Des affrontements secouent la Martinique depuis plusieurs nuits, dans un contexte de mouvement de contestation contre la vie chère, les tensions ne diminuent pas, un couvre-feu de 21h00 à 05h00 du matin a été décrété dès ce mercredi 18 septembre jusqu’au 23 septembre dans certains quartiers de Fort-de-France et de la commune limitrophe du Lamentin. Dans la nuit de vendredi à samedi, deux personnes ont ouvert le feu sur la façade du commissariat de Fort-de-France, sans faire de blessé. Le Grand port maritime de Martinique, par lequel transitent 98 % des marchandises est lui aussi visé par le mouvement de contestation.

Dans la nuit de mardi à mercredi, dans le quartier Dillon, un McDonald’s a été incendié, des barricades ont été enflammées. Toujours dans ce quartier, un hypermarché Carrefour a été envahi par une cinquantaine de militants, ils ont monté une barricade sur le parking qu’ils ont ensuite tenté d’incendier. Lors de sa fuite en scooter au moment de la dispersion par les forces de l’ordre, un homme est tombé, se blessant légèrement. Il a été interpellé. Un escadron de gendarmes, soit une centaine de militaires, a été envoyé en renfort. Depuis le début du mouvement, 44 véhicules ont été incendiés, 35 locaux commerciaux privés ont été attaqués, les autorités ont procédé à 15 interpellations, trois personnes ont été blessée, dont une par balle.

« Je n’ai mordu personne ». Ce mardi, tribunal judiciaire de Castres, une jeune femme interpellée à Saïx, le 18 février 2024, comparaissait pour des faits qui ont eu lieu lors d’un rassemblement des opposants à l’autoroute A 69. Un rassemblement pacifique qui avait fini en affrontement quand un groupe de personnes vêtues de noir et cagoulées ont jeté des projectiles sur les gendarmes. Six personnes avaient été interpellées. C’est l’une d’elles qui était jugée ce mardi. Une militante comparaissait non pas pour des jets de projectiles, mais pour être suspectée d’avoir mordu un gendarme lors de son interpellation. À la barre, la jeune femme conteste tout. Elle n’a jeté aucun projectile, n’a mordu personne et décrit au contraire une arrestation musclée. Le jour de l’interpellation, cette dernière était tout de noir vêtue et cagoulée afin de se protéger de la repression.

Pour le procureur, « il faut envoyer un signal », un « avertissement », la défense rappelle que ce sont des militants écologistes et qu’ils se mobilisent pour la planète. Le tribunal condamne la jeune femme à 5 mois de prison avec sursis, ainsi qu’une amende de 400€ avec sursis. Elle devra indemniser le gendarme mordu à hauteur de 600€.

Le Centre de Coordination Civilo-Militaire des Opérations Aériennes (C3MOA), spécialement créé pour les Jeux olympiques et paralympique, a coordonné les différentes autorités et moyens déployés, qu’ils soient civils ou militaires. Ce sont au total 178 interceptions aériennes qui ont été effectuées. 149 télé-pilotes, pour la plupart des touristes ignorant les règles en vigueur, ont été interpellés. Le 4 septembre, le dispositif de l’Armée de l’Air et de l’Espace déployé sur Paris détectait un drone s’approchant d’une prison parisienne. Deux télé-pilotes ont été interpellés ; ils tentaient de livrer du matériel interdit dans la prison. Le drone et le matériel ont été saisis.

Le dispositif était très lourd. Dans les airs opéraient des avions PC-21 et SR22, des avions-radar E-3F Sentry, des drones MQ-9 Reaper et  des ravitailleurs, l’interception étant confiée à des avions de combat Rafale et Mirage ainsi qu’à des hélicoptères Fennec. Au sol, des systèmes anti-drone Bassalt (photo), les batteries missiles antiaériens Mamba, Crotale NG et Mistral étaient déployées. Deux radars G1X ont été déployés sur Paris et Marseille pour renforcer les moyens de détection anti-drones.

Claudio Lavazza a été libéré le 7 septembre aprés avoir purgé sa condamnation après presque 28 ans de prison entre l’Espagne et la France (voir notre article). Claudio a pris part au combat révolutionnaire armé à la fin des annés 70 en Italie dans les rangs des Proletari Armati per il Comunismo. En cavale depuis le début des années 80, il se rapproche des idées anarchistes. Il sera arrêté seulement en 1996, en Espagne, à la suite d’un braquage qui finit par un échange de tirs avec la police (deux policiers trouveront la mort). En ce qui concerne la France (où il avait été transféré en juillet 2018), Claudio était accusé d’avoir participé au braquage du 4 juillet 1986 à Saint-Nazaire (88 milions de francs sousrtrait de la Banque de France).

