Mercredi 25 novembre, un Comité de Soutien aux Inculpés du 11 novembre a été fondé à Bruxelles. Voici son texte fondateur:

A l’aube du 11 novembre, 150 policiers cagoulés ont encerclé le village de Tarnac (350 habitants) en Corrèze, en plein centre de la France. A leur suite, une brigade de la police scientifique, des chiens renifleurs d’explosifs, un hélicoptère et une nuée de journalistes. Ces derniers n’avaient toutefois pas eu le temps de sortir leurs micro que déjà les dépêches AFP vendaient le scoop: les ‘dangereux saboteurs du rail‘ ont été débusqués et arrêtés. Cette opération spectaculaire a eu lieu à la suite de dommages commis sur des câbles électriques de la SNCF, qui avaient entraîné une perturbation du trafic ferroviaire les jours précédents, dans un contexte de grogne des cheminots. Un jour entier, le petit village a été isolé du monde par des barrages de police. Sur 20 personnes interpellées, 9 ont été emmenées dans les locaux de la police judiciaire à Paris pour subir quatre jours d’interrogatoires (temps maximum récemment autorisé par la loi pour une enquête terroriste). Les personnes qui ont été arrêtées vivaient en communauté; certains travaillaient à la ferme du Goutailloux, d’autres à l’épicerie du village qu’ils avaient repris à sa fermeture et où ils servaient tous les jours des repas ouvriers. Piétinant la présomption d’innocence aussi bien que le simple bon sens, les médias ont relayé deux jours durant les discours de la ministre de l’Intérieur et du chef de l’Etat, qui se sont empressés de saluer cette enquête éclair, ont ‘félicité la police et la gendarmerie pour leur diligence‘ et se sont ‘réjouis des progès rapides et prometteurs de l’enquête‘, tandis qu’un responsable syndical exprimait son soulagement à ne voir figurer aucun cheminot parmi les prévenus. Avant même le début de la garde à vue, l’affaire semblait entendue. Mais moins de deux jours après, force était de reconnaître de source judiciaire qu’aucune des preuves attendues n’était venue conforter les affirmations des policiers; ni flagrant délit, ni trace ADN, ni aveux, le dossier ne se fonde plus que sur l’enquête de police et sur des soupçons. L’on assiste dès lors à une surenchère de discours tenant lieu de pièces à conviction: dans la presse, on est passé ‘d’actes de malveillance‘ à ‘actes terroristes‘. S’il y a communauté, il ne peut s’agir que d »une secte‘. S’ils n’ont pas de portable, ce n’est pas un choix de vie mais parce que ce sont des ‘pros de la clandestinité‘. Ils ont une épicerie? Oui, mais ‘tapie dans l’ombre‘ (le Figaro, 12/11). A cela s’ajoute un classique éculé, la construction de la figure du ‘leader charismatique‘: le principal prévenu est accusé d’être le ‘dirigeant‘ d’une inconcevable ‘cellule invisible‘ ayant pour objet la ‘lutte armée‘, dont les cinq personnes aujourd’hui en détention seraient le ‘noyau dur‘. Ce qui peut valoir ‘jusqu’à 20 ans de prison‘ (le procureur Jean-Claude Marin, dans Libération, 15/11). Avec le comité de soutien de Tarnac à l’appel duquel nous répondons, nous ne pouvons que constater la démesure, grotesque ou tragique, qui entoure cette affaire: Démesure entre les actes reprochés et leurs qualifications, entre les preuves fournies par l’accusation et les procès d’intention faits aux inculpés, entre l’ampleur de l’opération ‘Taïga’ digne d’un raid en Irak et l’existence tout sauf clandestine des personnes qu’elles visaient. Après une semaine de délire et de surenchère généralisée, la presse change un peu de ton, grâce d’ailleurs à la lucidité salutaire de certaines interventions (nous pensons au philosophe Giorgio Agamben, dans le Libération du 19, ou à un article de M. Quadruppani, sur le site Rue89 le 18…) et à l’indignation d’un grand nombre de lecteurs anonymes choqués par le traitement médiatique de cette affaire. Mais cinq des inculpés, eux, restent en détention. Une détention qualifiée de ‘provisoire’ mais qui peut s’étendre en France, pour les affaires qualifiées de ‘terrorisme’, jusqu’à 4 ans et huit mois… Dans un contexte de crise générale allant s’approfondissant et face aux désaveux de sa politique, l’Etat français a besoin pour se soutenir de la constitution d’un nouvel ennemi intérieur. Le ‘terrorisme islamique‘, la ‘racaille des banlieues‘ ne suffisent plus: la ‘résurgence d’une mouvance anarcho-autonome‘ (décrétée par Michèle Alliot-Marie, ministre française de l’Intérieur) semble arriver à point nommé. Si l’affaire de Tarnac paraît ‘montée de toute pièce‘ il y a derrière un enjeu de taille. En faisant, d’une part, coïncider toujours davantage la figure du suspect et celle du coupable, l’Etat installe la peur dans les milieux contestataires. D’autre part, en faisant passer pour terroristes des actes qui relèvent plutôt du blocage, et qui s’inscrivent dans la continuité de gestes qui ont toujours existé dans les luttes sociales (blocages de la gare du midi par les étudiants de l’ULB ces mois derniers à Bruxelles, blocages autoroutiers en France pendant le CPE…). Il diabolise toute contestation qui ne se condamnerait pas d’avance à rester symbolique; il s’agit là de distiller la peur dans l’opinion publique. Pour ce faire, rien de tel qu’une opération comme celle du 11 novembre; opération dont la démesure est elle-même une opération visant à conforter, aussi a posteriori, l’introduction de ces ‘lois d’exception’. Les lois d’exception s’appliquent bien sûr aussi en Belgique. La Belgique a été l’un des premier pays à suivre avec zèle les directives européennes invitant à se doter de nouvelles mesures anti-terroristes. Affirmer maintenant notre solidarité avec ceux qui se trouvent en ce moment sous le coup de ces mesures indique aussi bien que nous nous organisons pour résister, ici, à leur mise en oeuvre. En écho avec le comité de soutien de Tarnac, nous demandons la libération immédiate de tous les inculpés et la levée des poursuites en matière de terrorisme.

