Cadre historique – Les mouvements de lutte des années ’60 en RFA

Vers le milieu des années 1960, les mouvements de lutte de la jeunesse étudiante et prolétarienne se développèrent en Allemagne comme partout. En décembre 1966, c’est le début de la fin du ‘miracle économique allemand’, ce grand boom économique qui suivit la reconstruction de l’après-guerre, (il y aura carrément récession en 1967). Les deux principaux partis politiques bourgeois (sociaux-démocrates du SPD et démocrates chrétiens de la CDU et de la CSU, qui totalisent 90% des sièges au parlement) forment la ‘grande coalition’ qui verrouille totalement la vie politique. De la contestation des étudiants socialistes du SDS, conduit par Rudi Dutschke, émerge l’Opposition Extra Parlementaire (APO). Les mobilisations de masse contre la guerre impérialiste US au Vietnam ne cessent de gagner en puissance, mais c’est lors d’une manifestation contre la visite du Chah d’Iran, dictateur sanglant, marionnette des USA, qu’un jeune manifestant, Benno Ohnesorg est tué par un policier le 2 juin 1967. Les manifestations qui s’ensuivront marquent la véritable naissance de l’APO.

La mort de Benno Ohnesorg

11 avril 1968 – Mort de Rudi Dutschke, première action de guérilla urbaine

Pâques 1968: des dizaines de milliers de manifestants, ainsi que des délégations de nombreux pays se réunissent à Berlin-Ouest pour un grand congrès contre la guerre du Viêt-Nam et pour la révolution mondiale. Le 2 avril, des bombes incendiaires explosent dans la nuit dans deux grands magasins de Francfort. Deux jours plus tard Andreas Baader, Gudrun Ennslin, Thorwald Proll, Horst Söhnlein sont arrêtés. Au cours de leur procès, ils déclareront avoir provoqué l’incendie pour protester contre l’indifférence vis-à-vis du génocide au Viêt-Nam. Ulrike Meinhof, rédactrice en chef de la célèbre revue de gauche Konkret, prend leur défense.

Le 11 avril 1968, un fasciste tire trois balles dans la tête de Rudi Dutschke. C’est le résultat d’une campagne de presse hystérique de la presse du magnat Springer. Dans toute la R.F.A., les universités sont occupées, et le bilan des manifestations est lourd: un millier d’arrestations, des centaines de blessés, deux morts. Le 15 mai, le parlement approuve les lois d’urgence qui donneront au gouvernement des pouvoirs extraordinaires ‘en cas de guerre et de tension interne‘.

Rudi Dutschke

Incendie à Francfort

Manifestation contre Springer

Octobre 1968 – Premier procès

Le 31 octobre 1968, le tribunal de Francfort condamne les quatre auteurs de l’incendie de Francfort à trois ans de prison ferme, la plus forte prononcée jusqu’alors en RFA pour un acte politique. Le 13 juin 1969, ils bénéficient de la liberté provisoire mais, risquant une nouvelle incarcération, Baader, Ennslin et Proll se réfugient à Paris.

Procès à Francfort

14 mai 1970 – Naissance de la RAF, libération d’Andreas Baader

En août 1969, le SDS s’auto dissout, et en septembre survient une vague sans précédent de grèves sauvages.

Le groupe revient en R.F.A. mais le 4 avril 70, Andreas Baader est arrêté à Berlin-Ouest au cours d’un contrôle de routine. Le 14 mai, il est libéré par un commando armé (un fonctionnaire est blessé dans l’action): c’est la naissance officielle de la RAF qui écrit à la revue 883 un texte intitulé Construire l’armée rouge où l’on peut lire: ‘camarades du 883, cela n’a pas de sens que de vouloir expliquer ce qui est juste aux mauvaises personnes. Nous l’avons déjà fait assez longtemps comme cela. L’action de libération d’Andreas Baader, nous n’avons pas à l’expliquer aux radoteurs intellectuels, aux peureux, à ceux qui savent tout, mais à la partie potentiellement révolutionnaire du peuple.‘ La RAF se réfère aux familles nombreuses, aux jeunes travailleurs et apprentis… tous ceux qui ne sont pas touchés par la consommation, les crédits, les contrats logements. L’action est annoncée mais comme la première action d’un nouveau type en R.F.A., et le texte se conclu par ces mots d’ordre: ‘développer les luttes de classe, organiser le prolétariat, commencer avec la résistance armée à construire l’armée rouge!‘.

Construire l’armée rouge (lien1)

Construire l’armée rouge (lien2)

Construire l’armée rouge – format pdf

Die Rote Armee aufbauen! (texte original en allemand)

Juin-août 1970 – Le passage dans les camps palestiniens

De juin à août 1970, plusieurs militants de la RAF (Horst Mahler, Andreas Baader, Gudrun Ensslin, Ulrike Meinhof, Peter Homann et Brigitte Asdonk) séjournent dans un camp palestinien en Jordanie. Ils y mènent des discussions avec des représentants de la gauche révolutionnaire palestinienne et acquièrent une formation à la guérilla.

Au camp du FPLP

Fin 1970-Début 1971 – Opérations logistiques et financières, premières arrestations

La RAF réussit ensuite une série d’opérations financières et logistiques: attaque de trois banques à Berlin-Ouest le même jour (le 29 septembre 1970); effraction nocturne avec saisie de tampons officiels et des passeports dans la mairie de Neustadt (16 novembre) et à Lang-Gons (21 novembre); attaque d’une banque à Kaiserlautern (22 décembre, un policier est tué dans l’opération); attaque de deux caisses d’épargne à Kassel (15 janvier 1971). Fin 1970 – début 1971, la police arrête Horst Mahler, Ingrid Schubert, Monika Berberich, Brigitte Asdonk, Irene Goergens, Astrid Proll, Hans-Jürgen Bäcker et Margrit Schiller.

Affiche de recherche

Avril 1971 – ‘Conception de la guérilla urbaine’

En avril 1971, la RAF rend public un remarquable texte manifeste intitulé Conception de la guérilla urbaine.

La peur a traversé le dos des dominants, qui pensaient déjà avoir tout en main, cet Etat et tous ses habitants et classes et contradictions, et réduit les intellectuels à leurs revues, enfermé les gauchistes dans leurs cercles, désarmé le marxisme-léninisme. La structure de pouvoir qu’ils représentent n’est pourtant pas aussi vulnérable que leur effarouchement peut nous le laisser penser. Leurs vociférations ne doivent permettre de nous surestimer. Nous affirmons que l’organisation de groupes armés de résistance est actuellement juste, possible et justifiée en République fédérale et à Berlin-Ouest, qu’il est juste, possible et justifié de mener id est maintenant la guérilla urbaine. Que la lutte armée comme ‘plus haute forme du marxisme-léninisme’ (Mao) peut et doit commencer maintenant, que sans cela il n’y a pas de lutte anti-impérialiste dans la métropole.

La RAF analyse sévèrement la situation en R.F.A. ‘Sous le couvert de ‘l’intérêt général’ le dirigisme étatique tient en bride les bureaucraties syndicales par le biais des contrats de progrès des salaires et la concertation. (…) Participant avec l’aide militaire et économique aux guerres d’agression des USA, la République fédérale profite de l’exploitation du tiers-monde sans avoir la responsabilité de ces guerres, sans avoir affaire avec une opposition intérieure. Pas moins agressive que l’impérialisme US, mais moins attaquable. Les possibilités politiques de l’impérialisme ne sont épuisées ni dans leur variante réformiste, ni dans leur variante fasciste, ses capacités d’intégrer ou d’opprimer les contradictions qu’il produit lui-même ne sont pas terminées. Le concept de guérilla urbaine de la fraction armée rouge ne se base pas sur une estimation positive de la situation en République fédérale et à Berlin-Ouest.

La RAF affirme que même si le mouvement étudiant a vu ses origines bourgeoises le rattraper, il ne faut pas le sous-estimer car il ‘a reconstruit le marxisme-léninisme comme arme dans la lutte de classe et a posé le contexte international pour le combat révolutionnaire dans les métropoles‘. Mais la RAF affirme qui faut aller plus loin: ‘II n’y aura pas de rôle dirigeant des marxistes-léninistes dans les futurs luttes de classes si l’avant-garde ne tient pas elle-même la bannière rouge de l’internationalisme prolétarien et si l’avant-garde ne répond pas elle-même à la question de savoir comment sera érigé la dictature du prolétariat, comment le pouvoir politique du prolétariat doit être exigé, comment le pouvoir de la bourgeoisie doit être brisé, si elle n’est pas prête avec une pratique à y répondre. L’analyse de classe dont nous avons besoin n’est pas à faire sans pratique révolutionnaire, sans initiative révolutionnaire‘. Et de se revendiquer de la primauté de la pratique: ‘Sans pratique, la lecture du ‘Capital’ n’est qu’une étude bourgeoise. Sans pratique, tes déclarations politiques ne sont que du baratin. Sans pratique, l’internationalisme prolétarien n’est qu’un mot ronflant. Prendre théoriquement le point de vue du prolétariat, c’est le prendre pratiquement.

Car la RAF veut ouvrir une nouvelle ligne de front: ‘S’il est juste que l’impérialisme américain soit un tigre de papier, c’est-à-dire qu’en dernier recours il peut être vaincu; et si la thèse des communistes chinois est juste, que la victoire sur l’impérialisme américain est devenue possible par le fait que dans tous les coins et bouts du monde la lutte soit menée contre lui, et qu’ainsi les forces de l’impérialisme soient éparpillées et que par cet éparpillement il soit possible de l’abattre – si cela est juste, alors il n’y a aucune raison d’exclure un pays quel qu’il soit ou une région quelle qu’elle soit parce que les forces de la révolution sont particulièrement faibles, les forces de la réaction particulièrement fortes (…). La guérilla urbaine part du principe qu’il n’existe pas d’ordre de marche prussien où beaucoup de soi-disant révolutionnaires voudraient guider le peuple dans la lutte révolutionnaire. Part du principe que lorsque la situation sera mûre pour la lutte armée il sera trop tard de la préparer.’

La légalité est l’idéologie du parlementarisme, du partenariat social, de la société pluraliste. Elle devient un fétiche quand ceux qui s’en targuent ignorent que les téléphones peuvent être légalement écoutés, le courrier légalement contrôlé, les voisins légalement interrogés, les indics légalement payés, que l’on peut légalement surveiller – que l’organisation du travail politique, si elle ne veut pas être mise hors circuit de manière permanente par l’attaque de la police politique, doit être en même temps légale et illégale (…) Qui n’a pas réalisé que les conditions de la légalité, avec la résistance active, se modifient nécessairement et qu’il est pour cela nécessaire d’utiliser la légalité pour la lutte politique et en même temps pour organiser l’illégalité, et qu’il est faux d’attendre l’illégalisation comme un coup du sort imposé par le système, parce que l’illégalisation signifie l’écrasement immédiat, et que la question est alors réglée. La fraction armée rouge organise l’illégalité comme position offensive pour l’intervention révolutionnaire. Mener la guérilla urbaine, c’est mener la lutte anti-impérialiste de manière offensive. La fraction armée rouge pose le lien entre lutte légale et illégale, lutte nationale, lutte politique, lutte armée, et la définition tactique et stratégique du mouvement communiste international. La guérilla urbaine c’est malgré la faiblesse des forces révolutionnaires en République fédérale et Berlin-Ouest intervenir ici et maintenant de manière révolutionnaire!‘.

Jaquette du livre ‘Conception de la guérilla urbaine

Conception de la guérilla urbaine

Conception de la guérilla urbaine – format pdf

Das Konzept Stadtguerilla (texte original allemand, lien)

15 juillet 1971 – Mort de Petra Schelm

Le 15 juillet 1971, la police abat une militante de la RAF, Petra Schelm, et arrête Werner Hoppe.

Petra Schelm

Début 1972 – Nouvelles fusillades, nouvelles arrestations

Le 17 janvier 1972 survient un échange de coups de feu au cours d’un contrôle de police. Selon la police, Andreas Baader était dans la voiture, ce qui donne lieu à une campagne de presse monstre. Le 2 mars 72, la police abat à Augsburg Thomas Weisbecker, un militant de la RAF qui n’était pas armé. Le 3 mars, lors d’une fusillade, un commissaire de police est tué et une militant de la RAF, Manfred Grashof, est grièvement blessé. Un autre militant, Wolfgang Grundmann est arrêté à cette occasion.

Affiche militante

Avril 1972 – ‘Guérilla urbaine et lutte de classe’

En avril 1972, la RAF rend public Guérilla urbaine et lutte de classe. La RAF y analyse la grève des travailleurs du secteur chimique, la militarisation de la lutte de classe, l’actualité objective de la question sociale, les liens entre les trusts et l’Etat, les différents réformismes, la possibilité et la fonction de la guérilla urbaine.

11 mai 1972 – Action contre un QG de l’armée américaine à Francfort

Le 11 mai 1972, trois bombes (80 kg de TNT) explosent dans le quartier général du 5ème Corps US à Francfort. Un officier est tué, treize soldats sont blessés. Le commando Petra Schelm de la RAF revendique l’action: ‘L’Allemagne de l’Ouest et Berlin-Ouest ne doivent plus être un arrière-pays tranquille pour les stratèges de la destruction du Viêt-Nam. Ils doivent savoir que leurs crimes contre le peuple vietnamien leur ont amené de nouveaux ennemis décidés, qu’il n’y aura plus aucun endroit au monde où ils seraient en sécurité des attaques des unités et de la guérilla révolutionnaire.

Action contre une base de l’armée à Francfort

Communiqué du Commando Petra Schelm (lien1)

Communiqué du Commando Petra Schelm (lien2)

12-16 mai 1972 – Actions contre la police et la justice

Le 12 mai 1972, le commando Thomas Weisbecker de la RAF fait exploser deux bombes à la direction de la police d’Augsbourg (six blessés) et sur le parking de la police criminelle de Munich (dix blessés et 100 voitures détruites, photo). Le 16 mai 1972, une bombe vise Buddenberg, juge à Karlsruhe, que le commando Manfred Grashof de la RAF rend responsable de la narcotisation forcée de la prisonnière Carmen Roll et des conditions d’isolement. La RAF exige l’application de la Convention des Droits de l’Homme (Genève) et de la Charte des Nations Unies en ce qui concerne le droit des prisonniers.

Action à Münich contre la police et la justice

Communiqué du Commando Thomas Weisbecker

19 mai 1972 – Action contre le groupe de presse Springer

Le 19 mai 1972, la RAF fait exploser deux bombes au siège des éditions Springer. Il y a 34 blessés dont de nombreux travailleurs. A deux reprises pourtant, des appels téléphoniques prévenaient de l’action. Cette dernière est revendiquée par le commando 2 juin de la RAF, qu’il ne faut pas confondre avec le Mouvement du 2 Juin, (un groupe de guérilla urbaine qui avait une conception organisationnelle décentralisée et une orientation politique socialiste-révolutionnaire, dont le nom fait également référence à l’assassinat de Benno Ohnsorg). Cinq jours plus tard, dans une lettre à la radio allemande, le commando regrette que des travailleurs aient été blessé et accuse Springer d’avoir pris clairement le risque de blesser ou tuer des ouvriers en n’écoutant pas leurs avertissements.

24 mai 1972 – Action contre un QG de l’armée américaine à Heidelberg

Le 24 mai 1972, le Commando 15 juillet de la RAF attaque à l’explosif le quartier général du Corps d’armée US stationnée à Heidelberg, et détruit l’ordinateur central coordonnant les bombardements américains au Nord Viêt-Nam. Trois soldats US sont tués. Le communiqué rappelle que plus de bombes ont été déversées sur le Viêt-Nam que sur le monde entier durant toute de la seconde guerre mondiale. Les bombardements sont interrompus pendant quelques jours et cette action aura un retentissement immense.

Communiqué du Commando du 15 juillet (lien 1)

Communiqué du Commando du 15 juillet (lien 2)

Mai 1972 – Campagne de presse contre la RAF

Le 31 mai 1972, la presse Springer annonce que la RAF veut faire sauter des bombes dans la ville de Stuttgart. La campagne de guerre psychologique ne cessera plus: on accusera la RAF de vouloir tirer des roquettes sur les stades lors des matchs de football, de vouloir prendre des enfants en otage, de vouloir empoisonner l’eau potable, etc. Cette guerre psychologique vise le capital de sympathie accumulé par la RAF: un sondage indique que 20% des allemands accepteraient de subir des poursuites judiciaires pour pouvoir cacher un membre de la RAF…

Campagne de presse contre la RAF

Juin 1972 – Vague d’arrestations

Le 1er juin 1972, Andreas Baader, Holger Meins et Jan-Cart Raspe sont arrêtés lors d’une opération spéciale: 300 policiers équipés de pistolets-mitrailleurs, avec l’aide d’un blindé, les arrêtent dans la banlieue de Francfort. Les trois militants sont blessés (Baader grièvement) dans un échange de coups de feu. Le 15 juin, Ulrike Meinhof et Gerhard Müller sont arrêtés dans la banlieue de Hanovre, suite à la dénonciation d’un syndicaliste social-démocrate qui les avait hébergés. D’autres arrestations suivent: Gudrun Ennslin, Brigitte Monhaupt, Bernard Braun, Gerhard Müller, Irmgard Möller, Klaus Jünschke,…

Arrestation de Baader

Septembre 1972 – Action palestinienne à Munich

Le 5 septembre 1972, huit combattants palestiniens prennent en otage neuf sportifs israéliens aux Jeux Olympiques à Munich, et propose de les échanger contre 200 personnes détenues en Israël. Les autorités feignent de négocier, mais tendent une embuscade à l’aéroport: neuf israéliens, cinq palestiniens et un policier allemand meurent dans la fusillade.

Le 7 septembre l’aviation israélienne bombarde les camps de réfugiés au Liban et tue 200 civils.

En novembre, la RAF rend public à cette occasion un texte exposant que la stratégie de la lutte anti-impérialiste amène la lutte dans le centre. Le document analyse la signification du Proche-Orient pour l’impérialisme, conçoit l’impérialisme comme unité des contradictions, étudie les rapports entre impérialisme et tiers-monde, traite des mouvements de libération anti-impérialiste, de l’opportunisme dans la métropole de l’exploitation, de la consommation de masse, des mass-médias, de la domination du système 24 heures sur 24, du sujet révolutionnaire, du fascisme et de l’antifascisme, de l’antifascisme et de l’anti-impérialisme.

Action palestinienne à Münich

1972 – La torture blanche

En prison, les militants de la RAF subissent un traitement spécial scientifiquement établi pour leur destruction: isolement, promenade les mains liées pendant des années, des mois de sections silencieuses, des anesthésies de force. Cette torture blanche est issue d’un programme de recherche nommé ‘camera silens’: le prisonnier est dans une cellule sans fenêtre ni lumière du jour, la lumière artificielle s’allume de telle manière à briser le cycle du sommeil du prisonnier, les murs sont blancs afin de briser la vue, la cellule est totalement insonorisée. Ulrike Meinhof tentera d’expliquer les sensations produites par la torture blanche: ‘le sentiment que ta tête explose’, ‘on ne peut pas expliquer si l’on tremble de fièvre ou de froid – on gèle’, ‘on ne peut plus identifier la signification des mots, seulement deviner – l’utilisation de lettres en sch (ch,. ss, z, s) est absolument insupportable’, ‘la construction de la phrase, la grammaire, la syntaxe, on ne contrôle plus rien’, ‘le sentiment qu’on t’a enlevé la peau‘.

Ulrike Meinhof

Janvier-février 1973 – Première grève de la faim

Le 17 janvier 1973, quarante prisonniers entrent en grève de la faim en revendiquant la fin de l’isolement, et en particulier la sortie d’Ulrike Meinhof de ‘l’aile morte’ de la prison de Cologne-Ossendo. La grève de la faim est ‘durcie’ par l’Etat qui cesse de donner de l’eau aux prisonniers. Mais le 9 février, Meinhof est placée dans une cellule isolée d’une prison masculine où elle peut entendre des bruits humains. La grève prend fin le 12 février.

Mai 1973 – Deuxième grève de la faim

Le 8 mai 1973, deuxième grève de la faim. 40 prisonniers politiques revendiquent les mêmes droits que les autres prisonniers, et une information politique libre. A nouveau, la distribution d’eau est supprimée à certains prisonniers, dont Andreas Baader. La grève se termine le 29 juin 1973.

Affiche de solidarité

Fin 1974 – Nouvelles arrestations, premier procès

Margrit Schiller, qui avait été libérée l’année précédente et qui avait repris la lutte est arrêtée une nouvelle fois. Sont aussi arrêtés Christa Eckes, Helmut Pohl, Ilse Stachowiak, Eberhard Becker, Wolfgang Beer,… Le 10 septembre 1974: début du procès contre Horst Mahler et Ulrike Meinhof, qui développe le 13 septembre un discours sur la lutte armée et l’usage par la contre-révolution de la guerre psychologique contre le peuple. Horst Mahler est condamné à 14 années de prison (dissocié et repenti, il sera libéré en 80 et adoptera des positions de plus en plus réactionnaires), Ulrike Meinhof à huit années.

