Actualité de la répression et
de la résistance à la répression

Mardi 21 janvier, l’Assemblée nationale passait une loi dite « anti-haine » avec un amendement de dernière minute proposé par le gouvernement. Alors que la loi exigeait initialement de retirer les contenus illicites en 24 heures, elle impose désormais aux plateformes de retirer en une heure les contenus que la police lui signalera comme relevant du terrorisme ou d’abus sur mineurs. La police décidera seule des contenus relevant du terrorisme, sans le contrôle d’un juge. La loi ne concernait initialement que les plateformes ayant plusieurs millions de visiteurs par mois (Facebook, Twitter, Youtube…), les nouvelles mesures « anti-terroristes » visent désormais n’importe quelle plateforme, de toute taille. Il pourra s’agir du forum de n’importe quel site de presse, d’une plateforme militante, d’un petit hébergeur associatif ou de tout nœud d’un réseau social décentralisé tel que Mastodon ou PeerTube.

Enfin, alors que la loi initiale ne prévoyait que des sanctions financières, les nouvelles mesures prévoient des sanctions concrètes, drastiques. Si une plateforme ne censure pas un contenu dans l’heure qui suit sa notification par la police, la police pourra exiger que les fournisseurs d’accès à Internet empêchent l’accès à cette plateforme depuis la France. Notons que cette situation n’est pas entièrement nouvelle : c’est la loi anti-terroriste de 2014 qui avait créé ce dispositif de censure policière. À l’époque toutefois, le délai pour répondre à la police était de 24 heures. Il passe aujourd’hui à 1 heure. Plus d’infos ici.

police internet

Un officier de l’armée philippine a été tué mercredi dans un affrontement entre des militaires et des combattants de la New People’s Army dans un village isolé de Labo, dans la province de Camarines Norte. Cet officier, qui portait le grade de 2e lieutenant, avait été affecté au 96e bataillon d’infanterie opérant dans cette province. Son détachement, qui accompagnait des paramilitaires de la Provincial Mobile Force, est tombé dans une embuscade à Barangay Malaya. La fusillade a duré environ 30 minutes

Combattants de la NPA

Mercredi 22 janvier, deux militant·es syndicaux de  CGT-Energie employés à Enedis (ex-ERDF) en Dordogne ont été placés en garde à vue dans le cadre d’une enquête sur une coupure d’électricité. Ils auraient coupé le courant le 10 janvier dans l’entreprise Neuvic Interspray (qui conditionne des cosmétiques, aérosols, laques), pour protester contre la réforme des retraites. Cette entreprise étant classée Seveso (chargée du stockage de produits dangereux), les militant·es syndicaux sont accusés de «mise en danger de la vie d’autrui». L’enquête faisait suite à deux plaintes déposées par cette entreprise et par Enedis. Une soixantaine de personnes, syndicalistes CGT principalement mais FO aussi, étaient rassemblées en mi-journée mercredi devant la gendarmerie de Neuvic (où les militants sont emprisonnés) en soutien de leurs deux collègues. Plus tôt dans la matinée une nouvelle coupure avait été effectuée dans la même entreprise en solidarité avec les deux prisonniers.

Deux militants syndicaux en garde à vue pour voir coupé l'électricité dans une entreprise

Deux militants syndicaux en garde à vue pour voir coupé l’électricité dans une entreprise

Mercredi 22 janvier, la Guardia Civil a arrêté Antton López Ruiz, Oihana San Vicente, Oihana Garmendia et Haimar Altuna. L’opération a été ordonnée par l’Audiencia Nacional en lien avec les cérémonies d’accueil organisés pour les prisonniers basques libérés. Antton López Ruiz et Oihana Garmendia sont membres de l’initiative Kalera Kalera qui milite en faveur des droits des prisonniers basques. Oihana San Vicente et Haimar Altuna sont quant-à-eux responsables du parti politique Sortu. Antton López Ruiz et Oihana Garmendia avaient déjà été arrêtées il y a deux ans et accusé·es « d’apologie du terrorisme » pour avoir participé à un événement rendant hommage à Belen González décédée en 2017 (voir notre article). Deux autres personnes avaient aussi été détenues lors de cette opération. Une fois emmenés à la caserne d’Intxaurrondo, tous les prisonniers ont été libérés.

Antton López et Oihana Garmendia, deux des quatres personnes arrêtées.

La militante et plasticienne Isabel Cabanillas de la Torre, qui s’est battue pour que les autorités assurent la sécurité des femmes, a été abattue de plusieurs coups de feu et son corps retrouvé tôt samedi matin dans le centre de la ville frontalière de Ciudad Juarez. La membre du groupe des Filles de la mère Maquilera, dédiée à l’art, au militantisme et à la défense des droits des femmes, était portée disparue depuis vendredi. Isabel Cabanillas, 26 ans, est la quatrième femme tuée à Ciudad Juarez ce mois-ci et la sixième de l’État. Le corps de l’activiste a été retrouvé à côté de son vélo sur un trottoir à un carrefour. Dimanche matin, des proches, des amis, des militants et des voisins de Cabanillas de la Torre ont manifesté sur l’esplanade du monument à Benito Juarez pour exiger que les autorités arrêtent les responsables du crime et arrêtent le féminicide.

