En Irak, les manifestants, qui réclament la chute du régime, redoutent que la coupure d’internet, inaccessible depuis ce lundi 4 novembre, ne soit un signe précurseur d’un retour au pire, les forces de sécurité tirant de nouveau à balles réelles dans la capitale. Depuis le 1er octobre, début d’un mouvement spontané de contestation, près de 280 personnes – en majorité des manifestants – ont été tuées, selon un bilan provisoire. Les autorités ont proposé des réformes sociales et amendements constitutionnels, mais les manifestants continuent de réclamer le départ de tous les responsables qu’ils jugent corrompus et incompétents ainsi qu’une refonte totale du système politique mis en place après la chute de Saddam Hussein.

Dans le sud, chiite et tribal, la désobéissance civile continue de paralyser écoles, administrations et gagne les infrastructures portuaires et pétrolières vitales pour l’Irak – deuxième producteur de l’Opep -, pays dont les habitants étranglés par le chômage et la pauvreté réclament leur « part du pétrole ». À Bagdad, les protestataires ont été une nouvelle fois pris mercredi sous les tirs à balles réelles des forces de sécurité sur le pont al-Chouhada. Les policiers anti-émeutes ont d’abord tabassé des manifestants à coups de matraques, les manifestants ont répondu avec des jets de pierre et ensuite les forces ont tiré. Depuis lundi soir, Internet est de nouveau aux abonnés absents. Les campagnes d’arrestations de militants vont bon train, selon des sources de sécurité et activistes. Des sources médicales s’inquiètent aussi de la disparition de plusieurs médecins, alors que de nombreuses voix en Irak dénoncent des opérations d’enlèvement organisées.

Manifestant blessé à Bagdad

Demonstrators scuffle with members of Iraqi security forces during one of the ongoing anti-government protests in Baghdad, Iraq November 6, 2019. REUTERS/Thaier al-Sudani TPX IMAGES OF THE DAY

 

L’organisation Amnesty International a récemment dénoncé l’utilisation de grenades lacrymogènes «brise-crâne» contre les manifestant·e·s irakien·ne·es qui  seraient jusqu’à dix fois plus lourdes que la normale. Ces cinq derniers jours, plusieurs manifestant·e·s ont été tué·e·s à Bagdad par ce type de grenade et on recense tous les jours plusieurs blessé·e·s suite à l’utilisation de ces engins à tir tendu. Ces grenades de type militaires de 40 millimètre, d’origine serbe et bulgare seraient utilisées pour la première fois dans le monde.

Des analyses par imagerie médicale authentifiées par Amnesty montrent des grenades entièrement encastrées dans le crâne de manifestant·e·s tué·e·s. Les grenades lacrymogènes de 37 millimètres habituellement utilisées par la police à travers le monde « pèsent entre 25 et 50 grammes », d’après Amnesty, mais celles utilisées à Bagdad « pèsent entre 220 et 250 grammes » et leur force est « multipliée par dix » lorsqu’elles sont tirées. De plus, les grenades généralement utilisées sont constituées de plusieurs cartouches plus petites qui se séparent et s’étendent sur une zone donnée. En revanche, les grenades « brise-crâne » à Bagdad consistent en une seule cartouche lourde.

Lors du premier épisode de manifestations, du 1er au 6 octobre, 70% des personnes décédées avaient été touchées à la tête ou au torse par des tirs de snipers que l’état irakien affirme toujours ne pas pouvoir identifier. Depuis la reprise le 24 octobre du mouvement, aucun tir à balle réelle des forces de l’ordre n’a été recensé dans la capitale, mais une quarantaine de manifestant·e·s y ont été tué·e·s. Au total, au moins 250 personnes ont été tuées depuis le début du mouvement il y a un mois.

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Imagerie médicale d'un patient décédé suite à l'utilisation d'une grenade brise crâne

Imagerie médicale d’un patient décédé suite à l’utilisation d’une grenade brise crâne

Aujourd’hui, l’armée irakienne a décrété un couvre-feu nocturne à Bagdad de minuit à six heures du matin pour les personnes et les véhicules jusqu’à nouvel ordre. Cette annonce fait redouter une dispersion dans la nuit de la place Tahrir, épicentre de la contestation et désormais occupé jour et nuit où cinq manifestants ont déjà été tués au cours de la journée de lundi. Au total, depuis le début du mouvement le 1er octobre, 239 personnes ont été tuées et plus de 8.000 blessées, selon un bilan officiel (les chiffres réels étant donc probablement plus élevés).

des manifestations en Irak contre le gouvernement sont réprimés dans le sang

des manifestations en Irak contre le gouvernement sont réprimés dans le sang

 

Un mouvement de révolte a commencé début octobre en Irak contre le chômage et la corruption dans le pays (voir notre article). Cette semaine, un rapport officiel, faisant le bilan de la répression, a été rendu public. Au moins 149 manifestant·es ont été tué en grande majorité à Bagdad.  La majorité des mort·es (70) ont été touché.e·s à balles réelles «à la tête et au torse». Il a notamment été établi que des snipers embusqués sur des toits dans le centre de Bagdad ont tiré sur la foule.