Affiche pour le procès

Déclaration d’Ulrike Meinhof au procès (lien1)

Déclaration d’Ulrike Meinhof au procès (lien2)

Septembre-novembre 1974 – Troisième grève de la faim, mort d’Holger Meins

Le 13 septembre 1974 commence la troisième grève de la faim, qui dure jusqu’au 5 février 1975. Contre l’élimination des prisonniers politiques, la RAF rappelle que la grève de la faim est la seule possibilité de résistance collective, de se défendre, psychiquement et physiquement: ‘Lutter, c’est faire de faiblesses une force’. Le 9 novembre 1974, Siegfried Haag, avocat de Holger Meins, se rend à la prison de Wittich. Il n’obtient l’autorisation de le voir qu’après de nombreuses démarches. Il raconte: ‘Holger Meins est amené sur un brancard par deux gardiens. Ils déposent le brancard tout près de la porte ouverte, à côté de deux cartons renfermant des dossiers de sa défense et une bouteille d’eau, puis ils se retirent. Holger Meins a les yeux clos, il n’est pas capable de se remuer, il ne peut même pas replier ses jambes. C’est un squelette. Un mètre quatre-vingt-cinq environ. Quarante-deux kilos seulement. Ils lui ont bourré les pantalons de papier. Holger ne peut plus parler. Il peut difficilement murmurer quelques mots en s’interrompant. Pendant plusieurs instants, il ne semble pas entendre.‘ Le même jour, l’avocat Klaus Croissant, prévenu de l’état très grave de Meins, porte lui-même une lettre au président du tribunal, le sommant de permettre que des médecins de confiance puissent se rendre auprès de lui. A 18 heures, Croissant reçoit un télégramme lui apprenant la mort de Holger Meins. Le 12 novembre 1974, le président du tribunal de grande instance de Berlin, Von Drenkmann, est exécuté. Le 21 novembre 1974, une bombe explose devant le domicile de Gerd Ziegler, juge du tribunal de Hambourg.

Holger Meins

Cadavre de Holger Meins

Affiche pour Holger Meins

Déclaration d’entrée en grève de la faim (lien1)

Déclaration d’entrée en grève de la faim (lien2)

Holger Meins sur le nutrition forcée

Holger Meins: ‘Combattre jusqu’au bout, même ici’

20 janvier 1975 – L’interview au Spiegel

Le 20 janvier 75, l’hebdomadaire Spiegel publie une grande interview des prisonniers de la RAF détenus à la prison de Stammheim (photo). Les prisonniers y exposent leur vision de la R.F.A.: ‘Centre impérialiste. Colonie américaine. Base militaire américaine. Puissance dirigeante impérialiste en Europe et dans le Marché Commun. Deuxième puissance militaire de l’OTAN. Représentant patenté des intérêts de l’impérialisme américain en Europe de l’Ouest. La fusion de l’impérialisme ouest-allemand (politiquement, économiquement, militairement, idéologiquement fondé sur les mêmes intérêts d’exploitation du Tiers-Monde, ainsi que sur l’homogénéité des structures sociales au moyen de la concentration des capitaux et de la culture de consommation) avec l’impérialisme américain caractérise la position de la République fédérale vis-à-vis des pays du Tiers-Monde: en tant que parti dans les guerres conduites contre eux par l’impérialisme américain, en tant que ‘ville’ dans le processus révolutionnaire mondial d’encerclement des villes par les campagnes. Dans cette mesure, la guérilla dans les métropoles est une guérilla urbaine aux deux sens du terme: géographiquement, elle surgit, opère et se développe dans les grandes villes, et au sens stratégique et politico-militaire, elle est une guérilla urbaine car elle s’attaque de l’intérieur à la machine répressive de l’impérialisme dans les métropoles, elle combat comme unité de partisans sur les arrières de l’ennemi. C’est ce que nous entendons aujourd’hui par internationalisme prolétarien. En un mot: la République fédérale faisant partie du système étatique de l’impérialisme américain, n’est pas une Nation opprimée mais une Nation qui opprime. Dans un tel Etat, le développement du contre-pouvoir prolétarien et de sa lutte de libération, le démantèlement complet des structures dominantes, de pouvoir, ne peuvent être, dès leurs débuts, qu’internationalistes, ne sont possibles qu’en relation tactique et stratégique avec les luttes de libération des Nations opprimées.

Historiquement: depuis 1918-1919, la bourgeoisie impérialiste – son Etat – possède l’initiative dans le déroulement des luttes de classe en Allemagne et est à l’offensive contre le peuple; et cela jusqu’à ce que les organisations du prolétariat se soient trouvées totalement défaites dans le fascisme jusqu’à la défaite de l’ancien fascisme, défaite due non pas à la lutte armée, mais aux alliés occidentaux et à l’armée soviétique. Dans les années 20, il y a eu la trahison de la Troisième Internationale: alignement total des partis communistes sur l’Union Soviétique, qui se trouve à l’origine de l’incapacité du K.P.D. (parti communiste d’Allemagne) d’en venir à une politique orientée vers la révolution par la lutte armée et la conquête prolétarienne du pouvoir politique. Après 1945, il y a eu l’offensive lavage de cerveau de l’impérialisme américain contre le peuple au moyen de l’anticommunisme, de la culture de consommation, de la restauration-refascisation politique, idéologique, et finalement militaire sous la forme de guerre froide et d’une R.D.A. (République Démocratique Allemande) qui n’a pas développé la politique communiste comme guerre de libération. Il n’y a pas eu ici de résistance antifasciste, de masses armées comme en France, Italie, Yougoslavie, Grèce, Espagne, même Hollande. Les conditions pour cela ont été immédiatement brisées par les alliés occidentaux après 1945. Tout cela signifie pour nous et pour la gauche légale, ici: il n’y a rien à quoi nous rattacher, sur quoi nous appuyer historiquement, il n’y a rien que nous puissions présupposer d’une manière ou d’une autre en termes organisationnels ou de conscience prolétarienne, pas même des traditions démocratiques républicaines. Au plan de la politique intérieure, il s’agit là d’un des motifs qui rend possible sans retenue le processus de fascisation, la surcroissance et l’excroissance de l’appareil policier, de la machine de sûreté de l’Etat comme police de l’Etat dans l’Etat, la suppression factice de la division des pouvoirs, la promulgation de lois d’exception fascistes dans le cadre du programme de ‘sécurité interne’ – depuis les lois d’urgence jusqu’aux lois d’exception actuelles qui permettent le déroulement de procès sans accusés ni défenseurs, comme pure entreprise de spectacle, mais également l’exclusion de ‘radicaux’ des services publics, l’élargissement des compétences de l’Office de police criminelle. Une démocratie qui n’a pas été conquise, qui n’est pour le peuple qu’un bourrage de crâne et n’a pas de base de masse, ne peut pas être défendue et ne l’est pas non plus.’

Les prisonniers exposent les effets politiques de l’action de la RAF:

1° au niveau où beaucoup, modifiant leur opinion sur cet Etat étant donné les mesures prises par le gouvernement contre nous, commencent à le reconnaître pour ce qu’il est: la machine répressive de la bourgeoisie impérialiste;

2° au niveau où nombreux sont ceux qui, s’identifiant avec notre lutte, devenant conscients et relativisant dans leur pensée, leur sensibilité et finalement dans leur action, l’absolutisme de pouvoir du système, reconnaissent ce qu’il est possible de faire, que le sentiment d’impuissance ne reflète pas la réalité objective;

3° au niveau de l’internationalisme prolétarien, de la conscience de la relation entre des luttes de libération dans le Tiers-Monde et ici, de la possibilité et de la nécessité de collaborer légalement et illégalement.

Au niveau de la praxis: qu’il ne suffit pas seulement de parler, mais qu’il est possible et nécessaire, nécessaire et possible d’agir. (…)

Aucun révolutionnaire ne pense à renverser seul le système, c’est absurde. Il n’y a pas de révolution sans le peuple. De telles affirmations contre Blanqui, Lénine, Che Guevara, contre nous maintenant n’ont jamais été autre chose que la dénonciation de toute initiative révolutionnaire, la référence aux masses ayant pour fonction de justifier, de vendre la politique réformiste. Il ne s’agit pas de lutter seul, mais de créer à partir des luttes quotidiennes, des mobilisations et des processus d’organisation de la gauche légale, une avant-garde, un noyau politico-militaire qui devra mettre en place une structure illégale – condition préalable, nécessaire à la possibilité d’agir et qui, étant donné les poursuites et l’illégalité, et la praxis peut donner aux luttes légales dans les usines, les quartiers, la rue et les universités orientation, force et but pour atteindre ce dont il s’agira dans les développements de la crise économique et politique de l’impérialisme: la prise du pouvoir politique. La perspective de notre politique – le développement pour lequel nous nous battons: un fort mouvement de guérilla dans les métropoles – est, au cours de ce processus de chute définitive et d’écroulement de l’impérialisme américain, un moyen nécessaire, une étape, dans la mesure où les luttes légales et les luttes qui se développeraient spontanément à partir des contradictions du système pourraient être brisées par la répression dès qu’elles se manifestent. Ce que le parti de cadres bolcheviques représentait pour Lénine, correspond à l’époque de l’organisation multinationale du capital, des structures transnationales de la répression impérialiste à l’intérieur et à l’extérieur, où nous nous trouvons aujourd’hui, à l’organisation du contre-pouvoir prolétarien issu de la guérilla. Au cours de ce processus – national et international – elle se développe en parti révolutionnaire.’

Les prisonniers décrivent les traitements spéciaux dont ils font l’objet et dénoncent: Holger Meins ‘a été exécuté sciemment par une sous-nutrition systématique, la nutrition artificielle était, dès le début, à la prison de Wittlich une méthode pour assassiner. Au début, brutale, directe, violente, pratiquée pour briser la volonté, et par la suite pratiquée seulement en apparence. 400 calories par jour: il s’agit seulement d’une question de temps, de jours, jusqu’à ce que l’on meurt. Le procureur fédéral Büback et les services de sécurité ont manigancé cela en s’arrangeant pour que Holger Meins reste à la prison de Wittlich, jusqu’à ce qu’il soit mort. Le 21 octobre, le tribunal (O.L.G.) de Stuttgart avait ordonné le transfert de Holger Meins à Stuttgart au plus tard le 2 novembre. Dès le 24 octobre, Büback, procureur fédéral, faisait savoir au tribunal de Stuttgart que la date du transfert ne pouvait pas être respectée par les services de sûreté de l’Etat: cette information n’a toutefois été rendue publique qu’après la mort de Holger Meins. Pour terminer, le médecin de la prison Hutter a cessé complètement la nutrition artificielle et est parti en voyage. Il faut également préciser que l’Office fédéral de police criminelle était informé sur l’état des prisonniers, pendant toute la durée de la grève de la faim, par les directions des prisons. Il faut souligner que Hutter, avant qu’il ne se retire, parce que Holger était mourant, a demandé à Degenhardt de lui assurer qu’il ne ferait l’objet d’aucune plainte – de la même manière, toutes les plaintes portées contre Degenhardt ont été annulées. Degenhardt est le médecin qui, durant l’été 1973, pendant la seconde grève de la faim à Schwalmstadt, a supprimé l’eau ‘pour raisons médicales’ pendant neuf jours, jusqu’au coma.

A la question du Spiegel La mort de Holger Meins a-t-elle été une opportunité pour le collectif R.A.F.? ‘, les prisonniers répondent: ‘Cela, c’est de la projection fasciste; la réflexion de quelqu’un qui ne peut plus penser autrement qu’en termes de marché: le système qui réduit toute vie humaine à de l’argent, de l’égoïsme, du pouvoir, de la réussite. Comme le Che, nous disons: ‘LE GUERILLERO NE DOIT RISQUER SA VIE QUE SI CELA EST ABSOLUMENT NECESSAIRE, MAIS DANS CE CAS SANS HESITER UN SEUL INSTANT.’ Et cela est tout à fait vrai pour la mort de Holger Meins: ‘la résonance de l’histoire’, celle qui s’est éveillée par la lutte armée anti-impérialiste, est entrée dans l’histoire des peuples du monde. Elle a ‘été une opportunité’, cela veut dire qu’elle a brisé le boycott de l’information. Car, si beaucoup de gens ne s’éveillent seulement que lorsque quelqu’un est assassiné et à partir de ce moment commencent seulement à comprendre de quoi il s’agit, c’est que vous en êtes également responsable. C’est ainsi que le Spiegel a passé sous silence pendant huit semaines la grève de la faim de quarante prisonniers politiques afin d’empêcher solidarité et protection.‘ Et quand le Spiegel se demande s’ils sont préparés à d’autre cas mortels, les prisonniers répondent: ‘Büback attend ça dans son bureau.‘ Le 5 février 1975, les prisonniers arrêtent la grève de la faim.

La prison de Stammheim

Interview au Spiegel

27 février 1975 – Enlèvement de Peter Lorenz

Le 27 février 1975, deux jours avant les élections, le Mouvement du 2 juin enlève Peter Lorenz, député libéral et candidat à la mairie de Berlin-Ouest, et propose de le libérer contre la libération de Rolf Pohle, Verena Becker, Rolf Heissler, Gabi Kröcher-Tiedemann et Horst Mahler. Horst Mahler refusera d’être libéré mais les autres militants peuvent trouver refuge au Yemen socialiste, tandis qu’à Berlin, le Mouvement du 2 juin libère Peter Lorenz.

Symbole du Mouvement du 2 Juin

Programme du Mouvement du 2 Juin

24 avril 1975 – Attaque de l’ambassade d’Allemagne à Stockholm

Le 24 avril 1975, peu avant midi, le commando Holger Meins de la RAF occupe l’ambassade de R.F.A. à Stockholm, prend en otage douze fonctionnaires, et réclame la libération de 26 prisonniers. La police attaque le bâtiment: deux fonctionnaires (dont l’attaché militaire, le comte Andreas von Mirbach) sont tués ainsi qu’un membre de la RAF, Ulrich Wessel. Un autre membre du commando, Siegfried Hausner, est grièvement blessé et contre l’avis des médecins suédois est immédiatement transporté en R.F.A.. Il n’est pas amené à l’hôpital mais à la station intensive de la prison de Stammheim, sur ordre de Büback, où il meurt faute des soins adéquats le 4 mai. Sont aussi capturés à Stockholm et extradés en R.F.A.: Karl-Heinz Dellwo, Lutz Taufer, Bernhard Rößner et Hanna Krabbe.

Ambassade d’Allemagne

Genscher à Stockholm

21 mai 1975 – Début du procès de Stammheim

Le procès d’Andreas Baader, Gudrun Ennslin, Jan-Carl Raspe et Ulrike Meinhof s’ouvre le 21 mai 1975 dans une annexe de la prison de Stuttgart-Stammheim construite pour l’occasion sur le budget de la Sûreté de l’Etat. C’est une forteresse de béton de 150 millions de marks gardée par des policiers de trois Länders. C’est au cours du même mois que le défenseur de Gudrun Ensslin déposera la première demande de récusation pour présomption légitime du juge Theodor Prinzing qui préside le tribunal. Elle sera suivie de 84 requêtes identiques. Au procès, les militants se positionnent en prisonniers de guerre et exigent que l’intégralité des actions contre les bases US soient considérées comme une partie de la guerre du Viêt-Nam. En août, les avocats réclament une expertise médicale, assurant que leurs clients sont incapables, en raison de leur état de santé, de suivre le débat. Le procureur lit alors l’acte d’accusation en l’absence des inculpés e de leurs défenseurs. Plus tard, les médecins estiment qu’ils ne peuvent suivre les débats que trois heures par jour. En septembre, les experts médicaux jugent les accusés inaptes à assister aux débats. Le tribunal décide alors que le procès peut se poursuivre en leur absence et la cour de justice fédérale le suit dans ses conclusions. Le travail des avocats est rendu impossible: la presse Springer reçoit des dossiers que les services du procureur refuse de communiquer aux défenseur; les dossiers sont caviardés et truqués; les défenseurs sont surveillés jour et nuit; leur courrier contrôlé et leur téléphone écouté. Les avocats subissent des sanctions disciplinaires de la part de leur Ordre parce qu’ils dénoncent les conditions de détention des prisonniers et le 23 juin, quatre d’entre eux sont perquisitionnés et deux (Klaus Croissant et Hans-Christian Ströbele) passent quelques semaines en prison.

Stammheim

Fin 1975-Début 1976 – Nouvelles lois répressives

Hiver 1975: le parlement approuve une loi qui subordonne l’appartenance à un parti, même légal, à la fidélité à la constitution: c’est la consécration définitive des Berufsverbote (interdiction de travail), de l’exclusion de la fonction publique de tous ceux qui ne donnent pas de preuves suffisantes de leur fidélité à la constitution. Etre soupçonné d’être militant du Parti Communiste (simplement toléré en R.F.A., il ne sera légalisé qu’en 81) bloque toute possibilité de devenir instituteur ou cheminot.

Janvier 1976: le parlement vote une nouvelle série de lois répressives, à caractère préventif.

9 mai 1976 – Assassinat d’Ulrike Meinhof

Le 9 mai 1976, les autorités annoncent qu’Ulrike Meinhof a été retrouvée ‘suicidée’ dans sa cellule. Ce suicide est totalement exclu par les militants de la RAF: Ulrike Meinhof a été tuée en raison de son importance au sein de la RAF. Peu avant, se sachant menacée, elle avait dit à sa soeur que si on lui annonçait sa mort, c’est que les autorités l’auraient assassinée. Les jours qui suivent ce meurtre sont marqués par des centaines d’actions de protestations dans le monde entier (actions armées en France, Australie, R.F.A., Italie, Grèce,…).

Ulrike Meinhof

Ulrike Meinhof: Débat sur la ‘position de classe’

Ulrike Meinhof sur la situation de la RFA

Ulrike Meinhof sur l’histoire de la RFA et de la gauche traditionnelle

Déclaration de Jan-Carl Raspe sur la mort d’Ulrike (lien1)

Déclaration de Jan-Carl Raspe sur la mort d’Ulrike (lien2)

Fin 1976-Début 1977 – Actions et réactions autour du procès

Le 29 mai 1976, la ‘loi anti-terreur’ est votée. Elle modifie la définition de ‘formation d’association terroriste’ et renforce le contrôle du courrier entre les prisonniers et les avocats.

Le 1er juin 1976, attentat contre le quartier général des forces américaines à Francfort (16 blessés). Le 10 juin 1976, l’avocat Langner défenseur de la militante de la RAF Margaret Schiller, fait l’objet d’un attentat fasciste (un mort et cinq blessés). Le 30 novembre, arrestation de Siegfried Haag et Roland Mayer.

En octobre, le procureur annonce son réquisitoire dans lequel il considère les inculpés comme des prisonniers de droit commun et réclame la réclusion à perpétuité pour chacun d’eux. En janvier 1977, la présidence du tribunal est retirée au juge Prinzing pour ‘comportement partial’. En mars, on apprend que les services secrets enregistraient toutes les conversations entre les avocats et les prisonniers de Stammheim. Le 8 février, Brigitte Monhaupt (photo) est libérée; elle rejoint la lutte peu de temps après et y jouera un rôle central.

Brigitte Monhaupt

30 mars 1977 – Nouvelle grève de la faim

Les prisonniers commencent une nouvelle grève de la faim le 30 mars 1977. Ils demandent leur regroupement par groupes de 15 à 20 personnes, selon une recommandation des médecins qui les ont observés. Ils demandent aussi des garanties minima sur les prisonniers de guerre.

7 avril 1977 – Action contre le procureur Buback

Le 7 avril 1977, le procureur Buback est exécuté à Karlsruhe par le commando Ulrike Meinhof de la RAF.

Buback

Communiqué du Commando Ulrike Meinhof

Début 1972 – Fin du procès et de la grève de la faim

Le 28 avril, Andreas Baader, Gudrun Ennslin et Jan-Carl Raspe sont condamnés à la détention à vie. Les prisonniers continuent la grève de la faim, mais le 30 avril, le ministre de la justice du Land de Bade-Wurtemberg promet le regroupement. La grève de la faim s’arrête sur un succès. Reste à transférer de nouveaux prisonniers à Stammheim, pour constituer des groupes capables ‘d’interactions sociales’ selon la formule des médecins.

3 mai 1977 – Nouvelle fusillade, nouvelles arrestations

Le 3 mai 1977, Gunter Sonnenberg et Verena Becker (revenue clandestinement du Yemen) sont arrêtés à Singen après un échange de coups de feu avec la police. Gunter Sonnenberg est dans le coma, une balle dans la tête. Ils sont accusés d’avoir participé à l’exécution du Buback. Verena Becker collaborera avec la police quelques temps après.

Le 1er juillet, la RAF attaque une armurerie à Francfort et récupère 18 pistolets et revolvers.

22 juin 1977 – Procès et grève de la faim des prisonniers de Stockholm

Le 22 juin 1977, Lutz Taufer, Kari-Heinz Dellwo, Bernd Rössner et Hanna Krabbe, qui ont été condamnés à la prison à vie pour l’attaque de l’ambassade à Stockholm, commencent une grève de la faim afin d’être transférés dans la même prison que les autres membres de la RAF, à Stuttgart-Stammheim, pour être regroupés avec eux. Verena Becker et Sabine Schmitz poursuivent également une grève de la faim depuis le 24 mai pour les mêmes raisons.

11 juillet 1977 – Début de ‘L’Affaire Croissant’

Le 11 juillet, Klaus Croissant, avocat d’Andreas Baader, persécuté par la police allemande, demande l’asile politique à la France.

