Le gouvernement russe par la voix de son autorité de régulation des communications Roskomnadzor a sommé récemment l’entreprise Telegram de lui fournir toutes les clés de chiffrement de ses utilisateurs russes. Le patron de l’entreprise, Pavel Dourov a refusé. Une demande d’interdiction de la messagerie Telegram sur tout le territoire a donc été faite par la Roskomnadzor. Cette interdiction est effective depuis ce vendredi 13 avril.

Mais Telegram propose deux typologies de chiffrement différentes. La première concerne les conversation à deux par défaut, les conversations de groupe et les canaux. Dans cette typologie, le chiffrement est uniquement opéré entre le terminal de l’utilisateur et le serveur. Il y a un deuxième type de chiffrement, qui cette fois-ci a lieu entre les deux terminaux des participants à la conversation, c’est celui des conversations dites « secrètes ». Telegram ne dispose alors pas des clés de chiffrement. En revanche pour tous les autres modes de chiffrement Telegram a les clés de chiffrement. Dans le cas des 10 millions d’utilisateurs russes, cela signifie au moins une dizaine de millions de clés que Telegram aurait dû fournir au autorités russes.

Telegram

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Signal est actuellement le service de messagerie le plus sûr tout en étant le plus simple à utiliser. Lorsque le service est apparu il y a quelques années, l’avis général concernant la sécurité informatique était que la difficulté d’utilisation n’était pas négociable. Et des moyens de communication sécurisés comme PGP étaient malheureusement délaissés car trop difficiles à utiliser pour le grand public. Signal a changé cette situation en offrant un service de messagerie doté un chiffrement extrêmement puissant, une grande simplicité d’utilisation, une disponibilité multi-plateforme (Android, iOS, Windows, MacOS, Linux,…), etc. Signal est à présent utilisé par des millions d’utilisateurs, et son protocole de chiffrement est utilisé par plus d’un milliard de personnes puisqu’il a été intégré nativement à Whatsapp et dans les modes incognito des services de messagerie les plus répandus (Google Allo, Facebook Messenger, Skype,…) Malheureusement, malgré toutes ces qualités, Signal souffre encore de quelques défauts, le plus gros d’entre eux étant qu’il est actuellement impossible d’utiliser le service sans numéro de téléphone (une situation qui changera dans l’avenir). D’autres problèmes, comme le fait qu’il est impossible de faire des recherches dans le contenu des messages ou d’exporter une installation complète (clés de chiffrement, photos et médias compris) sont en passe d’être résolu puisque Signal a récemment procédé à de grosses mises à jour de son système de bases de données qui permettront plus de flexibilité des données. Tous ces problèmes, et les lenteurs à les résoudre sont dues au fait qu’il n’y a que trois développeurs qui travaille sur Signal, et même si le projet est open-source, les développeurs sont très scrupuleux à intégrer des fonctionnalités codées par des inconnus sans avoir vérifié leur contenu. Signal a également toujours refusé d’être subventionné par des sociétés à but lucratif, de faire des levées de fond ou d’intégrer des publicités. L’essentiel de son fonctionnement était donc financé soit par l’intégration du protocole de chiffrement dans d’autres services (Google Allo, Facebook Messenger, Whatsapp, etc.) ou par la ‘Freedom of the Press Foundation’ (l’ONG fondée par Edward Snowden).

La ‘Signal Foundation’ (société sans but lucratif) nouvellement fondée permettra à Signal de profiter de dons, d’étendre l’équipe de développeurs et de travailler sur de nouveaux outils. Elle profite déjà d’un premier financement de $50 millions, probablement principalement payés par Brian Acton, co-fondateur de Whatsapp qui a déjà travaillé avec Signal par le passé.

Signal Foundation

Signal Foundation

En octobre 2017 à Penza six anarchistes et antifascistes étaient arrêtés par des agents du Service fédéral de sécurité sur une accusation de création d’un groupe terroriste. A cette époque, des raids policiers avaient visé des maisons d’anarchistes et d’antifascistes dans toute la Russie. Une nouvelle offensive policière a commencé en janvier. Un antifasciste Victor Filinkov a été enlevé par le service de sécurité à Saint-Pétersbourg. Les agents l’ont torturé dans la forêt proche de la ville jusqu’à ce qu’il admette sa participation à ce prétendu groupe anarcho-terroriste appelé le « net » qui aurait des cellules dans plusieurs villes. L’avocat de Filinkov dit qu’il n’a jamais vu d’aussi graves traces de torture sur un détenu. Un autre antifasciste, Ilya Kapustin, a également été menacé et maltraité par les agents de la sécurité, mais a refusé de s’incriminer et a été libéré sous caution.

