Début décembre, Shahou Sadeghi, Aram Mohammadi, Mehrdad Sabouri et Omid Ahmadi, des militants syndicaux Kurde iraniens de la ville de Kamyaran (Rojilat – Kurdistan iranien), ont été transférés à la prison de Kamyaran pour y purger leur peine. En mai 2016, les quatre syndicalistes ainsi que deux autres syndicalistes kurdes, Rozhin Ebrahimi et Delniya Sabouri, avaient été arrêtés pour leur participation à la journée du 1er mai. Rozhin Ebrahimi et Delniya Sabouri avaient été provisoirement libérés après interrogatoires et les quatre autres, sous caution, après une semaine de détention.

Le 3 octobre 2016, le procès de ces six militants avaient eu lieu sans la présence de leurs avocats les condamnant à 4 ans et six mois de prison pour propagande contre l’état dans le cadre de leur participation à la journée du 1er mai. L’appel du procès s’est tenu à la mi-novembre 2018. Mehrdad Sabouri et Omid Ahmadi ont été condamnés à un an de prison, Shahou Sadeghi et Aram Mohammadi à 91 jours de prison et Rozhin Ebrahimi et Delniya Sabouri à 3 jours de prison.

Iran : 4 syndicalistes kurdes emprisonnés pour avoir exercé leur liberté syndicale

Le 26 décembre, les employés d’Azkoiengo Huerta de Peralta, société de maraîchage navarraise, ont entamé une grève illimitée pour demander la réintégration de quatre travailleurs licenciés. Les travailleurs s’étaient organisés afin d’améliorer leurs conditions de travail. Leurs principales revendications concernent les journées interminables, le salaire payé en dessous du montant prévu dans l’accord de travail et l’impossibilité d’obtenir des congés. Suites aux élections sociales, des représentants syndicaux avaient été élus au sein de l’entreprise. Suite au travail syndicale mené dans l’entreprise, les dirigeants de Huerta de Peralta ont licencié 4 travailleurs syndicalistes « par vengeance ».

Depuis le début de la grève, les travailleurs ont menés plusieurs manifestations. Le 28 décembre, quatre travailleurs manifestants ont été blessés à Iruñea (Pampelune) par la Foruzain (Police de la communauté de Navarre). Le syndicat LAB, majoritaire au sein du comité d’entreprise, a appelé à la démission de la directrice Maria Jose Beaumont, conseillère à la présidence de Navarre.

LAB a appelé à une manifestation le 12 janvier à Iruñea et le 4 janvier, une journée de solidarité à Azkoia sera organisée.

Manifestation des travailleurs grévistes d'Azkoiengo Huerta de Peralta

Plus de 400 travailleurs temporaires des docks de Valparaiso sont en grève depuis plus d’un mois. Employés par la société privée TPS ils touchent de très bas salaires, leurs conditions de travail sont précaires et ils ne bénéficient pas des garanties offertes par les travailleurs réguliers. La société TPS leur a proposé un prêt de 600.000 pesos (environ 900 dollars) et une prime de 250.000 pesos, auxquels le gouvernement a ajouté 250.000 autres pesos « pour la formation ». Mais les dockers réclament dès le début de la grève une prime compensatoire de deux millions de pesos et non un prêt.

Ils ont donc rejeté le projet d’accord et repris leurs manifestations et se sont affrontés aux troupes spéciales du corps des carabiniers qui cherchaient les à disperser à l’aide de gaz lacrymogène et de jets d’eau lancés par des véhicules blindés. Dans plusieurs des principales artères de Valparaiso, le trafic est interrompu. Dans la zone des quais, des dizaines de grévistes ont franchi les barrières donnant accès à la société du port.