Klaus Croissant

30 juillet 1977 – Action contre le banquier Ponto

Le 30 juillet 1977, Jurgen Ponto, président de la Dresdner Bank, est abattu à Bad Hombourg lors d’une tentative d’enlèvement par la RAF.

Action contre Jurgen Ponto

8 août 1977 – Rétablissement de l’isolement, nouvelle grève de la faim

A la suite d’une provocation des gardiens, une partie des prisonniers de Stammheim, qui avaient été amenés pour constituer des ‘groupes capables d’interactions sociales’ conformément aux promesses du ministre de la justice, sont transférés le 8 août dans d’autres prisons. L’isolement est rétabli. Les détenus de Stammheim entament une nouvelle grève de la faim qui est suivie par d’autres prisonniers.

25 août 1977 – Echec d’une action contre le procureur Rebman

Le 25 août, un attentat à la roquette de la RAF est déjoué contre les bureaux du procureur fédéral Rebman à Karlsruhe.

5 septembre 1977 – Enlèvement du ‘patron des patrons’ Schleyer

Le 5 septembre 1977, Hans Martin Schleyer est enlevé par le commando Siegfried Hausner de la RAF. Son chauffeur et ses gardes du corps sont tués dans l’embuscade. Hans Martin Schleyer, ‘patron des patrons’ c’est-à-dire chef des fédérations patronales allemandes, avait milité aux jeunesses hitlériennes et avait été pendant la guerre un responsable de la SS (il avait notamment supervisé le pillage de la Tchécoslovaquie). Après guerre, il avait fait partie du conseil de direction de Daimler-Benz.

L’Etat réagit frénétiquement: 1.200 perquisitions en deux jours, vérification des personnes payant l’électricité, contrôle des identités et des voitures, des camions, des personnes entre 20 et 35 ans sur Interpol, etc. Malgré le fait que l’Etat lui-même reconnaît que l’action n’a pas pu être commandité ‘de l’intérieur’, les contacts avec les prisonniers deviennent impossibles. La RAF propose d’échanger Schleyer contre les prisonniers.

Hans Martin Schleyer

22 septembre 1977 – Nouvelle fusillade, nouvelle arrestation

Le 22 septembre, à Utrecht, Knut Folkerts est arrêté après une fusillade avec la police néerlandaise. Il sera extradé vers la R.F.A.

31 septembre 1977 – Suite de ‘L’Affaire Croissant’

Le 31 septembre 1977, Klaus Croissant est arrêté à Paris. Il sera extradé vers la R.F.A.

13 octobre 1977 – Détournement d’un Boeing allemand par les Palestiniens

Le 13 octobre 1977, un avion de la Lufthansa est détourné de Palma de Majorque par le commando Martyr Halimeh de l’Organisation de Lutte contre l’Impérialisme Mondial, qui exige la libération des prisonniers de la RAF. C’est la première fois que des combattants du Tiers-Monde soutiennent directement les révolutionnaires de la métropole. La nuit du 17 au 18, les policiers d’élite allemands attaquent de l’avion qui s’était posé à Mogadiscio. Trois combattants palestiniens (des militants du FPLP) sont abattus, une quatrième, Souhaila Andrawes Sayeh, grièvement blessée.

Le Boeing 737

La fedayin survivante

17 octobre 1977 – Massacre des prisonniers de la RAF à Stammheim

La même nuit, Andreas Baader, Gudrun Ensslin et Jan Carl Raspe, détenus en cellule d’isolement et faisant l’objet d’une surveillance de chaque instant, sont pendus ou abattus à coups de pistolet dans la nuque. Irmgard Möller en réchappe miraculeusement. Elle a été blessée de plusieurs coups de couteaux dans la poitrine. L’équipe du matin des surveillants la découvre baignant dans son sang, appelle un infirmier qui la sauve in extremis avec une transfusion. Elle pourra témoigner du massacre des prisonniers, mais le black out sera fait sur ce témoignage: officiellement, il s’agit de suicides concertés… Le 16 octobre, nouvelles attaques contre les d’avocats (perquisitions, arrestations). Le 19 octobre 1977, la RAF exécute Schleyer en représailles.

Andreas Baader et Gudrun Ensslin

Andreas Baader et Gudrun Ensslin

Jan-Carl Raspe

Irmgard Möller

Les funérailles à Stammheim

28 octobre 1977 – Nouvelle loi répressive

28 octobre 1977: nouvelle loi anti-terreur, qui définit ‘les causes politiques et spirituelles du terrorisme‘: l’attaque contre l’Etat, l’attaque contre la confiance du citoyen en l’Etat, attaque contre l’ordre des valeurs, critique sociale sans limite, marxisme, fausse analyse du passé…

Affiche de soutien

Fin 1977-Début 1978 – Débat dans le mouvement révolutionnaire allemand

Au cours de l’hiver 1977/1978, la définition d’une politique anti-impérialiste donne lieu à des débats dans la scène autonome anti-impérialiste (particulièrement forte à Hambourg et à Berlin). La bataille qui s’est soldée par l’assassinat des prisonniers de la RAF est vue comme un échec pour le mouvement révolutionnaire, mais le point positif consiste ‘en ce que la lutte des prisonniers et les actions de la guérilla a montré qu’ici en R.FA. il y a une résistance anti-impérialiste armée‘. Il ressort d’un document résultant de ces discussions qu’une nouvelle mobilisation s’est développée, et que celle-ci doit se concrétiser ‘dans la lutte de classe révolutionnaire pour le communisme’. Une nouvelle conscience s’est développée dans les avant-gardes combattantes, ‘la conscience de la maturité d’une nouvelle offensive de l’internationalisme prolétarien‘.

1978 – Nouvelle grève de la faim

Le 9 mars 1978, les prisonniers commencent une nouvelle grève de la faim.

Communiqué de grève de la faim

1978 – Nouvelles fusillades, nouvelles arrestations, mort de Willy Peter Stoll

Le 11 mai 1978, Stefan Wisniewski est arrêté à Orly, il sera extradé en R.F.A.. Le même jour, Brigitte Mohnhaupt, Peter-Jürgen Boock, Sieglinde Hofmann et Rolf Klemens Wagner sont arrêtés en Yougoslavie. Après six mois de détention, ils sont expulsés au Yémen. Le 6 septembre 1978, la police abat Willy-Peter Stoll à Düsseldorf. Stoll n’était pas armé. Le 15 septembre, Astrid Proll est arrêtée à Londres et extradée en R.F.A.. Le 24 septembre, des policiers surprennent trois militants de la RAF qui s’entraînent dans un bois près de Dortmund. Dans la fusillade, deux policiers sont tués, un autre blessé, et une militante (Angelika Speitel) est capturée. Le 1er novembre, fusillade au poste frontière germano-néerlandais, Rolf Heißler revenu clandestinement du Yémen pour reprendre la lutte dans la RAF, échappe à la police.

Willy-Peter Stoll

Début 1972 – Naissance des Revolutionäre Zellen

En 1978 survient une vague d’actions anti-impérialistes, principalement contre des installations militaires US. Les Cellules révolutionnaires (RZ) mènent de nombreuses actions contre l’industrie de l’armement et aéronautique, l’industrie nucléaire, l’industrie chimique et pharmaceutique, ainsi que le génie génétique. Entre 1978 et 1995, le groupe féministe révolutionnaire Rote Zora incendiera ou dynamitera 45 sex shops, laboratoires de recherche en génétique ou entreprises contribuant à l’oppression de la femme.

Logo RZ

Logo Rote Zora

Un communiqué des RZ

Un communiqué de Rote Zora

1979 – Nouvelles fusillades, nouvelles arrestations, mort d’Elisabeth von Dyck

La RAF exproprie avec succès deux banques en mars et avril 79. Le 4 mai, la police anti-terroriste attaque un appartement de la RAF à Nuremberg, Elisabeth von Dyck s’y trouve, sans arme et elle est abattue. Le 9 juin, Rolf Heißler tombe dans un piège de la police anti-terroriste qui lui met une balle dans la tête; il survit miraculeusement.

25 juin 1979 – Action contre le général Haig

Le 25 juin 79, le commando Andreas Baader de la RAF attaque à l’explosif, en Belgique, le général Alexander Haig, commandant en chef des forces armées de l’OTAN. L’action, qui manque de peu son but, marque le retour à l’offensive de la RAF.

Action contre le général Haig

1979-80 – Nouvelle fusillade, nouvelles arrestations

Le 19 novembre, la RAF exproprie une banque à Zurich. Dans la fusillade qui suit, la police tue une passante et arrête Rolf Klemens Wagner.

Le 5 mai 1980, arrestation à Paris de Sieglinde Hofmann et de quatre militantes du Mouvement du 2 Juin, elles seront toutes extradées vers la R.F.A.

2 juin 1980 – Dissolution du Mouvement du 2 Juin

Le 2 juin 80, une partie du Mouvement du 2 Juin se dissout pour continuer la lutte ‘dans la RAF, en tant que RAF‘ (une partie des prisonniers du Mouvement s’aligne sur cette décision et deviennent des prisonniers de la RAF comme Inge Viett, arrêtée le 2 mai 72, évadée en juillet 73 et reprise en septembre 75). Le communiqué de dissolution expose: ‘Le Mouvement du 2 juin s’est créé à l’encontre de la RAF, avec l’intention confuse de mener une ‘politique prolétarienne spontanée’. Nous avons considéré que la théorie révolutionnaire, l’analyse des conditions – seules à partir desquelles la stratégie et la tactique, la continuité et la perspective du combat, peuvent être développées – n’étaient pas importantes et nous avons ‘combattu à tort et à travers’ avec l’intention ‘d’enthousiasmer’ la jeunesse. Et c’est ainsi que nous avons déterminé notre pratique en nous posant la question: ‘qu’est-ce qui enthousiasme’, et non pas en nous posant la question de savoir où sont les véritables contradictions, les frictions dans la stratégie impérialiste que nous devons attaquer. Le mouvement était une soi-disant alternative à la RAF, en tant que possibilité pour ces camarades qui pensaient que le combat sans compromis était allé trop loin. Pendant 10 ans, cela a produit division, concurrence et désorientation dans la gauche et aussi parmi la guérilla, et cela a également ralenti notre propre processus révolutionnaire.‘ Le reste du Mouvement se disperse.

Communiqué de dissolution du Mouvement du 2 Juin

25 juillet 1980 – Mort de Juliane Plambeck et Wolfgang Beer

Le 25 juillet 80, deux militants de la RAF, Juliane Plambeck et Wolfgang Beer, perdent la vie dans un accident de voiture. En janvier 1981, Peter-Jürgen Boock est arrêté à Hambourg.

Début 1981 – Nouvelle grève de la faim, mort de Sigurd Debus

Le 2 février, 68 prisonniers détenus dans 16 prisons entament la huitième grève de la faim collective avec pour revendication le regroupement. Le 15 mars, des médecins ouest-allemands protestent contre l’isolement par une lettre ouverte, et le 16 avril 1981, Sigurd Debus, militant de la Résistance et qui avait rejoint la RAF en prison, meurt. Il était depuis le 19 mars nourri de force.

31 août 1981 – Action contre un QG de l’USAF à Ramstein

Le 31 août 1981, le commando Sigurd Debus de la RAF attaque le quartier général de l’US Air Force en Europe, à Ramstein. La RAF met en avant les mots d’ordre: ‘attaquer les centres, les bases et les stratèges de la machinerie militaire américaine’, ‘développer la résistance contre la destruction en front pour la révolution en Europe’, ‘Mener la lutte dans la métropole ensemble avec les révolutionnaires du Tiers-Monde‘.

15 septembre 1981 – Action contre le général Kroesen

Le 15 septembre, le commando Gudrun Ennslin de la RAF dresse une embuscade contre le général Kroesen, commandant des forces terrestres US en Europe (la voiture blindée du général résiste à l’impact de la roquette antichar!).

La Mercedes blindée de Kroesen

Mai 1982 – ‘Guérilla, résistance et front anti-impérialiste’

En mai 1982, la RAF rend public un document stratégique intitulé Guérilla, résistance et front anti-impérialiste. Définissant 1977 comme passage à une nouvelle étape, la RAF propose une nouvelle stratégie ‘de libération’ et la construction du front anti-impérialiste dans le centre impérialiste. Le système impérialiste, dit la RAF, est rendu instable suite à sa défaite au Viêt-Nam et l’Europe de l’Ouest est au coeur des contradictions Est-Ouest, Nord-Sud, état-société; signification de la lutte dans le centre pour la guerre de classe internationale. Ce document (qui propose aussi une analyse de la défaite de 1977) marque clairement l’abandon des catégories marxistes qui déterminaient les thèses fondatrices de la RAF. Le projet devient ouvertement subjectiviste’: on part de l’ensemble des luttes radicales contre le système (anti-guerre, anti-impérialiste, anti-patriarcale, squatts, etc.) plutôt que d’en dépasser les faiblesses; et plutôt que de dégager des axes stratégiques et de créer une véritable unité, on constitue un ‘front’ qui juxtapose les dynamiques existantes. Il n’y a plus de stratégie révolutionnaire mais une lutte contre les projets et les forces de l’ennemi (‘notre stratégie est d’être contre leur stratégie‘).

Cette pauvreté du discours de la RAF s’accompagne d’une véritable interaction avec un large mouvement de résistance anti-impérialiste, lui-même marqué par le subjectivisme. La RAF est en phase avec une nouvelle base sympathisante, active notamment dans l’aile radicale du vaste mouvement de lutte contre l’installation des missiles atomiques US Pershing en R.F.A. et, en règle générale, contre les projets de guerre visant l’URSS et qui transformeraient l’Europe centrale en champ de bataille. Le sommet de l’OTAN du 18 juin 1982 donne lieu à une grande manifestation de l’anti-impérialiste radical.

Guérilla, résistance et front anti-impérialiste

1982-1984 – Actions financières, logistiques et arrestations

Le 15 septembre, la RAF exproprie une banque à Bochum. Fin septembre, la police découvre le principal arsenal de la RAF, à Francfort. Elle y place une souricière qui permet d’arrêter, le 11 novembre 82, Brigitte Mohnhaupt et Adelheid Schulz. Le 16 novembre 1982, Christian Klar est arrêté ä Friedrichsruh.

Le 25 juin 1983 a lieu une grande manifestation anti-guerre et anti-impérialiste en R.F.A. à l’occasion de la venue du vice-président américain Georges Bush: 100.000 manifestants dont 1.500 autonomes affrontent la police.

Le 26 mars 84, la RAF exproprie une banque à Würzburg. Le 2 juillet, Helmut Pohl, Christa Eckes, Stefan Frey, Ingrid Jakobsmeier, Barbara Ernst et Ernst Volker sont arrêtés à Francfort.

Le 5 novembre 1984, la RAF exproprie une armurerie à Maxdorf et saisit 22 armes de poings (certaines seront retrouvées en décembre 85 lors de l’arrestation des militants des Cellules Communistes Combattantes).

Affiche de recherche (1983)

Décembre 1984 – Procès et grève de la faim

Le 4 décembre débute une nouvelle grève de la faim collective pour l’application de la convention de Genève. En décembre toujours, à l’occasion de leur procès, Christian Klar et Brigitte Monhaupt donnent une analyse de la bataille de 1977: en 76/77, la guérilla s’était reformée en liaison avec les luttes et les prisonniers. La ligne dure de l’Etat ouest-allemand en 77 résulte de deux facteurs. D’abord, l’Etat impérialiste optait pour des solutions militaires, depuis que la crise économique et la vague de luttes de libération dans le Tiers-Monde lui avaient fait perdre sa perte de marge de manoeuvre politique. Ensuite, la R.F.A. devait jouer un rôle dirigeant dans la constitution de Europe de l’Ouest comme base de guerre contre l’URSS et les mouvements de libération.

Le grève de la faim durera jusqu’à la mi-février.

Brigitte Monhaupt

Christian Klar

18 décembre 1984 – Echec de l’action contre l’Ecole de l’OTAN à Oberammergau

Le 18 décembre, une énorme charge d’explosifs (provenant du stock de 800 kg dérobé à Ecaussines, en Belgique, et également utilisé par les CCC) est désamorcée à la Shape School d’Oberammergau, école de formation des cadres militaires de l’OTAN. Le 15 janvier 85, les CCC attaquent une base de l’OTAN à la voiture piégée (deux soldats US blessés) et dédient cette dernière aux prisonniers de la RAF en grève de la faim.

En R.F.A., la Résistance anti-impérialiste ne cesse de se développer: il y a au milieu des années 80 plus d’un attentat par jour (par exemple l’incendie d’un bureau des services secrets US, le Military Intelligence Detachment-Bataillon le 29 décembre 1984, l’attaque à l’explosif d’une station émettrice de l’armée US à Heidelberg le 30 décembre, et d’innombrables petites actions comme l’incendie de véhicules militaires).

Janvier 1985 – Action contre Zimmerman, proposition de ‘Front de la guérilla ouest-européenne’ avec Action Directe

Le 25 janvier, le commando Elisabeth von Dyck d’Action Directe exécute le général Audran qui supervise la production et les ventes d’armes de l’Etat français et le 1er février 1985, le commando Patsy O’Hara de la RAF exécute Ernst Zimmerman, patron des patrons dans l’industrie aéronautique.

La RAF et le groupe français Action Directe publie un document commun: ‘Nous déclarons: il est aujourd’hui nécessaire et possible d’ouvrir dans les centres impérialistes une nouvelle phase du développement de la stratégie révolutionnaire authentique, et l’une des conditions à ce saut qualitatif est de créer l’organisation internationale du combat prolétarien dans les métropoles, son noyau politico-militaire: la guérilla ouest-européenne‘.

La proposition d’adhérer au ‘Front’ de la guérilla ouest-européenne’ est rejetée par le PCE(r) et les Groupes de Résistance Antifasciste du Premier Octobre (GRAPO) en Espagne ainsi que par les CCC en Belgique. Ces organisations sont basées sur les catégories du marxisme-léninisme, notamment en ce qui concerne l’analyse de classe et la nécessité d’un parti de classe. Pour elles, le devoir des révolutionnaires est de se lier au prolétariat de son pays et d’en unifier les avant-gardes sur une ligne révolutionnaire de classe. Or, le courant animé par la RAF appelait indistinctement toutes les forces d’opposition radicale ou révolutionnaire à s’articuler dans une dynamique plus ou moins commune. Il ne s’agissait donc pas de formaliser, renforcer et qualifier une unité reposant sur des caractères politiques (communauté du but et des objectifs, des principes et des méthodes, etc.) mais plutôt de se rassembler sans ligne ni projet (autre que celui de combattre le système) dans une ‘unité’ recouvrant en fait l’éclectisme social et politique justifié par l’’autodétermination des pôles de lutte‘ ou du ‘poids grandissant de la subjectivité‘.

Communiqué commun RAF-AD

Communiqué du Commando Patsy O’Hara

8 août 1985 – Action contre l’Air Base de Francfort

Le 3 juin, la RAF exproprie un transfert de fonds (butin: 157.000 Mark). Un convoyeur est blessé lors de l’opération.

Le 8 août 1985, le commando George Jackson RAF/Action Directe attaque l’Air Base qui est le plus grand aéroport militaire en dehors des USA: deux américains sont tués dans l’explosion qui fait pour plus d’un million de Mark de dégâts. Pour pénétrer dans le camp militaire, la RAF avait besoin d’un passe, et avait enlevé et abattu pour cela un simple sergent US, Edward Pimmental. En janvier 86, la RAF accepte les critiques venues du mouvement et déclare qu’il n’y avait pas de nécessité de tuer un simple soldat comme Pimmental, ‘parce qu’une telle action ne peut qu’être définie politiquement et stratégiquement et que le développement subjectif de la résistance ici et la situation objective n’y correspondent pas‘. Selon la RAF, il aurait été juste de tuer Edward Pimmental dans le Tiers-Monde, dans la résistance armée à une des multiples agressions des USA, mais erroné de tuer le même Edward Pimmental en Europe. Le fait qu’Edward Pimmental soit un lampiste ne doit pas masquer le glissement qui s’opère dans la conception de l’internationalisme de la RAF. La RAF n’est plus un détachement avancé de la grande armée des peuples en lutte contre l’impérialisme, qui porte la guerre des peuples dans les métropoles impérialistes. Elle se détermine en fonction de la société allemande, mais ce glissement s’accompagne d’une autre évolution: l’abandon du marxisme. Le recentrage ‘national’ de la RAF se produit au moment où la RAF a cessé d’analyser la société allemande en terme de classes et de lutte de classe, mais avec des catégories subjectivistes qui tournent vite en rond (il faut lutter avec ceux qui veulent lutter).

L’Air Base de Francfort

Janvier-février 1986 – Congrès anti-impérialiste de Francfort

Du 31 janvier au 4 février 1986 se tient le grand Congrès de la résistance anti-impérialiste et anticapitaliste en Europe de l’Ouest à Francfort. De 2.000 à 3.000 congressistes (parfois cagoulés), majoritairement des autonomes, des anti-impérialistes, des sympathisants de la RAF, mais aussi de nombreux délégués de presque tous les forces révolutionnaires européennes, débattent des perspectives du mouvement révolutionnaire sous la protection d’un service d’ordre efficace. Le Congrès de Francfort (dont la résolution finale appelait à combattre l’OTAN comme force d’agression vers l’extérieur et de contre-insurrection vers l’intérieur), et l’offensive politico-militaire qui suivit, peuvent être considérés comme le sommet du mouvement de résistance anti-impérialiste en Europe.

