Actualité de la répression et
de la résistance à la répression

La police turque a dispersé par la force, lundi, quelques milliers de manifestantes et manifestants qui défilaient à Istanbul pour demander la « fin de l’impunité » pour les auteurs de violences contre les femmes. Des policiers ont utilisé du gaz lacrymogène et tiré des balles en plastique pour repousser les manifestants, pour la plupart des femmes, qui tentaient de remonter une avenue au cœur d’Istanbul. Environ 2.000 personnes s’étaient auparavant rassemblées sur une placette non loin, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, brandissant des pancartes demandant « la fin de l’impunité » ou sur lesquelles on pouvait lire les noms de femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint en Turquie. Après ce rassemblement dans le calme, le cortège a commencé à remonter l’avenue Istiklal, mais a été rapidement bloqué par un mur de boucliers de la police anti-émeutes. Ces dernières semaines, la Turquie a été secouée par plusieurs cas très médiatisée de femmes tuées par des hommes, notamment le meurtre d’Emine Bulut, tuée en public sous les yeux de sa fille de 10 ans par son ex-mari. Un total de 378 femmes ont été tuées en Turquie depuis le début de l’année, selon le groupe de défense des droits des femmes. En 2018, on en comptait 440, contre 121 en 2011.

La répression de la manifestation de lundi

Quelque mois après le référendum pour l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie et les affrontements qui y étaient liés  (voir notre article), Christophe Castaner, le ministre de l’intérieur français, a signé un arrêté validant l’utilisation d’une nouvelle arme de « force intermédiaire » (qui n’a pas pour but de tuer, mais qui est potentiellement mortelle) en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. Cette arme, appelée Crush 44, tire des projectiles d’un calibre de 44 millimètres (contre 40 millimètres pour le LBD-40) avec une puissance de 150 joules. Elle a été développée par l’entreprise Securengy. Ses munitions s’auto-détruisent à l’impact, ce qui pourrait fortement complexifier les éventuelles expertises balistiques qui ont pour but d’identifier la nature d’un projectile reçu et son origine. En dehors de la mutilation par impact à craindre, les autres effets potentiels sont les suivants : irritation de la peau/des muqueuses (munition PEFCS, contenant 80 grammes de gaz CS à 15%), assourdissement (munition PEFBANG, contenant 25 grammes d’un “mélange explosif” et provoquant une détonation à 130 dB), aveuglement (munition PEFCOFLASH) ou marquage (munition PEFCOL).

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Le Crush 44

Le Crush 44

Des associations militantes martiniquaises ciblent les hypermarchés du GBH (Groupe Bernard Hayot) pour demander réparation sur l’utilisation du chlordécone et du paraquat dans les plantations antillaises. Depuis plusieurs semaines, les centres commerciaux de Carrefour Dillon le 19 octobre, de Cluny le 9 novembre et de Génipa les 16 et 17 novembre dernier ont été bloqués pendant une journée. Dès 7 heures samedi matin, des jeunes masqués ou à visage découvert occupent le terrain devant l’Euromarché du Robert, faisant face aux gendarmes. Les manifestants ont chanté et brandi des drapeaux indépendantistes, rouge-vert et noir, et plusieurs altercations ont lieu entre manifestants et forces de l’ordre qui ont fait usage de gaz.

Les incidents à la Martinique ce samedi

 

Lundi 28 octobre, un Gilet Jaune, condamné à trente mois de prison ferme pour fabrication d’engins explosifs, comparaissait en appel devant la troisième chambre correctionnelle de la cour d’appel du Hainaut (voir notre article). Le jeune ouvrier avait, avec plusieurs de ses camarades, fabriqué 14 engins explosifs artisanaux à l’aide de bouteilles de déodorants, de pétards, de feu de Bengale, d’aluminium et de mèches (voir notre article). Il a finalement été condamné à une peine de travail de 200 heures.

Un camion de Total brûlé suite à l'occupation des Gilets Jaunes à Feluy

Jeudi 21 novembre, des manifestations massives étaient annoncées en Colombie pour protester contre les mesures d’austérité du gouvernement d’Iván Duque. Celui-ci avait pris des mesures répressives préventives (dont le déploiement de 4000 policiers dans la capitale) (voir notre article). Malgré ce déploiement policier, plus de 250.000 personnes ont manifesté dans le pays ce jour-là. Dans la capitale, Bogotá, la police anti-émeute colombienne (Esmad) a dispersé violemment des manifestant·es à l’aide gaz lacrymogène sur la Plaza de Bolívar alors que celles et ceux-ci bloquaient des routes à la fin de la manifestation. La police a fait de même dans le district densément peuplé de Suba où des manifestant·es bloquaient une station de métro.

Au total, trois manifestant·es ont été tué·es dans les manifestations de jeudi : deux lors d’une action dans un centre commercial situé dans la municipalité de Buenaventura et une autre dans la municipalité de Candelaria dans le département du Valle del Cauca. En outre, selon les chiffres officiels 122 manifestant·es auraient été blessé·es, le chiffre réel étant très probablement bien plus élevé. Enfin, on dénombre 98 arrestations.

Des manifestant·es contre le gouvernement Duque à Bogota, le 21 novembre.

Des manifestant·es contre le gouvernement Duque à Bogotá, le 21 novembre.

D’ici le printemps prochain, un nouveau Règlement Général de Police sera d’application sur l’ensemble des communes de la capitale belge. Pour harmoniser les différents règlement déjà existants deux protocoles d’accord seront conclus. Le premier vise à uniformiser les infractions mixtes (vol, graffiti, coups et blessures…), le second à relancer la possibilité de dresser des sanctions administratives communales pour les mineur·es auteur·es de ce type d’infraction.