Les affrontements à Valparaiso

Depuis début novembre, les travailleurs du Groupe sidérurgique national iranien (INSIG) de la ville d’Ahvaz sont en grève pour réclamer le paiement de plusieurs mois de salaires impayés et des garanties pour la sécurité de leur emploi (voir notre article). Lundi 17 décembre, 31 sidérurgistes grévistes ont été arrêtés, principalement à leur domicile, durant des raids organisés de nuit, 10 autres seront arrêtés le mardi 18. Certains d’entre eux ont été battus par la police devant leur famille et des effets personnels ont été saisis, dont les téléphones portables. Sur les 41 arrêtés, 31 ont été emmenés à la prison de Sheyban (à Ahvaz). Dans la matinée du 19 décembre, la police et des Gardiens de la Révolution ont encerclé des quartiers de la ville d’Ahvaz pour empêcher les rassemblements de travailleurs à l’usine. Un groupe de travailleurs a malgré tout manifesté, notamment pour appeler à la libération de leurs collègues arrêtés.

Des travailleurs d'INSIG en grève

Le 11 décembre 2018, deux anciens cadres de l’usine Ford de Buenos Aires ont été condamnés par le tribunal pour complicité avec la dictature militaire en place entre 1976 et 1983. Le 24 mars 1976, le soir-même du coup d’État par la junte militaire, une unité de l’armée s’installe dans l’usine Ford. Durant les semaines qui suivront 24 délégués syndicaux seront détenus au centre sportif de l’usine, transformé en centre de torture. La plupart d’entre eux seront envoyés par la suite dans une prison militaire. Au final, trois syndicalistes ne seront jamais retrouvés.

Pedro Muller, à l’époque, numéro 2 de Ford Buenos Aires, a été condamnée à 10 ans de prison, et Hector Sibilla, chef de la sécurité de l’usine Hector Sibilla, à 12 ans de prison. Les deux hommes étaient poursuivis pour avoir autorisé la mise en service de ce centre de torture clandestin au sein de l’usine, mais également pour avoir désigné des travailleurs et donné des informations aux agents de la sécurité pour leur enlèvement et leur torture. Lors de ce procès, l’ancien général Santiago Riveros, qui commandait la base militaire de Campo de Mayo où les ouvriers ont été détenus et torturés, a également été condamné à quinze ans prison. La dictature fut l’occasion pour des dirigeants d’entreprise de faire taire toute revendication sociale et d’augmenter les cadences de productivité des usines. D’autres procès pour complicité avec la dictature sont en cours contre des entreprises étrangères et argentines. Celui de Ford a une portée symbolique particulière, les militaires utilisant pour les enlèvements des Falcon, alors le modèle le plus vendu par la firme américaine.

Pedro Muller et Hector Sibilla

Le mardi 11 décembre, sur l’ordre des autorités locales, une centaine de personnes, dont des policiers ont détruit le camp de solidarité tenu depuis le 12 octobre par les membres du syndicat de l’hôtel Tharabar Gate, des membres des familles des travailleurs et des sympathisants. Le 13 décembre, une marche syndicale s’est organisée à la suite de cette destruction mais a très vite été dispersée par la police arrêtant 13 personnes dont 7 membres du syndicat.

Le campement avait été établi suite à des manifestations publiques organisées par les syndicats des hôtels de la région de Bagan pour protester contre les licenciements de membres et leaders syndicaux par la direction de l’hôtel Tharabar Gate. Malgré les réunions de conciliation entre les représentants des gouvernements locaux et nationaux et la direction de l’hôtel, ces derniers refusent toujours de réintégrer les syndicalistes.

Ce mardi 11 décembre, six leaders syndicaux ont été condamnés à deux ans et demi de prison avec sursis pour avoir manifesté lors d’un large mouvement de contestations et de grève nationale en 2014 (voir nos articles ici et ici). Quatre travailleurs de l’industrie du vêtement avaient été tués lors des affrontements et une vingtaine d’autres blessés. Le tribunal municipal de Phnom Penh a déclaré les dirigeants syndicaux coupables de quatre actes de violence et de dommages matériels lors de manifestations organisées dans la banlieue de Phnom Penh. Ils ont également été condamné à payer une amende de 35 millions de riels (± 7500 euros) à deux policiers qui auraient été victimes de violences.

