Mercredi 28 avril, les députés européens ont adopté une nouvelle réglementation permettant aux États membres d’imposer aux plateformes en ligne le retrait en une heure des messages, vidéos et photos faisant le jeu de la “propagande terroriste” à partir de l’année prochaine. Cette nouvelle réglementation européenne autorisera bientôt les États membres à nommer des autorités compétentes, qui seront chargées d’émettre des injonctions et de définir des sanctions, qui pourront grimper jusqu’à 4% du chiffre d’affaires mondial. Les fournisseurs de services concernés auront alors une heure après réception de l’injonction pour supprimer ou bloquer l’accès au contenu jugé problématique. Chaque procédure fera ensuite l’objet d’une vérification afin de vérifier que la décision de retrait ne viole pas les droits fondamentaux. Plusieurs dizaines d’organismes à l’image d’Amnesty International, Reporters sans frontières ou Human Rights Watch avaient déjà appelé au rejet de ce texte, qui pourrait pousser les plateformes à déployer des outils automatisés de modération de contenus politiques.

Le parlement européen

Mercredi 28 avril, le ministre de l’Intérieur et le ministre de la Justice ont présenté un projet de loi antiterroriste. Cette loi prévoit la pérennisation de la loi sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (dite loi « SILT »), adoptée en octobre 2017, pour prendre le relais de l’état d’urgence mis en place à la suite des attentats de novembre 2015. Ces mesures ont été prorogées en décembre 2020 par le Parlement jusqu’au 31 juillet 2021, date butoir pour l’adoption du nouveau projet de loi. Parmi les modifications prévues par le futur texte, l’allongement jusqu’à deux ans, contre un an actuellement, de la période durant laquelle les personnes condamnées pour terrorisme pourront faire l’objet de mesures de contraintes administratives après leur sortie de prison. Par ailleurs, le texte prévoit d’actualiser et de pérenniser le recours aux algorithmes, c’est-à-dire le traitement automatisé des données de connexion, par la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure).

Il y a quelques jours, la Commission européenne s’est réunie dans le cadre du projet de réglementation visant à définir une approche européenne de l’intelligence artificielle. L’exécutif européen propose d’interdire les technologies d’IA destinée à “une surveillance indiscriminée appliquée de manière généralisée à toutes les personnes physiques sans différenciation”. Un texte préliminaire, qui devrait être présenté la semaine prochaine, précise qu’il est principalement question de rendre illégales les technologies visant à “la surveillance et le suivi des personnes physiques dans des environnements numériques ou physiques, ainsi que l’agrégation et l’analyse automatisées des données personnelles provenant de diverses sources”.

La Commission prévoit également l’interdiction des technologies d’IA susceptibles d’aller à l’encontre des droits de l’Homme, et notamment les IA prédictives, capables de cibler des minorités. Si le texte est adopté, la violation de ces interdictions pourrait coûter aux entreprises 4% de leur chiffre d’affaires annuel mondial. Cependant, cette interdiction ne s’appliquerait pas aux gouvernements et aux autorités publiques européennes qui pourraient utiliser l’IA “afin de préserver la sécurité publique”…

Jeudi 15 avril 2021, l’Assemblée Nationale a définitivement votée la loi Sécurité Globale. 75 députés ont votés pour, 33 contre (sur 577 places de députés). Le texte présente sept mesures majeures : un délit de « provocation à l’identification » des forces de l’ordre et de leurs proches, un cadre légal inédit pour l’utilisation des drones par les forces de sécurité en France, des pouvoirs étendus pour la police municipale, l’élargissement de l’accès à la vidéosurveillance, l’exploitation des images issues des caméras-piétons, la suppression des réductions de peines pour les détenus condamnés pour violence contre les forces de l’ordre et le port d’arme pour les forces de l’ordre autorisé dans les établissements publics.

Des rassemblements contre la proposition de loi « sécurité globale » ont eu lieu dans de nombreuses villes en France hier samedi. Au total, près de 80 rassemblements « pour le droit à l’information, contre les violences policières, pour la liberté de manifester et contre la surveillance de masse » ont eu lieu dans le pays. 200.000 manifestants (selon les organisateurs) ont dénoncé la proposition de loi, déjà votée en première lecture à l’Assemblée nationale, qui doit être examinée en mars au Sénat. La manifestation a été relativement calme à Paris (24 interpellations tout de même…), il y a eu des incidents à Angers où la police a fait usage de gaz lacrymogène et a procédé à deux arrestations, à Caen (3 arrestations), mais surtout à Lyon et à Montpellier (6 arrestations).

face à face hier à Caen

Ce mardi 22 décembre, le Conseil d’État a interdit l’usage des drones pour surveiller les manifestations sur la voie publique à Paris. La plus haute juridiction administrative a enjoint le préfet de police de Paris, Didier Lallement, à « cesser sans délai » les « mesures de surveillance par drone des rassemblements ».

Samedi 5 décembre, de grandes manifestations ont eu lieu dans plus de 90 villes de France contre la loi « sécurité globale ». À Paris, la manifestation qui a démarré Porte des Lilas a subi, dès le début, une grande répression de la part de la police. De nombreux affrontements entre manifestants et la police ont eu lieu, des barricades ont été dressées à plusieurs endroits du parcours. Plusieurs blessés par les armes de la police sont à déplorer. On compterait au moins 22 interpellations dans la capitale.

De nombreux affrontements ont eu lieu également dans d’autres villes de France comme à Nantes par exemple. À Toulouse, 2 manifestations ont été organisées le même jour pour le même sujet, une déclarée le matin et une non déclarée l’après midi. La manifestation non déclarée a été rapidement réprimée par la police.

Ce vendredi 4 décembre 2020 sont parus trois décrets du Ministère de l’Intérieur concernant le fichage de la population. Trois bases de données différentes sont concernées : le « fichier de prévention des atteintes à la sécurité publique (PASP) », le fichier « Enquêtes administratives liées à la sécurité publique (EASP) « , et celui relatif à la « Gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique (GIPASP) ». Les services pourront recueillir des informations sur l’opinion des personnes surveillées, leurs pseudonymes sur les réseaux sociaux, des données de santé, sans enjeu de sécurité publique. Ces données sont accessibles à des agents des services, tout policier ou gendarme, aux procureurs, aux agents pénitentiaires. Ces nouveaux dispositifs de surveillance ont été élaborés afin de mieux surveiller toute personne « pouvant porter atteinte à l’ordre public ».

Le 17 novembre, le député [LR] Jean-Louis Thiériot a déposé une proposition de loi visant à autoriser les militaires à porter leurs armes en dehors du service en cas d’attaque terroriste, en faisant valoir que les policiers et les gendarmes sont déjà légalement autorisés à porter et à faire usage de leurs armes de dotation en dehors de leur service dans le respect du code de la sécurité intérieure. S’agissant des gendarmes, un dispositif a été mis en place en février 2018 afin de doter leurs officiers et sous-officiers d’active d’une arme de poing pour toute la durée de leur carrière.

Et il est question d’aller plus loin si l’on en juge par les propos tenus par le général Christian Rodriguez, le directeur de la Gendarmerie nationale, lors de sa dernière audition devant la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la Défense. En effet, les 30.000 gendarmes réservistes pourraient bénéficier du même traitement que ceux d’active en matière de port d’arme. Selon le général Rodriguez: « Cela permet de renforcer le maillage et la proximité avec l’élu dans une situation de crise locale ». Il espère expérimenter ce dispositif dès l’année prochaine. Il est aussi question de faire passer le nombre de ces réservistes à 40.000 voire à 50.000.

Gendarmes français (archives)