Politiciens, avocats et militants, au moins 65 indépendantistes catalans ont été espionnés avec le logiciel Pegasus installé à leur insu sur leurs téléphones portables. Presque tous les piratages de téléphones se sont produits entre 2017 et 2020. Parmi les personnes visées figurent l’actuel président régional catalan Pere Aragoné (qui était au moment des faits numéro deux de la région), les ex-présidents régionaux Quim Torra et Artur Mas, ainsi que des eurodéputés, des députés du parlement régional catalan et des membres d’organisations civiles indépendantistes. Carles Puigdemont, qui avait fui en Belgique pour échapper à la justice espagnole après la tentative de sécession de la Catalogne en octobre 2017, n’a pas été directement espionné mais nombre de ses proches, dont son épouse. En juillet 2020, le président du parlement régional catalan, Roger Torrent, avait déjà affirmé avoir été espionné par l’État espagnol via Pegasus, une accusation niée par le gouvernement central.

À l’été 2021, une enquête avait révélé que le logiciel Pegasus avait permis d’espionner les téléphones de journalistes, d’hommes politiques, de militants ou de chefs d’entreprises de différents pays, dont le président français, Emmanuel Macron. Pegasus permet, une fois installé dans un téléphone mobile, d’espionner l’utilisateur de l’appareil, accédant à ses messageries, ses données, ou activant l’appareil à distance à des fins de captation de son ou d’image.

D’ici quelques années, les législateurs européens pourraient aussi décider de créer une gigantesque base de données destinée à la reconnaissance faciale. Centralisant des millions de photos d’Européens et Européennes, le projet pourrait pousser à un niveau encore jamais atteint cette technologie.
Pensé dans le cadre du projet de loi Prüm II, l’échange automatisé de données dans le cadre de la coopération policière vise notamment à la création d’un système de reconnaissance faciale automatisé qui faciliterait le travail des forces de l’ordre européennes.

Une première version du texte Prüm avait obtenu dès 2005 la signature de sept pays européens, dont la France. Cette dernière a rapidement été adoptée, permettant la création d’un fichier centralisé de profils ADN dans le cadre de la modernisation judiciaire européenne. Concrètement, Prüm II devrait éteindre le champ d’action de son prédécesseur, en autorisant aussi l’intégration de profils de reconnaissance faciale. Il ne s’agirait en fait pas de surveiller la population civile, mais plutôt de créer un répertoire des personnes déjà inculpées (et de celles à venir) à l’échelle européenne. Avec la reconnaissance faciale dite rétrospective, il sera “seulement” possible de comparer des images trouvées sur des caméras de surveillance, des téléphones ou des papiers d’identité, à un fichier européen de personnes ayant déjà eu affaire à la justice.

Depuis plusieurs années, au moins une cinquantaines de villes, municipalité ou entreprises de transports publics autorisent des entreprises à déployer et tester des dispositifs de vidéosurveillance algorithmique sur la population. Ces dispositifs se caractérisent par l’ajout d’une couche d’algorithme aux caméras de vidéosurveillance dans le but de rendre automatique l’analyse des images captées par caméras, jusqu’à présent réalisée par des humains. De tels dispositifs rendent notamment possible une analyse quasi-immédiate de toutes les pancartes dans les manifestations afin de détecter celles au contenu illégal (une analyse qui prend en temps normal des centaines d’heures). Ils pourraient également permettre de suivre à la trace une personne sur toutes les caméras d’une ou plusieurs villes. D’une manière générale, ces dispositifs augmentent considérablement les capacités des forces de répression qui ont besoin de beaucoup de moyens humains pour analyser les données à leur disposition.

En janvier 2022, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) a demandé aux industriels du secteur de lui faire des retours sur l’usage de ces technologies et ce « afin d’accompagner leur déploiement ». Dit autrement, la CNIL accepte le déploiement de ce type de technologie à grande échelle sur le territoire français. Plus d’infos ici et ici.

.