Interview de la RAF à la revue clandestine Zuzammen Kämpfen

9 juillet 1986 – Action contre Beckurts, arrestations

Le 9 juillet 1986, le commando Mara Cagol de la RAF exécute Beckurts, responsable de la recherche et des techniques chez Siemens et de la Commission de travail à l’énergie atomique de l’Union des industriels allemand.

L’action de la Résistance ne faiblit pas: le 8 septembre par exemple, le siège de la Sûreté de l’Etat est détruit par l’Unité Combattante Christos Tsoutsouvis (un militant grec à Athènes tué par la police en octobre 77 lors d’une action de protestation contre le massacre à Stammheim), et le 15 septembre, les immeubles où sont conçus des chasseurs de l’aviation militaire sont dynamités par l’Unité combattante Anna Maria Ludmann.

Le 2 août 1986, Eva Haule-Frimpong (militante de la RAF), Luitgard Hornstein et Christian Kluth (militants de la Résistance luttant avec la RAF dans le cadre du Front) sont arrêtés à Rüsselsheim.

Action contre Beckurts

10 octobre 1986 – Action contre von Braunmühl

Le 10 octobre, le directeur politique du ministère des affaires étrangères, von Braunmühl, est exécuté par le commando Ingrid Schubert de la RAF: ‘Notre attaque vise l’appareil d’Etat de R.F.A. agressif dans sa fonction d’Etat noyau de la formation politique de l’Europe de l’Ouest dans la stratégie de guerre impérialiste‘.

Le 16 novembre, le siège d’IBM est détruit par l’Unité combattante Hind Alameh, et le 19 décembre, l’Unité combattante Rolando Olalia attaque la première société spécialisée dans le crédit à haut taux d’intérêts aux pays sous-développés. Le 20 décembre a lieu une importante manifestation en défense de la Hafenstraße, grande rue de Hambourg dont les maisons sont occupées, sous le mot d’ordre ‘Un seul front’: regroupement des prisonniers; libération de Gunther Sonnenberg; la Hafenstrasse reste!‘. Le lendemain, l’Unité combattante Mustafa Aktas (Celal) attaque la Fondation Friedrich Ebert, une école de cadres pour la contre-insurrection — une des nombreuses actions de la Résistance.

Action contre von Braunmühl

Communiqué du Commando Ingrid Schubert

Début 1987 – AD démantellée, les RZ touchées par la répression

Le 21 février 1987, le démantèlement d’Action Directe a lieu en France. La même année, une première vague d’arrestations frappe les RZ. En 1986-87 les Cellules Révolutionnaires avaient mené des actions directes contre les différents rouages ou acteurs de cette politique en Allemagne: attentats contre les juges (blessés délibérément aux jambes) et les tribunaux condamnant les réfugiés, contre la police des étrangers et ses représentants, contre la police des frontières qui pourchasse les sans-papiers et contre le siège social de la Lufthansa qui procède aux expulsions…). Les RZ surmonteront cette vague d’arrestations et poursuivront la guérilla.

20 septembre 1981 – Echec de l’action contre Tietmeyer, communiqué commun avec les Brigades Rouges-PCC

Le 20 septembre 1988, à l’occasion d’une tentative d’exécution de Hans Tietmeyer, secrétaire d’Etat du ministère des finances, par son commando Khaled Aker, la RAF rend public un document commun avec les Brigades Rouges-PCC: ‘Le saut à la politique du front est possible et nécessaire pour les forces révolutionnaires, afin d’amener la confrontation à l’acuité adéquate. Pour cela, toutes les positions idéologiques-dogmatiques existantes encore à l’intérieur des forces combattantes et du mouvement révolutionnaire doivent être combattues et dépassées, parce qu’elles divisent les combattants, et parce que ces positions ne peuvent pas atteindre le niveau dont on a besoin pour amener les luttes et les attaques à leur acuité politique nécessaire. L’attaque unitaire des lignes stratégiques de la formation de l’Europe de l’Ouest ébranle le pouvoir impérialiste. Organiser la lutte armée en Europe de l’Ouest. Construire dans l’attaque l’unité des forces révolutionnaires combattantes: organiser le front. Lutter ensemble‘.

Communiqué commun RAF / BR-PCC

Février-mai 1989 – 10ème grève de la faim

Le 1er février 1989 commence la 10ème grève de la faim des prisonniers de la RAF pour le rassemblement en un ou deux groupes, pour la libération des prisonniers malades et pour la libre communication avec des groupes sociaux extérieurs. Le mouvement bénéficie d’un large soutien. Les squats de la Hafenstraße de Hambourg, qualifiés de base pour la RAF, sont attaqués par 1.000 policiers. La grève de la faim se termine le 12 mai.

30 novembre 1989 – Action contre Herrhausen

Le 30 novembre 89, le président de la Deutsche Bank, Alfred Herrhausen, est tué dans une embuscade à l’explosif contre sa voiture blindée par le commando Wolfgang Beer de la RAF.

Action contre Herrhausen

1989-1990 – Vague d’arrestations dans l’ex-RDA

Pendant des années, la R.D.A. avait accueilli d’anciens membres de la RAF qui avaient quitté la RAF soit pour des raisons idéologiques (divergences avec la nouvelle ligne de 1982), soit par volonté d’abandonner la pratique révolutionnaire. La R.D.A. leur avait fournit la possibilité de refaire leur vie (nouvelle identité, logement et emploi). En juin 90, l’annexion de la R.D.A. permet aux services spéciaux de la R.F.A. d’arrêter Suzanne Albrecht, Ralf Baptist Friedrich, Sigrid Sternebeck, Inge Viett, Werner Lotze, Christine Dümlein, Ekkehard von Seckendorff-Gudent, Monika Helbing, Silke Maier-Witt et Henning Beer. Les anciens de la RAF sont soumis au chantage: soit ils fournissent suffisamment d’informations pour charger les militants de la RAF, soit ils iront eux-mêmes en prison pour la vie. La majorité refuse, certains acceptent.

27 juillet 1990 – Echec de l’action contre Neusel

Le 27 juillet 90, Hans Neusel, expert en répression de soulèvement et secrétaire d’Etat du ministère de l’intérieur, est attaqué par le commando José Manuel Sevillano (prisonnier des GRAPO mort lors d’une grève de la faim) de la RAF. Neusel (qui en réchappe) était l’un des membres les plus dynamiques dans les rencontres du TREVI, organe de coordination internationale contre le terrorisme. Dans le communiqué, la RAF explique que ‘l’impérialisme a gagné la guerre froide‘, que la chute ‘du bloc socialiste et ainsi de sa fonction historique pour le processus de libération des trois continents a conduit à une nouvelle stabilisation du bloc formé par le pouvoir impérialiste‘.

Communiqué du Commando José Manuel Sevillano

13 février 1991 – Action contre l’ambassade américaine

Le 13 février 91, le commando Ciro Rizatto de la RAF attaque à la mitrailleuse lourde l’ambassade US à Bonn, ‘parce que les USA ont pris dès le départ dans la guerre de destruction contre le peuple irakien le rôle de conducteur‘.

15 septembre 1991 – Action contre Rohwedder

Le 1er avril 1991, Detlev Rohwedder, chef de la ‘Treuhand’ (l’organe de privatisation et de ‘dégraissage’ des entreprises de l’ex-R.D.A.), est exécuté par le commando Ulrich Wessel de la RAF qui affirme la nécessité d’opposer au ‘saut de la bête impérialiste le propre saut révolutionnaire’: ‘Qui ne combat pas meurt à petit feu, la liberté n’est possible que dans la lutte pour la libération‘.

10 avril 1992 – Premier pas vers la liquidation

Mais la chute du bloc socialiste et la fin de la vague des mouvements de libération nationale progressistes dans le Tiers-Monde pose un problème fondamental à la RAF. Comme elle a abandonné les catégories marxistes qui fondent la légitimité et la nécessité d’un combat révolutionnaire sur base des contradictions de classe, elle peine à trouver un fondement et un projet stratégique. Le 5 janvier 92, le responsable du parti libéral (FDP) Kinkel fait une ouverture pour une ‘solution négociée’. Le 10 avril, la RAF annonce qu’elle arrête l’escalade militaire contre l’état, et qu’elle cessera d’attaquer des responsables de l’économie ou de la politique. La raison annoncée par la RAF est que l’ouverture d’un débat sur les perspectives est nécessaire, et que l’escalade militaire n’aurait dans ce cadre que peu de sens. Les réactions à cette annonce sont négatives chez les autres forces de guérilla révolutionnaire. Elles s’expriment dans plusieurs documents: Une perspective révolutionnaire en Europe du collectif ‘Wotta Sitta’ des prisonniers des BR, Liquidation ou redéfinition? du PCE(r), Une déclaration injustifiable des prisonniers des CCC. Ces critiques remarquent surtout ce qui est annoncé ‘en creux’ dans le texte: l’abandon de la lutte armée et du projet révolutionnaire au profit d’une vague pratique ‘produisant’ du lien social. Le document de 82 montrait qu’avec l’abandon ouvert des catégories marxistes, la RAF cherchait à fusionner avec le courant ‘alternatif’. En 1982, la chose devait se faire en liquidant le courant (la RAF écrivait ‘il ne s’agit plus de ‘changer le système’, de ‘modèles alternatifs’ à l’intérieur de l’État, tout cela est devenu complètement grotesque‘). Dix ans plus tard, c’est par la liquidation de leur organisation que les militants de la RAF imaginent cette fusion.

Août 1992 – ‘Nous devons trouver du neuf’, second pas vers la liquidation

En août 92, nouveau texte de la RAF, Nous devons trouver du neuf: ‘Aujourd’hui beaucoup ont peur de l’existence, la destruction du social dans la société en est arrivée à une nouvelle dimension, l’explosion de l’autodestruction, de la violence des gens entre eux/elles. Du manque d’espoir et de l’absence de perspective pour en arriver à des changements positifs, de plus en plus de gens se réfugient dans l’alcool et la drogue, et les taux de suicides augmentent. La frustration, la peur et l’agression se dirigent vers soi-même ou vers d’autres qui sont encore plus bas dans la hiérarchie sociale. Ce sont les nazis contre les gens d’autres couleurs, d’autres nationalités, les homosexuels et les lesbiennes, l’accroissement de la violence contre les femmes, les enfants et les personnes âgées. Les campagnes médiatiques contre les réfugié/e/s et le matraquage des antifascistes dans les rues montrent clairement les intérêts de l’Etat et du Capital à canaliser les mécontentements croissants dans une mobilisation raciste et réactionnaire. A rencontre de cela il est difficile de cerner la possibilité de développer et d’imposer des réponses ayant du sens, et justes, dans la construction de liens solidaires et d’auto-organisation par en bas, partant de la réalité de la vie quotidienne des gens. (…) [la] destruction du social est une des bases essentielles pour le pouvoir et la continuation du système capitaliste. Un contre-pouvoir n’existera que s’il propose une alternative à la normalité des dominants dans cette société et au système. Cela signifie essentiellement: opposer une organisation à la destruction du social, l’aliénation et le chacun pour soi, et en arriver à des espaces sociaux où la solidarité soit vaste et d’où beaucoup prennent en main la responsabilité de développements sociaux – ce que nous appelons processus d’appropriation sociale. De cela vient une force d’attraction, car la lutte pour le social entre les gens est l’alternative sensible à la solitude dans le système, aux fascistes‘. Et de conclure: ‘La voie de la libération passe par le processus d’appropriation sociale, qui deviendra une partie de la nouvelle lutte internationale pour le bouleversement‘.

Les réactions à ce texte sont négatives de la part des forces et prisonniers de la guérilla en Europe.

Nous devons trouver du neuf (extraits principaux)

Collectif des prisonniers des CCC: ‘Une déclaration injustifiable’

1992-1993 – Fondation et démantellement de l’AIZ

En Allemagne apparaît une nouvelle organisation, les Cellules anti-impérialistes (AIZ), qui ne critiquent pas (encore) les nouveaux choix de la RAF mais qui réaffirme la nécessité de la lutte armée pour la lutte anti-impérialiste. Les AIZ affirmeront par la suite que la thèse de la RAF n’est pas suivie et prennent la responsabilité d’assurer la continuité de la politique menée par la RAF de 1972 (libération d’Andreas Baader) à 1991 (mitraillage de l’ambassade US). En fait, les AIZ reprennent la ligne de 1982 (frontisme anti-impérialisme) plutôt que celle de 1972 (anti-impérialisme comme dimension stratégique de la lutte de classe). Elles poussent même le frontisme anti-impérialisme (qui définit l’unité non par le projet social mais par l’ennemi commun: l’impérialisme) jusqu’à trouver un caractère révolutionnaire au mouvement islamique. Cette dérive idéologique isolera les AIZ aussi bien du côté marxiste que du côté subjectiviste (à commencer, bien entendu, par les forces autocentrée sur la lutte anti-patriarcale). Une vague d’arrestations démantèlera les AIZ après quelques actions (contre le siège de l’association patronale de la métallurgie en novembre 93 et celui de la CDU en juin 94).

Un communiqué de l’AIZ

30 mars 1993 – Action contre la superprison de Weitestadt

Le 30 mars 1993, le commando Katharina Hammerschmidt de la RAF fait sauter la superprison en construction de Weiterstadt avec plus de 500 kilos d’explosifs. Une partie des prisonniers de la RAF critique cette action ‘apolitique’ qui ne vise qu’à faire pression pour que les prisonniers soient libérés en échange de l’abandon de la lutte armée.

Action contre la superprison de Weitestadt

Communiqué du Commando Katharina Hammerschmidt

27 juin 1993 – Fusillade à Bad Kleinen, mort de Wolfgang Grams

Un agent parvient à s’infiltrer parmi les sympathisants proches la RAF. Il est à l’origine de l’arrestation à Bad Kleinen de Brigitte Hogefeld, et du meurtre de Wolfgang Grams. Celui-ci avait tué un policier dans la fusillade et avait lui-même été blessé. Gisant à terre, blessé, menotté et désormais sans arme, il est exécuté d’une balle dans la tête.

Wolfgang Grams

Novembre 1993 – Positionnement et grève de la faim des prisonniers

En novembre 1993, la majorité des prisonniers de la RAF critique la RAF (et quelques prisonniers) pour sa tentative de deal avec l’Etat. L’avocat Ströbele aurait discuté avec le chancelier Kohl, et avec des patrons pour que ceux-ci fassent pression en faveur d’un accord politique (arrêt de la lutte armée et libération des prisonniers). La RAF écrit en mars 1994 dans un communiqué qu’il n’a jamais été question de faire un deal avec qui que ce soit, que seul le rapport de force peut libérer les prisonniers. Elle développe à nouveau le thème des ‘contre-pouvoirs sociaux’

Communiqué de la RAF de 1994

20 avril 1998 – La liquidation

Le 20 avril 1998, la RAF rend public un texte daté de mars et intitulé: Pourquoi nous arrêtons. C’est le point final de la dérive subjectiviste: au lieu de revenir à la position d’avant-garde de la lu tte révolutionnaire qui était la sienne en 72, la RAF se dissout dans le courant alternatif. Des conceptions frontistes énoncées par la RAF en 1982 à la proclamation du ‘Front de la guérilla ouest-européenne’ en 1985 pour aboutir au ‘contre-pouvoir à la base’ en 1989, le subjectivisme, qui s’était exprimé d’abord dans le militarisme, sombre dans l’opportunisme et la capitulation.

Pourquoi nous arrêtons

Lettre de Rolf-Clemens Wagner sur la liquidation

15 septembre 1999 – Mort d’Horst-Ludwig Meyer et dernières arrestations

Le 20 juillet 1999, la police trouve des empreintes ADN de militants de la RAF arrêtés sur un lance roquette qui a servi à une attaque de transport de fonds (butin: un million de Mark). Le 15 septembre 1999, Horst-Ludwig Meyer est tué à Vienne dans une fusillade avec les policiers qui viennent l’arrêter. Andrea Klump est aussi arrêtée; elle collaborera avec la police peu après.

Horst-Ludwig Meyer abattu par la police autrichienne

La Résistance subira en général un grand recul à la fin des années 90. Fin 1999, trois vagues d’arrestations démantèlent les RZ qui auront revendiqué plus de 140 actions armées. La lutte armée n’a cependant jamais cessé en R.F.A., elle prend actuellement la forme d’une guérilla diffuse qui s’exprime par des dizaines de petites actions (incendies de sièges d’entreprises d’administration de voitures de fonction, etc.) menées par de petites organisations comme le groupe Klasse gegen Klasse, l’Autonome Miliz, la Militante Antimilitaristische Initiative, et le Militante Gruppe.

6 juin 2015 – Nouvel avis de recherches

Le 6 juin 2015, suite à une attaque manquée contre un fourgon blindé dans la banlieue de Brême, le parquet de Verden affirme avoir relevé l’ADN de trois membres toujours recherchés de la RAF: Daniela Klette, Ernst-Volker Wilhem Staub, et Burkhard Garweg. Ils étaient déjà recherchés leur participation supposée à l’attaque contre le prison de Weiterstadt et contre le transport de fonds le 30 juillet 1999.

27 févier 2024

Arrestation de Daniela Klette à Berlin.

17 octobre 1977-… – Ne rien oublier! Ne rien pardonner!

Sur la tombe

Le mardi 7 juillet 2009, une délégation de notre Secours Rouge/APAPC a été déposer fleurs, drapeau et cigarette sur la tombe des camarades assassinés à Stammheim.

La mort de Benno Ohnesorg
Rudi Dutschke
Incendie à Francfort
Manifestation contre Springer
Procès à Francfort
Au camp du FPLP
Affiche de recherche
Jaquette du livre 'Conception de la guérilla urbaine
Petra Schelm
Affiche militante
Action contre une base de l'armée à Francfort
Action à Münich contre la police et la justice
Campagne de presse contre la RAF
Arrestation de Baader
Action palestinienne à Münich
Ulrike Meinhof
Affiche de solidarité
Affiche pour le procès
Holger Meins
Cadavre de Holger Meins
Affiche pour Holger Meins
La prison de Stammheim
Symbole du Mouvement du 2 Juin
Ambassade d'Allemagne
Genscher à Stockholm
Stammheim
Ulrike Meinhof
Brigitte Monhaupt
Buback
Klaus Croissant
Action contre Jurgen Ponto
Hans Martin Schleyer
Le Boeing 737
La fedayin survivante
Andreas Baader et Gudrun Ensslin
Andreas Baader et Gudrun Ensslin
Jan-Carl Raspe
Irmgard Möller
Les funérailles à Stammheim
Affiche de soutien
Willy-Peter Stoll
Logo RZ
Logo Rote Zora
Action contre le général Haig
La Mercedes blindée de Kroesen
Affiche de recherche (1983)
Brigitte Monhaupt
Christian Klar
L'Air Base de Francfort
Action contre Beckurts
Action contre von Braunmühl
Action contre Herrhausen
Action contre la superprison de Weitestadt
Wolfgang Grams
Horst-Ludwig Meyer abattu par la police autrichienne
Sur la tombe

Présentation du dossier

Jeudi 4 mars, 22 personnes sont interpellées dans une vaste offensive visant la communauté kurde à travers toute la Belgique. Après auditions, la police fédérale a délivré huit mandats d’arrêts sous la qualification d’appartenance à un groupe terroriste: le PKK qui a été placé sur la liste noire des ‘organisations terroristes’ du gouvernement US et de l’UE.

Très vite, la communauté kurde s’est mobilisée contre l’attaque portée à ses organisations et associations représentatives. Des forces progressistes en Belgique (essentiellement turques et belges) se sont immédiatmement solidarisées avec les Kurdes. La question des nouvelles lois anti-terroristes et des ‘listes noires’ se trouve ainsi une nouvelle fois posée en Belgique. Tout comme se trouve une nouvelle fois posée la question de la collaboration judiciaire et policière entre les autorité belges et les tortionnaires d’Ankara/

Notre Secours Rouge a fait partie des forces qui ont immédiatement manifesté leur solidarité avec les militants kurdes arrêtés. Ce dossier servira d’appui documentaire à la campagne de solidarité avec ces militants.

L’affaire au jour le jour

3 avril: Deuxième grande manifestation à Bruxelles

Les Kurdes sont venus des quatre coins d’Europe à l’appel de la Fédération des associations kurdes, pour dénoncer notamment les opérations menées par la police belge il y a tout juste un mois à l’encontre de la télévision ROJ-TV. Il y a d’ailleurs eu un peu d’agitation avant le début de la manifestation, lorsque des organisateurs ont reconnu parmi les policiers en civils présents certains enquêteurs de la police fédérale qui avaient opéré la descente brutale et dévastatrice au siège de ROJ-TV. Les organisateurs ont menacé de ne pas lancer le cortège tant que ces personnes étaient présentes. La police fédérale s’est faite plus discrète et le cortège a démarré.

Les 5.000 manifestants présents au début de la manifestation se sont vite retrouvés 10.000 à la petite ceinture. Comme à la manifestation du 6 mars, notre Secours Rouge a participé à la constitution dans la manifestation d’un groupe de solidarité internationaliste (photo 1). Ce groupe était ouvert par une délégation du MLKP. La manifestation a débouché au Cinquantenaire, où un podium accueillait des orateurs et des musiciens kurdes. Les manifestants ont repris les slogans, chanté et dansé devant les caméras de ROJ-TV qui organisait une émission en direct (photo 2).