Dans un désir d’apaisement, le premier ministre du Cambodge, Hun Sen, avait annoncé qu’il souhaitait améliorer son image auprès des critiques occidentaux par une série de gestes « conciliants » dont la libération sous caution ou à la suite d’une grâce, de prisonniers politiques, dont le chef du parti de l’opposition, Kem Sokha, accusé l’année dernière de trahison et qui est actuellement en résidence surveillée. Le président avait entre autre appelé les tribunaux à accélérer les poursuites contre les six dirigeants syndicaux ou même à retirer les accusations. Cependant, après l’annonce du verdict de mardi, l’un des accusés – Ath Thorn, dirigeant du Syndicat démocratique des travailleurs de l’industrie du vêtement cambodgien – a déclaré qu’il ferait appel, car malgré sa condamnation avec sursis, sa condamnation légale l’empêcherait d’assumer les fonctions de dirigeant syndical pendant toute la durée de la peine.

Pav Sina, un des six syndicalistes condamnés

Esmail Bakhshi, représentant des travailleurs de Haft Tappeh Sugarcane Mill, a été libéré ce mercredi 12 décembre.

Esmail Bakhshi avait été arrêté le 18 novembre avec d’autres syndicalistes et defenseurs des droits civils. Il avait également été torturé durant sa détention (voir notre article). Ali Nejati, l’ancien président du syndicat des ouvriers d’Haft Tappeh, qui avait été arrêté le 29 novembre, reste toujours en prison, ainsi que la défenseuse des droits civils Sepideh Qolian arrêtée également le 18 novembre.

Esmail Bakhshi

Dans la nuit du 10 décembre, Reza Shahabi et Hassan Saeidi, leaders syndicaux de la compagnie de Bus de Téhéran (SWTSBC), ainsi que trois défenseurs des droits civils Amir Abbas Azaram Vand, Raham Yeganeh et Keyvan Mohtadi, ont été arrêtés à Téhéran par les forces de sécurité iraniennes. Ils ont été transférés à la prison d’Evin et libérés quelques heures après sans qu’on sache les raisons de ces arrestations. Ces arrestations ce sont faites quelques heures après qu’un travailleur de la compagnie de bus se soit immolé.

En 2012, Reza Shahabi avait été condamné à six ans de prison pour « propagande contre le système » (voir notre article). Il avait été libéré en septembre 2014 pour raisons médicales. Il sera réincarcéré en juillet 2017 pour purger les 17 mois de prison qui lui restaient. Il sera finalement libéré le 13 mars 2018.

Amir Abbas Azaram Vand, Raham Yeganeh, Keyvan Mohtadi (à gauche), Reza Shahabi et Hassan Saeidi (à droite)

Les travailleurs de l’usine sucrière Haft Tapeh (dans la ville de Suse, dans le sud de l’Iran) sont entrés dans leur quatrième semaine de grève pour réclamer le paiement de leurs salaires. Le 18 novembre, 18 militants et leaders syndicaux (voir notre article) avaient été arrêtés dont Esmail Bakhshi, représentant des travailleurs de Haft Tappeh Sugarcane Mill, qui est toujours en prison.

Esmail Bakhshi aurait été torturé durant sa garde à vue et transféré dans un hôpital de la sécurité à Ahvaz. Il souffrirait de blessures à la tête et au visage ainsi que d’une hémorragie interne à la suite des tortures qu’il aurait subit. Il aurait depuis été renvoyé à la prison d’Ahvaz. Jeudi 29 novembre, les forces de sécurité ont arrêté à son domicile Ali Nejati, l’ancien président du syndicat des ouvriers d’Haft Tappeh, ainsi que son fils, Peiman Nejati.

Ce lundi 3 décembre, les travailleurs de Haft Tapeh et ceux de l’usine d’acier d’Ahvaz ont manifesté ensemble pour exiger la libération des syndicalistes emprisonnés. Les sidérurgistes du Groupe National d’Acier (GNA) de la ville d’Ahvaz sont en grève depuis début novembre pour réclamer le paiement de quatre mois de salaires impayés et des garanties pour la sécurité de leur emploi.