Le Comité de Soutien aux Inculpés du 11 novembre – Bruxelles

Pour contacter le comité: soutien11novembre@bruxxel.org

Pour ceux de Tarnac

Pour ceux de Tarnac

Ce jeudi 27 novembre, un groupe d’anarchistes de Moscou a manifesté sa solidarité avec les militants interpellés en France pour le sabotage des lignes TGV. Ils ont diffusé des tracts et ont crié en russe et en français ‘Solidarité avec les interpellés de Tarnac!‘ et ‘A bas la terreur d’Etat!‘. Sur le bâtiment voisin de l’ambassade de France, ils ont accroché des banderoles sur lesquelles était écrit ‘Solidarité avec les interpellés de Tarnac!‘. La police a violement dispersé la manifestation.

Un site de soutien aux inculpés du 11 novembre s’est ouvert. En voici le texte de présentation:

Bienvenue,
Ce site est le site des comités de soutien aux 9 inculpés du 11 novembre, de Tarnac, Rouen et Paris. Nous condamnons des incriminations sans fondement et démesurées. Nous condamnons l’utilisation du dispositif anti-terroriste qui permet cette disproportion et ces injustices. Nous exigeons la libération immédiate des cinq personnes maintenues en détention et le retrait pour toutes et tous des chefs d’inculpation ‘visée terroriste’ et ‘association de malfaiteurs’. Vous pouvez déjà trouver sur ces pages quelques moyens de nous soutenir (création de comités locaux, aide morale et financière…). Nous allons nous employer dans les plus brefs délais à la création d’espaces donnant accès à: des revues de presse, des textes d’analyse, aux annonces et récits d’actions et d’événements de soutien, à certaines des nombreuses lettres que nous recevons etc. Un espace concernant les lois anti-terroristes et leurs utilisations doit également voir le jour. Des pages spécifiques seront ouvertes pour les comités locaux qui en feront la demande, comme c’est déjà le cas pour celui de Tarnac. Solidarité totale avec les inculpés

Ce site permet des liens avec les comités locaux de soutien aux inculpés: Voir ce site