La manifestation au JT de la VRT

Manifestation kurde à Bruxelles

Manifestation kurde à Bruxelles

25 mars: Six libérations

Le 25 mars, la chambre des mises en accusation a ordonné la libération sous conditions de six des huit inculpés. L’un d’entre eux n’avais pas fait appel et restera donc en prison, tout comme le dernier, qui restera sous les verrous à Charleroi. Le parquet fédéral a affirmé qu’il ne se pourvoirait pas en Cassation.

18 mars: Visite de solidarité à Roj-TV

Une délégation de militants solidaires belges et turcs s’est rendue ce jeudi au siège de ROJ-TV, la télévision kurde qui a été une des cibles de la vaste opération policière du 4 mars. La délégation a pu visiter les locaux et studios de la chaîne.

Rassemblement devant Roj-TV en mars 2010.

9 mars: Six mandats d’arrêts confirmés

Six des huit Kurdes interpellés jeudi dans le cadre d’une vaste opération policière menée en différents endroits du pays, et soupçonnés d’appartenir à une organisation terroriste, ont vu leur mandat d’arrêt confirmé. Parmi ceux-ci figurent Remzi Kartal et Zubeyr Aydar, les deux parlementaires dirigeants du Kongra-Gel, successeur du PKK. La chambre du conseil de Bruxelles a confirmé les mandats d’arrêt de cinq inculpés, dont ces deux hommes. Quant à la chambre du conseil de Charleroi, elle a confirmé un mandat d’arrêt. Deux personnes, alors qu’elles ont été libérées sous condition par la chambre du conseil de Bruxelles, seront toutefois maintenues en détention, après appel du parquet fédéral. La chambre des mises en accusation examinera le cas de ces deux personnes dans les quinze jours.

Quelques centaines de Kurdes étaient présents hier devant le palais de justice de Bruxelles pour manifester leur soutien aux inculpés. Notre Secours Rouge a assuré une présence solidaire.

7 mars 2010: Manifestation de protestation en France

Alors que des milliers de Kurdes s’étaient rassemblés la veille à Bruxelles afin de dénoncer les perquisitions et les arrestations visant le PKK en Belgique, quelques 600 personnes ont manifesté au même moment à Rennes. La manifestation, organisée par ‘La maison du peuple kurde de Rennes’ a rassemblé de nombreux militants de l’association ‘Amitiés kurdes de Bretagne’ ainsi que des personnes venant de différentes villes de l’ouest de la France. Le cortège s’est déroulé dans le calme, au son des slogans scandés par les manifestants ‘Le PKK n’est pas un parti terroriste’ et ‘Libérez nos camarades’.

6 mars 2010: Grande manifestation de protestation à Bruxelles

Entre cinq et huit mille Kurdes, venus des quatre coins de la Belgique mais aussi d’Allemagne et des Pays-Bas, ont défilé ce samedi dans les rues de Bruxelles afin de protester contre les perquisitions et les arrestations opérées jeudi dans des associations culturelles et politiques kurdes, dont la station de télévision Roj-TV, à Denderleeuw.

Huit personnes ont été inculpées pour ‘participation aux activités d’un groupe terroriste’ et placées en détention préventive. Un juge d’instruction bruxellois a délivré un mandat d’arrêt à l’encontre de sept des douze personnes qui lui ont été présentées, sur les 18 qui avaient été interpellées lors des perquisitions menées par le parquet de Bruxelles. Un juge d’instruction de Charleroi, qui dirigeait une autre série de perquisitions qui se sont également déroulées jeudi, a pour sa part placé une personne sous mandat d’arrêt sur les quatre qui lui ont été présentées. Ces huit personnes comparaîtront mardi matin, à Bruxelles et à Charleroi, devant une chambre du conseil, une juridiction d’instruction qui décidera s’il y a lieu de prolonger leur maintien en détention préventive.

Les organisateurs ont dénoncé la vague de perquisitions menée jeudi par la justice belge qui soupçonnait des membres du PKK de financer les opérations de guérilla et d’entraîner de jeunes Kurdes dans des camps, notamment situés dans l’Est de la Belgique: ‘Nous dénonçons fermement les mises en garde à vue de personnalités politiques comme Remzi Kartal et Zubeyir Aydar (deux des personnes arrêtées et inculpées ‘d’appartenance à une organisation terroriste’) dont les activités en faveur du peuple kurde sont déployées au grand jour et connues de tous: la Belgique doit mettre fin à ces agressions et les personnes mises en garde à vue doivent être immédiatement libérées. (…) Nous dénonçons ces manœuvres télécommandées par l’Etat turc et par l’OTAN qui font du gouvernement belge le complice de l’Etat turc’.

Dans la manifestation figurait un groupe de militants turcs, belges et iraniens solidaires, parmi lesquels une délégation de notre Secours Rouge (photo du bas).

Manifestation en soutien aux kurdes à Bruxelles

Manifestation en soutien aux kurdes à Bruxelles

4 mars 2010: Opération policière en Belgique

Jeudi 4, 22 personnes sont interpellées dans une vaste offensive visant la communauté kurde à travers toute la Belgique. Après auditions, la police fédérale a délivré huit mandats d’arrêts sous la qualification d’appartenance à un groupe terroriste. Les 14 autres personnes ont été relaxées. A ce moment, seule l’identité des deux leaders présumés du Kongral-gel, successeur du PKK, a été rendue publique. Il s’agit de Zubeyir Aydar et de Remzi Karal. Il semblerait d’ailleurs que la Turquie ne va pas tarder à demander leur extradition.

Un rassemblement spontané s’est formé autour du bâtiment de la télévision kurde Roj-TV perquisitionnée à Denderleuw, entrainant des heurts entre les manifestants kurdes et les forces de l’ordre. Une policière a été blessée d’un jet de pierre devant le siège de la télévision kurde. 300 Kurdes avaient forcé le cordon de police autour du bâtiment et se sont affrontés aux policiers. Une cinquantaine de policiers de la police judiciaire fédérale de Bruxelles ont été appelés en renfort pour libérer leurs collègues. Ils ont fait usage d’un canon à eau.

Lors des perquisitions, les enquêteurs auraient saisi de faux documents et d’importantes sommes d’argent. La justice belge soupçonne plusieurs personnes de diriger des ‘réseaux terroristes’, de former des jeunes d’origine kurde dans des camps en Belgique ainsi que le financement occulte de plusieurs cercles kurdes.

A Roj-TV plus de 200 ordinateurs ont été saisis par la police, ainsi qu’un grand nombre de clés USB, de Flash Disk et jusqu’à la machine à faire des sous-titres… La police a également saisi toutes les archives digitales de la télévision. Seule une partie a pu être sauvée à l’aide de back-ups – mais c’est l’équivalent de quatre années de travail de digitalisation d’archives qui a disparu.

Lors de la perquisition, les policiers se sont d’abord rendus dans le local technique pour arracher les câbles qui permettaient à la télévision d’émettre. Puis, ils ont envahi le bâtiment de la télévision, les studios de Radio Mésopotamie et ceux de Sterk Production. Roj-TV a perdu pour environ un million deux cent mille d’euros de matériel dans cette attaque. Les bénévoles qui l’animent ont pu recommencer rapidement les émissions au moyen d’ordinateurs portables, mais la télévision travaille bien en deçà de son niveau normal.

Roj-TV avait déjà été la cible de le justice allemande en juin 2008 (on sait les liens politico-économiques étroits entre la RFA et la Turquie). Mais l’interdiction de Roj-TV par le Ministère de l’Intérieur allemand a été levée par la Cour de grande instance de la RFA en février 2010. Les pressions turques s’expliquent par la grande influence de Roj-TV chez les Kurdes. Ses émissions retransmises par satellites sont les plus écoutées au Kurdistan. Elles contribuent à faire vivre la langue kurde qui reste interdite d’enseignement.

Descente policière à Roj TV

28 février: Opération policière en Italie, manifestation en France

En plus des onze personnes interpellées par la Sous-direction antiterroriste dans le sud de la France dans le cadre d’une enquête préliminaire du parquet de Paris visant le PKK, la police italienne a interpellé 69 personnes dont six Français dans la région de Pise, dans la même affaire.

Suite aux arrestations survenues en France, un millier de Kurdes ont manifesté dans les rues de Marseille pour protester contre la répression policière (photo). Les manifestants ont défilé derrière une grande banderole rouge et noire barrée de la mention ‘Solidarité internationale: libérez nos camarades kurdes’. Ils ont entonné ‘L’Internationale’ et scandé des slogans, tels que ‘Solidarité politique pour le Kurdistan’ ou encore ‘Le peuple kurde n’est pas un peuple terroriste’.

Manifestation en soutien aux kurdes en France

26 février: Opération anti-PKK en France

Une série de perquisitions se sont déroulées dans quatre villes du sud de la France dans le cadre d’une enquête sur le PKK. Les recherches portaient sur les activités de recrutement et la formation de jeunes militants du PKK. Un ‘camp d’entraînement’ aurait été localisé près de Millau, dans le courant de l’année dernière. L’enquête aurait également mis en évidence des contacts entre les membres du PKK en France avec des militants en Allemagne, en Belgique et en Italie notamment. Onze personnes ont été arrêtées, de nationalité turque pour la plupart mais également française, ont été interpellés à Marseille, Draguignan, Montpellier, Grenoble et dans une ferme sur le plateau du Larzac qui aurait servi de camp d’entraînement aux jeunes Kurdes voulant se rendre dans la guérilla au Kurdistan. Ils ont été placés en garde à vue dans ces différentes villes.

Des perquisitions ont eu lieu dans des sièges d’associations à Marseille et à Montpellier. Trois armes de poing, un fusil à pompe, de la documentation et du matériel informatique auraient été saisis. Les onze personnes devaient être transférées en région parisienne dans les locaux de la SDAT ce week-end avant une éventuelle mise en examen mardi.

Les inculpés

Zubeyir Aydar

Zubeyir Aydar, parlementaire, membre de la direction du Congrès du Peuple du Kurdistan (Kongra-Gel), successeur du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Remzi Kartal

Remzi Kartal, parlementaire, membre de la direction du Congrès du Peuple du Kurdistan (Kongra-Gel), successeur du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Les noms des autres inculpés ne nous sont pas encore connus.

Background 1: Brève histoire du Kurdistan

L’histoire du peuple kurde en tant que groupe ethnolinguiste débute dans le sud du Caucase. L’aire géographique dénommée Kurdistan est connue par plusieurs termes apparentés au mot Kurde au cours de l’Antiquité. Les Sumériens l’appelaient Kur-a, Gutium ou encore le pays de Karda; les Élamites, Kurdasu; les Akkadiens, Kurtei; les Assyriens, Kurti; les Babyloniens, Qardu; les Grecs, Carduchoi et les Romains, Corduene. La terminaison en -stan signifie dans les langues iraniennes ‘pays de’.

Carte du Kurdistan

Les plus anciennes dynasties kurdes connues sous autorité musulmane (du Xe au XIIe siècle) sont les Hasanwayhides, les Marwanides et les Shaddadides. Les principautés kurdes sont annexées par les peuples d’Asie centrale au cours de leurs conquêtes, et intégrées aux territoires contrôlés par les seldjoukides. En 1171, Saladin, issu de la dynastie kurde des Ayyoubides, renverse les califes fatimides et prend le pouvoir avec le titre de Sultan. Le Kurdistan perd alors toute particularité et est intégré au califat, englobant l’Égypte, la Syrie, le Kurdistan et le Yémen. Après les invasions turco-mongoles, le Kurdistan retrouve une partie de son autonomie, mais est morcelé en une série de petits états appelés émirats. La bataille de Chaldiran en 1514 est une date importante dans l’histoire kurde, marquant l’alliance des Kurdes avec les Turcs. Le Sharafnameh de 1597 est le premier récit de l’histoire kurde.

À partir du XXe siècle, l’histoire kurde est marquée par une montée de la prise de conscience d’une identité nationale se centrant sur le but d’un Kurdistan indépendant tel que prévu dans le Traité de Sèvres en 1920 sur les restes de l’Empire ottoman détruit, comme pour les autres peuples de la région. Mais par le traité de Lausanne de 1923, le Moyen-Orient est divisé en plusieurs pays qui ne prennent pas en compte le droit des Kurdes à disposer de leurs terres. En effet, d’une grande importance géopolitique dans la région, le Kurdistan est également riche en pétrole et en eau. Le Royaume-Uni et la France se voient confier des mandats sur les nouveaux États: sur l’Irak pour la première, la Syrie et le Liban pour la seconde. Les populations, notamment kurdes, ne tarderont pas à se révolter contre la nouvelle domination européenne. La Royal Air Force rase différents villes et villages kurdes. En 1925, une arme chimique, l’ypérite, est utilisée sur la ville kurde de Souleimaniye. Les deux tiers de la population sont atteints par les effets du gaz.

Cinquante ans plus tard, le 11 mars 1974, Saddam Hussein accorde une autonomie relative au Kurdistan, avec la ‘Loi pour l’autonomie dans l’aire du Kurdistan’ qui stipule notamment que ‘la langue kurde doit être la langue officielle pour l’éducation des Kurdes’. Les relations avec les Kurdes d’Irak se dégradent considérablement par la suite, débouchant sur le massacre de dizaines de milliers de kurdes.

La situation en Turquie

À la création de la République turque en 1923 par Mustafa Kemal Atatürk, les autorités interdisent la langue et les noms de famille kurdes. Parler la langue kurde est un acte interdit. Le mot ‘kurde’ lui-même est interdit et les Kurdes sont désignés par l’expression ‘Turcs des montagnes’. Face à cette négation du fait kurde et de l’identité kurde, les Kurdes se sont soulevés à plusieurs reprises. Les soulèvements ont été violemment réprimés par l’armée turque.

Le dernier soulèvement en date contre la Turquie est le fait du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Ce soulèvement qui prend la forme d’une guérilla débute en 1984. Au total, l’insurrection et la répression de l’insurrection a fait plus de 37.000 morts dans la région. Bien que l’état d’urgence ait été levé au Kurdistan, la situation des Kurdes n’a pas beaucoup évolué. De nombreux dirigeants kurdes sont en prison et les milliers de déplacés lors de la répression des années 1990 ne sont pas autorisés à regagner leurs villages. Les assassinats politiques et les exécutions sommaires de militants ou de civils kurdes se poursuivent. Depuis 1984, 3.000 villages auraient été détruits par l’armée turque. L’existence du peuple kurde et de sa culture ne sont toujours pas reconnues par la Constitution turque. Le 11 décembre dernier, la Cour constitutionnelle turque a décidé à l’unanimité la fermeture du parti pro-kurde, le DTP, considéré comme un ‘foyer d’activités préjudiciables à l’indépendance de l’Etat et à son unité indivisible’. Des dizaines de parlementaires, de maires, de conseillers communaux ont été arrêtés. Les élus de l’ex-DTP ont également confirmé, vendredi, leur décision de rallier le parti désigné pour la succession: le Parti pour la paix et la démocratie (BDP). Pour la sixième fois en vingt ans, le mouvement de la gauche légale kurde renaît sous un nouveau sigle.

La situation en Irak

Le régime de Saddam Hussein a commis de nombreux massacres contre les Kurdes d’Irak. En 1988, Hussein utilise des armes chimiques contre la ville d’Halabja dont beaucoup de victimes étaient des femmes et des enfants. Les Kurdes obtiennent une autonomie de fait lors de la Guerre du Golfe de 1991 sur une faible partie de leur territoire. En mars 1991, une insurrection renverse le régime baasiste. Deux régions autonomes se constituent en un état fédéré en août 1992 grâce à la protection des États-Unis. La première autour d’Erbil est dirigée par le Parti démocratique du Kurdistan (PDK). La seconde autour de Souleimaniye, est sous la direction de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK). L’Union est dirigée par Jalal Talabani. Les élections suivant le renversement du régime de Saddam Hussein donneront, dans le nord de l’Irak plus de 95% des votes à la coalition formée par les deux partis kurdes. Jalal Talabani est devenu le premier président de l’Irak post-Hussein. Un accord d’unification entre les deux administrations est signé le 16 janvier 2006. Ensuite, le 7 mai 2006 un Gouvernement régional du Kurdistan est inauguré. Il a pour Premier ministre Nechirvan Idris Barzani. En vertu de la constitution irakienne, ce gouvernement a une autonomie législative sur son territoire au niveau de certaines compétences qui lui sont accordées au sein d’un Irak fédéral. Les deux plus grandes villes du Kurdistan irakien de Mossoul et Kirkouk, à forte population kurde, sont cependant laissées en dehors de cet ‘État fédéré’, jusqu’à ce qu’un recensement et des élections soient organisés par le gouvernement Irakien.

La situation en Iran

Juste après la seconde guerre mondiale, les kurdes d’Iran proclament une république kurde indépendante à Mahabad entre 1946 et 1947. En Iran, les régions kurdes de l’Ouest et du Nord-est sont surveillées par l’armée et des Kurdes sont en prison pour des raisons politiques. Cependant, la langue kurde est officiellement reconnue et au Parlement siègent des députés kurdes. Une opposition spécifiquement kurde au régime islamiste est très active. Ses principales organisations sont le Komalah et le PJAK, très proches du PKK, qui mènent une guerre de guérilla.

La situation en Syrie

La population kurde de Syrie représente 6% de la population totale; elle est en partie issue de l’exode des Kurdes de la Turquie entre 1924 et 1938 suite à la répression kemaliste. Elle est regroupée au nord-est du pays, dans la province d’Alep, le Jazirah et la banlieue de Damas. La partie syrienne du Kurdistan est sous contrôle de l’armée depuis les soulèvements qui se sont produits en 2004 et 2005.

La situation en exil et en émigration

Il y a un million de Kurdes émigrés et exilés en Europe. Depuis 1995 un parlement en exil a été mis en place.

Manifestation kurde en France

Background 2: Brève histoire du PKK

Le 27 novembre 1978, Abdullah Öcalan et une quinzaine de personnes participent à une réunion qui entérine la création officielle du Parti des travailleurs du Kurdistan (Partiya Karkerên Kurdistan). À sa création, il visait l’indépendance des territoires à population majoritairement kurde se situant dans le sud-est de la Turquie, région constituant une partie du Kurdistan. Le PKK entame la lutte armée en 1984. Face à la politique oppressive turque et son refus de reconnaître aux Kurdes la légitimité d’une identité culturelle à part entière et d’une autonomie administrative, nombre de jeunes s’engagent dans le combat et la guérilla s’intensifie dès le début des années 1990.

L’influence du PKK est allé croissante et, en 1991, il contrôlait une large portion du sud-est anatolien. C’est à cette époque que se déchaîne la répression de l’armée turque qui vide quelque 4.000 villages de leurs habitants pour couper le PKK de ses soutiens dans la population et, par la même occasion, de ses circuits de ravitaillement clandestins. L’armée utilisera aussi des milices locales, des organisations fascistes et des réseaux mafieux comme escadrons de la mort. On estime à 37.000 le nombre des victimes de la guerre.

Combattantes du PKK

Seul le président turc Turgut Özal a entamé une rupture avec la politique kémaliste de son pays et proposé des solutions politiques, notamment une meilleure représentation des Kurdes en politique, l’amnistie des membres du PKK et une certaine autonomie du Kurdistan. Öcalan, en relation directe avec Özal, proposera un premier cessez-le-feu en mars 1993. Un mois plus tard, le président turc meurt en emportant avec lui ses projets et le pouvoir qui prend la relève ne respecte pas la trêve: la guerre reprend.

En mai 1990, lors de son deuxième congrès, le PKK décide de resserrer les liens avec Dev-Sol. Les relations avec les Kurdes irakiens sont ambigües: si des bases du PKK ont pu être installées dans le Nord de l’Irak au bénéfice d’une autonomie de fait depuis la Première guerre du Golfe (1991), les partis kurdes irakiens ont toujours cherché à garder leurs distances avec le PKK, sans doute pour éviter de devenir les cibles du feu turc. Cette réserve relative de l’UPK et du PDK n’a cependant pas empêché l’armée turque d’envisager sérieusement d’envahir le Nord de l’Irak sous couvert de l’opération américaine en 2003 et en 2007, initiative qui n’a été stoppée qu’au dernier moment par Washington.

Talabani et Ocalan

Combattante du PKK

Andrea Wolf ‘Rohani’

Des cessez-le-feu ont été décrétés par le PKK de 1995, 1998, 1999 et 2006 toujours dans le but d’aboutir à la résolution du problème kurde par la voix du dialogue. Le cessez-le-feu de 1999 intervient après l’enlèvement d’Öcalan dans une opération conjointe des services secrets américain, israélien et turc. Ce dernier avait alors dans l’idée que certains groupes de combattants basés en Irak traversent la frontière pour se rendre aux autorités turques. Mais après l’arrestation le 1er septembre 1999 des sept membres du premier groupe et la condamnation de son chef Ali Sapan à dix-huit ans de prison, le conseil présidentiel met fin à ce projet.