Isabel Cabanillas de la Torre

Jeudi 30 janvier, 13 militant·es antifascistes passeront en procès pour avoir manifesté contre la venue de Vox (un parti d’extrême droite) dans leur quartier de Vallecas (Madrid) à l’occasion de la campagne électorale de novembre 2019. Les militant·es s’étaient rassemblé·s avec des casseroles, des sifflets et d’autres bannières et plusieurs d’entre eux avaient été identifiés par la police à cette occasion. Suite à une plainte de Vox, les manifestant·es identifiés seront poursuivis pour « délit de contrainte » avec comme circonstance aggravante « la discrimination idéologique ». Les sanctions demandées sont encore inconnues. Les militant·es revendiquent la légitimité de leur action et estiment que ce procès sera l’occasion de questionner le régime post-fasciste mis en place en Espagne depuis 1978. Un rassemblement de soutien est prévu le jour du procès Place de Castille et un repas de solidarité est organisé ce samedi.

13 militants antifascistes en procès pour avoir manifesté contre Vox

13 militants antifascistes en procès pour avoir manifesté contre Vox

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La mobilisation contre le gouvernement a repris mardi en Colombie avec des marches et des blocages routiers notamment à Bogota, où des affrontements violents se sont soldés par au moins quatre blessés et plusieurs arrestations. Ce mouvement, assorti d’un « cacerolazo » national ou concert de casseroles en fin de journée comme lors des manifestations de novembre et décembre, a affecté la circulation automobile dans plusieurs secteurs de la capitale. La police a fait usage de gaz lacrymogènes et de canons à eau contre des manifestants cagoulés, qui lançaient des pierres et ont causé des dégâts. La mairie de Bogota a fait état de 18 « manifestations pacifiques » et de deux autres, dans le nord-ouest et le sud de la ville, où les forces de l’ordre sont intervenues. Des affrontements avec les forces de l’ordre ont également émaillé des manifestations dans les villes de Medellin et Cali, deuxième et troisième du pays. Outre la mise en cause de la politique économique du président Ivan Duque, le mouvement, lancé le 21 novembre, dénonce la spirale de violence visant leaders communautaires et défenseurs des droits humains depuis l’accord de paix de 2016 avec les FARC.

Maniestants caillassant mardi les forces de policeColombie: Nouvelles mobilisations, nouveaux affrontements

De nouvelles informations concernant la répression de l’acte 62 des Gilets Jaunes, nous parviennent. À Paris, une délégation d’une organisation marxiste-léniniste belge « Rupture & Renouveau » était présente à la manifestation. Un de ses miliitants a été blessé à l’arrière du crâne alors qu’il battait en retraite face à une charge policière. Il s’agissait soit d’un tir de LBD, soit d’une grenade lacrymogène, soit d’un puissant coup de matraque. Tombé inconscient jusqu’à son réveil dans une ambulance, il écope d’une commotion cérébrale, d’une fracture du crâne, d’une semaine d’hospitalisation et d’un risque de l’ordre de 10% de devenir épileptique.

À Toulouse, où 3000 personnes ont manifesté, la BAC a chargé plusieurs fois d’abord sur la place du capitole ensuite dans les couloirs du métro. Au cours de cette dernière charge, une dizaine de CRS se sont mis à tabasser un manifestant dans les couloirs du métro. Une personne a filmé la scène et a reçu plusieurs grenades lacrymogènes, tirées au LBD, lorsqu’il a tenté de s’approcher pour venir en aide au militant en difficulté.

Fracture du crâne pour un militant de R&R lors de l'acte 62 des Gilets Jaunes

Fracture du crâne pour un militant de R&R lors de l’acte 62 des Gilets Jaunes

Ce dimanche 19 janvier à Bagdad et dans plusieurs villes du sud de l’Irak, de nouvelles manifestations ont éclaté. Une dizaine de personnes, dont des policiers ont été blessés dans les affrontements. Les protestataires demandent le renouvellement d’une classe politique corrompue et menacent d’intensifier encore leur mouvement si leurs revendications n’aboutissent pas. Ce mouvement de contestation inédit en Irak avait été éclipsé ces dernières semaines par la flambée des tensions entre l’Iran et les États-Unis, les deux principaux parrains du pouvoir à Bagdad. Des rassemblements ont aussi eu lieu dans les villes de Diwaniya, Kout, Amara, dans le sud du pays, où la plupart des bureaux gouvernementaux, des écoles et des universités sont fermés depuis des mois. Dans la ville sainte de Najaf, au sud de Bagdad, des jeunes arborant des drapeaux irakiens ont brûlé des pneus et entamé un sit-in sur une route principale menant à la capitale. Plus au sud, à Bassora, les étudiants ont participé à un mouvement de grève. Depuis octobre, la contestation a été émaillée par des violences et réprimée par les forces de l’ordre. Il y a eu environ 460 morts – quasiment tous des manifestants – et plus de 25 000 blessés. Si les violences ont légèrement diminué lors des manifestations, les militants disent être confrontés à une vaste campagne d’intimidation, d’assassinats et d’enlèvements.

A Bagdad ce 19 janvier

Lundi 20 janvier, le Conseil national de sécurité de Colombie a adopté une liste de personnes et de groupes considérés comme terroristes à l’échelle internationale. Les FARC (ou du moins la partie a déposé les armes) en ont été exclues au motif de leur transition vers un parti politique. Les FARC restent cependant sur la liste des organisations considérées comme terroristes les États-Unis. Le seul groupe colombien désormais considéré comme terroriste par le gouvernement colombien est l’ELN.

Des membres des FARC sur le point de rendre les armes à Gallo, dans le département de Córdoba, le 1er février 2017