En novembre 1973, cela fait près de 6 ans que la Grèce subit une dictature militaire commanditée par l’OTAN et dirigée notamment par le colonel Papadopoulos. Enfermement et torture des opposants politiques, abolition des droits civils, dissolution des partis et censure rythment la vie politique grecque. Le monde étudiant n’est pas épargné, qui se voit dans l’impossibilité d’élire des représentants au sein des institutions universitaires, n’a pas le droit de publier de revue ni de mener aucune manifestation et encore moins de s’organiser en syndicat. Le 14 novembre 1973, les étudiants de l’école polytechnique se regroupent au sein de leur établissement et entament une manifestation appelant à la chute de la dictature. Le mouvement enfle jusqu’au 17 novembre. Au point que le régime panique et décide de réprimer le mouvement en envoyant ses chars à l’assaut de polytechnique. Un assaut meutrier (au moins 27 victimes). La commémoration du 17 novembre est une des occasions pour les étudiants contestataires (et notament anarchistes, très nombreux à Athènes) de manifester. Cette année, un ‘black block’ d’environ 2000 manifestants a affronté la police anti-émeute grecque.

Affrontements à Athènes

Affrontements à Athènes

Neuf membres présumés de la ‘cellule invisible’ anarcho-autonome, accusés de sabotages contre les lignes TGV de la SNCF, ont été mis en examen et écroués samedi dans la soirée pour ‘direction d’une structure à vocation terroriste‘, un crime passible de vingt ans de réclusion criminelle. Julien C., 34 ans, est également poursuivi pour ‘association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste‘ et ‘dégradations en réunion en relation avec une entreprise terroriste‘. Cinq personnes (dont Julien C.) qui auraient été aperçues près de lignes SNCF sabotées ont notamment été mises en examen pour ‘association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste‘. Le parquet avait requis contre elles des poursuites pour ‘dégradations en réunion en relation avec une entreprise terroriste‘. Seules trois d’entre elles (dont Julien C.) sont poursuivies de ce délit par le juge d’instruction Thierry Fragnoli qui n’a pas suivi le raisonnement du parquet selon lequel les cinq avaient pris part aux actes de dégradation. Le parquet a requis un mandat de dépôt à leur encontre. Quatre personnes devaient être également présentées dans la nuit à un juge des libertés et de la détention. Deux d’entre elles, Gabrielle H et Yldun L, sont poursuivies pour ‘destructions en réunion‘ et ‘association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste‘, les deux autres pour le seul dernier chef.

Les gardes à vue des dix militants arrêtés mardi dans l’enquête sur des actes de sabotage contre le réseau SNCF ont été prolongées. Il semblerait que, contrairement à ce qu’a affirmé la presse, les policiers du renseignement intérieur et de la sous-direction anti-terroriste, en charge de l’enquête, ne disposent pas de preuves: ni plan des voies SNCF, ni dispositif de sabotage. Les interrogatoires, qui se déroulent pour neuf des suspects à Paris, peuvent se prolonger jusqu’à samedi. Les suspects devront être ensuite, soit présentés à un magistrat anti-terroriste, soit remises en liberté

L’affaire vise quatre sabotages constatés samedi dernier sur des caténaires de l’Oise, de la Seine-et-Marne et de l’Yonne et sur un autre commis le 26 octobre en Moselle. La technique employée a été à chaque fois identique, un fer à béton a été placé avec un système de verrouillage sur une ligne à haute tension, ce qui a amené une mise hors-tension et hors-service des réseaux au passage des trains (cf. photo ci-dessous).

Sabotage de ligne de chemin de fer

Sabotage de ligne de chemin de fer

Un anarchiste belge (vivant en France depuis son enfance) figure parmi les personnes placées en garde à vue pour le sabotage commis contre les lignes TGV. Mardi 11 à l’aube, environ 150 policiers (60 de la Sous-direction anti-terroriste, 50 de la Direction centrale du renseignement intérieur et 40 enquêteurs locaux de police judiciaire), avaient arrêté 20 personnes à Paris, Rouen, dans la Meuse et en Corèze. La moitié d’entre elles ont été remises en liberté et les dix autres personnes, âgées de 23 à 33 ans, dont trois femmes, sont placées en garde à vue. Un militant suisse figure également parmi les arrêtés. Le militant belgo-français, Benjamin R., qui a eu un passé politique dans l’aile gauche de l’écologie ‘officielle’, habitait à Tarnac (Corrèze), dans une communauté libertaire animant un restaurant, organisant des concerts, des festivals BD etc. La police a arrêté au total à Tarnac cinq personnes. Selon l’AFP (à prendre avec des pincettes donc), les flics auraient notamment trouvé quatre cartes d’identité falsifiées. Neuf personnes sont en garde à vue dans les locaux de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), à Levallois (Hauts-de-Seine), une dixième à Nancy. Leur garde à vue peut durer jusqu’à 96 heures s’agissant d’un dossier de ‘terrorisme’.