En 2001, suite à son renoncement à la lutte armée, le PKK se renomme Congrès du Kurdistan pour la Démocratie et la Liberté (Kongreya Azad z Demokrasiya Kurdistan ou KADEK). En 2003, renonçant au léninisme, il change de nouveau son nom en Congrès du Peuple du Kurdistan (Kongra-GEL ou KGK). Le 1er juin 2004, Zübeyr Aydar proclame la fin du cessez-le-feu.

Abdullah Ocalan

Base du PKK

Drapeau du PKK

Drapeau du Kongra-GEL

En novembre 2008, les gouvernements irakien, turc et américain ont crées conjointement le comité ‘anti-PKK’ afin de contrecarrer leurs activités supposées. La rencontre s’est déroulée à Bagdad en présence du ministre turc de l’Intérieur Beşir Atalay, du Premier ministre irakien Nouri al-Maliki et de l’ambassadeur des États-Unis à Bagdad, Ryan Crocker. Le comité est dirigé par le ministre d’État pour la sécurité nationale, Shirwan al-Waïli, en collaboration avec le ministre de l’Intérieur de la région autonome du Kurdistan, Karim Sinjari.

En octobre 2009, un nouveau ‘groupe de paix’ de guérilleros se présente sans armes à la frontière entre l’Irak et la Turquie. C’est une nouvelle initiative du PKK pour favoriser une solution négociée. Quelques temps après, les autorités turques font une nouvelle fois avorter le processus de paix en procédant à l’arrestation de deux de ces guérilleros sont arrêtés pour ‘propagande séparatiste’.

Le groupe de paix

Les ‘listes noires’

Dans la foulée des attentats du 11 septembre et à l’image des décisions prises par les USA, le Conseil de l’Union, par son règlement n° (CE) n° 2580/2001, a organisé l’adoption de mesures restrictives spécifiques à l’encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Le règlement n’est que la traduction d’une résolution 1373 (2001) du 27/12/01 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, lui-même clone du règlement américain. Le jour de l’adoption du règlement, le Conseil a adopté une première ‘liste noire’ pour son exécution.

Le 27 décembre 2001, les représentants de 15 Etats réunis au sein du Conseil de l’Europe dressaient une liste de personnes, groupes et entités qu’ils accusent de terrorisme. Dans les premières listes de décembre 2001, annexées à la position commune et établie par le Conseil en exécution du règlement, apparaissent essentiellement des noms d’organisations et de personnes liés au conflit au Moyen Orient (Hezbollah, Jihad, Hamas), au conflit dans le Pays-Basque et en Irlande. Les organisation basques ayant une activité légale étaient particulièrement nombreuses sur cette liste, l’Europe cautionnant ainsi conformément à la nouvelle politique répressive de l’Etat espagnol qui entend traiter comme ‘bras légal’ d’ETA toute organisation politique revendiquant l’autodétermination du Pays-Basque.

Le 2 mai 2002, le Conseil de l’Union a inclus dans les listes établies sur base du règlement des mouvements de libération nationale et sociale qui mènent dans leur pays d’origine une lutte armée. Sont apparus sur la liste notamment: les Forces Armées révolutionnaires de Colombie (FARC), le Front Populaire pour la Libération de la Palestine (FPLP), les Brigades des martyrs Al-Aqsa (liées au Fatah), le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), le Parti/Front révolutionnaire de libération du peuple (DHKP/C), les Mujahedin-e Khalq iraniens, la New People’s Army (NPA) des Philippines et le fondateur de Parti Communiste des Philippines, le Professeur Jose Maria Sison.

Ces mouvements ne mènent des actions violentes en Europe. Plusieurs d’entre eux ont de représentants et même des bureaux de représentation officiels dans des pays de l’Union. Il ont néanmoins en commun qu’ils estiment que le régime qui règne dans leur pays ne peut être combattu que par la force. Tous ces mouvements argumentent que leurs activités se situent dans le cadre d’une lutte légitime pour la libération nationale ou sociale. Pour ce qui concerne les organisations palestiniennes, le droit international (à travers les résolutions de l’ONU) a même établi indiscutablement que le peuple palestinien est confronté à une occupation. Le même droit international reconnaît le droit de s’opposer à l’occupation, y compris par la force.

Ce genre de décision se prend sur base de dossiers secrets. Mais il est clair que la prise de position de ces organisations, en Turquie, constitue la raison de leur interdiction en Europe. Tant le PKK que le DHKP-C se sont assignés en tout premier lieu, en Europe, des tâches parfaitement légales, telles la diffusion d’informations sur la répression en Turquie, ou des manifs et des conférences de presse, la collecte de cotisations, la quête de solidarité et de soutien politique à leur lutte en Turquie. Elles usent en Europe de leurs droits constitutionnels et démocratiques tels le droit à la libre expression ou celui de s’organiser, qui leur sont refusés en Turquie. En Europe, ils n’ont pas mené d’action armée. On peut comparer leur façon d’agir avec celle, il y a 25 ou 30 ans, de l’ANC, le mouvement sud-africain de libération de Nelson Mandela. Toute la lutte armée s’était menée en Afrique du Sud, tandis qu’en Europe, toutes les activités s’étaient déroulées dans un cadre strictement légal. Si ces lois anti-terroristes avaient existé à l’époque, il y a de fortes chances qu’on les aurait appliquées contre l’ANC.

Le PKK figurait déjà sur la liste noire des Etats-Unis. Il figure aujourd’hui sur les ‘listes noires’ du Canada, des Etats-Unis d’Amérique, de l’Union européenne, de l’Australie, de la Turquie, de la Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni. Le 3 avril 2008, le Tribunal de première instance des communautés européennes a annulé une décision du Conseil de l’Union européenne de 2002 d’inscrire le PKK sur sa liste d’organisations terroristes, estimant que le Conseil n’avait pas suffisamment motivé sa décision, mais le 15 juillet 2008, le Conseil de l’Union Européenne réintègre le PKK dans la liste des entités qu’il considère comme terroristes et adopte des mesures restrictives.

Le règlement européen prévoit le gel de tous les fonds, avoirs financiers et autres ressources économiques détenus par les entités incluses dans la liste et interdit la mise à la disposition de ces entités de telles ressources. En outre, le règlement interdit de fournir des séries de services financiers aux entités sur la liste.

Le règlement énumère dans son article 2.3 les personnes qui peuvent être inclues sur la liste établie en exécution du règlement par le Conseil:

‘i) les personnes physiques commettant ou tentant de commettre un acte de terrorisme, participant à un tel acte ou facilitant sa réalisation;

ii) les personnes morales, groupes ou entités commettant ou tentant de commettre un acte de terrorisme, participant à un tel acte ou facilitant sa réalisation;

iii) les personnes morales, groupes ou entités détenus ou contrôlés par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, groupes ou entités visés aux points i) et ii) ou

iv) les personnes physiques ou morales, groupes ou entités agissant pour le compte ou sous les ordres d’une ou de plusieurs personnes physiques ou morales, groupes ou entités visés aux points i) et ii)’

Ne sont donc pas seulement visées les personnes qui participent au sens du droit pénal (comme complice ou coauteur) à des actes de terrorisme, mais les personnes qui ‘facilitent’ de tels actes, des personnes physiques ou morales qui agissent ‘pour le compte ou sous les ordres d’une ou de plusieurs personnes’ reprises sur la liste. La notion de ‘faciliter’ n’est définie nulle part et est une notion étrangère au droit. Les notions ‘d’agir pour le compte ou sous les ordres de’ ne sont d’ailleurs pas plus précises. Elles ouvrent évidemment la porte à l’arbitraire le plus total.

En outre, l’article 9 du règlement impose l’obligation aux pays membres de l’Union d’instaurer des sanctions ‘efficaces, proportionnelles et dissuasives’ à l’encontre de toute personne qui aurait violé le règlement; par exemple en fournissant des services interdits ou en mettant des fonds à la disposition d’une organisation ou d’une personne dont le nom est repris sur la liste.

Les représentations en Europe des mouvements de libération nationale et sociale incluses dans la liste peuvent donc être accusées de ‘faciliter’ les activités de l’organisation dans le pays d’origine.

Aucune des personnes ou organisations reprises sur la liste n’ont préalablement été informées de l’intention du Conseil de les insérer à la liste. Aucun des mouvements ou personnes n’a eu la possibilité d’être entendu. Pire même, quand ils demandent accès au dossier qui a été à la base de leur inclusion sur la liste, il leur est répondu que les notules de la réunion du COREPER qui en a discuté sont secrets et que les documents produits à cette réunion par des pays membres ont été restitués. Le COREPER (Comité des représentants permanents), est un groupe de fonctionnaires délégués par les États membres pour assister les ministres dans la préparation des Conseils européens.

Les personnes et organisations incluses dans la liste se voient taxer de ‘terroristes’ et sont privées de tout droit sans la moindre contradiction possible. Elles sont ainsi privées de leur droit à la présomption d’innocence, d’un procès équitable avant d’être soumises à des sanctions d’une extrême gravité, de leur droit d’être entendues et d’apporter la contradiction aux éléments ‘à charge’.

En ratifiant le Traité d’Amsterdam, les quinze Etats membres ont décidé que les décisions prises dans le cadre de la PESC, par exemple l’inscription d’une personne ou d’une organisation sur la liste des organisations terroristes, ne seraient pas susceptibles d’être contrôlées par la Cour de Justice de Luxembourg, donc de faire l’objet d’un recours légal.

Certaines organisations inscrites sur la liste n’était même pas tenues pour illégales par l’Etat qu’elles contestaient. L’organisation de jeunesse basque SEGI était légale en Espagne. L’Etat espagnol l’a fait inscrire sur la liste européenne des organisations terroristes, et puis s’est prévalu de la présence de SEGI sur la liste européenne pour l’interdire et pour procéder à des arrestations massives de ses militants. L’échelon européen a permis à l’Etat espagnol de court-circuiter ses propres procédures légales de criminalisation.

Manifestation kurde à Bruxelles
Manifestation en soutien aux kurdes à Bruxelles
Manifestation en soutien aux kurdes à Bruxelles
Descente policière à Roj TV
Manifestation en soutien aux kurdes en France
Zubeyir Aydar
Remzi Kartal
Carte du Kurdistan
Manifestation kurde en France
Combattantes du PKK
Talabani et Ocalan
Combattante du PKK
Andrea Wolf 'Rohani'
Abdullah Ocalan
Base du PKK
Drapeau du PKK
Drapeau du Kongra-GEL
Le groupe de paix

Jeunesse

Georges Ibrahim Abdallah est né à Kobayath – Akkar, dans le Nord du Liban, le 2 avril 1951. Il a suivi ses études à l’Ecole Nornale à Achrafieh, et en est sorti diplômé en 1970. Georges Abdallah a grandi à une époque où la crise structurelle de l’entité libanaise devenait de plus en plus insurmontable. C’est l’époque où pour conjurer tout changement et contrer la radicalisation du mouvement des masses populaires et de la jeunesse, la bourgeoisie n’hésita pas à pousser vers la guerre civile confessionnelle.

L’affirmation de la réalité révolutionnaire palestinienne sur le devant de la scène régionale et libanaise a démultiplié la portée des diverses
luttes sociales au début des années 70. A la veille de la guerre civile de 1975, la crise du système a changé de nature et la portée des enjeux s’est modifiée. Les ‘ceintures de la misère’ autour de Beyrouth, les villes et les villages du Sud et les camps de réfugiés aux abords des principales villes incarneront dès lors et pour de longues années les enjeux locaux, régionaux et internationaux du mouvement révolutionnaire…

Massacre de la Quarantaine, Beyrouth 1976

Cette réalité de lutte, de résistance et de sacrifice a construit la conscience politique de Georges Abdallah et déterminé son engagement révolutionnaire. Il choisit la résistance face aux massacres de masse perpétrés par les bourgeois confessionnalistes de tous bords et leurs alliés israéliens et franco-américains et commence son engagement politique dans les rangs du Parti National Social Syrien (PNSS, progressiste et panarabe) pour rejoindre ensuite la résistance palestinienne, en adhérant au FPLP.

L’invasion israélienne de 1978

Le 14 mars 1978, trois jours après l’action d’un commando palestiniens infiltré au Sud-Liban contre un bus, l’armée sioniste envahi le Liban pour y détruire les bases des organisations palestinienne au sud de la rivière Litani (qui marque la frontière du Sud-Liban). L’armée sioniste tue 1186 civils libanais, provoque le départ de 285.000 réfugiés, endommage 82 villages et rase complètement six d’entre eux. Georges Abdallah combat dans les rangs du FPLP cette invasion et sera blessé à cette occasion.

Cette invasion entrainera le conseil de sécurité de l’ONU à voter une résolution stipulant le retrait de l’armée israélienne et mettant en place une force « d’interposition » (la FINUL). Israël contourne cette résolution en remettant le Sud-Liban à une milice de Libanais chrétiens à sa solde, l’Armée du Liban Sud (ALS), qui fera régner une terreur blanche dans la région (ouverture du camp de concentration de Khiam).

Opération Litani (mars 1978)

L’invasion israélienne de 1982

Après des mois d’agressions en tout genre (bombardements aériens et navals, raids héliportés, attaques menées par l’intermédiaire de supplétifs mercenaires comme l’Armée du Liban Sud), l’armée israélienne envahit le Liban le 6 juin 1982.

L’armée israélienne a perdu 670 soldats. 18.000 combattants arabes sont morts durant cette guerre [[Soldats syriens, combattants de la gauche libanaise et des organisation palestiniennes]]. Des centaines de militants arabes capturés et ‘disparus’ dans les camps d’Ansar et de Khiam. Le bilan final de l’opération ‘Paix pour la Galilée’ est éloquent: 25.000 morts, 45.000 blessés, Beyrouth dévasté par des semaines de siège et de bombardements.

Invasion du Liban de 1982


Massacres de Sabra et Chatila

Les 16 et 17 septembre, c’est le massacre de Sabra et Chatila (deux camps de réfugiés palestiniens de Beyrouth-Ouest. L’armée israélienne qui a encerclé ces deux camps vides de tout combattants palestiniens laisse entrer les tueurs des milices fascistes chrétiennes et observent le massacre. Entre 1000 et 5000 civils désarmés sont froidement assassinés.

Les Fractions Armées Révolutionnaires Libanaises

Cette invasion fut perpétrée avec la complicité générale des puissances occidentales. En réaction, des combattants libanais et arabes allèrent porter la guerre contre le sionisme et l’impérialisme dans le monde. Ce fut le cas des Fraction Armées Révolutionnaires Libanaises (FARL) qui entrèrent en action en Europe, et dont les principales actions, extrêmement ciblées et précises, furent la tentative d’attentat contre Christian Edison Chapman, le responsable en second à l’ambassade américaine en France (12 novembre 1981); l’exécution du colonel Charles Ray, l’attaché militaire à l’ambassade américaine en France (18 janvier 1982); l’exécution de Yakov Barsimantov, le secrétaire en second à l’ambassade israélienne en France et, surtout, responsable du Mossad en France (abattu par une jeune femme le 3 avril 1982); la tentative d’attentat contre Rodrigue Grant, l’attaché commercial à l’ambassade américaine en France, qui se solda par la mort de deux artificiers de la police française qui tentaient de désamorcer la bombe placée sous la voiture du diplomate (22 août 1982); la tentative d’attentat de Robert Onan Home, le Consul Général des Etats-Unis à Strasbourg, qui échappa de peu aux balles tirées contre lui le 26 mars 1984.

Voici un des communiqué des FARL (celui de l’action contre Yacov Barsimantov):

Nous, FRACTION ARMÉE RÉVOLUTIONNAIRE LIBANAISE, nous nous adressons à tous ceux qui condamnent la terreur et le terrorisme, à tous ceux qui militent pour l’abolition de la société d’exploitation et de guerre. Nous avons exécuté YACOV BARSIMANTOV.
La presse impérialiste et les gouvernements qui soutiennent l’impérialisme, comme le gouvernement Français, crient au «terrorisme». Qui sont les terroristes ? Ceux qui tuent un jeune Cisjordanien parce qu’il résiste à l’annexion de son pays par Israël, ceux qui bombardent les populations civiles du Sud Liban, ceux qui tuent aveuglément et osent se réclamer d’un pseudo «cessez le feu».
Nous, nous attaquons ceux qui organisent le génocide du peuple Palestinien. Nous, nous sauvegardons la vie des innocents même au péril de notre propre sécurité.
Depuis sept ans le peuple Libanais subit la guerre. Depuis sept ans l’impérialisme, sous le couvert de la lutte contre les «fanatiques Palestiniens», détruit tout ce qui est progressiste au Liban.
C’est notre droit de nous défendre.
C’est notre droit aussi d’attaquer l’impérialisme partout où il sévit et en particulier là où il bénéficie du soutien politique du gouvernement en place.
Nous poursuivrons notre guerre à la guerre impérialiste jusqu’à la victoire.
À bas l’impérialisme Américain et ses mercenaires Européens.
La Victoire ou la Victoire.
Fraction Armée Révolutionnaire Libanaise
Paris. le 7 avril 1982

Le 6 août 1984. Les douaniers italiens arrêtent dans le train Ljubljana-Rome-Paris un jeune homme de 19 ans, Abdullah el-Mansouri, qui transporte environ huit kilos d’explosifs et qui se rend à Paris. Abdullah el-Mansouri ne dira rien, mais c’est semble-t-il en étudiant l’achat du ticket que la police italienne arrête Joséphine Abdo Sarkis (26 ans) et Daher Feriol Fayez (23 ans). Ils seront condamnés l’année suivant par un tribunal de Trieste à 15 années de prison.

Arrestation

Les autorités françaises arrêtèrent Georges Ibrahim Abdallah le 24 octobre 1984, après qu’un groupe du Mossad et quelques-uns de ses agents libanais l’eurent suivi à Lyon. L’incarcération n’était motivée que par la détention de vrais-faux papiers d’identité: un passeport délivré légalement (avec une identité fictive) par les autorités algériennes.

Les autorités françaises avaient promis au gouvernement algérien la mise en liberté de Georges Ibrahim Abdallah. Dans ce but, elles avaient envoyé le chef du département des services secrets français (DST) en Algérie pour en informer le gouvernement algérien. Dans le journal-mémoire qu’il a fait éditer, Jacques Attali, le conseiller du président français François Mitterand, écrivait: ‘Jeudi 28 mars 1985. Ive Bonnet, patron de la DST, envoyé à Alger, explique qu’Abdallah, arrêté à Lyon, sera libéré pendant l’été en raison des faibles charges qui pèsent contre lui. Les Algériens lui répondent que le Français enlevé au Liban, Pyrroles[[En réalité Peyrolles; il s’agissait d’un diplomate français en poste à Tripoli, au Nord du Liban]], sera relâché si Abdallah l’est aussi. On obtient que celui-là précède celui-ci.'[[Verbatim, tome l. Deuxième partie Chronique des années 1983-1986, p. 1202]]. Jacques Attali toujours: ‘Lundi 24 mars 1986. Réunion chez le Président (Mitterrand) avec Ulrich (représentant Jacques Chirac), Giraud, Raimond, le général Forey et Jean-Louis Bianco. Le Président: ‘… la DST avait été autorisée à dire aux Algériens (qui servaient d’intermédiaires) que la libération d’Ibrahim Abdallah était envisageable dans le cadre de la loi française. La DST a sans doute dit aux Algériens: on va le libérer tout de suite… »[[Verbatim, tome lI. Chronique des années 1986 – 1988, Fayard, Paris, 1995, p.25]]

Mais les autorités françaises ne respectèrent pas cet engagement. Georges Ibrahim Abdallah fut traduit devant le tribunal le 10 juillet 1986 pour détention d’armes et d’explosifs; une sentence de quatre années d’incarcération fut prononcée. Il refusa le procès mais n’objecta pas. Les Français manquaient à leur promesse.

Les autorités françaises étaient alors soumises à une pression directe des États-Unis. Le président américain Reagan lui-même aborda le sujet du procès de Georges Ibrahim Abdallah lors d’une rencontre avec le président français Mitterrand. De nombreuses immixtions américaines s’étaient exercées pour pousser les autorités françaises à ne pas relâcher Georges Ibrahim Abdallah. Les États-Unis s’étaient constitués partie civile dans le procès. Les pressions sionistes ne manquaient pas non plus. Attali : ‘Vendredi 27 juin 1986. A l’ambassade de France à La Haye, petit déjeuner traditionnel entre François Mitterrand et Helmut Kohl… François Mitterrand: ‘… Le conseiller pour la Sécurité de Ronald Reagan, John Pointdexter, nous télégraphie pour nous mettre en garde contre une éventuelle libération d’Ibrahim Abdallah avant son procès et avant que les autorités américaines n’aient toutes les preuves relatives aux charges contre lui. Son gouvernement, rappelle-t-il, s’est porté partie civile dans ce procès, et le Président américain y voit une occasion de démontrer la capacité et la volonté des sociétés démocratiques de faire pleinement justice contre ceux qui sont accusés de commettre des actes de terrorisme.’ Pourquoi nous écrit-on cela? Nous ne savons rien de ce dont il retourne. Les Américains sont-ils au courant des tractations engagées à ce sujet par le gouvernement à l’insu de l’Elysée[[La France est alors sous le régime de la cohabitation: en raison du décalage des élections parlementaire et présidentielle, le gouvernement est de droite et la présidence (‘l’Élysée’) de gauche. Le gouvernement menait en de nombreux points sa propre politique, en veillant à en écarter la Présidence.]]?'[[Verbatim, tome lI. Chronique des années 1986 – 1988, p. 103, 104 et 105.]]

