurdes), des centaines de personnes s’étaient rassemblées sur une place publique proche du tribunal pour dénoncer, entre autre, l’interdiction faite aux accusés de se défendre dans leur propre langue. La foule pacifique a dansé, scandé des slogans et écouté des discours avant de se mettre en marche vers le tribunal, encadrée comme il se doit par un cordon policier. Petit à petit, la tension est montée entre de petits groupes de manifestants et les forces de l’ordre, et à l’arrivée devant le tribunal, ces dernières ont commencé à lancer des gaz lacrymogènes. Ceux-ci ont entrainé la fuite d’une grande partie des manifestants. D’autres y ont répondu par des jets de pierres, de pétards et de cocktails Molotovs. Les affrontements ne se sont calmés qu’en fin d’après-midi. Malgré que la police ait été toujours présente en force, les manifestants sont restés sur place et ont chanté en attendant la fin de l’audience.

Manifestation en marge du procès à Diyarbakir

Manifestation en marge du procès à Diyarbakir

De violents affrontements ont opposés des manifestants et les forces de l’ordre cette nuit dans la grande banlieue de Tunis, malgré le couvre-feu imposé par les autorités. Selon les dernières déclarations de témoins locaux, huit personnes ont été tués par les policiers. Plusieurs bâtiments publics et véhicules ont été incendiés. Par ailleurs, un syndicat a annoncé qu’une personne avait été abattue et deux autres grièvement blessées par balles mercredi par les forces de l’ordre à Thala. A Sfax, où une grève générale avait été décrétée pour toute la journée, une personne a été tuée et quatre autres blessées par des tirs policiers. Deux autres personnes ont été abattues mercredi soir dans la ville de Douz. Une organisation internationale présente sur place a affirmé détenir une liste nominative de 66 personnes tuées depuis le début des protestations à la mi-décembre.

Manifestant tué en Tunisie

Manifestant tué en Tunisie

Hamma Hammami dirige le Parti Communiste des Ouvriers de Tunisie (PCOT) interdit par le gouvernement tunisien. Hammami était recherché par la police, et avait longtemps vécu dans la clandestinité. Ces derniers jours, il est intervenu à plusieurs reprises sur des télévisions étrangères pour dénoncer le régime en place en Tunisie à la suite des troubles qui durent depuis plus d’un mois. Ce matin, plusieurs policiers ont fait irruption dans son appartement. Ils ont perquisitionné les lieux avant d’emmener Hammami devant sa femme et sa fille.

Hammam Hammami

De vastes manifestations ont à nouveau eu lieu ce mercredi dans le centre de Tunis. Des centaines de jeunes ont été bloqué par les forces de l’ordre, qui ont tiré des grenades lacrymogènes pour les disperser. Le ministère tunisien de l’Intérieur a décrété ce soir un couvre-feu nocturne dans la capitale et sa banlieue. Dans le reste du pays, les affrontements se sont poursuivis durant toute la journée, faisans, selon certaines sources, de nouvelles victimes.

Hammam Hammami

Tunis est entrée hier dans le cercle des manifestations. Lundi, des unités anti-émeutes se sont déployées dans le centre ville, où étaient prévus plusieurs rassemblements estudiantins. Un étudiant affirme que dès le début du cortège, ils se sont retrouvés face à la police anti-émeute qui avait reçu l’ordre de les empêcher de passer. Ce qu’elle a fait à coups de matraques et de bombes lacrymogènes. Un étudiant a été blessé et huit autres ont été interpellés. Par ailleurs, après un week-end d’affrontements entre les forces de l’ordre et les manifestants dans le nord-ouest du pays, les manifestations ont repris de plus belle hier, et se poursuivent aujourd’hui. Sur place, plusieurs témoins annoncent que le nombre de tués dans la région dépasse les cinquante, citant les chiffres de l’hôpital de Kasserine. Ils parlent de tirs de snipers, de pillages et de vols de commerces et de domiciles par des effectifs de police en civil. Ils dénoncent des tirs de snipers postés sur les toits et des policiers tirant sur des cortèges funéraires. Dans toutes les villes du pays, la vague de protestation se poursuit, et avec elle la répression. De nombreux témoins, notamment à Kasserine et à Regueb parlent de ‘cadavres éventrés’ et de ‘cadavres à la cervelle éclatée’.