Une campagne de solidarité avec les anarchistes réprimés en Russie aura lieu du 5 au 12 février. Adresse de contact: media_ns@riseup.net
Pour écrire à Viktor en prison: VIKTOR SERGEEVICH FILINKOV,
UL. SHPALERNAYA, D. 25, G. SANKT-PETERBURG,
191123, FÉDÉRATION DE RUSSIE
Collecte de fonds: Pay Pal abc-msk@riseup.net (Attention! Envoyer avec un tag « 205 »)

Semaine de solidarité avec les anarchistes russes

Semaine de solidarité avec les anarchistes russes

La semaine de la solidarité avec les manifestants arrêtés à Hambourg au début de juin lors des initiatives anti-G20 a reçu des échos dans plusieurs pays. À Moscou, une manifestation sauvage a eu lieu devant le Centre allemand des visas. Des rassemblements ont également eu lieu à Moscou devant l’ambassade l’ambassade allemande et à Kaliningrad devant le consulat allemand. Des tags ont été peints à Moscou, Saint-Pétersbourg, Naberezhny Chelny, Chelyabinsk et Irkoutsk. D’autres initiatives solidaires ont eu lieu à Moscou, Penza et Nijni Novgorod.

Voir les initiatives dans les autres pays

Devant le Centre allemand des visas à Moscou

Devant le Centre allemand des visas à Moscou

Des activistes ont physiquement bloqué l’accès à Rozcomnadzor (Service fédéral de supervision des communications, des technologies de l’information et des médias de masse), l’agence qui censure l’accès à internet en Russie. La censure sur internet est ordinairement forte, mais elle a récemment pris des proportions peu communes: en plus des contenus illégaux, l’agence bloque de plus en plus de services qui permettent de contourner la censure (VPN, Proxys, Tor,…) et d’autres services qui permettent l’anonymat (Tor,…). Ce mois-ci, l’accès à Google, Yandex et vKontakte a même été brièvement coupé, ainsi que l’accès à la messagerie « sécurisée » Telegram. Les activistes se sont donc mis devant les portes de l’agence à Saint-Petersbourg en entassant des boites en carton sur lesquelles étaient inscrit « Citoyens bloqués de Russie ».

Des manifestants bloquent les accès de l’agence qui censure internet

Des manifestants bloquent les accès de l’agence qui censure internet

La justice russe a commencé mardi à condamner les partisans de l’opposant Alexeï Navalny, qui a écopé lui-même de 30 jours de détention, au lendemain d’une journée de mobilisation massivement réprimée. Au moins quatorze personnes à Saint-Pétersbourg ont été condamnées à 10 jours de détention et 10.000 roubles d’amende (156 euros). Les manifestants risquent jusqu’à quinze jours de prison, une peine qui peut être alourdie s’ils sont reconnus coupables de violence contre les forces de l’ordre. Deux manifestants font ainsi l’objet d’enquêtes judiciaires pour avoir fait usage de violences contre les forces de l’ordre, et risquent jusqu’à cinq ans de prison.

Au total, la police a interpellé 1.720 personnes à travers la Russie. Des milliers de manifestants avaient répondu à l’appel d’Alexeï Navalny à descendre dans la rue dans les villes du pays pour dénoncer la corruption, de Vladivostok, dans l’Extrême-Orient, à Kaliningrad sur la mer Baltique. A Moscou, ses partisans s’étaient rassemblés sur la rue Tverskaïa, artère centrale de Moscou qui mène à la place Rouge et au Kremlin. Les forces de l’ordre ont réagi avec fermeté, avec coups de matraques et interpellations en masse.

Arrestation le 12 juin à Moscou

Arrestation le 12 juin à Moscou

Le 15 novembre 2015, le gouvernement russe a mis en place une taxe au kilomètre imposée aux poids lourds. Les fonds sont recueillis par une société détenue à 50% par le fils d’un ami de Poutine, alors que l’État russe perçoit déjà un impôt routier et des accises sur les carburants. Les utilisateurs des routes russes, construites avec l’argent public, sont redevables aux amis de Poutine d’une redevance d’abord fixée à 3,73 roubles par km. En 2015 et 2016, les camionneurs avaient manifesté et contraint le pouvoir d’abaisser le taux à 1,53 rouble. Le 24 mars dernier, la taxe a été portée à 1,91 rouble au km. Le 27, les routiers étaient en grève nationale illimitée.

Alors que la grève est massivement suivie sur l’ensemble du pays, pas un mot sur les canaux TV contrôlés par le pouvoir. Les routiers se rassemblent à proximité des grandes villes sur des aires de stationnement. Les jugements, les amendes et les arrestations s’abattent sur eux dans toute la Russie. Arrêtés au stationnement, en manifestation ou à domicile, ils sont parfois emmenés par des hommes masqués dans des directions inconnues. Parmi les grévistes arrêtés, le dirigeant de l’Association des routiers russes, Andrey Bazhutin. Pour communiquer, ils utilisent le réseau radio-internet Zello. Les autorités ayant rapidement bloqué Zello en Russie. Les camionneurs ont trouvé une parade en installant le logiciel gratuit VPN qui permet d’établir sa connexion en passant par un autre pays.