Un dispositif de surveillance audio a été retrouvé à la bibliothèque anarchiste Libertad à Paris. Le dispositif était caché à l’intérieur de l’imprimante-photocopieuse de la bibliothèque. Il était composé de deux micros, d’une antenne, d’un transformateur, d’une batterie, d’un boîtier contenant une carte électronique, d’une carte SD de 64 Go et d’une carte SIM du fournisseur de téléphonie mobile Orange. Il s’agissait d’un dispositif de surveillance de modèle RB800 commercialisé par l’entreprise italienne Innova.

 

Une caméra militaire raccordée à un routeur et des batteries lithium a été découverte sous un filet de camouflage à l’entrée du bourg de Sevreau, près de Niort. Elle était orientée vers le domicile du père de Julien Le Guet, le porte-parole du collectif « Bassines non merci ! ». Ce collectif s’oppose, depuis plusieurs années, au nom de la protection de l’environnement, à la construction de grandes réserves d’eau pour les agriculteurs des Deux-Sèvres. C’est le chien d’un ami qui a flairé une caméra, sortant à peine du sol, recouverte de ronces et d’herbe, reliée à un routeur Pepwave et à deux mallettes renfermant des batteries lithium de haute technologie Accuwatt, dissimulées dans un fossé, sous une bâche et un filet de camouflage. Accuwatt est reconnue dans l’étude et la conception de batteries communicantes (tous réseaux RS 485, LoRa, SigFox, 4G, 5G, Iridium) toutes technologies avec une compétence particulière pour les batteries lithium militarisées à destination des forces de police, gendarmerie et tous groupes opérationnels. Il s’agit d’un fournisseur historique des ministères de l’Intérieur, de la Défense, de l’OTAN ainsi que des plus grands donneurs d’ordres civils de l’industrie française.

d’autres photos ici

Jeudi 17 mars, des membres présumés du Groupe Antifasciste Lyon et Environs (GALE) se sont vus remettre des documents les avisant du déclenchement d’une procédure de dissolution à l’encontre de ce groupe. La veille, des antifascistes avaient été suivi.es dans la rue jusqu’à leur domicile et leur travail, harcelé.es au téléphone par la police lyonnaise qui est venue sonner et tambouriner à leurs portes très tôt le matin et à plusieurs reprises dans la journée.

Cette procédure de dissolution utilise comme prétexte la diffusion par la GALE du Lyon Antifa Fest montrant notamment des slogans anti-police lors d’un concert, ainsi que le relais, quelque mois plus tard d’un appel du mouvement « Les Soulèvements de la terre » à assiéger Bayer-Monsanto le 5 mars à Lyon. Il s’agit de la troisième procédure de dissolution contre des groupes de gauche, annoncée en à peine quelques semaines par le gouvernement français. Le média Nantes Révoltée est ainsi la cible d’une tentative de dissolution tandis que le Collectif Palestine Vaincra a quant à lui déjà été dissous (voir notre article). Plus d’infos ici.

Le 9 novembre 2017 était lancé le système Scribe, qui aurait dû être livré à tous les services de police fin 2019, début 2020. Scribe avait vocation à révolutionner le traitement informatique des procédures judiciaires au sein de la police et remplacer le logiciel de rédaction des plaintes obsolète. Le marché a été remporté par Capgemini. Mais les retards se sont accumulés à tel point qu’un audit a été effectué à Capgemini qui a réalisé qu’il y avait une faille si énorme au cœur même de l’architecture du projet et que celui-ci ne sera jamais opérationnel. L’addition de ce fiasco se chiffre à 11,7 millions d’euros, et le contrat avait été si bien bétonné qu’il n’y a eu aucun recours juridique possible contre Capgemini.