Enquête à Tarnac

Enquête à Tarnac

La ministre de l’Intérieur française Michèle Alliot-Marie a annoncé aujourd’hui l’arrestation de dix personnes qui appartiendraient à la mouvance ‘anarcho-autonome’ dans le cadre de l’enquête sur les actes de sabotage commis sur les lignes TGV. ‘Depuis mon arrivée (au ministère), j’avais souligné les risques de résurgence violente de l’extrême gauche radicale‘, a dit la ministre. La ministre a affirmé constater que ‘ce mouvement ultra-gauche a des liens avec cinq pays européens (Belgique, Allemagne, Italie, Grèce et Grande-Bretagne) et avec d’autres pays non européens‘.

Les arrestations ont eu lieu en Corrèze, dans la Meuse, en région parisienne ainsi qu’à Rouen, suite à l’espionnage effectué depuis des mois par la Direction Centrale du Renseignement Intérieur (DCRI), et à une enquête de la Sous-Direction Anti-Terroriste (SDAT). Après cinq sabotages sur des voies ferrées, réalisés à partir du 26 octobre (en Moselle, dans l’Oise, l’Yonne, la Seine-et-Marne) entraînant des retards sur la ligne TGV, les services anti-terroristes avaient été chargés de l’enquête. Un nouveau sabotage avait affecté dimanche un TGV circulant près de Narbonne. Les peines encourues vont de trois à dix ans de prison ferme et jusqu’à 75.000 euros d’amende.

Dans la nuit du 19 au 20 octobre, deux engins explosent devant le quartier général de la police municipale de Parme (Italie). Les dégâts sont limités, aucun des flics qui se trouvaient à l’intérieur ont été blessés. Cette section de la police municipale a récemment été dénoncée par un étudiant ghanéen qui a rendu public qu’il a été battu et torturé dans ce commissariat. Ces derniers temps, de plus en plus de dénonciations d’immigrés qui sont torturés dans les commissariats sont rendus publics. Le 20 octobre, cinq perquisitions ont eu lieu à Vérone. Deux anarchistes sont amenés au commissariat, ils sortent avec une accusation de ‘favoriser des transgresseurs’ (article 378) parce qu’ils ont refusé de déclarer quoi que ce soit. A ce moment, trois autres anarchistes sont arrêtés et incarcérés à la prison de Vérone. L’accusation à leur encontre n’est pas encore formalisée, mais il s’agit probablement de ‘fabrication, transport et déflagration de matériel explosif avec des fins terroristes’ et d’avoir mis une banderole (qui a été mise devant le commissariat au moment des explosions, dénonçant les tortures). Le 21 octobre, un quatrième anarchiste est arrêté à Parme et incarcéré à la prison.

Les adresses des anarchistes incarcérés:

-Giuseppe Sciacca
Nora Gattiglia
Maddalena Calore
casa Circondariale di Verona
Montorio via S. Michele 15
37133 – Verona
Italie

-Santo Caselbonese Fonti
casa circondariale di Parma
Via Burla, 59
43100 Parma
Italie

Le communiqué suivant a été posté sur le site du Centre de Médias Alternatifs de Bruxelles (CEMAB): ‘Cette nuit nous avons défoncé à coups de marteaux une caisse de Dalkia à Laeken. Phares, rétros, vitres, carrosserie, tout y est passé. Par ce geste nous voulons saluer les émeutiers de la prison de Bruges. Pour la démolition de toutes les prisons!‘. Cette action n’est pas la première du genre. Le 16 juin par exemple, une camionette de la société ISS Cleaning avait été incendiée à Bruxelles. Cette société avait emporté le contrat de l’entretien des centres fermés. Pour se tenir informé des initiatives anarchistes anti-carcérales, lire La Cavale que l’on peut télécharger en français et en néerlandais sur le site de l’Anarchist Black Cross.

Site du CEMAB

Site de l’A.B.C.