Les attentats massacres, le CSPPA, l’intox

A ce moment, la France était sous l’effet d’une série d’attentats aveugles à Paris entre 1986 et 1987, et qui avaient fait de nombreuses victimes françaises innocentes (13 morts et plus de 300 blessés). Ces attentats étaient revendiqués par le CSPPA (Comité de solidarité avec les prisonniers politiques arabes) qui exigeait la libération de Georges Ibrahim Abdallah, du Libanais lié aux services secrets iraniens Anis Naccache et de Varoudjian Garbidjian, un militant de l’Armée Secrète Arménienne pour la Libération de l’Arménie (ASALA). En fait, ces attentats étaient commis par un réseau proche de l’Iran, dirigé par le Tunisien Fouad Ali Salah, qui entendait faire payer à la France son soutien à l’Irak dans la guerre contre l’Iran.

Il est apparu par la suite que les services français savaient (sans en avoir identifier précisément les auteurs) de quel côté venaient ces attentats massacres. Mais à ce moment, les autorités françaises négociaient et débattaient avec les commanditaires du CSPPA (négociations secrètes qui d’ailleurs aboutirent et virent la libération des agents iraniens détenus en France). Pour couvrir ces négociations secrètes et rassurer l’opinion publique française (en la désinformant), les services secrets français accusèrent les frères de Georges Ibrahim Abdallah de ces attentats.

Les autorités françaises offrirent des sommes d’argent pour tout renseignement concernant les frères Abdallah. Elles diffusèrent les noms des frères dans le monde entier pour qu’ils soient poursuivis, et firent afficher leurs photos dans tous les postes frontières et dans les lieux publics en France. Les frères Abdallah nièrent immédiatement ces accusations calomnieuses à travers des conférences de presse. Les ‘informations’ sur lesquelles les services secrets français prétendaient s’appuyer provenaient des rapports du Mossad et de ceux de l’avocat de Georges Ibrahim Abdallah, Jean-Paul Mazurier, qui était devenu toxicomane et que les services secrets utilisaient comme informateur et comme désinformateur. Le syndicat des avocats le chassera plus tard de ses rangs, lorsque cette affaire fut rendue publique[[Cf le livre de Laurent GALLY: L’Agent noir. Une Taupe dans l’Affaire Abdallah]].

Article sur Mazurier

Officiellement sur base de l’étude des documente trouvés à Lyon chez Georges Abdallah, une commission rogatoire ordonnant la perquisition d’un appartement parisien, rendue par la juge d’instruction Kleidmann dès le 27 octobre 1984, est exécutée le … 2 avril 1985 au matin, juste avant la libération conditionnelle de Georges Abdallah ! On y trouve 23 kilos d’explosifs, des 3 détonateurs, des armes et des munitions, parmi lesquelles le pistolet tchèque qui a servi aux actions contre Roy et Barsimentov.

Le second procès

Le premier mars 1987, les autorités françaises jugèrent une deuxième fois Georges Ibrahim Abdallah sur base de cette ‘découverte’ tardive et miraculeuse. Il fut accusé de conspiration dans des actes terroristes (d’avoir fondé les Fractions Armées Révolutionnaires Libanaises et d’en avoir planifier les opérations). Un verdict de condamnation à perpétuité fut prononcé. Pour ce procès, les autorités françaises avait constitué une tribunal spécial antiterroriste pouvant prononcer ses verdicts sur base des données fournies par les services secrets, sans avoir recours aux preuves juridiques ou aux témoins, contrairement aux codes de procédure. Absolument personne ne s’était présenté en témoignage de l’implication de Georges Abdallah dans tout ce qu’on lui attribuait comme charges.

La condamnation à perpétuité de Georges Abdallah et l’accusation lancée contre ses frères servirent à désinformer le peuple français sous le choc des attentats-massacres du CSPPA, à satisfaire les Américains et les sionistes, et à faire apparaître la France comme un pays pouvant combattre le terrorisme.

La détention

En prison, comme en témoignent les textes que nous publions dans cette brochure, Georges Ibrahim Abdallah a continué a défendre la cause des peuples. C’est ainsi qu’il a adhéré à la Plate-forme du 19 juin 1999 qui a réuni dans une communauté de lutte une centaine de prisonniers révolutionnaires, communistes, anarchistes, antifascistes et anti-impérialistes, et qu’il a participé aux grèves de la faim de solidarité avec les prisonniers révolutionnaires en Turquie. En août 2002, en solidarité avec les prisonnières palestiniennes détenues à Neve Tirza (Israël) en grève de la faim pour dénoncer les humiliations quotidiennes dont elles font l’objet dans les geôles sionistes, Georges Ibrahim Abdallah et plusieurs dizaines de prisonniers détenus à Moulins (en fait, presque tous les prisonniers de la centrale) ont refusé le repas de l’administration pénitentiaire. Cette initiative lui a valu d’être, en compagnie de deux autres prétendus ‘meneurs’ placé pendant plusieurs mois à l’isolement, à la prison de Fresnes.

Georges Abdallah a encore comparu le 1er décembre 2010 devant un tribunal de Tarbes pour « refus de se soumettre à un prélèvement ADN ». Il avait été condamné à trois mois de détention pour ce refus. Trois mois de détention alors qu’il est condamné à perpétuité !

Georges Ibrahim Abdallah

Le refus de libération

Depuis 1999, la libération de Georges Ibrahim Abdallah ne requiert pas de recours en grâce particulier, elle est possible juste par un simple arrêté administratif du Ministère de la Justice, conformément au code pénal français qui rend cette libération possible après quinze années d’incarcération.

En novembre 2003, la juridiction régionale de libération conditionnelle de Pau avait autorisé la libération de Georges Ibrahim Abdallah à condition qu’il quitte la France immédiatement. Sur ordre du ministre de la Justice Dominique Perben, le procureur général de Pau avait aussitôt fait appel de cette décision, saisissant de facto la juridiction nationale. La juridiction nationale de libération conditionnelle a rendu son verdict le 15 janvier 2004, en décidant le maintien en prison de Georges Ibrahim Abdallah, décision conforme aux conclusions de l’avocat général et au souhait du ministre…

Février 2005, Georges Ibrahim Abdallah présente une nouvelle demande de libération conditionnelle. Septembre 2005, le Tribunal de Grande Instance de Tarbes, présidé par le même juge qui avait statué positivement à la première demande de libération en 2003, rejette cette demande. Septembre 2005, appel de cette décision introduit par Georges Abdallah. Février 2006, nouveau refus.

Georges Ibrahim Abdallah a déposé une nouvelle demande de libération conditionnelle le 6 février 2007. Elle devait être examinée le mardi 26 juin 2007 à 15H30, soit quasiment à la limite du délai maximum de 6 mois autorisé par la loi. Rappelons que maintenant en France la justice d’exception s’effectue par Vidéoconférence. L’accusé est seul, ou avec son avocat, face à des caméras dans son lieu de détention, entouré de gardiens. Les juges, avocats des parties civiles, procureur quant à eux siègent à Paris dans les locaux du Palais de Justice. Le 6 février, personne ne savait faire fonctionner les caméras ! L’examen de la demande a donc été repoussé après les vacances judiciaires, au 4 septembre. Après un nouveau report, la demande sera rejetée le 10 octobre.

20 décembre 2007, la demande de libération conditionnelle de Georges Abdallah est examinée en appel. L’audience est fixée le 31 janvier 2008, puis reportée au 17 avril, puis au 4 septembre, puis au 8 janvier 2009, au 26 mars 2009 !!!
La cour va se baser sur un avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté de Paris rendu le 22 janvier 2009 concernant Georges Ibrahim Abdallah:
« Il [Georges Ibrahim ABDALLAH] revendique ses actes et les justifie par son engagement politique ; il se présente comme un « résistant » qui, à l’époque, luttait par la violence contre l’occupation du LIBAN par ISRAEL, avec la complicité des ETATS-UNIS.
(…)
La commission constate que Georges Ibrahim ABDALLAH n’a aucunement renoncé à la lutte armée et à l’action terroriste, y compris en France. Sa dangerosité est démontré par son indifférence pour le sort des victimes et la force intacte de ses convictions qui peuvent à nouveau, si le contexte politique s’y prêtait, le pousser à se comporter en activiste résolu et implacable.
La commission émet un avis défavorable à la demande de libération conditionnelle de Georges Ibrahim ABDALLAH. »

Le 5 mai 2009, la libération est refusée.

Le 21 novembre 2012, le tribunal d’application des peines (TAP) de Paris avait émis un avis positif de principe sur sa demande de libération. Début janvier 2013, la chambre d’application des peines de Paris, qui examinait l’affaire en appel, a accédé à la huitième demande de libération de Georges Abdallah, en la conditionnant à un arrêté d’expulsion du territoire français que le ministère de l’intérieur doit impérativement prendre d’ici au 14 janvier. Les Etats-Unis ont immédiatement fait part de leur opposition à sa libération en estimant qu’il constituait toujours une menace potentielle. Par ailleurs, a décision de libéreration a été reportée lundi au 28 janvier par TAP confronté au fait que le ministère de l’intérieur n’a pas signé l’arrêté d’expulsion du territoire français, qui est le préalable indispensable à cette libération. Le 28 janvier, le document n’ayant toujours pas été signé, son transfert de pour le Liban fut reporté au 28 février.

Durant toutes ces semaines, les initiatives, les actions et les manifestations de solidarité se multiplient à travers l’Europe et le monde arabe. Pour une vision d’ensemble, notamment de la journée internationale du 27 février 2013, consultez notre page spéciale.

Le 28 février, la Chambre d’application des peines a examiné un appel du parquet, contestant le report de la décision finale du Tribunal d’application des peines (TAP) de Paris sur la demande de libération conditionnelle, dans l’attente d’un hypothétique arrêté d’expulsion signé par le ministère de l’Intérieur. Le 4 avril la cours de cassation a cassé et annulé la décision du 10 janvier 2013 et déclaré irrecevable la demande de libération conditionnelle de Georges Ibrahim Abdallah au motif que ‘le condamné n’a pas été placé sous le régime de la semi-liberté. Disposition applicable à un étranger condamné qui n’est pas l’objet de l’une des mesures d’éloignement du territoire’.

Georges Ibrahim Abdallah 2010

Georges Abdallah dépose une nouvelle demande de liberté qui est examinée par une la Chambre d’application des peines (Chap) à Lannemezan le 30 septembre 2014. Verdict le 5 novembre. Cette comparution survient alors que Georges Abdallah entame sa 31e année de prison, et donne lieu à une nouvelle vague de solidarité, voir notre page spéciale).

Georges Ibrahim Abdallah
Massacre de la Quarantaine, Beyrouth 1976
Opération Litani (mars 1978)
Invasion du Liban de 1982
Massacres de Sabra et Chatila
Article sur Mazurier
Qui est Georges Ibrahim Abdallah?

Aux États-Unis, au cours de leur congrès de 1884, les grands syndicats International Working People’s Association (révolutionnaire) et American Federation of Labor (réformiste) se donnent deux ans pour imposer aux patrons une limitation de la journée de travail à huit heures. Ils choisissent de débuter leur action le 1er mai, date du « moving day » parce que beaucoup d’entreprises américaines entament ce jour-là leur année comptable, et que les contrats ont leur terme ce jour-là, l’ouvrier devant déménager (d’où le terme de « moving day ») pour retrouver du travail.

La grève générale du 1er mai 1886 est largement suivie : il y a 340.000 grévistes dans tout le pays. A la grande usine de matériel agricole McCormick Reaper Works, à Chicago, August Spies, militant anarchiste, est le dernier à prendre la parole devant la foule des manifestants. Au moment où la foule se disperse, 200 policiers font irruption et chargent les ouvriers. Il y aura un mort et une dizaine de blessés.

La répression du rassemblement de Haymarket

Spies lance un appel à un rassemblement de protestation contre la violence policière, qui se tiendra le 4 mai. Ce rassemblement se voulait pacifiste mais un autre appel invitait les travailleurs à venir armés dans le but d’autodéfense (Parsons avait imprimé le tract mais Spies s’opposa à sa diffusion).

L’appel à la manifestation de Haymarket

Le jour venu, Spies, ainsi que deux autres anarchistes, Albert Parsons et Samuel Fielden, prennent la parole. Le maire de Chicago, Carter Harrison, assiste aussi au rassemblement. Lorsque la manifestation s’achève, Harrison, convaincu que rien ne va se passer, appelle le chef de la police, l’inspecteur John Bonfield, pour qu’il renvoie chez eux les policiers postés à proximité. Il est 10 heures du soir, les manifestants se dispersent, il n’en reste plus que quelques centaines dans Haymarket Square, quand 180 policiers de Chicago chargent la foule encore présente. Quelqu’un jette une bombe sur la masse de policiers, qui répliquent en tirant dans le tas : bilan sept policiers tués et 70 manifestants blessés.

L’explosion de la bombe de Haymarket

Sept hommes sont alors arrêtés et accusés de meurtre : August Spies, George Engel, Adolph Fischer, Louis Lingg, Michael Schwab, Oscar Neebe et Samuel Fielden. Un huitième nom s’ajoute à la liste quand Albert Parsons se livre à la police. Le procès s’ouvre le 21 juin 1886 à la cour criminelle du comté de Cook. C’est avant tout le procès des anarchistes et du mouvement ouvrier. La sélection du jury compte par exemple un parent du policier tué. Le procureur Julius Grinnel déclare ainsi lors de ses instructions au jury : « Il n’y a qu’un pas de la République à l’anarchie. C’est la loi qui subit ici son procès en même temps que l’anarchisme. Ces huit hommes ont été choisis parce qu’ils sont des meneurs. Ils ne sont pas plus coupables que les milliers de personnes qui les suivent. Messieurs du jury : condamnez ces hommes, faites d’eux un exemple, faites-les pendre et vous sauverez nos institutions et notre société. C’est vous qui déciderez si nous allons faire ce pas vers l’anarchie, ou non. »

Le 19 août, tous sont condamnés à mort, à l’exception d’Oscar Neebe qui écope de 15 ans de prison. Un vaste mouvement de protestation international se déclenche. Les peines de mort de Michael Schwab, Oscar Neebe et Samuel Fielden sont commuées en prison à perpétuité (ils seront tous les trois graciés le 26 juin 1893). Louis Lingg se suicide en prison. Quant à August Spies, George Engel, Adolph Fischer et Albert Parsons, ils sont pendus le 11 novembre 1887. L’événement connut une intense réaction internationale et fit l’objet de manifestation dans la plupart des capitales européennes. George Bernard Shaw déclara à cette occasion : « Si le monde doit absolument pendre huit de ses habitants, il serait bon qu’il s’agisse des huit juges de la Cour suprême de l’Illinois »

Les anarchistes martyrs de Chicago

Lire la biographie de Louis Lingg

Lire la biographie de George Engel

Lire la biographie d’Adolph Fischer

Lire la biographie d’Albert R Parsons

Lire la biographie d’August Spies

Les martyrs de Haymarket

En 1889, la IIe Internationale se réunit à Paris. Sous l’impulsion de Jules Guesde et sur une proposition de Raymond Lavigne, elle décide le 20 juillet 1889 de faire de chaque 1er mai une journée de manifestation avec pour objectif la réduction de la journée de travail à huit heures. Le 1er mai 1890, l’événement est ainsi célébré dans la plupart des pays, avec des participations diverses. Le 1er mai 1891, à Fourmies, dans le Nord, en France, la police tire sur les ouvriers et fait neuf morts. Avec ce nouveau massacre, le 1er mai s’enracine dans la tradition de lutte des travailleurs européens.

Banderlole martyrs de Haymarket

La répression du rassemblement de Haymarket
L'appel à la manifestation de Haymarket
L'explosion de la bombe de Haymarket
Les anarchistes martyrs de Chicago
Les martyrs de Haymarket
Banderlole martyrs de Haymarket

28/07/2005

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1. La persécution des militants ouvriers en Iran

La République islamique, qui exécute un programme économique néo-‎libéralisme, a entamé une attaque tout azimuts contre les travailleurs ‎iraniens : diminution du salaire et retard de leur paiement, ‎fermetures d’entreprises, suppression des subventions des produits alimentaires de base (pain, riz, sucre…), dégradation des conditions de travail, création de zones économiques spéciales où les ouvriers ne sont pas couverts par le code du travail, etc. Cette politique a ‎provoqué les protestations des ouvriers (notamment dans la pétrochimie), des ‎infirmières, des employés, des ‎enseignants, etc.

manifestation en iran

Le régime répond par une répression brutale : En Iran, des travailleurs sont régulièrement arrêtés pour s’être mis en grève, pour avoir fondé un syndicat. C’est ce qui est arrivé aux chauffeurs des bus de Téhéran : plus de 700 d’entre eux ont été arrêtés suite à une grève, aux travailleurs de la canne à sucre lorsqu’ils ont protesté pour leurs salaires impayés, ou aux enseignants qui se sont mis en grève pour leurs salaires et leurs conditions de travail.

Les manifestations du 1er mai sont également réprimées : Des centaines de personnes s’étaient rassemblées cette années devant le parlement à Téhéran pour défendre les revendications portées dans une pétition signée par 30.000 travailleurs réclamant entre autre la hausse du salaire minimum. Les forces de répression du régime sont rapidement intervenues pour disperser ce rassemblement ouvrier, des arrestations ont eu lieu les jours suivants notamment chez les travailleur de l’entreprise automobile Iran Khodro, située dans la banlieue de Téhéran.

Tous les moyens sont bons pour briser le mouvement ouvrier : licenciements, intimidations, arrestations et détentions arbitraires, coups, harcèlement permanent par des convocations au tribunal, fortes cautions, longues peines de prison.

La prison est particulièrement dure pour les prisonniers politiques : ils souffrent du manque de soin aux prisonniers (le 22 juin 2013, Afshin Osanloo du syndicat des chauffeurs de bus de Téhéran, emprisonné à Rejai Shahr, est mort d’une crise cardiaque), de l’enfermement avec des prisonniers sociaux mentalement instables et violents dressés contre eux par les gardiens, et jusqu’aux exécutions : en mai 2010, l’instituteur et syndicaliste enseignant Farzad Kamangar a été exécuté comme « ennemi de dieu » avec quatre autres prisonniers politiques, malgré une campagne de protestation de syndicats du monde entier. Il avait été torturé (‘fouetté et électrocuté) parce qu’il refusait de signer les aveux écrit par les forces de sécurité selon lesquels il était membre de la guérilla du PJAK.

2. Quelques syndicalistes aujourd’hui emprisonnés

Reza Shahabi est un conducteur de bus et membre de la direction du Syndicat des Travailleurs de la
Régie du Transport de Téhéran et sa Banlieue – Vahèd. Il a été condamné par un tribunal de Téhéran à une peine d’un an de prison pour « propagande contre le gouvernement », assortie d’une peine supplémentaire de 5 ans de prison pour « action contre la sécurité nationale ». Il est aussi sous le coup d’une interdiction de 5 ans de toutes ses activités syndicales qui sera effective à sa sortie de prison et d’une amende de 70 millions de tomans que ni lui ni les camarades de son syndicat ne peuvent payer. Sa peine d’emprisonnement a été réduite à 4 ans en appel.
Gravement malade, Reza Shahabi avait mené une une grève de la faim en décembre 2012 pour protester contre ses conditions de détention et le refus des autorités pénitentiaires de lui accorder une sortie une sortie provisoire de prison en liberté conditionnelle pour qu’il puisse se faire soigner dans un hôpital public. Les autorités pénitentiaires d’Evin avaient finalement cédé à ses demandes légitimes, mais après quelques semaines, Reza a été réincarcéré, toujours à la prison d’Evin.

Reza Shahabi

Behnam As’ad Ibrahimzadeh est militant syndical, membre du Comité de Coordination pour Aider à la Formation d’Organisations Ouvrières. Il est aussi membre du Groupe de défense des enfants des rues. Il a été arrêté le 12 juin 2010 et condamné à 20 ans de prison en première instance dans un procès à huis clos, et à 10 ans d’emprisonnement en appel. Après une brève sortie en liberté conditionnelle provisoire pour assister son fils qui souffre d’un cancer du sang, Beharn a été réincarcéré à la prison d’Evin.

Behnam Ibrahimzadeh

Mohammad Jarahi est militant du Syndicat des Travailleurs de la Peinture et de la Décoration
du Bâtiment de Téhéran et également membre du Comité de Suivi pour la Formation d’Organisations Ouvrières Libres, a été condamné à cinq ans de prison. Il souffre aujourd’hui atteint d’un cancer de la thyroïde. Il a subi une intervention chirurgicale le 16 février dernier. Malgré les efforts de sa famille pour qu’il soit correctement traité dans un hôpital public, Jarahi continue d’être emprisonné à Tabriz.

Mohammad Jarahi

Shahrokh Zamani, membre du Comité de Suivi pour la Formation d’Organisations Ouvrières Libres en Iran et du Syndicat des Peintres de Téhéran. Il a été arête le 5 juin 2011 et a été condamné à onze ans de prison au même procès anti-syndical à huis clos que Jarahi Mohammad. Il est actuellement détenu à la célèbre prison Rajaei-Shahr et risque 15 ans supplémentaires dans un nouveau procès.