En décembre 2021, le ministère de l’intérieur avait fait un nouvel appel d’offres avec une autre société prestataire pour un nouveau logiciel, à l’horizon 2024. C’est un objectif de moins en moins crédible au regard des retards accumulés. Depuis plusieurs semaines, il est demandé aux policiers de ne pas transmettre de procédures dématérialisées vers la justice « jusqu’à nouvel ordre ». En d’autres termes, les services de police doivent imprimer leurs dossiers. Du moins lorsqu’ils ont accès à leurs postes informatiques, car les bugs du logiciel de rédaction des procédures pénales (LRPPN) perdurent depuis trois, voire quatre semaines. Le chef du projet a quitté ses fonctions, c’est le troisième en six ans.

Autre fiasco, celui de la plateforme nationale des écoutes téléphoniques (PNIJ). Un système opérationnel depuis 2017 qui était censé réduire de moitié les frais d’écoutes et, en même temps, simplifier le travail des policiers. Sauf que la création du logiciel par Thales va coûter neuf fois plus cher que prévu. Soit près de 380 millions d’euros au lieu de 42. Des dépenses supplémentaires dues à six ans de retard dans la mise en service de la PNIJ…

Lancé en 2017, le projet OFFensive Swarm-Enabled Tactics (OFFSET) vise à créer un essaim de plus de 250 drones (terrestres et aériens, de taille et de spécialisations différentes) commandés par un seul opérateur afin de remplir des missions de combat urbain. Une interface entre l’essaim et l’homme permett à ce dernier de diriger en temps réel les différents drones et de les diriger tous/une partie vers une zone indiquée. L’utilisation de la réalité augmentée sera centrale (monde virtuel basé sur la voix, les gestes et le toucher de l’utilisateur), et un environnement virtuel en réseau et en temps réel permettra à l’utilisateur d’explorer et d’évaluer le positionnement des drones via l’interface. Enfin, un échange des tactiques de positionnement de drones en essaim entre toute la communauté (comportement collectif des drones, schémas pensés par des algorithmes…).

Un essai vient ainsi de valider l’utilisation de plus de 100 drones par un seul utilisateur, l’objectif étant de 250 drones coordonnés dans une mission urbaine. En octobre, Northrop Grumman avait réussi à contrôler un essaim de 174 drones. Pendant trois heures et demie, ils ont effectué diverses simulations de reconnaissance et de patrouille en se déployant en différentes formations. En novembre, Raytheon de faire voler un essaim de 130 drones physiques et 30 drones virtuels. L’utilisateur possédait un set de réalité virtuelle et l’essaim était également autonome (si l’utilisateur souhaitait cartographier un immeuble, le système définissait automatiquement le nombre de drones appropriés, tout en sélectionnant les plus proches et les plus spécialisés). Les deux systèmes seront présentés à Fort Benning lors de l’Army Expeditionary Warrior Experiment de mars 2022.

Plusieurs police des Etats-Unis ont adopté, et certaines ont déjà utilisé, une nouvelle arme non-léthale: le BolaWrap, une produit de la Wrap Technologies, Inc. Le BolaWrap est un dispositif déchargeant un fil de Kevlar qui s’enroule autour de la personne ciblée jusqu’à 7,5 mètres de distance. Un laser aide à la visée. Le BolaWrap a été mis sur le marché en 2016, a été testé par quelques polices en 2018, mais ce n’est que maintenant qu’il se répend largement dans divers départements de police aux USA.

Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a annoncé, lors des débats de présentation de son budget 2022, son intention de réaliser cette année une démonstration de faisabilité technologique d’intégration de la caméra portative aux smartphones. Cette proposition survient dans le contexte où les dépenses du SPVM en 2021 ont largement dépassé le budget initial, qui était de 679 millions de dollars, pour atteindre plutôt 733 millions. En demandant dans un premier temps à ses policiers d’utiliser leur téléphone intelligent comme caméra portative, le SPVM opte donc pour une formule économique. Ce projet devrait d’ailleurs coûter 437 000 $, entrevoit le corps de police, soit une fraction de la somme d’environ 17 millions de dollars que la Ville a prévu dépenser d’ici 10 ans pour munir tous les policiers de la métropole de caméras portatives et résoudre les divers problèmes technologiques que ce projet entraînerait.