des manifestations en Irak contre le gouvernement sont réprimés dans le sang

Des manifestations  contre le gouvernement irakien réprimées dans le sang

Quatre combattants des Brigades Marxistes-Léninistes de Propagande Armée (MLSPB), la branche armée du Parti Front de libération des peuples de Turquie (THKP-C), ont été tués dans une frappe de l’armée turque au Kurdistan irakien. Il s’agit de Tamer Kasabalı (Fırat Yıldırım), Mahir Ernesto (Muhammed Tiril), Çayan Kızılbaş (Umut Özsepet) et du commandant de l’unité de guérilla : Alper Koçer Çakas (Fırat Çaplık). Les opérations de l’armée turque s’étaient multipliées ces derniers temps au Kurdistan irakien, avec des frappes aériennes mais aussi l’installation d’avant-postes fortifiés. La mort de ces quatre révolutionnaires remonte au 16 septembre. L’annonce des morts des combattants dans les guérillas est souvent différée, pour ne pas aider au renseignement tactique des militaires turcs.

Les quatre combattants des MLSPB

 

 

Depuis plusieurs jours, des manifestations anti-gouvernementales ont lieu à Bagdad et dans le sud de l’Irak contre le chômage et la corruption dans le pays. Le mouvement, qui ne cesse de prendre de l’ampleur, fait l’objet d’une répression sanglante. Un couvre-feu a été mis en place depuis jeudi dans Bagdad et dans le sud du pays.

Les forces de sécurité intérieure utilisent un arsenal habituel du maintien de l’ordre (canon à eau, gaz lacrymogène) et tirent également à balles réelles sur les manifestant·e·s. En trois jours, 44 manifestant·e·s ont été tué·e·s et plusieurs centaines ont été blessé·e·s. De plus, dans plus de trois quarts du pays internet a été coupé.

Des manifestations en Irak contre le gouvernement sont réprimées dans le sang.

Des manifestations en Irak contre le gouvernement sont réprimées dans le sang.

Depuis quelques jour, l’armée turque mène des bombardements aériens et des parachutages dans la région kurde de Khakurk au Sud-Kurdistan (Irak). Selon le commandement des Forces de Défense du Peuple (HPG), l’attaque de Khakurk serait une tentative d’occupation. Selon Murat Karayilan membre du comité exécutif du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) et commandant du quartier général des HPG, cette les opérations militaires turques se mènent avec le soutien de l’OTAN et plus particuliérement des États-Unis. Il a également annoncé que les guérilleros aller donner la réponse nécessaire à cette tentative d’occupation et mettre en place la résistance nécessaire.

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Murat Karayilan, membre du Conseil exécutif du PKK

Murat Karayilan, membre du Conseil exécutif du PKK

Mercredi 30 janvier, les forces de sécurité de Duhok ont arrêté jusqu’à 80 personnes en représailles du soulèvement des habitants de Behdinan, Dihok, Sheladize et Deralok contre l’occupation turque. Pour rappel, ces habitants avaient pris d’assaut samedi une base militaire turque dans la région et incendié du matériel militaire (voir notre article). Parmi les détenus se trouvent 3 membres du mouvement « New Generation », le coprésident du Tevgera Azadi (mouvement pour la liberté) de la région de Behdinan et des membres d’autres partis.

Un char capturé par les manifestants lors de la prise de la base samedi 26 janvier

Un char capturé par les manifestants lors de la prise de la base samedi 26 janvier

Aujourd’hui, des Kurdes de la ville de Sheladize, dans le district de Derelok (gouvernorat de Duhoq, Kurdistan irakien), se sont rendus à une base turque en signe de protestation contre le bombardement turc dans la région. Les manifestants ont occupé la base et incendié les installations.

Ils ont réussi à pénétrer dans le périmètre de la base malgré les tentatives de l’armée pour les en empêcher. Un groupe de soldats turcs de la base a été arrêté par les manifestants en colère.

Les manifestants ont également incendié le matériel militaire de la base, notamment des chars, des tentes, des conteneurs et plusieurs autres véhicules. Craignant la frustration des manifestants, les soldats turcs se sont échappés et la foule continue de manifester. Ils demandent à l’armée turque de quitter le Kurdistan.

Plus d’infos et une vidéo de l’événement [ici
->https://anfenglishmobile.com/kurdistan/people-in-kurdistan-region-stormed-a-turkish-base-32451]

Un char capturé par les manifestants lors de la prise de la base samedi 26 janvier

Le symbole des gilets jaune a été repris en Irak par les manifestants anti-corruption (voir notre article). Six manifestants ont été abattus et de nombreux autres blessés lorsque des manifestants ont pris d’assaut un bâtiment du gouvernement local à Bassora mardi, à l’issue d’un cortège en l’honneur d’un manifestant tué la veille par la police. Au moins 39 personnes ont été blessées, dont des forces de sécurité. Un couvre-feu a été imposé à travers la ville mardi soir alors que les autorités tentaient de reprendre le contrôle.

Bassora, le principal centre pétrolier irakien, a été le berceau des nombreuses manifestations qui ont eu lieu depuis cet été (voir notre article). Les manifestations ont commencé par des pénuries d’électricité et ont rapidement visé la corruption, la pauvreté et le manque d’emplois. La province souffre aussi d’une eau « potable » polluée et salée. Les hôpitaux ont signalé plus de 17 000 cas liés à de l’eau potable contaminée le mois dernier.

Les affrontementsc d’hier à Bassora

Les affrontementsc d'hier à Bassora