Heurt entre camionneurs et policiers russes au Dagestan

Heurt entre camionneurs et policiers russes au Dagestan

Andrei Sokolov est un antifasciste russe qui avait été enlevé entre avril et octobre 2016 et détenu clandestinement par les services spéciaux ukrainiens. Nous avions fait campagne pour sa libération à l’époque, retrouvez notre dossier ici. La Russie a récemment décidé d’ouvrir une enquête sur l’enlèvement de Sokolov et d’autres ressortissants russes, Andrei a été interrogé à cette occasion. De son côté, Andrei avait décidé de porter plainte auprès de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), une telle plainte doit être déposée dans les six mois, Andrei avait donc jusqu’au 14 avril. Andrei a choisi de passer par le SIJ (Stichting Justice Initiative, une organisation de défense des droits de l’homme néerlandaise) pour déposer cette plainte, cette organisation lui avait été recommandée par un journaliste et il n’avait pas les moyens de payer lui-même un avocat pour déposer cette plainte. Andrei a donc déposé tous les papiers nécessaires ainsi que son témoignage en décembre, mais le SIJ n’a pas déposé la plainte par agenda politique (privilégiant les affaires contre la Russie que contre l’Ukraine). Lorsque Andrei s’est rendu compte que quelque chose n’allait pas, il n’avait plus que deux semaines pour déposer sa plainte, il a finalement pu la déposer à temps.

Donbass: Ouverture de deux enquêtes sur l’enlèvement de Andrei Sokolov

Plus d’un millier de personnes arrêtées et une condamnation hier lundi à 15 jours de prison pour Alexeï Navalny qui avait appelé les Russes à descendre dans la rue pour protester contre la corruption, c’est le bilan de la répression des manifestations de dimanche. Les vastes manifestations qui ont eu lieu dans près de 100 villes à travers la Russie témoignent d’une protestation allant bien au-delà des partisans d’Alexeï Navalny. Il s’agissait des manifestations les plus massives depuis 2011-2012 et sans doute même des dix dernières années. Les régions ont par ailleurs fait preuve d’une très forte mobilisation, alors que jusqu’ici Moscou a toujours été l’épicentre de la contestation. À Saint-Pétersbourg, Tioumen, Novossibirsk, Tambov, Perm, les régions russes étaient plus remontées et leurs revendications plus fortes que dans la capitale. Remarquable aussi était le très grand nombres de jeunes manifestants.

Tentative d’arrestation dimanche à Moscou

Tentative d'arrestation dimanche à Moscou

Plusieurs prisonniers emblématiques des abus du système judiciaire russe ont été libérés anticipativement ces dernières semaines:
Ildar Dadine, premier citoyen russe condamné en vertu de la loi de l’été 2014 punissant sévèrement toute manifestation non autorisée. Pour s’être posté tout seul avec une pancarte, à plusieurs reprises, non loin du Kremlin, il avait été condamné à deux ans et demi de colonie pénitentiaire en Carélie où il avait été maltraité. La Cour suprême a décrété que son jugement avait été abusif et a ordonné sa réhabilitation, ainsi que son droit à des dommages et intérêts.
Evguenia Tchoudnovets, une jeune institutrice de maternelle condamnée à cinq mois de prison pour avoir posté sur son compte VKontakte (le Facebook russe) une vidéo de trois secondes considérée par les juges comme de la « pornographie infantile ». Elle avait en réalité voulu dénoncé l’humiliation d’un enfant nu par des éducateurs.
Dmitri Boutchenkov, le dernier détenu de Bolotnaïa – lieu de rassemblement à Moscou des grands défilés de protestation contre M. Poutine à l’hiver 2011-2012 (il reste en résidence surveillée).
Oksana Sevadisti, 46 ans, condamnée pour « haute trahison » à sept ans de colonie pénitentiaire. En 2008, juste avant le début de la guerre russo-géorgienne, cette vendeuse résidant à Sotchi avait envoyé un SMS pour décrire ce qu’elle voyait passer, comme tout le monde, sous ses yeux : un train de blindés faisant route vers l’Abkhazie. Elle a bénéficié d’une grâce présidentielle.
Rouslan Sokolovski, condamné pour « extrémisme et outrage » pour avoir chassé des Pokémons dans une église (son histoire ici).

Rouslan Sokolovski chassant les Pokémons dans l’église de Tous-les-Saints à Ekaterinbourg

Rouslan Sokolovski chassant les Pokémons dans l’église de Tous-les-Saints à Ekaterinbourg