La répression des personnes soutenant la Palestine et opposées au génocide à Gaza continue de sévir en Europe. Voici des exemples récents qui se sont déroulés en France :

Jeudi 5 septembre, Imane Maarifi, une infirmière française qui a passé 2 semaines à Gaza et qui n’a cessé de dénoncer les crimes de l’armée d’occupation dont elle a été témoin a été perquisitionnée et placée en garde à vue. La raison de cette arrestation ? Elle s’était opposée à la tenue à Paris, du Salon de l’immobilier Israélien (qui propose entre-autre à la vente des biens dans la partie de la Palestine occupée suite à la guerre de 6 six jours). Elle a été libérée le lendemain. On ignore s’il y aura des suites à cette procédure.

En avril, un agent de sécurité lui avait confisqué un drapeau palestinien lors d’un match de football auquel assistait Emmanuel Macron. Elle voulait lui remettre un témoignage collectif rédigé par plusieurs médecins sur les horreurs de Gaza et lui faire part de l’urgence d’un cessez-le-feu.

Imane Maarifi, une infirmière française qui a passé 2 semaines à Gaza et qui n'a cessé de dénoncer les crimes de l'armée d'occupation

Imane Maarifi, une infirmière française qui a passé 2 semaines à Gaza et qui n’a cessé de dénoncer les crimes de l’armée d’occupation

 

La répression n’est pas que policière, mais peut aussi être administrative et/ou sociale : 

Benoît Huou, professeur de mathématique à la Toulouse School of Economics a été suspendu à titre conservatoire après avoir appelé au boycott d’Israël. Il avait évoqué, dans un de ses cours du 3 septembre, un courrier de lecteurs de la revue « The Lancet » qui évaluait, au début de juillet, à 186 000 le nombre de Palestiniens assassinés par l’armée israélienne.

« La situation n’a pas commencé le 7 octobre, et il est malhonnête de dire que le responsable de ce qui se passe actuellement est le Hamas », avait poursuivi Benoît Huou, appelant au boycott d’Israël. « Je ne veux pas parler de ce qui s’est passé le 7 octobre, mais rien, absolument rien ne justifie de massacrer une population civile comme c’est en train de se passer », a ajouté l’enseignant tout en dénonçant le soutien tacite du gouvernement français. Ces déclarations lui ont valu une suspension à titre conservatoire dès le lendemain.

Sylvie Retailleau, ministre démissionnaire de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a personnellement demandé à ce que des sanctions soient prises.

Vie chère en Martinique, dimanche 1er septembre, 700 manifestants se sont rassemblés à l’appel du collectif  «Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéennes »(RPPRAC). Le collectif revendique la baisse des prix pratiqués sur l’île soient alignés sur ceux de la métropole. Quinze ans après les grèves générales contre la vie chère, la population martiniquaise est de nouveau de la rue. Ce 1er juillet, un ultimatum avait été lancé par le RPPRAC afin de faire baisser le prix de 2500 produits de première nécessité. Deux mois plus tard, l’ultimatum est sans effet, rendez-vous était fixé devant un grand centre commercial de Fort-De-france.

En début de journée, Rodrigue Petitot, président du RPPRAC a été arrêté et mis en garde à vue, suspecté de participation avec une dizaine d’autres personnes cagoulés à une tentative de vol de bus. En réaction à cette arrestation, les manifestants se sont dirigés vers le port de Fort-De-France où ils ont bloqué ses accès principaux et un terminal à conteneurs. Dans la nuit, un véhicule a été incendié et plusieurs poubelles ont été réduite en cendre. Des opérations de gendarmerie et de police sont menées à Fort-de-France pour libérer les accès des ronds-points bloqués. 5 camions de gendarmes mobiles sont arrivés en renfort de Guadeloupe et se sont déployés sur le terrain. Rodrigue Petitot dit « Le R » a été libéré en fin de journée.