À cette occasion, la STIB a annoncé qu’elle mettrait tout en œuvre pour être en mesure de partager les images de vidéo-surveillance de son réseau avec les six zones de police de la capitale. Elle annonce être sur la dernière ligne droite en vue de la conclusion d’une convention en ce sens avec l’organisme régional Bruxelles Prévention et Sécurité et le Centre de l’Informatique de la Région de Bruxelles-capitale (CIRB). Après la signature de la convention avec les zones de police, la Région bruxelloise programmera les logins et mots de passe policiers qui auront accès en temps réel à aux images de vidéo-surveillance de la STIB. Ce droit sera cependant limité aux images des stations de métro qui se trouvent sur le territoire des zones concernées.

Caméra de la STIB

Caméra de la STIB

 

La protestation, déclenchée le 18 octobre par une augmentation du prix du ticket de métro à Santiago, s’est vite étendue à des revendications plus larges, débouchant sur la plus grave crise sociale que le Chili ait connue en trois décennies. Des troubles insurrectionnels se sont ainsi produits jeudi à Santiago et dans d’autres villes comme Valparaiso, Viña del Mar, Arica, Antofagasta et Concepcion. Un adolescent a été tué sur une barricade érigée avec des pneus sur la route qui relie Arica, près de la frontière péruvienne, au reste du pays. Un automobiliste a voulu foncé dans le barrage, tuant l’adolescent et blessant grièvement un adulte qui l’accompagnait. Outre ce 23e décès, le bilan officiel des incidents de jeudi a été de 128 blessés et 767 arrestations. A Santiago, en particulier, et dans plusieurs quartiers périphériques de la capitale comme Puente Alto, Quilicura ou Maipu, la nuit de jeudi à vendredi avait été marquée par des attaques contre des commerces, un poste de police et une station-service.

Des milliers de personnes se sont de nouveau rassemblées vendredi sur la plaza Italia (rebaptisée place de la Dignité), dans le centre de la capitale, pour la cinquième « plus grande marche du Chili », une manifestation convoquée chaque vendredi sur cette place depuis le début du mouvement. Dans les environs, des manifestants encagoulés affrontaient la police, qui dispersait la foule avec du gaz lacrymogène et des camions lanceurs d’eau. Pendant les neuf premiers jours du mouvement, le président chilien Sebastian Piñera avait déployé l’armée dans les rues et décrété un couvre-feu. Mais à présent la police (et la police militarisée, les carabiniers) est seule à tenter de rétablir l’ordre. La police a annoncé mardi qu’elle suspendait l’utilisation de ces munitions spéciales qui ont rendu borgnes ou aveugles des centaines de manifestants (voir notre articles).

Des manifestants se protègent face aux forces de l'ordre à Santiago, hier vendredi

Ce samedi 23 novembre, une manifestation se tiendra à 13h devant l’ambassade iranienne en soutien au soulèvement de la population en Iran (voir notre article). Depuis le début du soulèvement, près de 200 personnes ont été tuées et plus de 3000 blessées. Le rassemblement exprimera aussi sa solidarité avec les insurrections populaires du Chili, du Liban et d’ailleurs.

Rendez-vous à 13h, devant l’ambassade d’Iran, avenue Franklin Roosevelt 15, 1050 Bruxelles

Soulevement en Iran - Novembre 2019

Le «  kiosque » de l’entreprise Cellebrite, muni du logiciel UFED-InField, est un système capable d’aspirer et de traiter toutes les données d’un téléphone portable en moins de dix minutes. Actuellement, en France, les téléphones saisis doivent être envoyés dans un des 35 centres spécialisés de la police technique et scientifique, qui sont souvent embouteillés. Avec ce système, qui sera installé dans les commissariats de premier niveau, il suffira de brancher le téléphone et toutes les données seront extraites pendant la garde à vue : SMS, photos géolocalisées… Le système est en cours de déploiement dans le nord de la France. L’an prochain, cent nouveaux systèmes seront installés en Île-de-France et dans le Sud. En tout, cinq cents systèmes doivent être installés d’ici 2024, pour un coût de quatre millions d’euros. Il a déjà été testé lors du G7, pour traiter les téléphones des personnes gardées à vue, avec des résultats jugés « très positifs »…

Voir les spécificités techniques de la plate-forme Kiosk

Voir les caractéristiques du système UFED-InField

Le système Kiosk

Vendredi 15 novembre, au moins 8 manifestant·es contre le coup d’état ont été tué à Sacaba (près de Cochabamba) après que les forces de sécurité aient ouvert le feu sur la foule. Les manifestant·s ont déclaré que les tirs avaient commencé après qu’ils aient tenté de franchir un poste de contrôle militaire. Mardi 20 novembre, au moins huit personnes qui tentaient de bloquer un dépôt de carburant dans la municipalité d’El Alto ont été tuées par les forces de sécurité. On dénombre également au moins 30 blessé·es. Jeudi 22 novembre, une manifestation massive se tenait pour dénoncer cette répression. Durant la marche les cercueils de 5 des 8 manifestant·es tués étaient portés par leurs camarades. La police bolivienne a réprimé cette manifestation avec des gaz lacrymogènes. Après les événements, les multiples blocages des entrées à La Paz par les opposant·es au coup d’état ont été renforcés. La répression du mouvement anti-coup d’état en Bolivie avait déjà fait plusieurs dizaine de mort·es et de blessé·es (voir notre article).

La police réprime une marche qui portait les cercueils de 8 manifestants

La police réprime une marche qui portait les cercueils de 5 manifestants