Shahrokh Zamani

Bodaghi Rasoul est un militant syndical, membre de l’Association des enseignants. Il a été arrêté en septembre 2009 et condamné à six ans de prison pour «propagande contre le régime» et «rassemblement et collusion contre la sécurité nationale ». En janvier 2011, une cour d’appel a confirmé la condamnation de Rasoul et lui a interdit de prendre part à des activités de la société civile pendant cinq ans après sa libération.


3. Témoignage 

Lettre de prison de Shahrokh Zamani

A toutes les organisations syndicales et de défense des droits
Ecoutez le son de ma plainte !
Je suis Shahrokh Zamani, membre du Syndicat des Peintres de Téhéran et du Comité de Suivi pour la Formation d’Organisations Ouvrières Libres en Iran. Je suis résident de Téhéran depuis trente ans. Le 5 juin 2011, alors que je me rendais dans la ville de Tabriz pour visiter mes parents, j’ai été arrêté en toute illégalité par des agents du Ministère des Renseignements, sans aucune charge contre moi, ni preuve ou mandats. Après quarante jours de violentes tortures à la fois psychologiques et physiques, j’ai été emmené à la prison centrale de Tabriz. Pendant ces 40 jours de détention illégale, je me suis mis en grève de la faim afin de protester contre cette situation. J’ai perdu 27 kilos et je n’ai jamais signé d’aveux. Bien qu’il n’y ait eu aucune preuve contre moi et que je n’ai jamais donné la moindre ligne d’aveux lors des interrogatoires, la première branche du Tribunal Révolutionnaire de Tabriz m’a de façon vicieuse accusé de « propagande contre le régime et de formation de groupes socialistes » accusation passible de 11 ans de prison ferme. Il est clair que lors du procès j’ai nié toutes les accusations depuis le début et montré la nature fausse et monté de toute pièce des accusations. J’ai demandé au président du tribunal les preuves contre moi, et la justification d’une telle longue peine, ce à quoi il a répondu « Qui croyez vous que je suis Monsieur ? Je ne suis rien de plus qu’un subordonné dans un système hiérarchique ».
La prison de Tabriz est une des plus célèbres prisons, connue pour ses gardiens violents et meurtriers. Les gardiens sont infâmes par leur inhumanité, et leurs méthodes meurtrières et illégales. Les prisonniers ne disposent pas de droits comme des permissions ou des libérations conditionnelles. Même l’emprunt de livres à la bibliothèque est complètement sous le contrôle des fonctionnaires de la prison qui placent les détenus sous une myriade des pires tortures physiques et psychologiques. Une des pires de ces tortures est le déchaînement de prisonniers violents (de droit commun) contre les prisonniers politiques. Comme il n’y a aucune loi, cela se passe quotidiennement et il n’y a pas un jour sans affrontement ou problème entre ces deux groupes de prisonniers.
Dans une pièce, longue de 20 mètres, il y a 21 lits, et il est fréquent d’y trouver plus de quarante prisonniers. Il y a toujours sept prisonniers de droit commun violents parmi nous pour nous intimider et nous espionner.
Les prisonniers politiques sont placés en contact étroit avec les détenus atteints du sida et de l’hépatite, ce qui, avec les exactions des gardiens, est le plus stressant. En 2011, ils m’ont transféré de ma cellule, qui par rapport à celle où ils m’ont envoyé été un paradis, à la section 12 du bureau des renseignements afin de me torturer. C’était une zone de quarantaine réservé aux criminels dangereux. Cela ne pouvait être supporté au plus que trois journées. Puis, avec Jomhour Azgoch du PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan), j’ai été emmené à la section 15, la section de la méthadone, dans une cellule avec 50 personnes malades du sida et de l’hépatite. Pour protester, nous avons fait une grève de la faim pendant plusieurs jours.
A l’automne 2012, bien que je n’aie pas commis la moindre infraction, les fonctionnaires ont falsifié des documents disant que je demandais mon transfert et j’ai été déplacé à Yazd. Là, les conditions de détention étaient meilleures, mais j’ai été accusé de diffusé des informations sur les conditions de détention à l’extérieur de la prison, et j’ai été ramené à Tabriz, à la section de soin 8. Là, nous, prisonniers politiques, avons écris 14 articles mettant en lumière l’absence de droits dans la prison comme les permissions, les libérations conditionnelles, l’accès à du matériel sportif, à des classes techniques ou professionnelles, etc.
Aussi, les fonctionnaires de la prison ont force les prisonniers de droit commun a porter plainte contre moi et d’autres. Ils ont dit que nous avions insulté le leader [de la République Islamique, NdT], injurié les prisonniers de droit commun et encouragé les autres syndicalistes ouvriers emprisonnés à se mettre en grève. Cette plainte à été instruite et par conséquent j’ai été transféré à la prison Rajaei-Shahr à côté de Karaj.

Shahrokh Zamani
Prisonnier à Rajai Shahr, Iran
20 octobre 2012

affiche iran

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4. Bref historique du mouvement ouvrier en Iran

Formation des luttes et premiers syndicats ouvriers

Les premiers embryons du mouvement indépendant de la classe ouvrière d’Iran se formèrent au début du vingtième siècle. Les ouvriers des imprimeries fondèrent le premier syndicat en 1905. A cette époque-là, les journées de travail étaient très longues et les salaires très bas. Le salaire de 14 heures de travail par jour satisfaisait à peine les besoins journaliers des ouvriers. Les femmes ouvrières recevaient 2/3 du salaire des hommes et les enfants la moitié de celui des femmes à travail égal. Les ouvriers demandaient l’augmentation des salaires et la baisse du temps du travail au cours de leurs premières luttes. Les ouvriers imprimeurs organisèrent leur première grève la même année et obtinrent 10 heures de travail par jour au lieu de 14. En cette même année, les ouvriers des industries de la pêche participèrent à une grève pour l’augmentation des salaires. Un an plus tard les ouvriers des wagons de Téhéran appelèrent à une grève contre le licenciement des ouvriers et pour l’augmentation des salaires. Leur grève fut victorieuse.

Développement du mouvement syndical

Les activités syndicales se réduisirent après l’échec de la Révolution Constitutionnelle d’Iran (1905-1911). Mais la Grande Révolution d’Octobre 1917 en Russie eut beaucoup d’influence en Iran. En 1928 les ouvriers imprimeurs se remirent en grève et obtinrent toutes leurs revendications : 8 heures de travail par jour, l’augmentation des salaires et le droit à la convention collective. A ce moment-là une dizaine de syndicats de diverses branches d’activités furent créés. En 1920 les différents syndicats de la ville de Téhéran se rassemblèrent en un « Conseil Central des Syndicats », lequel fut joint par d’autres syndicats des autres villes. Le C.C.S. adhéra à l’internationale des syndicats ouvriers (PROFINTERN).

Le 1er Mai fut fêté par des manifestations de rue pour la première fois en 1922. A cette époque-là environ 100.000 ouvriers travaillaient dans les industries pétrolières et d’extraction, de textile, de soie, de fabrication de tapis, de cuir, de pêche, d’imprimerie etc. 30.000 de ces ouvriers s’étaient syndiqués dans 20 centrales ouvrières. Mais une grande partie du prolétariat du pays, celle du pétrole, ne pouvaient pas se syndiquer, car la compagnie anglaise qui avait la concession de l’exploitation du pétrole iranien au Sud du pays, imposait ses politiques répressives aux ouvriers de cette branche industrielle très importante. Durant ces années-là les ouvriers firent grève plusieurs fois pour les revendications économiques et gagnèrent souvent. Mais au fur et à mesure les revendications politiques furent aussi exigées, parmi lesquelles celles des ouvriers du livre qui demandèrent la levée de l’interdiction de la publication de certains journaux et magazines et qui firent reculer le gouvernement de l’époque.

Dissolution des syndicats

Le début du règne de la dynastie monarchique des Pahlavi marqua la fin des libertés politiques et la pression sur les syndicats commença. Le C.C.S. fut déclaré illégal en 1925 et les ouvriers délégués furent arrêtés. Les syndicats ouvriers continuaient cependant leurs activités clandestinement et même en 1928 le syndicat des ouvriers des industries pétrolières fut créé au cours d’une conférence dans laquelle les statuts et règlements intérieurs furent votés par les ouvriers. La formation de ce syndicat était d’une importance primordiale pour la prise de conscience et l’organisation des ouvriers, car à ce moment-là presque la moitié des ouvriers industriels d’Iran travaillaient dans cette branche économique.

Le syndicat des ouvriers du pétrole prépara, dès sa constitution, une grève pour l’amélioration des conditions ouvrières et contre le renouvellement du contrat injuste avec l’Angleterre. La grève devait commencer le 1er Mai 1929, mais quelques jours auparavant certains dirigeants et membres du syndicat furent arrêtés. Le régime et la compagnie pétrolière commirent des actes répressifs afin d’empêcher cette grève. Les répressions et les arrestations n’influencèrent guère la détermination des ouvriers et la grève débuta le 3 mai. Les ouvriers exigèrent les points suivants : augmentation des salaires de 15%, légalité des syndicats, officialisation du 1er Mai, 7 heures de travail par jour pour les jeunes de moins de 18 ans, baisse des heures de travail pendant l’été à 7 heures par jour, un mois de congé payé annuel, abolition des licenciements arbitraires, participation des délégués ouvriers pour les recrutements et licenciements, assurance des accidents du travail et de vieillesse etc. Les forces de répression du régime et de la compagnie pétrolière anglaise arrêtèrent 300 ouvriers, licencièrent certains autres et ainsi étouffèrent la grève.

Reformation des syndicats et des luttes ouvrières

De cette époque-là jusque septembre 1941,date à laquelle les forces des Alliés entrèrent en Iran et Réza Chah Pahlavi fut renversé, les syndicats ouvriers n’existaient pratiquement pas. Réza Chah pratiquait des politiques de répression. Il faisait arrêter les militants ouvriers et syndicaux, les assassinait sous des tortures barbares et ainsi étouffait la moindre protestation ouvrière. Malgré les répressions de cette période les ouvriers faisaient grève de temps à autre, mais le mouvement ouvrier n’était pas vraiment actif et les ouvriers étaient dans une situation absolument injuste et exploités d’une manière effroyable. La chute de Réza Chah entraîna une reprise des activités licites et la réapparition relative des libertés politiques. Les syndicats ouvriers se reformèrent. A cette époque-ci le nombre d’ouvriers industriels d’Iran avait accru considérablement et atteignait 650.000 ouvriers. Un an après la chute de Réza Chah deux centrales ouvrières étaient formées, le « Conseil des Syndicats Ouvriers » et « l’Union des Ouvriers et des Paysans ». En 1944 de différentes centrales se sont fusionnées pour fonder le « Conseil Central Unifié des Syndicats des Ouvriers et des Travailleurs ». Ce Conseil comptait deux ans plus tard plus de 200.000 membres. Ce fut alors une des périodes d’importantes luttes ouvrières. De nombreuses grèves eurent lieu. Les plus importantes de ces grèves furent celle de 9 usines de textile d’Ispahan en 1942 qui fit baisser le temps du travail de 10 à 8 heures par jour. Trois mois plus tard les ouvriers de ces usines fondèrent le « Syndicat des Ouvriers d’Ispahan ». Ce syndicat se joignit plus tard au Conseil Central Unifié avec ses 15.000 adhérents. En 1946 plusieurs grèves s’effectuèrent dans l’industrie pétrolière parmi lesquelles celle du 14 juillet 1946 qui fut réprimée par les forces gouvernementales.
L’évolution du mouvement ouvrier et syndical d’Iran à ce moment-là entraîna son adhésion à la Fédération Mondiale des Syndicats Ouvriers (W.F.T.U.). La croissance du mouvement syndical en Iran inquiéta beaucoup l’État et malgré les répressions, ce dernier décida de mettre en place ses propres syndicats. Sous le gouvernement du Premier ministre Ghavam, « l’Union des Syndicats Ouvriers d’Iran » (E.S.K.I.) fut alors organisée qui n’a pas eu beaucoup d’influence sur les ouvriers. Un autre syndicat fut fondé de la même manière qui n’a pas joué de rôle important non plus. L’objectif de ce genre de syndicats gouvernementaux était bien sûr de contrecarrer le mouvement indépendant de la classe ouvrière et de ses organisations. En 1946 le gouvernement de Ghavam fit voter le premier code du travail en Iran et cela à cause des luttes ouvrières. Dans la deuxième moitié des années 1940 les syndicats étaient de plus en plus sous pression et ont choisi davantage les formes semi-clandestines d’activités. L’un des plus grands événements de ces années-là fut la grande grève des ouvriers de l’industrie pétrolière en mars 1951 qui toucha pratiquement les 30.000 ouvriers de la raffinerie.

Répression du régime du Chah

Le coup d’Etat du 19 août 1953 de la C.I.A. américaine contre le gouvernement de Mossadegh mit pratiquement fin aux activités indépendantes des syndicats ouvriers. Les syndicats d’Etat dirigés quelques années plus tard par la SAVAK (police politique du Chah), ne défendaient évidemment pas les intérêts des ouvriers. A ce moment-là les peuples d’Iran ont été complètement privés des libertés et des droits démocratiques. Les organisations syndicales ouvrières ont été déclarées illégales et les ouvriers étaient sauvagement exploités. Le régime du Chah réprimait toute protestation ouvrière. Les militants ouvriers étaient emprisonnés et quelquefois les mitraillettes répondaient aux ouvriers comme la fusillade des ouvriers de l’usine de textile de Djahan-e-Tchit au cours de laquelle 4 ouvriers furent tués et plusieurs autres blessés. (…) Après ce coup d’État et jusqu’au renversement du régime du Chah en 1979, les ouvriers n’ont jamais baissé les bras et ont lutté pour leurs justes revendications sous la dictature. Durant les années 1957-58 plusieurs grèves se sont produites dans les industries du pétrole et du textile des villes de Chahi et d’Ispahan au cours desquelles des augmentations de salaires étaient demandées. Au début de l’année 1971 quelques grèves furent déclenchées dans des usines de textile. Dans la deuxième moitié des années 1970 les protestations ouvrières prirent des allures considérables. Les ouvriers contestaient l’inexistence des droits, la dictature et l’exploitation sauvage. Le rôle principal des ouvriers dans la Révolution de 1979 qui renversa le régime du Chah n’est pas négligeable. En septembre 1978 les ouvriers pétroliers de la raffinerie de Téhéran se sont mis en grève. Tout de suite les ouvriers des raffineries des villes d’Abadan, de Chiraz, de Tabriz et d’Ispahan se sont joints à eux. La grève générale des ouvriers de l’industrie pétrolière assomma le régime du Chah alors qu’il se trouvait dans une crise profonde à cause du mouvement protestataire populaire grandissant. La grève des ouvriers du pétrole entraîna celle des autres branches comme le textile, la métallurgie, des mines de charbon et de cuivre etc. A ce stade-là dans les usines et les établissements de services les comités de grèves se sont formés et les coordinations des grèves s’effectuaient contre le régime monarchique. La grève générale et nationale de tous les ouvriers assommait le régime et l’insurrection armée des 21 et 22 février 1979 renversa le régime dictatorial du Chah.
De cette situation révolutionnaire et du cœur des comités de grèves sont nés les conseils ouvriers. Les ouvriers organisèrent alors ces conseils dans les plus grandes unités de productions. Ces conseils instauraient le contrôle ouvrier dans les établissements où les patrons s’étaient enfuis. Ainsi les ouvriers continuaient à lutter pour leurs revendications. Le niveau des connaissances politiques des ouvriers augmentait considérablement à ce moment-là.

Dissolution des conseils ouvriers par la République islamique

Cette période des libertés relatives et des conseils ouvriers n’a pas duré longtemps. Deux ans après le renversement du Chah, la République islamique priva les gens de toutes les libertés et de tous les droits démocratiques par une campagne éhontée de répressions. Elle recommença alors la répression et l’exploitation sauvage des ouvriers. Depuis 1981 à nos jours des centaines d’ouvriers et de militants du mouvement ouvrier ont été exécutés par le régime islamique. Des centaines d’autres ont été condamnés à de lourdes peines de prison. Beaucoup ont été licenciés et certains autres sont recherchés. Certains se sont réfugiés dans de différents pays. Les ouvriers d’Iran sont frustrés de toute organisation indépendante. Les conseils et associations islamiques que l’on trouve dans les établissements et usines ne défendent non seulement pas les intérêts des ouvriers mais en plus sont des organes d’espionnage du régime contre les ouvriers. Malgré toutes les pressions du régime islamique, ces dernières années, les ouvriers luttent sous diverses manières et obtiennent de temps en temps quelques victoires. Il est évident que rien ne pourra arrêter le mouvement ouvrier bien qu’il soit sous les pressions les plus sauvages. Mais il ne faut pas oublier que les pressions économiques et politiques qui pèsent sur la classe ouvrière d’Iran entraîna l’inexistence de toute organisation indépendante ouvrière qui cause à son tour l’affreuse exploitation et la répression moyenâgeuse. La classe ouvrière d’Iran continuera sa lutte. Elle demande à ses camarades ouvriers du monde entier de l’y aider et leur demande de faire pression sur le régime de la République islamique en dénonçant ses crimes dans le monde entier au sein des organisations internationales ouvrières.

(historique emprunté au site de l’Organisation des Fedayin)

5. Pour en savoir plus

Pour l’actualité des luttes ouvrières en Iran (deux sites trotskisants) :

http://iranenlutte.wordpress.com

http://www.iran-echo.com

Pour mémoire : le massacre des prisonniers politiques iranien de 1988

Le rapport d’Amnesty 2013 pour l’Iran

Et deux sites en anglais sur les droits de l’homme en Iran:

https://hra-news.org/en

http://www.iranhumanrights.org

manifestation en iran
Reza Shahabi
Behnam Ibrahimzadeh
Mohammad Jarahi
Shahrokh Zamani
affiche iran

La nuit du 7 juillet, des membres et des sympathisants du Secours Rouge ont réveillé la prison de Tournai en tirant des feux d’artifice et en lançant au mégaphone des appels à la solidarité avec Jon Lopez Gomez qui y était détenu. Les prisonniers de Tournai ont salué cette intervention avec des acclamations.

Solidarité à la prison de Tournai

Communiqué de l’initiative – format pdf

Solidarité à la prison de Tournai

01/12/2003

Solidarité! n°2

Jaquette du Solidarité! n°2

Belgique / Des nouvelles de la loi sur les ‘méthodes particulières de recherche’ / Grève de la faim au Chili et manifestation à Bruxelles / Bruxelles: Répression de la manifestation pour Marco Camenisch / Les dix droits de base du manifestant / Bruxelles: Action de solidarité avec Marco Camenisch / Zeebrugge: Chasse aux clandestins / Brugge: Action de solidarité devant le centre fermé / Bruxelles: Manifestation de solidarité avec les réfugiés iraniens / Bruxelles: Arrêt puis reprise de la grève de la faim des réfugiés iraniens / Alveringem: Marche aux flambeaux contre l’expulsion d’une famille macédonienne / Bruxelles: ‘Jugement’ des gendarmes meurtriers de Sémira Adamu / International / France: Exigeons la liberté de Georges Ibrahim Abdallah / Pays Basque: Laboratoire de la répression en Europe / Palestine: Des nouvelles d’Amina Mounah / Allemagne: Solidarité avec les Trois de Magdeburg / Tunisie: Situation de Radhia Nasraoui / Grèce: Les Sept de Salonique remis en liberté / France: Conférence de presse pour Nathalie Ménigon

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Jaquette du Solidarité! n°2

Affiche de commémoration pour Semira Adamu

Le 22 septembre a marqué le cinquième anniversaire de la mort de Semira Adamu, assassinée lors de son expulsion. Une politique toujours plus répressive à l’égard des sans papiers et de ceux qui les soutiennent s’applique plus férocement que jamais. Les récentes rafles, le procès contre les membres des collectifs contre les expulsions mais aussi les luttes des équatoriens, des iraniens et des afghans ont marqué l’actualité et souligné les effets désastreux de cette politique inhumaine. Parallèlement, une solidarité sans précédent s’est constituée: assemblées de voisins, comités de quartier, collectifs de sans papiers… Cinquante organisations et associations (parmi lesquelles le Secours Rouge/APAPC) se sont regroupées afin de marquer le dimanche 21 septembre d’une pierre blanche, en organisant ensemble un grand rassemblement en mémoire à Semira Adamu sous les mots d’ordre:

5 ans après l’assassinat de Semira Adamu, les expulsions et les déportations sont toujours des crimes. Justice pour Semira Adamu. Arrêt des poursuites à l’encontre des militants des collectifs contre les expulsions. Régularisation de tous les sans-papiers. Liberté de circulation et d’installation.

Plusieurs centaines de personnes ont participé au rassemblement qui s’est tenu dans la salle de la Madeleine (centre de Bruxelles) à 18h30, pour suivre les concerts (notamment Claude Semal, Starflam, Pitcho, Rionsnoir, PPZ30, Ecuador Andino, Emma Peal….), les interventions, et les diverses activités proposées par les associations organisatrices (le Secours Rouge a ainsi tenu un stand d’information). La journée avait été animée de plusieurs initiatives et manifestations organisées par les collectifs de soutien aux sans-papiers.

Affiche de commémoration pour Semira Adamu