Vendredi 30 aout au matin, les occupants de la ZAD ont subi une intervention de délogement de grande ampleur. Plus de 200 gendarmes se sont rendus sur la ZAD de la « Cal’arbre » pour expulser les activistes opposés au projets de prolongation de l’autoroute A69 à Saix dans le Tarn. L’intervention à été menée par la CNAMO, unité de gendarmerie spécialisée dans le dégagement d’obstacles complexes.Tentes lacérées, objets personnels saccagés… À 13 heures, la quasi totalité des cabanes et des espaces communs ont été détruits. (voir article ici)

Les forces de l’ordre ont attaqué un chêne à la pelleteuse, mettant gravement en danger les militants accrochés aux arbres. Lors de l’opération militaire, une personne réfugiée sur un fortin de vigie suspendu dans un arbre à 8 mètres du sol a été braquée par des gendarmes munis de LBD, poursuivie par la CNAMO, elle a chuté de 8 mètres. Gravement blessé, l’activiste a été pris en charge par les sapeurs-pompiers, il souffrirait de plusieurs fractures à la colonne vertébrale, il a été hospitalisé. Six militants ont été interpellés. Seuls quelques arbres restent à ce jour occupés sur le site de La « Cal’arbre ».

Alors qu’à la seule échelle de la CGT, plus de 1000 militants qui subissent une répression patronale en raison de leur militantisme syndical, deux récentes décisions ont vu procédures anti-syndicales être annulées. Jordan Robichon, travailleur à GRDF et militant CGT ciblé par une procédure de licenciement depuis 1 an et demi, à titre de sanction pour son activité syndicale, a d’obtenu l’annulation de toute la procédure d’abord par l’inspection du travail en novembre 2023, puis tout dernièrement par le ministère. Après plusieurs défaites juridiques pour InVivo, la nouvelle tentative de licenciement du délégué CGT Christian Porta par le géant de l’agrobusiness a été sévèrement sanctionnée par le conseil des Prud’hommes de Forbach et le tribunal judiciaire de Sarreguemines. InVivo condamné à réintégrer le délégué CGT Christian Porta et à verser 500 000€.

Samedi 24 août au soir, Pavel Durov, fondateur et dirigeant de la messagerie cryptée Telegram, a été arrêté à l’aéroport de Bourget près de Paris. Cette interpellation fait suite à un mandat de l’Ofmin, l’office français chargé de la lutte contre les violences faites aux mineurs qui reproche à Monsieur Durov son refus supposé de modérer les contenus qui passent par la messagerie.

Les chefs d’inculpations vont de l’escroquerie au trafic de stupéfiants, au cyberharcèlement et à la criminalité organisée en passant par l’apologie du terrorisme et la fraude. Sa garde à vue a été prolongée dimanche soir.

Telegram est dans le viseur des autorités judiciaires européennes depuis quelques années. Pavel Durov, pourtant, assure répondre à chaque demande de suppression de contenu appelant à la violence ou au meurtre. Par ailleurs la plateforme a régulièrement collaboré avec les autorités judiciaires : en 2022, menacé de blocage par la cour suprême du Brésil, Telegram avait notamment accepté de fermer des comptes accusé de désinformation.

Nombre d’experts restent par ailleurs dubitatifs quand à la réelle sécurité offerte par Telegram qui ne crypte, par exemple, pas les messages par défaut.

Bref Signal reste une bien meilleure alternative puisqu’elle n’est tout simplement pas techniquement en mesure de fournir certaines informations utiles aux autorités (voir notre article).

Telegram

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Le chantier de l’autoroute A69 a été la cible de plusieurs incendies ces derniers jours. Face à la ZAD de la «cal-arbre », un coffrage destiné à couler la pile d’un pont a été incendié la nuit de jeudi à vendredi. Les pompiers ont essuyé de nombreux jets de pierre. Vers 1h30 du matin, plusieurs groupes de militants cagoulés ont jeté des pierres sur la zone afin de créer une diversion, contraignant les agents de sécurité à se mettre à l’abri. L’un des groupe à incendié l’ouvrage en lançant plusieurs cocktails molotov. Pompiers et gendarmes sont intervenus, mais ont essuyé de nombreux caillassages. L’incident n’a pas fait de blessé et aucune interpellation n’a eu lieu.

Dans la nuit de samedi à dimanche, un bungalow est parti en fumée, ainsi qu’un véhicule de la police municipale. Samedi en fin de journée, Les forces de l’ordre ont été déployées pour contrer les opposants, ces dernières ont été confrontées à des tirs de mortiers, de jets de pierres catapultées et de cocktail Molotov. Une cinquantaine de gendarmes ont fait usage de gaz lacrymogène, de grenades désencerclantes et menaces au LBD. Une personne a été interpellée dimanche, suspectée d’avoir attaqué un des agents de sécurité avec «un outil en fer».